Espace prestataires Maladies rares : accélérer l’accès aux traitements Tant au niveau européen que national, la mise sur le marché de médicaments est strictement réglementée. Quid des affections rares pour lesquelles il faut agir rapidement ? Pour ces “besoins médicaux non satisfaits”, une procédure accélérée est nécessaire pour permettre une plus grande sécurité légale aux prescripteurs et diminuer les délais de remboursement. Des exemples internationaux existent déjà. En Belgique aussi on se penche sur cette question. P our de nombreux patients atteints d’une maladie rare grave, les médicaments efficaces font défaut. Il est alors question d’un “besoin médical non satisfait” (unmet medical need). Depuis 2007, il existe dans notre pays un cadre juridique qui permet de délivrer un médicament avant son autorisation de vente et sa mise sur le marché pour une indication particulière. On parle alors d’”usage compas- 24 sionnel” ou de “programmes médicaux d’urgence”. Mais seul un petit nombre de patients peut faire appel à ces programmes. Plusieurs pays testent des procédures expérimentales afin d’offrir aux prescripteurs une meilleure sécurité juridique et de réduire les délais durant lesquels aucune forme de remboursement n’existe. Citons par exemple les “autorisations temporaires d’utilisation”, en France. Et en Belgique ? Une procédure accélérée est également en cours d’élaboration en Belgique. En septembre, ce point était à l’ordre du jour du Conseil des Ministres et la nouvelle réglementation verra sans doute le jour à la nouvelle année. Important : cette procédure est exclusivement destinée aux maladies graves qui menacent la vie et pour lesquelles il n’y a pas de Espace prestataires traitement alternatif, et ce pour des patients pour lesquels la procédure habituelle retarde l’accès au traitement pour de nouvelles indications. Les procédures et délais de remboursement habituels ne sont pas impactés. Le principal défi consistera à maintenir ce système gérable d’un point de vue administratif et économique et d’éviter qu’il n’entre en conflit avec les procédures régulières. Quelques éléments-clés Le développement technique de cette procédure accélérée passe par le Fonds spécial de solidarité (FSS). Ce fonds comporte une section “technologies innovantes”, mais les médicaments n’en font pas partie. Un article spécifique va changer les choses. Une Commission spécifique sera mise en place pour développer des propositions de cohorte, dont des critères d’in- clusion/exclusion, les montants des interventions, les exigences vis-à-vis du prescripteur/centre, les délais pour les demandes de mise sur le marché/remboursement, la tenue d’un registre,… En concertation avec le service Budget, il est possible aussi de proposer un contrat de maîtrise des coûts (“cost-containment”). Tant les sociétés pharmaceutiques que la Ministre de la Santé publique peuvent introduire des demandes d’inscription sur la liste des besoins médicaux non satisfaits. Ils ont jusqu’au 15 mai pour le faire et le Conseil général établira la liste définitive pour l’année suivante le 31 octobre. Pour ce faire, il tient compte des avis de la nouvelle Commission et du Collège des médecins-directeurs (CMD). L’impact économique et médical joue bien évidemment également un rôle. La décision finale relative aux dossiers présentés relève du Collège des médecins-directeurs (CMD). Les cohortes approuvées seront ensuite publiées sur le site de l’INAMI. Une fois le dossier accepté, tous les patients qui répondent aux critères ont droit aux mêmes modalités de remboursement. Si un patient ne remplit pas les critères, une demande individuelle auprès du Fonds spécial de solidarité est toujours possible. Un budget distinct de 3,5 millions d’euros est prévu pour le financement du projet, complété par un transfert (pas encore précisé) de moyens entre le FSS et le budget médicaments. Chris Van Hul, Expert à l’Union Nationale des Mutualités Libres L’avis des Mutualités Libres Le débat doit se poursuivre Cette procédure accélérée pour les besoins médicaux non satisfaits est une bonne chose, mais les Mutualités Libres émettent cependant quelques suggestions : 1. La formule reste une question d’offre et non de demande. C’est pourquoi il est nécessaire que la procédure impose un regroupement des demandes. Un planning peut ainsi être établi, les demandes peuvent être comparées entre elles, une liste de priorités peut être établie. 2. Une décision ne peut pas constituer une menace pour la solidarité en acceptant des interventions trop élevées. Bien qu’il n’existe pas de prix ou de montants maximum. Des choix devront être faits et le débat sociétal doit continuer. 3. L’apport financier de l’industrie pharmaceutique est limité. Certains médicaments qui sont délivrés gratuitement par les firmes seront dorénavant financés par l’INAMI. Un partage des risques serait donc plus approprié. Un cofinancement de l’INAMI et de l’industrie permet d’augmenter le budget disponible et ces moyens financiers peuvent être utilisés pour l’innovation réelle. 4. L’impact de cette procédure accélérée est difficile à estimer. Les lobbyistes et les sociétés vont-ils y percevoir un nouveau marché en soustraitance ? Selon quelles directives les sociétés vont-elles se référer à un scénario de “besoins médicaux non satisfaits” ? 5. Pour de nombreux médicaments et dans de nombreuses situations, le prix officiel ne correspond à ce que paye l’assurance maladie. Pour la procédure relative aux besoins médicaux non satisfaits, la base de remboursement sera également indépendante du “prix d’achat”. C’est sans conteste une bonne chose pour le caractère abordable de notre système de santé, mais les économistes de la santé repenseront avec nostalgie au temps où ils pouvaient calculer le coût pour l’INAMI en fonction du prix sur la boîte. 6. Pour la première fois, la possibilité d’un “enregistrement obligatoire de données” sera introduite au sein du Fonds spécial de solidarité. Ces données seront très utiles pour l’appréciation finale du dossier de remboursement régulier. 25