Nombres normaux et fonctions pseudo-aléatoires

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A NNALES DE L’ INSTITUT F OURIER
M ICHEL M ENDÈS -F RANCE
Nombres normaux et fonctions pseudo-aléatoires
Annales de l’institut Fourier, tome 13, no 2 (1963), p. 91-104
<http://www.numdam.org/item?id=AIF_1963__13_2_91_0>
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Ann. Inst. Fourier, Grenoble
13,2 (1963), 91-104.
NOMBRES NORMAUX
ET FONCTIONS PSEUDO-ALÉATOIRES
par Michel MENDES FRANCE (Paris)
INTRODUCTION
Dans cet article, nous nous proposons d'établir les relations
qui peuvent exister entre la théorie des nombres normaux et la
théorie des fonctions pseudo-aléatoires. Nous verrons en particulier comment l'introduction de la corrélation multiple :
P^AI, h^ . . ., hp^
1
)^ ït
(
Ali, L'
n^ . . . , îï'
flq^
= lim
T^-oo
1
Ffit + h,) ... f{t + h,) J{t + h[) ... J{t + A,) dt
1 JQ
permet d'énoncer simplement certains résultats.
Le plan de l'exposé est le suivant :
1) Définition des fonctions pseudo-aléatoires.
2) Les nombres normaux.
3) L'espace des suites infinies.
Qu'il me soit permis d'exprimer ici mes remerciements à
M. Bertrandias dont les conseils m'ont été précieux.
L DÉFINITION DES FONCTIONS PSEUDO-ALÉATÉOIRES
1.1. Définitions et notations.
Introduites par M. Bass [2], les fonctions pseudo-aléatoires
f sont définies de la façon suivante :
f(t) est une fonction complexe de la variable réelle positive t,
92
M I C H E L M E N D È S FRANCE
localement intégrale et telle que la limite :
(1)
l i m 1 r7Wf{t+h)dt=^h)(^
T^oo
1
JQ
appelée fonction de corrélation de /, existe et soit continue
à l'origine h === 0. De plus y(0) > 0 et y(+ oo) == 0. On montre
alors que la limite pour T infini de _ ( /*(() dt existe et est
L Jo
nulle.
Exemple : Si t est un nombre réel, notons par î le plus grand
entier qui ne dépasse pas ( et par t == ( — î la partie fractionnaire du nombre (.
Appelons W^ la classe des polynômes réels ç.
ç(() == Ao + A^ + A^2 + . • • + Ay^
tels que l'un au moins des coefficients Ap, Ap+i, . . . soit irrationnel (1 <^ p <^ v).
Dans [2], M. Bass montre que les fonctions f définies par :
(2)
/^)==exp2iî:y(î);
y e W2
sont pseudo-aléatoires et que leur fonction de corrélation y est
la fonction de Khintchine :
(3)
^(h)=Max{0,l—\h\).
Une fonction admettant pour fonction de corrélation la
fonction de
Khintchine sera dite k-pseudo-aléatoire.
Nous en verrons des exemples par la suite, autres que les
fonctions définies par l'expression (2).
1.2. Fonctions constantes sur les intervalles [n, n 4- ![•
Nous nous occuperons dans ce qui suit, essentiellement de
fonctions f constantes sur tous les intervalles [n, n + 1[?
(1) Dans la définition de f(/i), on n'aura pas besoin de supposer que la variable h
soit positive. En effet si elle est négative, on posera :
YW=lim
T->oo
1
F ~f(t}f(t 4- h)dt
T J\
où A est un nombre positif plus grand que — h. Cette remarque nous sera utile
plus loin, lorsque nous aurons à définir les corrélations multiples I )v 1 '
fc^î^
les arguments n'étant pas nécessairement tous positifs.
î» • * • » Q î
NOMBRES NORMAUX ET FONCTIONS PSEUDO-ALÉATOIRES
93
(n entier.) [C'est d'ailleurs le cas des fonctions définies précédemment par la formule (2).] La fonction de corrélation y (A)
d'une telle fonction est particulièrement simple, comme le
montre le lemme suivant [2] :
LEMME 1.— Soit f une fonction complexe de la variable
réelle t. vérifiant Inéquation fonctionnelle f(t) == /*(?). Si la fonction de corrélation h —> y(A) est définie pour tout h entier non
négatif^ alors y(A) existe pour tout h réel. y est une fonction
continue, qui varie linéairement dans chacun des intervalles
(n, n + 1)» ^ entier.
1.3. Extension de la notion de fonction de corrélation.
Sous condition d'existence, nous poserons :
(A\
w
P)
1?
2?
' ' '?
P(
'Oi,^...^^
= lim
T^+oo
i
Ff(t + h,) . . ./•(< + W + Ai) . .. J(t + h,} dt,
1 JQ
expression dans laquelle Ai, Ag, ..., Ap, Ai, . . . hq est une suite
finie de nombres réels. Les nombres F ^ 1? * * *' ^ > s'appellent
(/ii, . . ., Ag)
les corrélations multiples de la fonction /*, ou plus simplement,
les corrélations de /*. Si dans la suite (Ai, h^ . . ., Ap) il se trouve a^
nombres égaux à Â-i, o^ nombres égaux à À-g, etc..., et de même,
si dans la suite (Ai, Ag, ..., A^), ai nombres sont égaux à À*i, etc...,
on pourra écrire les corrélations sous la forme abrégée :
p n^i)^? v^a,? • • • [
i(^)a;,(^,...i
Si la suite (Ai, Ag, . .. ) est vide, on écrira la corrélation sous la
forme :
F jAi.Ag, . . . , A p j .
Notons en particulier les identités suivantes :
^K'-.îF"^
r^=r^=ïW.
94
MICHEL MENDES FRANCE
IL LES NOMBRES NORMAUX
Dans ce paragraphe, nous montrons l'équivalence de trois
définitions des nombres normaux sous forme de conditions
nécessaires et suffisantes.
IL1. Définition des nombres normaux
et équirépartition de la suite ^a;.2"^r
A part les nombres n|2q (n, q entiers positifs), on sait que
tout nombre réel x de l'intervalle [0,1[ admet une représentation binaire unique :
(5)
^É^k=l
où e^x) est soit 0, soit 1. Soit A/, == (§1, ^, . . ., S^) un ensemble
ordonné de k chiffres égaux à 0 ou 1. Appelons N(p, A^) le
nombre de fois qu'apparaît la suite A^ dans les p premières
décimales binaires (£i(aQ, £2(^)5 • • • ? ^C^)) de x (p entier positif).
Par définition [10], on dit que le nombre x est normal [dans le
système binaire) si Von a V égalité suivante :
(6)
lim-'-N^A,)P-> oo p
Zi
pour toute suite A^ de k termes, et pour tout entier k ^ 1.
Dans [11], on démontre le théorème suivant dont nous
aurons besoin pour donner une autre caractérisation des
nombres normaux.
THÉORÈME 1. — Une condition nécessaire et suffisante
pour que le nombre x soit normal, est que la suite Src.2'^^
soit équipartie modulo 1.
Démonstration : Soit x un nombre réel positif. Nous allons voir
que les quatre propositions suivantes sont équivalentes :
(a) : la suite ^x.271^^ est équirépartie modulo 1;
(p) : pour tous entiers k et p positifs, et pour tout entier
a vérifiant la double inégalité 0^a^2fc—1, l'intervalle
N O M B R E S N O R M A U X ET FONCTIONS PSEUDO-ALÉATOIRES
95
[ y 7 ~2k^\ contie^t P- 2-^ + o(p) points de la suite partielle
(„. o ^^=l
j p ).
{ ^
x
z
(y) : quelle que soit la suite A^ == (§1, . . ., §^) constituée de /r
chiffres égaux soit à 0, soit à 1, on a :
N(p, A,) = p. 2^ + o(p) (k = 1, 2, 3, . . . ) ;
(S) : a; est un nombre normal.
Il est en effet évident que (a) est équivalent à (?) d'une part
et que d'autre part, (y) est équivalent à (à). Par ailleurs,
à tout entier a de l'intervalle [0,2^ — l], on peut faire correspondre de façon biunivoque une suite A^ par les relations
{a = 2^ + 2^, + . . . + 2.^, + ^
(Ak = (§1, Sa, ..., ^-i, ^).
On voit ainsi que l'intervalle [ a a—— [ contient exactement
^(Pî A^) éléments de la suite {x^}^ Ceci montre bien
que les deux propositions (?) et^(y) sont équivalentes. Le
théorème en découle.
n.2. Fonctions de Rademacher et fonctions de Walsh.
Les fonctions de Rademacher sont les fonctions r J x )
attachées à x et définies par les relations
(7)
r,{x) = 1 — 2e,{x)
de sorte que r^x) est égale soit à + 1, soit à — 1. Notons
les deux identités :
\
(8)
0
V< ^k\^)
^-^^-y-^
r^{x)
= exp (l'Tc. x^).
Nous considérons ces fonctions comme fonctions de l'argument /c, x étant supposé fixe. Plus précisément, nous posons
f(t) == ^(a;). On a alors le théorème :
THÉORÈME 2. — Une condition nécessaire et suffisante
pour que le nombre x soit normal est que la fonction f(t) == r^x)
6.
96
MICHEL MENDÊS FRANCE
admette des corrélations r|/Ci, k^ ..., kp\ nulles pour toutes
suites
(rentiers
(k^ k^ . . ., kp)
avec
A*i < /Cg < • • • <^kp.
Pour démontrer ce théorème, nous allons introduire les
fonctions de Walsh ^(x) dont nous rappelons la définition ([5],
[6], [14]); Soit 2 N un nombre entier pair positif dont la
représentation binaire est donnée par
2 N = 2"< + î^ + . • - + 2^
(n^ > n^ > • • • > Uk ^ 1 ; Uj entiers).
On définit alors la suite de fonctions co^(rc) par les relations
suivantes :
/œ
j^o^) == 1,
(^(x) = r^{x)r^x) . . . r^).
On voit aisément que la suite |^ONJ est une suite de fonctions
orthogonales sur l'intervalle (0,1) :
/ (ON^OM^) dx == SM,N
(SM,N est le symbole de Kronecker).
De plus, on montre dans [6] et dans (fl4] exercices 6 et 7,
k
p. 34) que l'ensemble des combinaisons linéaires finies ^ a/0/
0
est dense dans l'espace des fonctions continues sur (0,1).
De cette remarque, on déduit le corollaire suivant du critère
d'équirépartition de H. Weyl :
Une condition nécessaire et suffisante pour que la suite réelle
t^njn^i s01^ équirépartie modulo 1, est que pour tout entier k
non nul on ait Inégalité
K^Ï^^0En rassemblant les résultats acquis, on voit alors que les
implications suivantes ont lieu :
x est normal '^=> | Un == x. 2" j^i est équirépartie
-^ lim
1
Y co^a;. 2") = 0
V k ^ 0 entier
^ ^m ^I^^ • • • rk^ = °
N O M B R E S N O R M A U X ET FONCTIONS PSEUDO-ALÉATOIRES
97
pour toute suite finie d'entiers (Â*i, k^ . . ., kp) avec
1 < Ai < /Ça < • • • < kp.
Or ^(rc^) == r^n(a;). On a par conséquent:
A
N—l
a; est normal •<==»- lim — ^ r^^) .. . r^ ^{^ == 0 pour toute
N>-oo
IN n==0
suite finie d'entiers (k^ ..., kp) avec 1 ^ k^ <^ • • • <; kp.
Le théorème 2 en découle aussitôt.
COROLLAIRE 2.1. — Si x est un nombre normale alors la
fonction f(t) = r^x) est k-pseudo-aléatoire.
Démonstration : On combine le lemme 1 au théorème 2.
COROLLAIRE 2.2. — Soit k^ < A'2 < " ' <^ kp une suite
finie rentiers positifs donnés. Si x est un nombre normal, alors
le nombre y défini par les égalités
^(y) = r^{x)r^{x) ... rn+hpW
(^ = 1, 2, . . .),
est aussi un nombre normal.
Ce corollaire montre comment à partir d'un nombre normal
on peut en construire une infinité dénombrable d'autres.
ffl. ESPACE DES SUITES INFINIES
III.l. Applications du théorème ergodique de Birkhoff.
Soit u == (ui, Mg? • • - î ^715 • • •) une suite infinie de nombres
réels Un de l'intervalle 1 == [0,1[. L'ensemble U des suites u
peut être identifié au tore T^ == Ie0 à une infinité dénombrable de dimensions. Le théorème de Tychonoff montre que
U est compact. Sur l'espace U, on peut définir une mesure
comme étant le produit infini des mesures de Lebesgue sur
chaque composante I.
Dans la suite, si X désigne un espace muni d'une mesure,
nous noterons cette mesure par le symbole mesx. On a donc
mesu(U) = 1.
98
MICHEL M E N D E S FRANCE
Nous nous proposons de démontrer les deux théorèmes
suivants :
THÉORÈME 3. — (À'i, À*2, . . . 5 kp) et (/Ci, /Ça, . . . , kq)
désignent deux ensembles finis distincts (Kentiers, Vun des
ensembles pouvant éventuellement être vide. Alors pour presque
toutes les suites infinies u, la corrélation F] , 1 5 . 2 ? ' ' l î ^i >
v
1?
2?
de la fonction f{t) = exp îi-^u^ est nulle.
' " '? g /
THÉORÈME 3'. — (/Ci, /Cg, . . ., kp) désigne une suite d'entiers
tels que /Ci < /Cg < • • • < /Cp. A?ors pour presque toutes
les suites infinies, la corrélation F |/Ci, /Cg, . . ., /Cpj dô ita fonction
f^t) = exp ITC 2u^, e5( nulle.
Démonstration. — Nous allons voir que ces théorèmes sont
des conséquences immédiates du théorème ergodique de
G. D. Birkhoff dont nous rappelons l'énoncé :
THÉORÈME DE BIRKHOFF. — Soit X un ensemble sur lequel
est définie une mesure finie mes^. T désigne une application de X
sur X, mesurable, conservant la mesure et ergodique (2). Si g
est une fonction sommable X -> R, alors l'égalité suivante
^m ^- S1 g(T^) == ^ g{x) dx
a lieu pour presque tous les éléments x de X.
Supposons que X soit l'ensemble U des suites infinies
u == (u^, Ug, ... ) et que T désigne l'opérateur de translation
définie par l'égalité :
Tun = u^+i
ou encore :
Tu== (ug, Ma, . . . ) .
Pour que le théorème de Birkhoff soit applicable, il faut
démontrer que T est une transformation mesurable, conservant
la mesure et ergodique. Désignons par T~1 l'application inverse
de T. Si u est un élément de l'espace U, T""^ représente
l'ensemble \v\y e U, T^ = u\. De même si U' est un sousensemble de U, T^U' désigne l'ensemble ^|^eU, T ^ e U ' j .
( 2 ) Ces termes sont définis plus loin.
NOMBRES N O R M A U X ET FONCTIONS PSEUDO-ALÉATOIRES
99
LEMME 2. — Inapplication T est mesurable et elle conserve
la mesure.
Cela signifie d'une part que si U' est un sous-ensemble
mesurable de U, il en est de même de T'^U', et d'autre part
que la mesure de T^U' est égale à celle de U'. Le lemme se
démontre en remarquant que ^~1U/ == ï X U'. De cette
égalité découle en effet que si U' est mesurable, il en est de
même de T"1!}' et que
mes^T-^U') = mesi(I).mesu(U')
== mesu(U').
LEMME 3. — L'application T est ergodique.
Cela veut dire que si T"'1!-!7 = U' (à un ensemble de mesure
nulle près), alors l'une des deux égalités suivantes est vraie :
(mesu(U') = 0.
jmesu(U-U') =0.
Dans le cas que nous étudions, la seconde égalité est équivalente à mesu(U') == + 1.
Ce lemme se démontre à partir de la notion de point de
densité : 9 est un point de densité de l'ensemble mesurable U'
si, | A^ \ ^LI désignant une suite infinie d'ensembles mesurables
contenant 9 avec lim mesu(AJ = 0, on a
n-^-ao
lim mes^'^ ^ + 1.
n-^oo mesu(A^)
Un théorème de Lebesgue affirme l'existence d'un point de
densité 9 sur tout ensemble de mesure positive.
Considérons un sous-ensemble mesurable U' de U tel que
T''~1U/ == U' à un ensemble de mesure nulle près. Nous allons
montrer que l'hypothèse : meS[j(U') > 0, entraîne l'égalité :
mesu(U') == 1. En effet, d'après le théorème de Lebesgue, U'
contient un point de densité 9 = (9i, 9g, ... 9^, ...). Appelons
An l'ensemble des suites de la forme :
(ôiA, ...,9,,ui,u2, . . . )
où la suite (ûi, Ug, . . . ) parcourt tout l'espace U. On a donc
T^A^ = U. Par définition du point de densité, à tout nombre
100
MICHEL M E N D È S FRANCE
£ > 0, il est possible d'associer un nombre n(s) tel que pour
tout entier n > n(e), on ait :
mes^nA^_^
mesu(AJ
Appelons x(u) la fonction caractéristique de l'ensemble U'.
mesu(U' n A^) == f x(u) du.
Le changement de variable u == T"~"^ dans l'intégrale conduit
à la formule :
mesu(U' n A^) = mes^A^^T-^) ^.
Mais U' est invariant par T, donc
x(T-V) == x((^)
et par conséquent :
(11)
mesu(U' n A^) = mesu(AJ mesu(U')
En rassemblant les formules (10) et (11), il vient :
mesu(U') > 1 — £
pour tout
£>0
et par suite : mesu(U') == 1. Le lemme 3 est ainsi démontré et
la transformation T satisfait donc aux conditions de théorème
de Birkhoff.
Soit g une fonction définie sur U par l'égalité
g(u) == exp 2m(i^ + u^ + • • • + Ukp — u^ — • • • — u^)
où (/Ci, k^ .... kp) et (À*i, /Ça, ..., k'q) sont deux suites
distinctes d'entiers positifs. Le théorème de Birkhoff montre
que presque partout, on a l'égalité :
j[ N—l
lim -,, ^ exp 2nr(u^ + • • • + ^n+fcp — ^+A< — • • • — ^n+fc;)
Tî^ oo 1^( ^==0
/»
== ^ ^(u)
du
-
Or l'intégrale du second membre de l'égalité est un produit
d'intégrales de la forme :
r1
/ exp 2i'K Uk du,, == 0.
i/o
Le théorème 3 est ainsi démontré. Le théorème 3' se démontre
en prenant
g(u) = exp m {2^, + ' • • + 2u^) ; (À-i < A-2 < • • • < kp).
NOMBRES NORMAUX ET FONCTIONS PSEUDO-ALÉATOIRES
101
COROLLAIRE 3.1. [3]. — La fonction f(t) = exp 2m; u^ est
k-pseudo-aléatoire pour presque toutes les suites u de V espace U.
Ce résultat, qui semble avoir été signalé pour la première fois
par Hlawka dans [7] découle immédiatement du théorème 3
et du lemme 1.
Soit 9 un polynôme W2. Nous avons déjà indiqué que la
fonction f(t) = exp 2nc <p(?) était /c-pseudo-aléatoire. Ceci
nous amène à nous poser la question :
Quelle est la mesure du sous-ensemble U' de U des suites u
telles que u^ == f{k), où y parcourt l'ensemble des polynômes
W2? La réponse nous est donnée par le corollaire suivant :
COROLLAIRE 3.2. — L'ensemble des suites u == (9(1),
ç(2), . . ., 9(7î), . . .) où y parcourt l'ensemble de tous les poly'
nomes, est de mesure nulle.
Démonstration. — Soit en effet Uy l'ensemble défini par
Uy == \u \Ufe = 9(À"), k == 1,2, . . . ; 9 polynôme de degré v j
Si u est un élément de Uy, alors la fonction f(t) == exp 2m:^
est telle que la corrélation
p( Mi,
(^ — 2)0^ (v — 4)ct, ... )
( (v — l)ci, (v — 3)c3,, (v — 5)cî, ... ^
^ N-l
= lim ,- ^ exp ïw [<f(n + v) — C^^n + v ~ 1)
N ^ o o 1^ n=o
+C^(M+v—2)—...J
soit non nulle. (Les nombres Cî sont les coefficients du binôme.)
Le théorème 3 montre alors que mesu(Uy) = 0. Par suite
/
00
\
mesu(UUv)==0.
\ V==l
/
in. 2. Applications aux nombres normaux.
A toute suite u de U nous faisons correspondre un nombre x
de l'intervalle (0,1) par les égalités
(12)
Tn{x) = exp in "2^
(n = 1,2,3, . . . )
102
MICHEL MENDÈS FRANCE
ou, ce qui revient au même
x-y^.
À 2Notons par A la correspondance ainsi définie de sorte que
x = Au.
LEMME 4. — Soit U' un sous-ensemble de U. On a l'implication suivante :
mesu(U') = 1 => mesi(AU') = 1.
Démonstration. — Soit B l'application qui à la suite
u = (ui, Ma, . . . ) associe la suite ^ == Bu == (2ui, 2u^y . ..).
Bu est donc une suite infinie d'éléments égaux soit à 0, soit à 1.
B projette le tore Ie0 sur l'ensemble V = |(0), (1)^ qui peut
être considéré comme l'ensemble des sommets du tore infini.
A l'ensemble KO), ( l ) j est associée la mesure de Bernoulli
1
1
égale à-7-§o 4~ "F) ^i (^<x es^ ^a mesure de Dirac au point a). La
2i
2t
mesure sur l'ensemble V est définie comme étant le produit
infini des mesures de Bernoulli. Alors, si U' est un sous-ensemble
de U et si BU' est le sous-ensemble de V = |(0), (1)^ transformé par B, on a l'implication suivante :
(13)
meSn(U') == 1 => mesv(BU') == 1.
Maintenant, soit P== (^i, ^2? . . . ) un élément de BU' et soit C
l'application définie par :
GO
^
v->x= Cv = S —
n==l ^
D'après un résultat de Kaczmarz et Steinhaus [8], on peut
écrire que
(14)
mesv(BU') = mesi(CBU').
Les relations (13) et (14) montrent alors que mesi(CBU') == 1.
Le lemme est ainsi démontré car CB = A.
Le lemme 4 associé au théorème 3' permet alors d'énoncer
le théorème
NOMBRES N O R M A U X ET FONCTIONS PSEUDO-ALÉATOIRES
103
THÉORÈME 4. — Pour presque tous les nombres x de l'intervalle (0,1) la fonction f{t) = r^(x) admet des corrélations
i 1 > 2 > ' * ' ? K?}
nulles pour toute suite d'entiers (/Ci, k^ .. ., kp) avec
f r l < Â - 2 < / C 3 < • • • </^.
jEn particulier^ pour presque tous les nombres x de l'intervalle (0,1)? f{t) = r^{x) est k-pseudo-aléatoire.
La dernière partie du théorème est signalée par N. Wiener
dans [13].
La comparaison des théorèmes 2 et 4 montre que presque
tous les nombres sont normaux. On retrouve ainsi un résultat
connu de Borel.
En combinant les idées du corollaire 3.2, et du théorème 4,
on obtient la proposition suivante [9] :
L'ensemble des nombres réels x de l'intervalle (0,1), définis
par les égalités:
(15)
rn(x) == exp wp(n),
(n = 1, 2, 3, . . . )
où ç parcourt l'ensemble des polynômes^ est de mesure nulle.
Enfin pour terminer, citons sans démonstration le théorème
suivant dû à W. A. Beyer [4] :
L'ensemble des nombres x tels que la fonction f(k) == r^x)
n'admette pas de moyenne V \ 0 \ est de mesure nulle et de dimension
de Hausdorff égale à 1.
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