Changements de bases en algèbre linéaire - Applications CHANGEMENTS DE BASES EN ALGEBRE LINEAIRE APPLICATIONS E et f désignent des K espaces vectoriels de dimension finies 1) Matrices de passage - changement de base pour les vecteurs définition Soient e = (e1 ,..., en ) et e' = (e'1 ,..., e'n ) deux bases de E. La matrice P = ( pi j )1≤i≤ n définie par : 1≤ j ≤ n ∀i, j ∈ N n , pi j = e (e' j ) est appelée matrice de passage de e à e'. * i n ∀j ∈ N n , ∃!(ak j )1≤ k ≤n ∈ K n , e' j = ∑ ak j ek (car e est une base de E). k =1 donc ∀i, j ∈ N n , pi j = ei* ∑ ak j ek k =1 n n = ∑ a k j ei* (ek ) k =1 n = ∑ ak j δ i k k =1 = ai j n conséquence : ∀j ∈ N n , e' j = ∑ ak j ek donc P = mat (id E ; e' , e) et p est inversible (car id E est k =1 bijective). proposition Soient e = (e1 ,..., en ) et e' = (e'1 ,..., e'n ) deux bases de E. Si P est la matrice de passage de e à e', alors P −1 est la matrice de passage de e' à e. démonstration P = mat (id E ; e' , e) . Soit Q la matrice de passage de e' à e. Q = mat (id E ; e, e' ) . mat (id E ; e, e) = I n et mat (id E ; e' , e' ) = I n , I n désignant la matrice identité d'ordre n. Or, mat (v o u; e, g ) = mat (v; f , g ) × mat (u; e, f ) Donc mat (id E ; e, e) = mat (id E ; e' , e) × mat (id E ; e, e' ) et mat (id E ; e' , e' ) = mat (id E ; e, e' ) × mat (id E ; e' , e) , c'est-à-dire, sachant que mat (id E ; e, e) = I n mat (id E ; e' , e' ) = I n , I n = PQ et I n = QP . et P est donc inversible (on le savait déjà) et Q = P −1 . S. DUCHET 1/6 Changements de bases en algèbre linéaire - Applications proposition Soient e = (e1 ,..., en ) et e' = (e'1 ,..., e'n ) deux bases de E. Soient X ' = mat ( x; e' ) et p la matrice de passage de e à e'. Alors X = PX ' . x∈E , X = mat ( x; e) , démonstration x1 ∃!( xi )1≤i≤ n ∈ K , x = ∑ xi ei , X = M . i =1 x n n n x'1 ∃!( x'i )1≤i≤ n ∈ K , x' = ∑ x'i e'i , X ' = M . i =1 x' n n n n Notons P = ( pi j )1≤i≤ n . D'après ce qui précède, on a : ∀j ∈ N n , e' j = ∑ pk j ek . 1≤ j ≤ n k =1 n x = ∑ x 'i e 'i i =1 n n = ∑ x'i ∑ pk i ei i =1 k =1 n n = ∑ ∑ x'i pk i ei i =1 k =1 (distributivité, associativité de l'addition) n Or la décomposition de x dans la base e est unique donc : ∀i ∈ N n , xi = ∑ x'i pk i . Donc X = PX ' . k =1 2) Changement de base d'une application linéaire On considère E de dimension p et F de dimension n. proposition Soient e = (e1 ,..., e p ) et e' = (e'1 ,..., e' p ) deux bases de E, f = ( f1 ,..., f n ) et f ' = ( f '1 ,..., f 'n ) deux bases de F. Soient u une application linéaire de E dans F, A = mat (u; e, f ) et A' = mat (u; e' , f ' ) . Soient P la matrice de passage de e à e', Q celle de f à f'. Alors A' = Q −1 AP . démonstration Soit x ∈ E . Soient X = mat ( x; e) et X ' = mat ( x; e' ) . On a X = PX ' . Soit y = u (x) . y ∈ F . Soient Y = mat ( y; f ) et Y ' = mat ( y; f ' ) . On a Y = QY ' . Or y = u (x) donc Y = AX et Y ' = A' X ' . Y = AX donc QY ' = A' PX ' . Q étant inversible, on a : Y ' = Q −1 A' PX ' . Comme Y ' = A' X ' et que la matrice de u relativement aux bases e' et f' est unique, il en résulte que A' = Q −1 AP . théorème et définition On définit sur M n p (K ) une relation binaire par : S. DUCHET 2/6 Changements de bases en algèbre linéaire - Applications ∀A, B ∈ M n p ( K ), A ℜ B ⇔ ∃P ∈ GL p ( K ), ∃Q ∈ GLn ( K ), B = Q −1 AP . ℜ est une relation d'équivalence. Si Aℜ B , on dit que A et B sont des matrices équivalentes. démonstration • ∀A ∈ M n p ( K ), A = I n−1 AI p donc Aℜ A ; • Soient A, B, C ∈ M n p ( K ) telles que Aℜ B et Bℜ C . ∃P ∈ GL p ( K ), ∃Q ∈ GLn ( K ), B = Q −1 AP . ∃R ∈ GL p ( K ), ∃S ∈ GLn ( K ), C = S −1 BR . Donc C = S −1 (Q −1 AP) R = ( S −1Q −1 ) A( PR) (associativité qu produit matriciel) = (QS ) −1 A( PR) avec QS ∈ GLn (K ) et PR ∈ GL p (K ) . Donc Aℜ C . • Soient A, B ∈ M n p ( K ) telles que Aℜ B . ∃P ∈ GL p ( K ), ∃Q ∈ GLn ( K ), B = Q −1 AP . Donc A = QBP −1 = (Q −1 ) −1 BP −1 , avec Q −1 ∈ GLn ( K ) et P −1 ∈ GL p ( K ) . Donc Bℜ A . lemme Soit u une application linéaire de E dans F, de rang r. Alors il existe une base e de E et une base f de F telle que: 0 LL 0 1 M M O 1 (matrice à n lignes, p colonnes, il y a r fois le chiffre 1). Notons mat (u; e, f ) = M 0 L 0 M M M M M 0 L 0 0 LL0 cette matrice J n , p ,r . démonstration D'après le théorème du rang, dim( Ker (u )) = n − r Soit (er +1 ,..., e p ) une base de Ker (u ) . D'après le théorème de la base incomplète, il existe tels que (e1 ,..., e p ) soit une base de E. Montrons qu'alors (u (e1 ),..., u (er )) est une base de Im(u ) : • Soit y ∈ Im(u ). ∃x ∈ E , y = u ( x) p ∃ ( xi )1≤i≤ p ∈ K p , x = ∑ xi ei . i =1 y = u ∑ xi ei i =1 p p = ∑ xi u (ei ) i =1 r = ∑ xi u (ei ) (car ∀j ∈ N , r + 1 ≤ j ≤ p, u (e j ) = 0 ) i =1 S. DUCHET 3/6 Changements de bases en algèbre linéaire - Applications donc (u (e1 ),..., u (er )) est une famille génératrice de Im(u ) . Soit ( xi )1≤i≤r ∈ K r tel que • r u ∑ xi ei = 0 i =1 Alors r ∑ xi ei = i =1 ∑ x u (e ) = 0 . i =1 i i r donc ∑ x e ∈ Ker (u ) i =1 i i donc il existe ( xi ) r +1≤i≤ p ∈ K p − r tel que p ∑x e i = r +1 r Donc r i i ∑ xi ei − i =1 . p ∑x e i = r +1 i i = 0 donc tous les xi sont nuls car e est une base de E donc (u (e1 ),..., u (er )) est une famille libre de Im(u ) . C'est donc une base de Im(u ) . • Soit ( f i )1≤i≤r ∈ F r définie par : ∀j ∈ N r , f j = u (e j ) . On vient de voir que ( f i )1≤i≤r est une famille libre de F donc, d'après le théorème de la base incomplète, il existe f r +1 ,..., f n ∈ F tels que ( f1 ,..., f n ) soit une base de F. Alors mat (u; e, f ) est de la forme souhaitée. théorème Deux matrices de M n p (K ) sont équivalentes si et seulement si elles ont le même rang. démonstration • Soient A, B ∈ M n p ( K ) deux matrices équivalentes. ∃ P ∈ GL p ( K ), ∃Q ∈ GLn ( K ), B = Q −1 AP . rg (Q −1 AP) = rg ( AP) (car Q −1 est inversible : voir chapitre "rang en algèbre linéaire") = rg ( A) (car P est inversible) Donc rg ( B) = rg ( A) • Soient A, B ∈ M n p ( K ) telles que rg ( B) = rg ( A) . Soit u l'endomorphisme de K p dans K n canoniquement associé à A. Soient e = (e1 ,..., e p ) la base canonique de K p et f = ( f1 ,..., f n ) la base canonique de K n . mat (u; e, f ) = A rg (u ) = r donc, d'après le lemme, il existe une base e' = (e'1 ,..., e' p ) de E et une base f ' = ( f '1 ,..., f 'n ) de F telles que mat (u; e, f ) = J n , p , r . Soient P la matrice de passage de e à e' et Q la matrice de passage de f à f'. Alors J n, p , r = Q −1 AP donc A ℜ J n , p , r . De même on montre que B ℜ J n, p , r . Par transitivité de la relation d'équivalence, on a : Aℜ B . A et B sont donc équivalentes. 3) Changement de base d'un endomorphisme E désigne dans ce paragraphe un K espace vectoriel de dimension n ( n ∈ N * ). Les résultats suivants découlent directement du paragraphe 2. S. DUCHET 4/6 Changements de bases en algèbre linéaire - Applications proposition Soient e = (e1 ,..., en ) et e' = (e'1 ,..., e'n ) deux bases de E. Soient u un endomorphisme de E, A = mat (u; e) et A' = mat (u; e' ) . Soit P la matrice de passage de e à e'. Alors A' = P −1 AP . théorème et définition On définit sur M n (K ) une relation binaire par : ∀A, B ∈ M n ( K ), A ℜ B ⇔ ∃P ∈ GLn ( K ), B = P −1 AP . ℜ est une relation d'équivalence. Si Aℜ B , on dit que A et B sont des matrices semblables. théorème Deux matrices de M n (K ) sont semblables si et seulement si elles ont le même rang. Application à la réduction des endomorphismes Pour ce qui suit, on se reportera aux démonstrations des chapitres "endomorphismes diagonalisables" et "trigonalisation des endomorphismes". théorème Soit u un endomorphisme de E. u est diagonalisable si et seulement si χ u est scindé fans K[X] et pour toute valeur propre λ , dim( Eu (λ)) = m , m étant la multiplicité de la valeur propre λ . théorème Soit u un endomorphisme de E. u est trigonalisable si et seulement si χ u est scindé dans K[X]. application u 0 , u1 ∈ K Etude des suites récurrentes linéaires d'ordre 2 : (u n ) définie par : . ∀n ≥ 2, u n + 2 = au n +1 + bu n 4) Changement de base d'une forme bilinéaire proposition Soient E un K espace vectoriel de dimension n ∈ N * , e et e' deux bases de E. Soient F un K espace vectoriel de dimension p ∈ N * , f et f' deux bases de F. Soient φ une forme bilinéaire sur E × F , A = mat (φ ; e, f ) et A' = mat (φ ; e' , f ' ) . Soient P la matrice de passage de e à e', Q celle de f à f'. Alors A'= t PAQ . démonstration Soient x ∈ E , X = mat ( x; e) et X ' = mat ( x; e' ) . Soient y ∈ E , Y = mat ( y; f ) et Y ' = mat ( y; f ' ) . X = PX ' et Y = QY ' S. DUCHET 5/6 Changements de bases en algèbre linéaire - Applications φ( x, y )= t XAY et φ( x, y )= t X ' A'Y ' t XAY = t ( PX ' ) A(QY ' ) =( t X ' tP) A(QY ' ) (propriété de la transposée) = t X '(t PAQ)Y ' (associativité du produit matriciel) Donc ∀X '∈ M n1 ( K ), ∀Y '∈ M p1 ( K ), t X ' A'Y '= t X '(t PAQ)Y ' donc A'= t PAQ . proposition Soient E un K espace vectoriel de dimension n ∈ N * , e et e' deux bases de E. Soient q une forme quadratique sur E, A = mat (q ; e) et A' = mat (q ; e' ) . Soit P la matrice de passage de e à e'. Alors A'= t PAP . démonstration C'est un cas particulier du cas précédent avec P = Q , A étant la matrice de la forme bilinéaire associée à q dans la base e, A' celle de q dans la base e'. S. DUCHET 6/6