INSECTES ET PATHOLOGIE TROPICALE H. DUMON* et B. FAUGERE** RESUME virales bactériennes et parasitaires. Hyménoptères, ecto et endoparasites, insectes et acariens allergisants peuvent être responsables de nuisances. Nous limiterons notre propos à un rapide tour d’horizon sur les insectes et les acariens d’importance médicale, passant ainsi sous silence les accidents d’envenimation dans certaines régions et surtout objet de crainte et de répulsion. En milieu tropical le rôle des arthropodes, quoique souvent important est largement dominé par celui qu’ils jouent dans la transmission de nombre u s e s maladies tropicales/ Dans certains cas des stratégies de lutte contre ces maladies, peuvent leur être opposées (exemple de l’onchocercose, du paludisme, de la maladie du sommeil). MOTS CLES : Insectes, Nuisances, Maladies à transmission vectorielle, Tropiques. Les arthropodes sont l’un des embranchements les plus importants du monde animal : 85 % des espèces animales connues, soit plus d’un million d’espèces dont les trois quarts sont des insectes. Parmi eux, un peu plus d’une centaine ont un intérêt médical, soit comme simple nuisance, soit comme hôtes d’agents pathogènes, soit surtout comme vecteurs de maladies. Dans nos régions tempérées, les arthropodes d’importance médicale sont surtout représentés par le groupe des nuisances. Dans l’environnement tropical, alors que ce problème de nuisances est bien plus important que chez nous, il est cependant largement dépassé par le rôle majeur des arthropodes dans la propagation de grandes endémies * - Professeur - Laboratoire de Parasitologie Faculté de Médecine - Insectes et acariens responsables de nuisances Insectes venimeux Les hyménoptères aculéates représentent un groupe important d’insectes chez lesquels l’organe de ponte des femelles est transformé en aiguillon. Tous ces hyménoptères sont potentiellement venimeux. Les plus importants de ces insectes sont les guêpes, les abeilles, les frelons, les bourdons mais aussi certaines fourmis. La toxicité de certains venins d’hyménoptères serait au moins égale à celle du venin de vipère, ce qui explique que des injections multiples et répétées peuvent être mortelles, en dehors des phénomènes de choc anaphylactique chez les sujets allergiques et des oedèmes de Quinke lors de piqûres au niveau de la bouche ou du pharynx. A titre d’exemple, on note en France beaucoup plus de décès par piqûre de guêpes, d’abeilles ou de frelons que par morsure de serpents. Ecto et endoparasites À côté de la sarcopte de la gale de répartition cosmopolite, on peut classer parmi les endoparasites temporaires certains agents de myiases humaines comme le célèbre ver de Cayor d’Afrique tropicale et le ver macaque d’Amérique tropicale (voir tableau). Ces affections toujours bénignes sont fréquentes et spectaculaires : issue d’une larve de mouche à travers la peau. ** - M.C.U. - P.H - Laboratoire de Parasitologie - Faculté de Médecine 27, Boulevard Jean Moulin - 13385 - MARSEILLE CEDEX 5. Médecine d'Afrique Noire : 1992, 39 (3) H. DUMON, B. FAUGERE 232 Principaux vecteurs des grandes affections transmissibles Classification Dénomination commune Ixodidne Affections transmises Géographie Fièvres boutonneuses Fièvres pourprées Arboviroses Borrélioses (Lyme) Fièvres récurrentes Typhus Maladie de Chagas Peste Typhus murin Ancien monde Nouveau monde Cosmopolites Cosmopolites Cosmopolites Cosmopolite Amérique latine Cosmopolite Cosmopolite Taons Glossines Loase Maladie du sommeil Afrique centrale Afrique tropicale Phlébotomes simules Leishmanioses Onchocercose Anophètes Filariose lymphatique Aedes Paludisme Tropiques Fièvre jaune Dengue Ancien et nouveau monde Afrique noire Amérique tropicale Tropiques Tropiques sauf Asie Tropiques Nuisance Myase furonculeuse Myase furonculeuse Afrique tropicale Afrique tropicale Amérique tropicale Tiques Argasidae Anoploures Hémipiitres Siphonaptères Tiques molles Poux Punaises Puces Diptères brachycères - Tabanidae - Muscidae Diptères nématocères - Psychodidae - Simullida e - Culicidae Culex On peut ainsi ajouter quelques agents de mylases humaines Auchinerophyla Cordylobia Dermatobia Ver de cases Ver de Cayor Ver macaque Insectes et acariens allergisants : tout le monde connait la place importante des acariens des poussières de maison dans les pneumallergènes. Par contre on incrimine depuis peu de temps un nouveau venu parmi le catalogue immense de ces allergènes, il s’agit d’un de nos insectes les plus familiers, le cafard. Blatella germanica espèce domestique la plus fréquente, pratiquement cosmopolite, très abondante dans nos cuisines et salles de bains, insecte brun jaunâtre de 1,5 cm serait à l’origine de nombreux phénomènes allergiques, asthme en particulier. Virus Rickettsies Fièvre jaune Dengue Arboviroses Fièvre des 3 jours Aedes aegypti Aedes Arthropodes Phlébotome R. prowasecki R. conori R. rickettsi R. mooseri Poux Tiques Dermacentor Puce Médecine d'Afrique Noire : 1992, 39 (3) Bactéries Protozoaires Cestodes Helminthes Trématodes Nématodes Y. pestis B. bacilliformis B. recurrentis B. hispanica B. bugdorfei Puce Phlébotome Poux Tiques Tiques Plasmodium Leishmanies Trypanosomes Schizotrypanum Anophèles Phlébotomes Glossine Triatome Bothriocéphales D. caninum H. nana Cyclops Puce Ténébrio Douves de Chine Bancroft Loa-loa Onchocercose Médine Crustacés Culicides Chrysops Simulie Cyclops INSECTES ET PATHOLOGIE TROPICALE Insectes et acariens hôtes et vecteurs Dans l’environnement tropical, le rôle des arthropodes dans la transmission des maladies est considérable. Dresser une liste complète de ces agents dépasserait largement le cadre de notre exposé, aussi nous nous contenterons de présenter un tableau simplifié regroupant les principaux vecteurs des grandes affections transmissibles. A l’exception de la maladie de Lyme, de certaines fièvres boutonneuses et des leishmanioses, toutes ces maladies sont des maladies tropicales. Le deuxième tableau regroupe les différents agents pathogènes transmis par des arthropodes ou dont une partie du développement s’effectue chez des arthropodes. La lutte contre ces grandes endémies passe par le contrôle de ces arthropodes. Exemples de stratégies de lutte appliquées à tro i s endémies parasitaires. Trois grands types de stratégies sont actuellement appliquées pour éviter le contact homme-vecteur : lutte antilarvaire avec utilisation d’agents chimiques ou biologiques à grande échelle, capture du plus grand nombre possible d’adultes à l’aide de pièges attractifs, protection individuelle contre les piqûres. Trois grandes endémies bénéficient à l’heure actuelle de ces campagnes de prévention. Onchocercose : le succès de la lutte contre l’onchocercose en Afrique de l’Ouest repose avant tout sur les immenses moyens déployés pour détruire les larves de simulies avec des agents chimiques et biologiques. Le contrôle permanent de tous les cours d’eaux associés à une chimiothérapie de masse par l’ivermectine peut permettre d’espérer assister à terme à la disparition de ce fléau. 233 Paludisme : après les échecs cuisants rencontrés dans la lutte antilarvaire à grande échelle du fait de l’apparition rapide de résistances aux insecticides, et surtout depuis la généralisation de la résistance du Plasmodium falciparum à la nivaquine, la prévention contre le paludisme passe surtout par des mesures de protection individuelle. S’il n’est pas toujours facile d’éviter le contact avec les insectes hématophages on peut au moins le réduire par de petits moyens. L’utilisation de rideaux ou de moustiquaires imprégnés de deltamétrine (K Otrine), insecticide à effet répulsif, protège e fficacement pendant le sommeil. Pendant la période d’activité maximum des moustiques, au crépuscule et dans les premières heures de la nuit il est recommandé de se protéger de la piqûre des moustiques en appliquant sur les parties découvertes des répulsifs efficaces (Autan ou Off) sous forme de lotion, de crème, de spray, en notant bien que la durée de protection n’excède pas quatre heures. Maladie du sommeil : la lutte chimique à grande échelle contre les glossines n’étant pas réalisable, la lutte conte le trypanosomiase humaine africaine passe, à côté du dépistage et du traitement des malades, par le piégeage passif des vecteurs. L’utilisation de pièges attractifs de réalisation et d’entretien très simples a fait la preuve de son efficacité et présente l’immense avantage de respecter l’environnement. Ce rapide tour d’horizon nous a permis de voir l’importance et la variété des insectes et acariens d’intérêt médical. Il nous montre aussi qu’il n’existe pas une stratégie de lutte applicable à tous ces vecteurs mais des stratégies adaptées à chaque cas. Médecine d'Afrique Noire : 1992, 39 (3)