Récits de Situation Complexes Authentiques produits par les

publicité
Récits de Situation Complexes Authentiques
produits par les internes de Médecine Générale
Exemple de l’erreur médicale
Eric Galam
Katell Mignotte, Jean-Pierre Aubert, Michel Nougairède
Narrative Matters 2014. Récit et Savoir
Université Paris Diderot. 23‐27 juin 2014
Traces d’apprentissage
• Pédagogie constructiviste
• Diplôme d’études Spécialisé (DES) dans les
Départements de Médecine Générale (DMG) en
France
• Méthode de formation et d’évaluation de l’acquisition
des compétences de médecine générale
• Source d’échanges pédagogiques entre l’interne et ses
enseignants (maître de stage et tuteur)
• Récit de situation complexe authentique (RSCA) : forme
la plus élaborée
Récit de Situation Complexe
Authentique RSCA
• Récit écrit impliqué, descriptif et analytique
• Situation professionnelle complexe (couvrant des éléments de
nature différente : clinique, relationnels, sociaux, éthiques,
administratif, contexte….) vécue par l’interne (authentique).
• Analyse critique de la situation
questions induites et leur hiérarchisation
réponses apportées
modalités d’obtention
recherche d’informations complémentaires
bibliographie succinte
• Différentes parties variables
en fonction de la situation traitée et de l’interne
• Partie narrative plus ou moins riche et développée mais
indispensable à la validation de la trace
Base de données
• Toutes les traces d’apprentissage produites par
ses 550 internes du DMG Paris Diderot
• Du 13/05/10 au 03/09/13, 3646 traces produites
et validées parmi lesquelles 2681 RSCA
• Mots clés attachés à chaque trace permettant
une analyse structurée
• « annonce d’une mauvaise nouvelle » : 68 traces
• « erreur médicale » : 38 traces
Au 07 juin 2014 : 4046 traces
•
•
•
•
Erreur médicale : 90
Annonce d’une mauvaise nouvelle : 100
Cancer : 29
Relation médecin malade : 45
Travaux en cours
• Michael Sellam : RSCA sur la compétence
« travail en équipe »
• Julie Roger : RSCA «annonce d’une mauvaise
nouvelle »
• Dan Bismuth : RSCA « Erreur médicale »
Consignes : première étape
Tableau récapitulatif
Numéro
trace
Titre
nbr
Nbr de mots
éventuel total d’introduction
de
mots
nb de mots nbr de mots
d’analyse de d’analyse
l’histoire
théorique
nbr de mots de
narration
nbr de
Autres éléments
références biblio pertinents ?
Consignes : deuxième étape
un doc pour chaque RSCA
• Tout ce qu'on veut garder : commentaires
généraux, structure de la trace , éléments
concernant le patient, la pathologie, les erreurs,
les conséquences, les intervenants, les
questionnements, implication ….et ce qui apparaît
pertinent pour chaque trace
• mots ou phrases clés : verbatim tels qu'ils ont
été écrits par l'auteur
• Problématiques évoquées
On ne cherche pas que ce qui est commun
mais aussi ce qui est différent
• Solutions adoptées et évolution
Consignes : troisième étape
• A partir des différents résumés contractés
• Eléments communs ou pas
• Ramasser le plus de notions possibles du
type PPCM et non PGCD
Exemples : Erreur médicale
• Cours Erreur médicale : 2 sessions pour les
internes en stage ambulatoire de Niveau 1
• Séance « aller » théorique
Séance « retour » : travail sur les RSCA des
internes
• Travail en sous groupes de 5 puis mise en
commun
• Validation secondaire des RSCA par le tuteur
Ex : Trace 15 : Les presque évènement
• Commentaires généraux
• Structure de la trace : 2 cas cliniques
• Eléments concernant le patient
- Homme amené par la police pour établir certificat de non admission;
Calme; hurlait sur les passants par la fenêtre
- Inversion de 2 dossiers par l'infirmière, celui d 'un patient devant
sortir le lendemain avec celui d'un patient décédé
• Pathologies, Erreurs, Conséquences, Intervenants, Questionnements
• Implication
- Les erreurs évitées à la dernière minute doivent autant que les erreurs
qui ont eu lieu nous donner l'occasion de réfléchir et nous enrichir en
vue de notre pratique à venir
- Par son côté moins traumatisant, le presque événement est analysable
de façon plus « froide »
Ex : Trace 15 : Les presque évènement
(2)
• éléments pertinents
l'interne narrateur liste l'ensemble des mesures qu'il met
dorénavant en pratique pour éviter les erreurs similaires à
celles qui ont failli se produire
• mots ou les phrases clés
« En somme, j’ai déclaré quelqu’un mort alors qu’il est bien
vivant, et j’ai failli appelé une famille pour leur dire que leur
père ou leur mari était mort… et si la famille avait débarqué ?
et si le patient était descendu à la morgue sous cette fausse
identité ??? et si et si… »
« En réalité, c’est une multiplication d’intervenants, de lieux
(radiologie, laboratoire..) ou chaque intervenant dans la prise
en charge du patient est un facteur potentiel d’événements
indésirables. »
Ex : Trace 15 : Les presque évènement (3)
• Problématiques évoquées
Refus d'examen par les patients, que faire ?
Erreur médicale et presque évènement
Transmissions médicales et erreurs
Multiplication des intervenants
Multiplication des risques d'erreurs
• Solutions adoptées et évolution
Quelques verbatim
• Après que son dossier fut présenté nous allions rendre visite
au patient et là fut le choc !
ce cas m’a énormément marqué, je me suis sentie assez
coupable vis à vis du patient
• Je lui fais face en lui disant que je vais inscrire dans le dossier
informatique que moi je conclus à la dissection et que lui la
réfute. La seule solution que j’ai trouvée à ce moment était de
lui faire du chantage
• C’est l’urgentiste qui avait accueilli Mme P, qui m’appelle pour
m’informer de son décès 3 jours auparavant.
Le choc est rude
• Le fait d’écrire cette histoire puis d’en parler m’a permis de
sortir de la culpabilité
• Chose surprenante, après être sortie du box,
la senior « craque » et se met à pleurer
• Puis je me dis qu'un comportement de cours
de récréation ne m'aidera pas à mieux
prendre en charge le patient
• Chaque visite dans sa chambre était
douloureuse pour moi, puisqu’elle me mettait
face à mon erreur diagnostique
• Je fais régulièrement des allers-retours au
déchoquage pour voir comment évolue la patiente,
en jetant un coup d’œil à son scope sans vraiment
lui adresser la parole
J’avais honte de moi, j’étais au bord des larmes
• Il m’a dit que j’étais la première responsable et qu’il
était le deuxième, je me suis sentie vraiment nulle
• Je n'en ai parlé à aucun de mes amis internes, car
j'ai un peu honte d'avoir commis cette erreur :
« En médecine, l'important, ce n'est pas tellement
de soigner les patients, c'est surtout de ne pas
passer pour un idiot devant les autres médecins"
• Son intérêt, pour moi, est précisément qu’elle soit assez
lointaine, et peut être plus aussi exacte, pour pouvoir n’en
avoir retenu que ce qui est passé par l’émotion, l’erreur, et la
leçon plus pratique et professionnelle que réellement
théorique
• Là commence ce qu’on pourrait appeler, si le meilleur humour
n’était pas destiné qu’aux autres, un calcul en double aveugle.
Mon chef calcule en gramme ou mole ou quelque chose à ne
surtout pas retenir. Je compatis à son calcul basé sur des
souvenirs (la notice Vidal, déjà manifestement hostile, ne
donne le menu qu’en UI / personne). Au point que nous voila
embarqués dans les même erreurs de calcul, et un résultat
assez divergeant d’avec les UI. Je signe l’arrêt. Bien entendu,
cette nuit-la, je dors sur mes deux UI, la tête pleine de calcul.
Staff. Tête complice tendue, repentante et accusatrice de mon
chef
• Finalement je n’ai rien fait. Je n’en ai ni parlé à mon praticien, ni
au patient, ni à ma meilleure amie avec qui nous parlons très
régulièrement des cas qui nous ont posé problème.
J’ai honte. J’ai toujours l’angoisse de voir Georges et son père
pousser la porte du cabinet… Ou que mon praticien me parle
d’un cas bizarre
je comprends alors la conclusion de mes co-internes lors de
l’analyse du cas en ED. En effet même si une partie de mon
inquiétude s’est envolée, je me sens encore coupable.
Après cet échange je me sens enfin libérée. Mon erreur n’est
pas oubliée pour autant, mais je suis prête à passer à autre
chose
• Je finis par remplir le certificat de décès
Du dossier, un ecg s’échappe... je regarde l’ecg, le rythme est
électro entrainé….
Pourtant, le patient que j’ai vu n’avait pas de pace-maker…
• Voyant qu’il ne me laisserait pas tranquille tant que je ne l’aurais
pas écrite, je prescrivis, de façon automatique, en accord avec
les dernières recommandations et sans reprendre le dossier, du
Clamoxyl intra veineux alors que la patiente était allergique
• Mes pensées se focalisent sur l’erreur que je venais de
commettre. Comment ai-je pu faire preuve d’une telle
inattention ? Comment ai-je pu faire autant confiance au
logiciel de prescription sans remettre en cause ce qu’il me
proposait ? Certes, je suis fatiguée, mais ce n’est pas une
raison pour justifier mon erreur
Alors que seule la voie intramusculaire est médicalement
possible», note le réquisitoire définitif, qui évoque un acte
de «maladresse et imprudence»
Une prescription que je venais de faire pour que nous,
soignants, ayons la paix. Je me rends compte à quel point
ma prescription est purement égoïste !
Mais encore ?
• RSCA : écrit réflexif structuré
• Echanges avec les enseignants maître de stage
et tuteur
• Groupes d’échange de pratique
• Entretiens individuels lors des thèses
• La narration réintroduit la subjectivité du
narrateur et son contexte
• Elle réintroduit l’histoire et son partage dans
une clinique longtemps présentée comme en
apesanteur
• Elle incite à l’échange verbal
• Elle réintroduit la vie dans la médecine
• Et la médecine dans la vie
•
Merci
Téléchargement