Acquisition et évaluation des compétences linguistiques en Langue des Signes Historique Jusqu’à la fin des années 1970 : le mode d’expression visuo-manuel utilisé par les personnes sourdes n’était pas vraiment considéré comme une langue à part entière Maintenant il a été démontré que les compétences en jeu dans l’acquisition de la LS sont dans de nombreux domaines les mêmes que celles concernant l’acquisition d’une langue parlée Évaluation des compétences en LS : récente La Langue des Signes La langue signée s’appuie sur les signes comme système de production permettant à cette langue d’être transmise de façon perceptible (fonction d’échange) Les signes sont l’équivalent linguistique et fonctionnel des mots (unités lexicales des langues parlées) Phonologie = organisation sous-lexicale des signes PHONOLOGIE Rappel : trait phonologique = trait caractéristique indécomposable et sans signification, universel pour toutes les langues des signes. 4 classes de codes phonologiques : 4 paramètres de formation des signes : Configuration Localisation/emplacement Mouvement Orientation PHONOLOGIE Chaque paramètre de formation se combine avec les autres pour former la « syllabe ». Les signes peuvent être jusqu’à quadrisyllabiques, mono ou bi-manuels. 5è paramètre de formation: l’expression du visage: controversé car d’autres la considèrent de la même façon que la prosodie ou l’intonation pour les langues parlées : ajoute de l’info et aide à la segmentation du discours mais ne fait pas partie du signe en lui-même sur le plan phonologique. NB: accès précoce à la LS rare : seulement 5 à 10% des enfants sourds ont des parents sourds qui leur ont appris la LS dès la naissance BELLUGI & FISCHER (1972) Comparaison de la vitesse d’articulation Prémisse : afin d’étudier la vitesse d’articulation dans la production de signes ou de mots, il faut pouvoir exclure les pauses du discours (qui prennent 40 à 50% du temps total de parole). Vitesse d’articulation mesurée par le nombre de signes/de mots par minute. NB: bien que la vitesse d’articulation varie significativement d’une personne à l’autre, elle reste vraiment constante pour la même personne (dans différentes situations). BELLUGI & FISCHER (1972) Comparaison de la vitesse d’articulation Sujets : 3 bilingues : jeunes adultes entendants de parents sourds. Ont appris la LS dès leur naissance (comme première langue) et continuent à l’utiliser quotidiennement (en même temps que l’anglais). Sont très à l’aise dans les 2 langages. Tâche : raconter une histoire de leur enfance ou une histoire qu’ils connaissent bien, la même dans 3 conditions : En ASL En anglais parlé Simultanément signé et parlé BELLUGI & FISCHER (1972) Comparaison de la vitesse d’articulation Le tout était filmé et il y avait donc 4 retranscriptions (parlé et signé dans les conditions séparées et parlé et signé dans la condition simultanée). Temps total des histoires : pas différent : ça prenait + ou – le même temps de raconter la même histoire que ce soit en LS ou en anglais. Exclusion des pauses : plus difficile de distinguer les pause dans la LS qu’en langue parlée sous-estimation probable du temps de pause en LS BELLUGI & FISCHER (1972) Comparaison de la vitesse d’articulation Résultats en conditions séparées : Histoire signée Histoire parlée (moyenne de signes/seconde) (moyenne de mots/seconde) Sujet A 2,3 4,0 Sujet B 2,3 4,9 Sujet C 2,5 5,2 Quand les pauses sont exclues du discours, la vitesse d’articulation des mots est presque deux fois celle des signes, et ce pour chaque sujet. BELLUGI & FISCHER (1972) Comparaison de la vitesse d’articulation Mais certains diront que cette différence peut provenir du fait qu’il y a 2 versions de l’histoire et qu’elles ne sont pas les mêmes Résultats de la condition simultanée : Accroissement du temps passé en pause pour chaque sujet peut-être le reflet d’un investissement cognitif plus important signes/seconde mots/seconde Sujet A 2,2 3,4 Sujet B 2,5 4,4 Sujet C 2,5 4,1 même quand le contenu est exactement le même, la vitesse d’articulation des mots est au moins 1,5 fois celle des signes. BELLUGI & FISCHER (1972) Comparaison de la vitesse d’articulation Les signes semblent être plus longs à produire que les mots. On pouvait s’y attendre étant donné que les signes sont plus complexes et impliquent des mouvements coûteux en temps. Qu’en est-il pour les phrases ? Suite à ces résultats, on peut s’attendre à ce qu’elle durent plus longtemps BELLUGI & FISCHER (1972) Comparaison temporelle des phrases Phrases divisées en propositions. // entre propositions en signes et en mots Condition simultanée : moyennes de 1,2 à 1,6 secondes par proposition. MAIS le flot naturel de narration a été altéré dans cette condition Conditions séparées : Parlé (moyenne de sec/proposition) Signé (moyenne de sec/proposition) Sujet A 1,6 2,0 Sujet B 1,2 1,4 Sujet C 1,0 1,0 pas de différences significatives. Cela varie plus d’un sujet à l’autre que d’une modalité à l’autre pour le même sujet. BELLUGI & FISCHER (1972) Conclusion Alors qu’on a trouvé des différences frappantes et consistantes pour la vitesse d’articulation entre signes et parole (les signes mettent pour être produits, +ou- 1,5 fois le temps que mettent les mots); on retrouve une similarité de la durée mise par proposition pour les deux modalités. = paradoxe : les signes sont plus lents à produire que les mots les phrases signées ne prennent pas plus de temps à produire que les phrases parlées Pourquoi ? BELLUGI & FISCHER (1972) : Explications Quels sont les mécanismes en LS qui compensent cette perte de temps en articulation des signes? Comment la LS gagne du temps tout en communicant de façon non ambiguë ? 3 grands mécanismes : A. Délétion B. Incorporation C. Changements corporels et faciaux BELLUGI & FISCHER (1972) : Explications A. Délétion Morphèmes grammaticaux : suppression des mots de fonctions (it’s, to, the, …) Ex : « it’s against the law to drive on the left side » « ILLEGAL DRIVE LEFT-SIDE » Anaphores : suppression des pronoms (quand les noms ont déjà été mentionnés) Ex : « John likes Mary, so he goes and visit her a lot » « JOHN LIKE MARY, WELL, GO VISIT MUCH » Verbes généraux : usage de verbes spécifiques Ex : « so they came in » « ENTER » BELLUGI & FISCHER (1972) : Explications B. Incorporation L’emplacement/localisation : des mouvements directionnels reflètent la disposition spatiale de personnes ou d’objets en relation avec l’interlocuteur. Ex : « I will bring something down of that shelf for you » le verbe BRING incorpore le lieu de la source (une haute échelle, donc le signe bouge vers le bas) et le datif (« you ») Le nombre : quand le verbe reflète le nombre, la forme du signe verbal peut changer de différentes façons : Changement de configuration manuelle et nombre de mains Changement du mouvement Répétition du verbe Ex : CLIMB : si 1 personne, 2 doigts dans 1 main; si 2 personnes, 2 doigts dans chaque main; si bcp, 4 doigts dans chaque main BELLUGI & FISCHER (1972) : Explications B. Incorporation La manière : utilisé de la même façon que l’intonation dans le langage parlé Ex : « terrific explosion » « EXPLODE » de façon grave, telle que l’adjectif est incorporé dans le verbe. La taille et la forme : un signe peut incorporer la taille et la forme de l’objet ainsi que sa source, son but et son instrument. Ex : le verbe « REMOVE » : « REMOVE LARGE PAINTING FROM WALL WITH HANDS » est différent de « REMOVE NAIL FROM WALL WITH CLAW HAMMER » BELLUGI & FISCHER (1972) : Explications C. Changements corporels et faciaux Expression faciale : Négation : hochement de tête, souvent réduit à un froncement de sourcil pendant toute la proposition. Ex :« I don’t know that » « ME KNOW THAT + froncement de sourcils » Acquiescement : hochement de tête pendant la proposition. Dans une question de type oui/non, ça correspond souvent à la 2ème partie. Ex : « You like this, don’t you » « YOU LIKE THIS? +hochement » Interrogative : questions de type oui/non souvent marquées par un haussement de sourcils. Guillemets (prise de rôles) : regard sur l’interlocuteur pendant la narration et ailleurs durant la citation. BELLUGI & FISCHER (1972) : Explications C. Changements corporels et faciaux Attitude corporelle : notamment pour indiquer les différents personnages dans une histoire et indiquer qui parle à qui. Très économe en temps, très fréquemment utilisé en LS, aide aussi à rendre le discours vivant et absorbant à regarder. BELLUGI & FISCHER (1972) CONCLUSION L’exploitation des mécanismes disponibles à la modalité rend possible la compensation du problème apparemment lié à la LS, à savoir que les signes prennent plus de temps à articuler que les mots. Grande tendance à condenser le message en LS PHONOLOGIE : aspects développementaux A. Babillage Babillage manuel = productions manuelles répétitives sans significations, présentées en mouvement dans l’espace définit pour l’expression dans la LS de référence de l’enfant. Le babillage manuel est présenté par la majorité des enfants exposés précocement à la LS (qu’ils soient sourds ou entendants de parents sourds). PHONOLOGIE : aspects développementaux A. Babillage : PETITTO & MARENTETTE (1991) Idée : si on observe un babillage manuel en LS et s’il a les même caractéristiques que le babillage vocal, alors c’est que le babillage résulterait de la maturation d’une capacité langagière neuronale applicable au traitement de différents types de signaux (plutôt qu’uniquement aux mécanismes articulatoires responsables de la parole). Caractéristiques du babillage vocal : 1. Échantillon des sons possibles 2. Organisation syllabique (CV : bababa) 3. Pas de signification ou de référent apparent PHONOLOGIE : aspects développementaux A. Babillage : PETITTO & MARENTETTE (1991) Sujets : 5 enfants : 2 sourds (de parents sourds) et 3 contrôles (enfants entendants de parents entendants). Analyse des babillages vocaux et des activités manuelles chez tous les enfants Résultats : 2 types d’activité manuelle : Babillage manuel syllabique : basé sur les 3 caractéristiques : 1) échantillon réduit d’unités combinatoires 2) organisation syllabique 3) Pas de signification ou de référents Gestes : pas d’organisation interne, produits référentiellement (ex : tendre les bras pour être pris) PHONOLOGIE : aspects développementaux A. Babillage : PETITTO & MARENTETTE (1991) Gestes : même type et même quantité chez les enfants sourds et entendants Babillage manuel : beaucoup plus produit par les sourds (entre 32 et 71% de l’activité manuelle contre 4 à 15% chez les entendants) Enfant Geste Babillage manuel H1 98 10 H2 195 8 H3 121 14 D1 101 80 D2 122 111 PHONOLOGIE : aspects développementaux A. Babillage : PETITTO & MARENTETTE (1991) Babillage manuel des enfants sourds partage 6 caractéristiques avec le babillage vocal d’enfants entendants: 1) 2) 3) 4) 5) Utilisation d’un échantillon réduit d’unités phonétiques qu’on retrouve dans l’ASL (32%) Utilisation préférentielle de 4 types de syllabes par les enfants sourds: a, b, c, d Répétitions dans babillages vocal et manuel des sourds Stade du babillage syllabique manuel à 10 mois (entre 7 et 10 mois chez les enfants entendants) Progression dans le babillage manuel similaire à celle dans le babillage vocal et dans une évolution temporelle similaire : jargon entre 12 et 14 mois pour les deux (formes possibles mais inexistantes du lexique ASL) PHONOLOGIE : aspects développementaux A. Babillage : PETITTO & MARENTETTE (1991) 6) Continuité entre les formes phonétiques et syllabiques du babillage manuel et les premiers signes : les unités les + fréquemment utilisés dans le babillage étaient aussi les + fréquentes dans leurs premiers signes. De plus premiers mots et premiers signes apparaissent à des âges similaires (entre 10 et 12 mois) Babillage = expression d’une capacité neuronale amodale capable d’un traitement de la parole et des signes : forme et organisation du babillage sont liés à la structure linguistique abstraite du langage Les enfants semblent donc prédisposés de façon innée à découvrir les input particuliers des unités phonétiques et syllabiques PHONOLOGIE : aspects développementaux A. Babillage : PETITTO & MARENTETTE (1991) Babillage = mécanisme par lequel les enfants découvrent les moyens de produire la structure du langage Les similarités d’évolution temporelle, de structure et d’usage existant entre le babillage vocal et manuel suggèrent qu’il y a une capacité langagière unitaire qui sous-tend l’acquisition des langages humains signé et parlé. PHONOLOGIE : aspects développementaux B. Premiers signes COMPREHENSION Premières mises en lien entre des signifiants proposés par l’entourage (les signes) et leurs signifiés (signification ou objets que ces signes symbolisent). Fonction symbolique Pas de test d’évaluation en LSBF car difficultés : • Certains référents peuvent être exprimés par plusieurs signes (ex: l’enfant ne connaît pas le signe du test mais connaît un synonyme) • Population de référence trop petite pour normalisation PHONOLOGIE : aspects développementaux B. Premiers signes EXPRESSION 1 signe : vers 8 mois ½. 10 signes : vers 13 mois ½. Combinaison de 2 signes : vers 17 mois Les premières productions signées porteuses de signification apparaissent plus précocement qu’en langue parlée (car, à cet âge, la motricité manuelle est en avance sur la motricité bucco-phonatoire) Apparition concomitante du babillage manuel et des premiers signes significatifs PHONOLOGIE : aspects développementaux B. Premiers signes EXPRESSION (suite) Comment déterminer qu’une production manuelle possède la fonction symbolique, est bien un signe ? • Signe = tout item lexical utilisé dans au moins deux situations contextuelles différentes en l’absence du référent. • Signe = tout item lexical présenté pour évoquer une classe de référents qui lui sont reliés (ex: « papa » en pointant les chaussures de papa) Mots-phrases produits au même âge que l’enfant entendant exposé à une langue parlée stade plus tributaire des capacités cognitives que des capacités motrices de l’enfant. PHONOLOGIE : aspects développementaux B. Premiers signes BABY-SIGNES Baby-signe = déformation des signes (ne sont pas toujours identiques à ceux utilisés par les locuteurs) Ce phénomène reflète la difficulté articulatoire de la langue : les erreurs portent souvent sur les éléments les plus difficiles à produire. Emplacement > Mouvement > Configuration > Orientation Saillance perceptive joue sans doute un rôle : ce qu’on voit mieux est plus vite acquis PHONOLOGIE : aspects développementaux C. Erreurs phonologiques Erreurs pas par hasard : portent sur les caractéristiques phonologiques des signes, par modification d’un ou de plusieurs paramètres (dans les productions les plus difficiles). les enfants respectent les contraintes phonologiques et les adaptent à leurs capacités articulatoires. Configuration manuelle : erreurs à cause de la similitude phonologique et de la difficulté d’exécution. Emplacement/localisation : proximalisation des erreurs: l’enfant modifie le plus souvent l’emplacement en le rapprochant du tronc. Mouvement : omission ou simplification de ce paramètre (surtout les mouvements de rotation). MORPHOLOGIE Les langues signées ont une grammaire aussi complexe et organisée que celle des langues parlées. Il y a des règles de modifications des signes en fonction de la signification des énoncés. Formes infléchies ou conjuguées des verbes Ex : « donner » répété 2 fois dans l’espace frontal = « distribuer » Pronoms en fonction du contexte sémantique et grammatical: marqué par un pointage directionnel, un classificateur ou une intégration morphosyntaxique dans le verbe. SYNTAXE A. Accord spatial du verbe Verbes directionnels : accord du verbe en utilisant des éléments de référence placés grammaticalement dans l’espace (pronominalisation du verbe). Ex : « voir » : près des yeux du locuteur si parle à la première personne, dans un point de l’espace si référence à un autre personnage 5 ans : l’enfant comprend les règles d’accord du verbe. 6 ans : l’enfant accorde spatialement le verbe en utilisant l’espace d’exécution des signes comme référence. Entre 5 et 6 ans : sur-généralisations erronées de certaines règles grammaticales sur des verbes invariables ou on directionnels En ASL ces règles sont décrites et formalisées mais pas en LSBF SYNTAXE B. Expression faciale (marqueur non manuel) Mimiques faciale pour accompagner les questions : Questions de type oui/non : rehaussement de sourcils. < 1,6 ans Questions de type qui/quoi/comment/où : froncement de sourcils. Vers 3,6 ans. Conditionnel : haussement de sourcils sur la partie de la phrase au conditionnel (ex: BOOK LOSE WILL ORDER OTHER ONE). Vers 3,11 ans Idem pour différencier 2 propositions Pas de test concernant l’expression faciale en LSBF SYNTAXE C. Pointage référentiel Concerne le pointage réel et abstrait de personnes ou d’objets absents Pointage référentiel linguistique : acquisition des pronoms personnels Vers 9 mois : pointage non linguistique des objets/personnes Vers 18 mois : pointage correspondant à l’utilisation des premiers pronoms (avec erreurs pour les réversibles) Entre 2 ans et 2 ans ½ : début de l’usage approprié des pronoms personnels Erreurs sur pronoms réversibles = évidences d’une analyse nouvelle du geste, l’enfant reconnaît l’index pointé comme un signe au sens linguistique du terme et non plus comme un référentiel concret. Pas de test concernant les référents abstraits en LSBF SYNTAXE PETITTO (1987) : Introduction 2 modèles de l’acquisition du langage A. « Interaction-based models » Le langage est dérivé de capacités cognitives générales plutôt que de capacités linguistiques spécifiques (Reilly et Greene, 1980) (basé sur Piaget) B. Child-based models » Le langage émerge de structure spécifiques au langage (Wexler et Culicover, 1980) (basé sur Chomsky) SYNTAXE PETITTO (1987) : Introduction Réfutation de B Les connaissances sur le langage : via connaissances pré-linguistiques, rôle central des gestes pré linguistiques Bates et coll. (1983) : 13 mois : gestes avec objets en main = équivalent gestuel du mot, donc = gestes pré-linguistiques. Clarck (1978) : Les mots déictiques émergent des gestes de pointage précoce dans une progression naturelle et continue. SYNTAXE PETITTO (1987) : Objectif de l’étude But = acquérir des données afin de voir si l’acquisition des structures linguistiques se fait en continuité à partir de structures non ou prélinguistiques, OU si elle se fait en discontinuité, témoignant alors d’une réorganisation des connaissances par rapport aux formes linguistiques dépendant de l’émergence du système grammatical. SYNTAXE PETITTO (1987) : Explications sur les pronoms Acquisition des pronoms en ASL Même organisation linguistique formelle que le LP: Fonctions déictiques et lexicales Signification de « I » et « YOU » suivant l’événement raconté et suivant la personne qui parle Propriétés de référence instable aux contraires des mots Erreur de réversibilité Mais différences : Espace et mvt = moyen clé pour communiquer en LS, pas en LP, unités de mvt et spatiales = morphèmes de LP En LP, relation mot référent est arbitraire, en LS il est non arbitraire SYNTAXE PETITTO (1987) : Explications sur les pronoms Structures des pronoms personnel en ASL ME: signé par le signeur en pointant directement sur sa poitrine YOU: signé en pointant vers la personne à qui on s’adresse Espace de signage délimité, à statut multimorphémique 3ème pronom : comme en LP, fonction anaphorique et déictique complexe Si qqun présent dans le contexte du discours : pointe vers lui Si référent absent, on pointe vers un locus spatial arbitraire (celui qu’occupait la personne) En LS (≠ LP), les expressions déictiques (« this, there, that,… ») sont signées par pointage comme pour les pronoms personnels. SYNTAXE PETITTO (1987) : Méthode Sujets 2 filles sourdes de naissance, Kate et Carla ASL comme 1ere langue via parents sourds Procédure Observation: vidéo de 12 X 1h, conversation libre à la maison ou en laboratoire avec les parents Expérimentation: 3 tâches d’éludation de pronoms A) Tache d’identification d’images B) Tache Action C) Tache Hiding Box SYNTAXE PETITTO (1987) : Résultats Période précoce : 6-12 mois 1°: cpt de recherche et de grasping : 6-8 mois 2°: pointage vers gens/lieux/objets/événements : 10-12 mois Pointage avec un bras tendu vers la personne ou l’objet avec les yeux fixés sur le regard de l’adulte Même période que pour le LP SYNTAXE PETITTO (1987) : Résultats Période moyenne: 12-18 mois Pointage vers personnes cesse mais continue pour le pointage vers des objets/lieux/évènements. Phénomène pas du à un déficit cognitif ou de langage car celui-ci se développe normalement par rapport aux autres enfants sourds et entendants. 1. 2. 3. nombre de signes produits seul ↓ nombre de combinaisons de signes ↑ nombre de signes et de combinaisons de signes ↑ avec le temps MLU ↑ durant cette période SYNTAXE PETITTO (1987) : Résultats Période moyenne (suite) Échec de pointage vers soi-même et les autres qui serait du à une inhabilité à reconnaître et à faire référence à soi-même et aux autres. Référence à soi-même et aux autres via noms propres (idem LP). SYNTAXE PETITTO (1987) : Résultats Période d’erreur : 21-23 mois Kate: 1er pronoms à 22 mois, connaissance instable de ceux-ci Erreur inversion consistante: YOU=ME Produit pas ME mais le comprend Fait référence à elle-même avec le signe « girl » Connaît pas le signe de son prénom (K) N’utilise pas les 2 et 3ème pronoms mais fait référence à eux avec des noms propres Pointage déictique vers objets et endroits est sans erreurs SYNTAXE PETITTO (1987) : Résultats Carla: 1er pronoms : 21 mois, connaissance instable de ceux-ci Jargon approximatif de son nom jusqu’à 25 mois 3types d’erreurs: 1) erreurs d’inversions inconsistantes: inversions non systématiques de YOU et ME, comme pour les enfants entendants 2) erreur de référent à la 3ème personne: produit le 3ème pronom sans spécifier le référent 3) erreurs de pronoms possessifs: utilise MY et MINE à la place de ME et vice-versa, pareil pour YOU et YOUR => pas erreur sémantique mais confusion entre usage de pronoms personnels et possessifs (qd utiliser l’un ou l’autre) Usage correct des pronoms personnels: 25-27 mois SYNTAXE PETITTO (1987) : Discussion Pourquoi une fonction sélective du pointage disparaît? Explication possible dérivée des recherches sur l’acquisition du sens des mots, de la morphologie et de la syntaxe Slobin, 1973, 1982 et 1985: l’enfant met plus de temps pour apprendre un mot dont les unités morphologiques ont une seule forme de surface et plusieurs significations sous-tendues que lorsqu’un mot à une seule forme de surface et une seule signification. C’est pourquoi, il déciderait d’éviter d’utiliser ces formes tant qu’il ne maîtrise pas leurs composantes entièrement. SYNTAXE PETITTO (1987) : Discussion Pointage en ASL: forme de surface unique à significations complexes et ayant des fonctions grammaticales => difficile à maîtriser Pq éviter YOU et ME? Pluri-fonctionnalité du pointage + complexité conceptuelle des référentiels pronominaux L’enfant préfère donc éviter YOU et ME en faveur d’items lexicaux plus simples, qui enlèvent toute ambiguïté SYNTAXE PETITTO (1987) : Discussion Pourquoi les enfants font-ils des erreurs de pronoms? A) Hypothèse égocentrique Pour Piaget (1955), les enfants échouent dans la distinction entre soi et l’autre, avec comme conséquence qu’ils sont incapables de tenir compte du point de vue de l’auditeur dans une conversation. En ASL, apprendre des signes requière que l’enfant soit capable d’effectuer une transformation spatiale, c’est-à-dire de produire en miroir ce qu’il voit, plutôt que la forme littérale. => cela présuppose que l’enfant n’est pas égocentrique 2 faits additionnels contrecarrent l’hypothèse égocentrique: 1. si l’impossibilité à changer de perspective est due à l’égocentrisme, on devrait observer des erreurs d’inversions dans une large sortes d’items lexicaux, ce qui n’est pas le cas (ici que inversion ME-YOU) 2. cette hypothèse ne peut expliquer la nature asymétrique de l’erreur (signe YOU pour ME mais pas le contraire) SYNTAXE PETITTO (1987) : Discussion B)Hypothèse alternative Le signe YOU de Kate serait un signe lexical qui ne représenterai qu’elle Kate a donc sursymbolisé le You indexical, le traitant comme un item lexical « gelé » avec un référent stable: elle-même Cependant, cette hypothèse ne peut être considérée comme vraie car dans des contextes où le YOU ne la représente pas, Kate comprend très bien sa signification SYNTAXE PETITTO (1987) : Conclusions Acquisition des pronoms personnels chez les enfants sourds est similaire à celle des enfants entendants Évitement des pronoms personnels chez les enfants sourds = évidence de réorganisation des structures de connaissances de l’enfant en développement, et de discontinuités entre systèmes linguistique et non linguistique (Karmiloff-Smith, 1986). Les données montrent que l’acquisition des connaissances grammaticales impliquent davantage de structures spécifiques au langage que de connaissances cognitives générales Les connaissances linguistiques ne sont pas simplement construites à partir de matériels non linguistiques. => le processus d’acquisition du langage est discontinu par rapport à d’autres formes de connaissances SYNTAXE D. Classificateurs Classificateur = signe-pronoms utilisé en remplacement de signes désignant un objet, un animal ou une personne. Maîtrise particulièrement tardive car dépend de l’application de nombreuses règles morphosyntaxiques complexes : vers 8 ou 9 ans. Cependant, pas phénomène de tt ou rien, certaines règles sont maîtrisées plus tôt que d’autres. Domaine clé pour l’évaluation des compétences individuelles en LS car permet de surveiller l’émergence du traitement de règles morpho-phonologiques et morphosyntaxiques. Jalons d’acquisition de compétences en langue des signes Production d’un signe 8,5 mois Pointage concret non linguistique 10 mois Production de 10 signes isolés 13,2 mois Production de 2 signes consécutifs 17 mois Pointage concret linguistique vers soi (1ère personne) 20 mois Pointage concret linguistique vers d’autres (2 et 3ème personne) 22 à 25 mois Questions oui/non (sourcils interrogateurs 1;6ans Premier appariement nom + verbe 2 à 2;11 ans Verbe de mouvement dans l’espace 2;9ans Jalons d’acquisition de compétences en langue des signes Verbe de mouvement avec classificateur pour un objet incorporé 2;11 à 3;6ans Commentaire (négation de tête en association à la production d’une phrase) 3ans Accord du verbe (radical+mvt+localisation) 3 à 3;6ans Appariement nom+verbe; utilisation de multiples paires 3 à3;11ans Utilisation de la répétition d’un signe pour la marque de durée ou de fréquence 3 à 3;11ans Utilisation pronominale (classificateur) pour 2 tierces personnes 3;1 à 4;9mois Verbe de mouvement avec classificateur pour 2objets incorporés 3;4ans à 4;4ans Pointage référentiel abstrait de personnes ou d’objets non présents: une localisation 3;6ans Jalons d’acquisition de compétences en langue des signes Questions qui-quoi-où-quand-comment-pourquoi 3;6ans Récit à un rôle 3;6ans Marqueurs du conditionnel (si…alors) 3;11ans Distribution, action d’un groupe de personnes (répétition du signe) 3;7 à 4;8ans Pointage référentiel abstrait de personnes ou d’objets non présents: 3;9 à 4;4ans plusieurs localisations Jeu de rôle, récit à plusieurs rôles 4;4ans Accord du verbe avec localisation abstraite 4;9ans Maîtrise complète des verbes de mouvement avec classificateurs incorporés 8-9ans Conclusion L’évaluation des compétences en LS est actuellement encore difficile et les quelques études sur l’acquisitions de la LS n’ont que rarement abouti à des tests standardisés d’évaluation du niveau linguistique. Cependant, il serait intéressant d’avoir un outil d’analyse, valide et normalisé, de la compétence linguistique en LS afin de pouvoir suivre, documenter et contrôler les progrès du développement de la LS des enfants sourds. On est à fortiori moins avancé en ce qui concerne la LSBF puisqu’elle est encore moins étudiée et actuellement encore mal identifiée dans son vocabulaire et ses règles grammaticales. Cependant, des études sont menées en ce moment par l’équipe de PROFILS afin d’apporter des éclaircissement sur la grammaire et le fonctionnement de la LSFB