Les interrogatives

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Les interrogatives
I.
II.
Les interrogatives indépendantes
Les interrogatives subordonnées
(indirectes)
Pollet Samvelian
1
La modalité interrogative

Interrogation : une demande d’information adressée à un
interlocuteur.

A l’oral : intonation spécifique.

Moyens morphologiques et syntaxiques particuliers et
variés, conditionnés par les registres de langue et marqués
par l’opposition entre l’oral et l’écrit.

Interrogation totale (globale) vs. interrogation partielle.
Pollet Samvelian
2
Interrogation totale (globale) vs.
Interrogation partielle

L’interrogation totale porte sur l’ensemble du contenu
propositionnel et appelle une réponse globale oui ou non.
Aimez-vous Brahms ?
(Sagan)
Est-ce ainsi que les hommes vivent ? (Aragon)
Ange plein de gaieté, connaissez-vous l’angoisse ?
(Baudelaire)
Avez-vous déjà giflé un mort ? (Aragon)
Pollet Samvelian
3
Interrogation totale (globale) vs.
Interrogation partielle

L’interrogation partielle porte sur une partie de la phrase,
sur un des ses constituants.

La réponse : un constituant (le reste de la phrase
généralement elliptique).
- Qui viendra nous voir ?
- Marie

Le constituant interrogé : variable sur laquelle porte la
demande d’information.
Pollet Samvelian
4
Interrogation totale (globale) vs.
Interrogation partielle

Le mot interrogatif correspond à cette variable.

Les autres éléments de la phrase véhiculent des
informations présupposées.
A qui Marie a-t-elle donné un cadeau ?
Présupposée : « Marie a donné un cadeau à quelqu’un »
Pourquoi vendez-vous de la drogue ?
Présupposée : « Vous vendez de la drogue »
Pollet Samvelian
5
I. Interrogation totale (globale)

Marquée par une intonation ascendante et laissant la
phrase en suspens sur la dernière syllabe de la phrase.

Plusieurs possibilités :
- Interrogation par la seule intonation.
- Interrogation avec inversion du sujet.
- Interrogation avec est-ce que.
Pollet Samvelian
6
I. Interrogation totale (globale)
a. Marquée par la seule intonation

Même forme que la phrase déclarative : même ordre des
constituants.

Fréquente à l’oral, le registre familier, mais employée
aussi à l’écrit.

A l’écrit, seule la ponctuation la distingue d’une phrase
déclarative :
Vous croyez qu’on va me garder longtemps ?
Vous voulez que nous prenions un verre ensemble ?
(P. Modiano, Une jeunesse)
Pollet Samvelian
7
I. Interrogation totale (globale)
b. Avec inversion du sujet

Le sujet est placé après le verbe.

Selon la nature su sujet, on distingue deux types
d’inversion.
1.
Inversion simple
Seras-tu présent ?
Inversion complexe
Marie, viendra-t-elle nous voir ?
2.
Pollet Samvelian
8
I. Interrogation totale (globale)
b.1. Inversion simple

S’applique aux pronoms clitiques (conjoints ou faibles)
sujets (je, tu, il, …) et au démonstratif ce.
Ai-je passé le temps d’aimer ?
Aimez-vous Brahms ?

(La Fontaine)
Le démonstratif ce est inversé avec le verbe être :
Est-ce ainsi que les hommes vivent ?
Est-ce ma faute ?
Pollet Samvelian
9
I. Interrogation totale (globale)
b.2. Inversion complexe

Le sujet n’est pas un clitique, ni le démonstratif ce.

Il reste dans la position préverbale, mais est repris après le
verbe par un clitique.
Dieu est-il français ?
La guerre constitue-t-elle une solution aux problèmes de
cette région ?
Pollet Samvelian
10
I. Interrogation totale (globale)
c. Avec est-ce que

Analyse grammaticale : « terme complexe ».

A l’origine, l’inversion de c’est que suivi d’une structure
phrastique.

Employé aussi bien à l’oral qu’à l’écrit.
- Est-ce que vous vous êtes regardée dans un miroir ?
(Montherland)

L’ordre de la phrase déclarative est maintenu.
Pollet Samvelian
11
II. Interrogation partielle

Toujours avec un terme (mot) interrogatif (pronom ou
déterminant interrogatif), appelé aussi mot QU-.
Que faut-il faire de mes jours ? (Aragon)
Comment peut-on être Persan ?

Intonation différente par rapport à l’interrogation totale.

Intonation en fonction de la position du mot interrogatif.
Pollet Samvelian
12
II. Interrogation partielle
Mots (Pronoms, déterminants) interrogatifs

Pronoms et déterminants interrogatifs : qui, que (quoi),
où, combien, pourquoi, comment, …

La forme du pronom est déterminée par son sémantisme,
mais aussi par sa fonction :
Qui :
sujet, COD ou attribut du sujet, humain
Que :
COD, attribut du sujet, non humain
Où :
complément prépositionnel,
valeur locative
etc.




Pollet Samvelian
13
II. Interrogation partielle
Pronom interrogatif : qui



Fonction : Sujet, COD ou attribut
Sémantisme : animé humain
Qui a peur de Virginia Woolf ? (sujet)
Qui as-tu croisé dans la rue ?
(COD)
Qui était donc cette dame ?
(Attribut)
* Qui a explosé ?
(sujet, non humain)
Préposition + qui : Compléments prépositionnels humains
A qui penses-tu ?
Pour qui sonne le glas ?
De qui parlent-ils ?
Pollet Samvelian
14
II. Interrogation partielle
Pronom interrogatif : que




Fonction : COD, attribut, séquence de l’impersonnelle
Sémantisme : non animé
Que veux-tu ?
(COD)
Que serais-je sans toi ? (Attribut)
Que reste-t-il de nos amours ? (Séquence de
l’impersonnelle)
Que est un clitique. D’où sa position contrainte.
* Préposition + que
* A que penses-tu ?
* De que parles-tu ?
Pollet Samvelian
15
II. Interrogation partielle
Pronom interrogatif : quoi

1.
2.

Quoi : la variante non clitique de que. Comparez :
a. Que cherches-tu ?
b. * Quoi cherches-tu ?
b. Tu cherches quoi ?
c. * Tu cherches que ?
Préposition + quoi : compléments prépositionnels non
humains
De quoi te plains-tu ?
A quoi penses-tu ?
Pollet Samvelian
16
II. Interrogation partielle
Pronom interrogatif : où


Fonction : complément prépositionnel ou adverbial
Sémantisme : locatif
Où vas-tu ?
Où avez-vous caché le trésor ?
Mais où sont les neiges d’antan ?

(F. Villon)
Préposition + où : compléments prépositionnels locatifs
D’où venez-vous ?
Par où êtes-vous passés ?
Pollet Samvelian
17
II. Interrogation partielle
Pronom interrogatif : quand


Fonction : complément prépositionnel ou adverbial
Sémantisme : temporel
Quand viendras-tu nous voir ?
Quand passez-vous vos examens ?

Préposition + quand : compléments prépositionnels
temporels
De quand datent ces documents ?
A quand remontent ces événements ?
Pollet Samvelian
18
II. Interrogation partielle
Pronom interrogatif : comment


Fonction : complément prépositionnel ou adverbial
Sémantisme : manière
Comment avez-vous ouvert cette porte ?
Comment va le monde ?
Comment vous expliquer ce qui s’est passé ?
Comment peut-on être Persan ?

Pas d’emploi avec une préposition.
Pollet Samvelian
19
II. Interrogation partielle
Pronom et déterminant interrogatifs : combien



Fonction : complément prépositionnel ou adverbial
Sémantisme : mesure, quantité
Fonctionne à la fois comme pronom et comme
déterminant interrogatif. Dans ce dernier cas, il remplace
le déterminant quantifieur :
Combien de temps faudra-t-il attendre ?
Combien de soldats avez-vous vus dans dans la ville ?
Combien a-t-il de livres?
Combien êtes-vous?
Combien ça coûte?
Depuis combien de jours, êtes-vous ici?
Pollet Samvelian
20
II. Interrogation partielle
Pronom et déterminant interrogatifs : lequel





Lequel ne différencie pas l’animé et l’inanimé.
Il demande d’identifier un individu dans une classe de
référence.
Employé comme un pronom interrogatif ou comme un
déterminant.
Employé seul, anaphorique ou déictique :
Regardez ces sacs, lequel vous appartient ?
Voici des gâteaux, lequel voulez-vous ?
Employé comme un déterminant :
Lequel de ces films voulez-vous voir ?
Pollet Samvelian
21
II. Interrogation partielle
Déterminant interrogatif : quel

Quel est employé seulement comme un déterminant
interrogatif :
Quel film avez-vous vu hier soir ?
De quel livre parlez-vous ?
A quelle heure pensez-vous être là ?
Dans quel tiroir avez-vous rangé les serviettes ?
Pollet Samvelian
22
III. La position des pronoms interrogatifs
1. Registre soutenu

Mot interrogatif toujours en tête de phrase.
1.1.Sujet clitique : inversion obligatoire
Qu’as-tu fait de ta jeunesse ?
Que reste-t-il de nos amours ?
Qui suis-je ? Où vais-je ?
Que serais-je sans toi ?
A qui parles-tu ?
Quand viendras-tu ?
Dans quel monde vivons-nous ?
Pollet Samvelian
23
III. La position des pronoms interrogatifs
1. Registre soutenu
1.2. Sujet non clitique, deux possibilités :
1.2.1. Inversion simple du sujet
Qu’espèrent les gens d’un tel gouvernement ?
Qui sont ces hommes réunis dans le hall ?
Que deviennent nos étudiants après leurs études ?
A quoi rêvent les jeunes filles ?
Pour qui sonne le glas ?
Où sont les neiges d’antan ?
Comment s’habillera Marie à cette occasion ?
Pollet Samvelian
24
III. La position des pronoms interrogatifs
1. Registre soutenu

1.2.2. Le sujet non clitique en position préverbale, reprise
par un clitique en position postverbale.
Qui Marie regarde-t-elle ?
A quel roman le prix Goncourt a-t-il été attribué ?
Où Baptiste a-t-il rencontré Garance ?
Combien de fois le train sifflera-t-il ?
Pollet Samvelian
25
III. La position des pronoms interrogatifs
2. Registre familier ou standard
Deux possibilités
2.1. Mot interrogatif dans la position canonique de l’élément
qu’il remplace.
Elle aime qui ?
Tu cherches quoi exactement ?
Mais elle va où comme ça ?
Il coûte combien, ce livre ?
Tu veux lequel, toi ?
Je suis censé donner ce livre à qui ?

Pollet Samvelian
26
III. La position des pronoms interrogatifs
2. Registre familier ou standard
2.2. Mot interrogatif en tête, sans inversion :
Qui tu cherches dans cette pièce ?
A qui tu veux donner ce livre ?
Où tu passeras la nuit ?
Comment tu penses le convaincre ?
Combien de fois je dois répéter les mêmes choses ?

Impossible avec que.
Pollet Samvelian
27
IV. Interrogatives partielles avec les
formes « composées »

Qui est-ce qui, qui est-ce que, qu’est-ce qui, qu’est-ce que
servent à interroger le sujet et les compléments d’objet.

Le premier élément QU- : pronom interrogatif
Le second élément QU- : pronom relatif





Qui est-ce qui  humain et sujet
Qui est-ce que  humain et objet
Qu’est-ce qui  inanimé, sujet
Qu’est-ce que  inanimé, objet
Pollet Samvelian
28
IV. Interrogatives partielles avec les
formes « composées »







Pour interroger les autres compléments, on place le
pronom interrogatif en tête et on le fait suivre
invariablement de est-ce que :
Quand est-ce que
Où est-ce que
Comment est-ce que
Combien est-ce que
Etc.
Question : ces formes considérées comme inanalysables
par les grammaires, sont-elles analysables ?
Pollet Samvelian
29
V. Phrases interrogatives à l’infinitif

Les phrases infinitives étant nécessairement sans sujet,
tous les constituants peuvent être interrogés sauf le sujet.
Que faire ?
Où aller ?
A qui parler ?
Pourquoi attendre ?
Pollet Samvelian
30
VI. Représentation syntaxique des
interrogatives partielles

L’analyse syntaxique des interrogatives totales avec
inversion simple ou complexe dans le schéma X-barre
nécessite l’introduction de nouveaux concepts théoriques.
Nous l’écartons donc pour le moment.

De même, pour les interrogatives partielles, nous
analyserons les cas sans inversion.

Avec le pronom interrogatif dans la position canonique
d’un complément, la même analyse qu’une phrase
assertive.
Pollet Samvelian
31
VI. Représentation syntaxique des
interrogatives partielles

Le pronom interrogatif en tête de phrase : recours au
mouvement et coïndexation entre le pronom interrogatif et
sa trace.

Le pronom interrogatif doit se déplacer dans le constituant
C’’.

Question : vers quelle position se déplace-il ? Occupe-t-il
la position C ou la position du Spécifieur?
Pollet Samvelian
32
VI. Représentation syntaxique des
interrogatives partielles

Les deux possibilités :
1. Le pronom interrogatif se trouve dans la position du
complémenteur :
C’’
Spec
C’
C
P
qui
tu as vu
Pollet Samvelian
33
VI. Représentation syntaxique des
interrogatives partielles

1. Le pronom interrogatif se trouve dans la position du Spécifieur :
C’’
Spec
qui
C’
C
P
Ø
tu as vu
Laquelle de ces deux analyses est plus appropriée ?
Pollet Samvelian
34
VI. L’analyse des interrogatives partielles :
Certaines données du français populaire


Les données suivantes du français populaire peuvent nous
aider à trancher :
Et tes yeux, Léon, comment qu’ils vont à présent ?
(Céline, Voyage au bout de la nuit)
Alors, pourquoi que tu veux l’être, institutrice ?
(Queneau, Zazie dans le métro)
Qui qu’t’as vu ?
De quoi qu’il cause ?
Le pronom interrogatif peut être suivi de que.
Pollet Samvelian
35
VI. Représentation syntaxique des
interrogatives partielles


Il faut une position disponible pour que : c’est la position du
Complémenteur.
Le pronom interrogatif se trouvera donc dans la position de
Spécifieur.
C’’
C’
Spec
C
comment
qu’
P
ils vont tes yeux
Pollet Samvelian
36
VII. Les conséquences de l’analyse proposée
pour les phrases indépendantes

L’analyse que nous avons esquissée pour les
interrogatives partielles ressemble à celle proposée pour
les complétives : la phrase est le complément d’un
Complémenteur.

Or, les interrogatives partielles sont des phrases
indépendantes (i.e. non subordonnées).

Cette analyse entraîne une conséquence non triviale : les
phrases indépendantes et les phrases subordonnées
reçoivent une analyse identique.
Pollet Samvelian
37
VII. Les conséquences de l’analyse proposée
pour les interrogatives indépendantes

Si les interrogatives partielles sont analysées comme les
complétives, il n’y a a priori aucune raison pour que les
phrases assertives échappent à cette analyse, à ceci près
que la position Complémenteur serait vide dans une
phrase assertive.

Cette analyse représente certes un intérêt théorique
important : toutes les phrases, indépendantes ou
subordonnées reçoivent une analyse unifiée.

Question : dans quelle mesure est-elle linguistiquement
justifiée ?
Pollet Samvelian
38
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

On rencontre tout de suite un problème : il n’existe pas de
Complémenteur (conjonction) réalisé dans une phrase
assertive indépendante.

Mais, un examen plus attentif de de la fonction de que
dans les complétives et dans certaines phrases
indépendantes nous montrera que ce problème peut être
résolu.

Le rôle fonctionnel de que, lorsqu’il introduit une
complétive complément, est de marquer la dépendance du
verbe conjugué de la subordonnée par rapport au verbe de
la principale.
39
Pollet Samvelian
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

Mais on observe aussi des phrases telles que :
Qu’il vienne !
Que la bête meure !
Que Dieu vous le rende !

Or, ces phrases ne peuvent pas être analysées comme des
compléments d’une unité lexicale, autrement dit comme
des complétives.

Quelle est alors la fonction de que dans ces phrases ?
Pollet Samvelian
40
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

On constate que ces phrases ne sont pas assertives.

Même si ce ne sont pas des subordonnées, d’après Claude
Muller, on peut y voir « une construction dépendante
d’un autre type, non du point de vue de l’analyse
syntagmatique, mais du point de vue énonciatif […] ».
Claude Muller, La Subordination en français
Pollet Samvelian
41
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

«Il s’agit de présenter des énoncés indépendants comme
intégrés dans une relation plus vaste, dépendance
sémantique par rapport à des notions comme l’ordre,
l’hypothèse ou la simple évocation, s’intégrant dans un
discours plus large. »
Claude Muller, La Subordination en français

Les verbes de ces phrases sont au subjonctif. Or, le
subjonctif, en français moderne, est un signe de la nonassertion du verbe en tant qu’entité autonome.
Pollet Samvelian
42
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

On constate que cette suspension de l’assertion
s’accompagne nécessairement de l’apparition de la
conjonction que en tête de phrase.

Cette propriété distingue le français moderne du français
classique, où la présence de que n’était pas indispensable,
le subjonctif à lui seul étant susceptible d’indiquer cette
suspension.
Pollet Samvelian
43
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

Aujourd’hui, cette possibilité ne subsiste que dans des
locutions idiomatiques ou des empois archaïsants :
Sauve qui peut
Qui m’aime me suive
Vienne le temps, sonne l’heure (G. Apollinaire)

En français d’aujourd’hui, ces phrases donneraient :
Que se sauve celui qui le peut
Que celui qui m’aime me suive
Que vienne le temps, …
Pollet Samvelian
44
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

a.
b.
c.
d.
On peut tirer les conclusions suivantes :
La position Complémenteur est disponible en position
initiale de toute phrase.
Elle reste vide lorsque la phrase qu’elle introduit est
assertive et syntaxiquement indépendante (non
subordonnée).
Elle est remplie par une conjonction lorsqu’il y a une
suspension de l’assertion.
Cette suspension de l’assertion peut s’accompagner d’une
dépendance syntaxique (i.e. complétive complément) ou
non.
Pollet Samvelian
45
VIII. L’analyse unifiée de toutes les phrases
comme des C’’

« Le choix de la conjonction que est motivé, soit par la
nécessité de construire un verbe tensé comme actant au
niveau syntagmatique, soit par la nécessité de priver le
verbe tensé de son rôle de support d’une modalité
énonciative d’assertion ou d’interrogation ».
(C. Muller, La subordination en français)

L’analyse unifiée de toutes les phrases comme des C’’
s’appuie sur des données empiriques et semble par
conséquent justifiée.
Pollet Samvelian
46
IX. Interrogatives indirectes

Exemples :
Je me demande où il est.
Peut-on jamais savoir par où commence et quand finit
l’indifférence ? (Gainsbourg)

Sur le plan syntaxique, il s’agit de la transposition de
phrases interrogatives, totales ou partielles, en
compléments de verbe.
Pollet Samvelian
47
IX. Interrogatives indirectes

La caractérisation de ses propositions subordonnées
comme interrogatives indirectes est assez trompeuse, car
elle laisse croire qu’il s’agit soit d’un acte indirect
d’interrogation, soit d’une forme de discours indirect
rapportant en substance le contenu d’une question.

Or, la liste des verbes ayant la propriété de se construire
avec une interrogative indirecte est assez longue (environ
80 verbes).

Certains de ces verbes sont dépourvus de tout sens
interrogatif : constater, prouver, …
Pollet Samvelian
48
IX. Interrogatives indirectes

Alors qu’à l’inverse, des verbes tels que questionner ou
interroger, clairement interrogatifs, ne peuvent pas se
construire avec une interrogative indirecte.

Sur le plan sémantique, les « interrogatives indirectes »
réfèrent à un savoir en suspens que le sujet de l’énoncé
ignore ou recherche. Il ne s’agit donc pas
systématiquement d’une interprétation interrogative :
J’ignore si Marie est là
Je sait où se cache Marie
Pollet Samvelian
49
IX. Interrogatives indirectes

La plupart des verbes qui se construisent avec une
« interrogative indirecte » admettent aussi une complétive
introduite pas que : découvrir, expliquer, confirmer,
montrer, oublier, se souvenir, …

Généralement, un sens assertif et positif favorise la
construction avec que.

Un sens négatif, interrogatif ou injonctif rend probable
l’interrogative indirecte.
Pollet Samvelian
50
IX. Interrogatives indirectes

Comparez :
1.
a. Je sais que Marie est là
b. Je ne sais pas si Marie est là
c. Je saurai si Marie est là
2.
a. J’ai découvert que Marie était partie
b. Je découvrirai un jour si Marie est partie
Pollet Samvelian
51
IX. a. Interrogatives indirectes totales

Les interrogatives indirectes totales sont toujours
introduites par si.

Il n’y a ni inversion, ni possibilité d’utiliser est-ce que.

Leur représentation syntaxique est identique à celle des
complétives introduites par que, à ceci près que la
position complémenteur est occupée par si et non par que.
Pollet Samvelian
52
IX. b. Interrogatives indirectes partielles

L’interrogation sur le sujet, le complément d’objet et
l’attribut animés se fait avec le pronom interrogatif qui,
comme dans les interrogatives indépendantes :
Je me demande qui se cache derrière le rideau
J’aimerais savoir qui tu as rencontré hier
Je découvrirai un jour qui tu es réellement

Quand l’interrogation porte sur l’attribut, l’inversion du
sujet non clitique est obligatoire :
Je découvrirai un jour qui est réellement Marie
Pollet Samvelian
53
IX. b. Interrogatives indirectes partielles

L’interrogation sur le sujet, le complément d’objet ou
l’attribut non-animés ne se fait pas de la même façon : au
lieu d’utiliser un pronom relatif, on a recours au pronom
démonstratif ce suivi des relatifs qui (pour le sujet) et que
(pour le complément d’objet et l’attribut) :
Je me demande ce qui a pu l’empêcher de venir
Je ne sais pas ce qui le dérange
Je me demande ce que Marie fait en ce moment
Je ignore ce qu’il cherche.
Pollet Samvelian
54
IX. b. Interrogatives indirectes partielles

Les interrogatives indirectes sur les compléments
prépositionnels (sélectionnés ou non) sont introduites par
les mêmes mots interrogatifs que les interrogatives
indépendantes :
Je me demande où il va
J’ignore quand elle sera là
Je ne sais plus comment ouvrir cette porte
J’ai oublié à qui il fallait livrer ce colis
Pollet Samvelian
55
X. Interrogatives indirectes partielles
Registre familier

Dans l’usage soutenu ou standard, l’interrogation
indirecte exclut certaines structures de l’interrogation
directe : les formes « complexes » qui est-ce que, … sont
ainsi exclues pour introduire une interrogative indirecte.

Or, le registre familier (et populaire) autorise ces
tournures :
Dis-moi qu’est-ce que tu fais
Explique-moi pourquoi est-ce que tu fais la tête
Je ne sais pas où est-ce qu’elle est, Marie
Pollet Samvelian
56
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