Les banques et la gauche, une présentation par

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Les banques et la gauche
Xavier Dupret
Gresea
Décembre 2011
Le Gresea?
• Groupe de recherche pour une stratégie économique
alternative
• Centre de recherche et lieu de rencontre entre
universitaires, syndicalistes et associations
citoyennes
• Thèmes de recherche: Économie internationale et
économie du développement (angle progressiste)
• www.gresea.be + mail : [email protected]
Objectifs
• O1 : Retracer un certain nombre
d’évolutions du secteur bancaire
• O2 : Repérer une série d’enjeux et
d’alternatives pour la gauche
Evolutions (1)
• Libéralisation financière
• Modification en profondeur du secteur
• Crise remet en cause la validité de cette
stratégie
• La Commission européenne a encadré et
implémenté ce processus
Evolutions (2)
• L’aspect quantitatif de la libéralisation va
principalement consister, d'une part, en un
démantèlement des conditions d'encadrement
du crédit octroyé par les banques et, d'autre
part, en une élimination, plus ou moins complète
et rapide selon les pays, du contrôle des
changes. Ce dernier consiste en un ensemble
de mesures prises par un gouvernement pour
réglementer l'achat et la vente de monnaies
étrangères par ses ressortissants.
Evolutions (3)
• Pour ce qui est du démantèlement du
contrôle des prix en matière de
produits financiers, les commissions
et les marges, depuis la fin des
années 80, sont complètement
libéralisées. Et cela va entraîner deux
types de conséquences.
Evolutions (4)
Pour ce qui est du démantèlement du
contrôle des prix en matière de produits
financiers, les commissions et les marges,
depuis la fin des années 80, sont
complètement libéralisées.
Tout cela va entraîner deux types de
conséquences.
Evolutions (5)
• Primo, la suppression de l'encadrement du
crédit constitue un fait central pour saisir
cette évolution car, en définitive,
« l'innovation financière », depuis les
années 80, a poursuivi comme principal
objectif le développement et la facilitation
du crédit. C'est depuis cette époque que
l'on signale le recours de plus en plus
systématique des institutions financières à
l'effet de levier.
Evolutions (6)
L'effet levier (leverage) consiste à avoir recours à
l'endettement pour augmenter la rentabilité des capitaux
propres. Pour que l'effet levier marche, il faut que le taux
de rentabilité du projet soit supérieur au taux d'intérêt à
verser pour la somme empruntée. Les effets leviers sont
devenus de plus en plus importants avec le temps. Ainsi,
au printemps 2008, les banques d'investissement de
Wall Street avaient des effets levier qui oscillaient entre
25 et 45. Cela signifie que pour un dollar de fonds
propres, elles avaient emprunté entre 25 et 45 dollars.
Par exemple, Merrill Lynch avait un effet levier de 40.
Une institution qui a un effet de levier de 40 à 1 voit ses
fonds propres effacés avec une baisse de 2,5% de la
valeur des actifs acquis.
Evolutions (7)
• Séparation des « métiers » bancaires
• On distingue les banques de dépôt
des banques d'investissement.
• Banque de dépôt : reçoivent des dépôts,
accordent des prêts et sont traditionnellement
séparées entre la banque de détail (en
anglais, retail banking) destinée aux particuliers,
aux professionnels et aux petites et moyennes
entreprises (PME), ou la banque d'affaires (en
anglais, wholesale banking) destinées aux
moyennes et grandes entreprises.
Evolutions (8)
• La banque d'investissement (en
anglais, investment banking) est active sur
les marchés financiers, se chargeant des
opérations financières comme les
émissions d'emprunts obligataires, les
souscriptions d'actions, l'introductions en
bourse, les fusions-acquisitions, etc.
Evolutions (9)
• Secundo, pour augmenter leurs marges, les
institutions financières ont mis en œuvre des
stratégies de concentration dans le secteur. Ces
dernières ont permis d'accroître les parts de
marché des nouvelles mégabanques apparues
au terme de ce processus.
• La libéralisation va également donner lieu à un
décloisonnement des activités. Les législateurs
des différents pays occidentaux vont entériner
l'élimination des barrières entre les activités
d’investissement et de dépôt des banques.
Evolutions (10)
L'élimination de la réglementation Glass-Steagall ne fut
acquise qu'en 1999 sous la présidence de Bill Clinton. En
France, l'adoption d'une réglementation devra atteindre les
gouvernements progressistes (d'union nationale incluant les
communistes) au lendemain de la deuxième guerre mondiale,
alors qu'en Belgique, la séparation des métiers bancaires était
intégrée dans la législation nationale dès 1935.
La séparation en Europe était, il est vrai, moins rigoureuse
qu'outre-Atlantique. Très rapidement, les banques
européennes vont de nouveau mêler les deux grands
registres d'activité. Elles le feront toutefois en donnant la
priorité à des missions de recueil de l'épargne du public et
d'octroi de crédits aux particuliers et aux entreprises. C'en
sera fini de cette prédominance au milieu des années 80.
Enjeux (1)
•
La vague des fusions-acquisitions dans le secteur va donner lieu à la
naissance de conglomérats dans le secteur bancaire. Un conglomérat
financier désigne un regroupement de "sociétés sous un contrôle commun
dont les activités consistent dans la prestation de services significatifs dans
au moins deux secteurs financiers distincts (la banque, la gestion d'actifs et
l'assurance)"[1]. C'est ce que l'on appelle la "banque universelle" en
Europe. La Directive sur les conglomérats financiers de l'Union européenne
donne, par ailleurs, une définition mettant en avant la dimension de
transnationalité. En effet, en droit européen, les grands groupes financiers,
ce sont "des grands groupes actifs dans différents secteurs, souvent de
manière transfrontalière"[2].
•
•
[1] Joint forum on Financial Conglomerates, Bank for International
Settlements, Bâle, 2001, p.5.
[2] Directive 2002/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 16
décembre 2002 relative à la surveillance complémentaire des
établissements de crédit, des entreprises d'assurance et des entreprises
d'investissement appartenant à un conglomérat financier.
Enjeux (2)
• En Europe, la libéralisation financière a été impulsée de manière
décisive par l'Acte unique européen de 1986. Ce dernier
présente une série articulée de réformes qui visent
progressivement à faire disparaître radicalement de l'espace
européen les entraves à la circulation des personnes, des
marchandises et des capitaux.
• La libéralisation des mouvements de capitaux va concerner les
transactions en capital, les opérations à court terme, les
opérations sur titres en autorisant l'achat de titres étrangers par
des résidents ainsi que l'entrée sur les marchés des capitaux des
Etats membres de titres étrangers. Donc, une banque belge
située en Belgique peut, grâce à la libéralisation financière,
acheter de la dette souveraine d'un autre pays européen. La
période nécessaire à l'application de l'Acte Unique va s'étendre
de 1987 (date d'entrée en vigueur de l'Acte) à 1992.
Enjeux (3)
• Revenir sur les « acquis » (pour les
banquiers) de la libéralisation financière
constituera un des enjeux majeurs pour la
gauche au cours des prochaines années.
• La séparation des métiers bancaires est
centrale d’un point de vue économique.
Enjeux (4)
En l’absence de réglementation bancaire, la politique de l’argent
bon marché de la Fed n’a jamais eu pour but de remettre l’économie
"réelle" d’aplomb. Durant la grande dépression des années 30, le
taux directeur de la Fed se situait en-dessous de 1%. Avec un taux
si bas, beaucoup d’entreprises auraient dû contracter des prêts.
Pourtant, le volume de ces derniers a diminué. Les entreprises
éprouvaient des difficultés à rester viables, faute de demande. Par
conséquent, les banques rechignaient à leur prêter de l’argent.
Une politique de relance économique suppose que l’activité des
entreprises soit stimulée par des commandes en provenance des
pouvoirs publics. Et ces derniers se rembourseront, à terme, en
encaissant les recettes fiscales provenant du surcroît d’activité.
La politique de relance économique suppose que le robinet du crédit
soit ouvert. Explication du Glass Steagal Act.
Enjeux (5)
Pour contrer la frilosité des banques, l’administration
Roosevelt n’a pas hésité, en 1933, à séparer les
banques de dépôt des banques d’investissement. Battue
en brèche par la libéralisation financière, cette division
du travail bancaire a, aujourd’hui, complètement disparu.
Sa réhabilitation n’a jamais fait partie des mesures
envisagées par la Fed lorsque la crise de 2007-2008 a
éclaté. Grâce à la politique des taux d’intérêt bas, les
banques ont donc couvert les pertes de leur secteur
"investissement" en réalisant des placements spéculatifs
dans d’autres secteurs (matières premières et produits
alimentaires) que l’immobilier, jusque là privilégié.
Enjeux (6)
• Taille des banques à réduire.
• Ainsi, en va-t-il des banques dites "too big to fail dites systémiques :
il s'agit de banques qui représentent un intérêt crucial pour la
distribution du crédit et la circulation du profit. Si elles s'effondrent, le
financement de l'économie s'en ressentira inévitablement. La
doctrine du "too big to fail" ne sera vraisemblablement pas sans
poser problèmes à moyen terme car les banques ont pris trop de
poids par rapport aux PIB des pays développés. C’est un des
enseignements que retire l’économiste Henry Kaufman de la gestion
de la crise par les pouvoirs publics américains.
• En 1990, les dix premières institutions financières US possédaient
10% des actifs financiers de la nation. En 2008, elles en contrôlaient
plus de la moitié. Dans les années 90, aucune des 25 banques
mondiales leaders n’affichait un total bilantaire dépassant le PIB de
son pays d’origine.
Enjeux (7)
• La circulation, aujourd’hui planétaire, des
capitaux pose question.
• Sauvetage : 5 milliards d’euros pour l’Etat belge.
• Wim Vermeir (Dexia Asset Management) en avril
2010 résumait la philosophie du groupe Dexia.
L’achat d’obligations des pays émergents serait
préférée à celle des pays occidentaux pour
cause de différence de return.
Enjeux (8)
• Banque publique prend tout son sens.
• Dans les pays qui ont un stock, tous
secteurs confondus, d’actifs (assets)
supérieur aux stock de dettes (liabilities),
la banque publique peut mobiliser la
liquidité intérieure au service de la dette
publique.
Enjeux (9)
• Cette idée fonctionne relativement bien
pour un pays comme la Belgique.
• Impraticable, par exemple, en Espagne.
• Profils de solvabilité des deux pays
(Eurostat, septembre 2011)
Valeur
financière
nette
des sociétés
non financières
en Belgique
et en Espagne Belgique
(% du PIB)
Espagne
2009
2010
-93,17
-102,89
-143,16
-134,67
Valeur
financière
nette des
sociétés
financières
(Belgique/
Espagne en
% du PIB)
2009
2010
Belgique
-1,91
-2,29
Espagne
10,48
13,14
Valeur
financière
nette
des
administrations
publiques
en Belgique
et en Espagne
% du PIB
2009
2010
Belgique
-80,06
-80,63
Espagne
-34,89
-40,54
Valeur
financière
nette
des
ménages
2009
2010
Belgique
200,56
204,56
Espagne
78,11
77,12
Enjeux (11)
• On voit clairement que la position financière des
ménages belges est de loin supérieure à celle de leurs
homologues espagnols. Elle s'est même améliorée en
un an alors que la situation patrimoniale des ménages
espagnols s'est dégradée.
• En allant plus loin dans l'exploitation de ces données, on
peut même établir le besoin de financement d'un pays. Il
suffit de reprendre la valeur financière nette des
ménages et de la comparer avec la position des autres
secteurs. Avec une valeur financière nette de ses
ménages de l'ordre de 78,11% du PIB, l'Espagne doit
financer un endettement net des pouvoirs publics de
l'ordre de 40,54% de son PIB et de 134,67% du PIB pour
son secteur non-financier.
Enjeux (12)
La situation de la Belgique est complètement
différente. La valeur financière nette des
ménages belges est de 200,56% du PIB du
pays. Et cette somme doit financer un
endettement net, en part du PIB, du secteur
privé non financier de 102,89%, du secteur privé
financier de 2,29% et une dette publique nette
de 80%. La chose est, d'un strict point de vue
arithmétique, parfaitement possible.
Enjeux (13)
• La banque publique mobilisant de la
liquidité locale pour acheter de la dette
publique, cela ne fonctionnera tout
simplement pas dans le cas de l’Espagne.
• Reparler de la fonction de banque
centrale.
Enjeux (14)
• Une certaine monétisation de la dette
publique est incontournable en Europe
aujourd’hui.
• Rôle de la BCE. Financement de la dette
et des entités financières défaillantes au
taux de base de 1,25%.
Enjeux (15)
Près de 90% de l’argent actuellement en
circulation est de l’argent qui a été émis –
contre reconnaissances de dettes prenant
diverses formes – par les banques
commerciales. Le retour à une
réglementation plus sévère du crédit doit
faire place à une plus grande part de
création monétaire par la BCE
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