Chapitre 8 – Une politique de rééquilibrage macroéconomique (1976-1981) • Jacques Chirac démissionne du poste de Premier ministre en août 1976. • Raymond Barre cumule alors les fonctions de : – Premier ministre, jusqu’en mai 1981 – et ministre de l’Économie et des Finances, jusqu’en avril 1978. • L’objectif de ce changement de gouvernement est de changer de politique économique, afin de sortir la France de la stagflation. • Les deux axes de la politique de rigueur du Professeur (d’économie) R. Barre sont : – la lutte contre l’inflation, qui devient prioritaire – et le maintien des équilibres budgétaire et extérieur. • Les plans Barre, au nombre de 3, vont se succéder entre 1976 et 1981. Section 1 – La lutte contre l’inflation devient prioritaire • La lutte contre l’inflation est l’objectif prioritaire du 1er plan Barre, ou « plan Barre 1 » de 1976-1977. • Elle sera maintenue dans le « plan Barre 2 » de 1977-1978. • Le « plan Barre 3 » de 1978-1980 mettra l’accent sur des objectifs plus structurels. 1.1- Des mesures de gel des prix • Le « plan Barre 1 » ou programme de lutte contre l’inflation rompt provisoirement avec les mesures de libéralisation des prix des années 1975-1976. • Il instaure, en septembre 1976, un gel temporaire des prix jusqu’à la fin de l’année, afin de briser les tensions inflationnistes. • Le 1er janvier 1977, à la fin du blocage des prix, le taux de TVA d’un grand nombre de produits est abaissé de 20 à 17,6 %, afin de prévenir des comportements de rattrapage sur les prix et les salaires. 1.2- Une politique de modération salariale • Qui s’inscrit en rupture avec les politiques menées depuis 1969. • L’objectif est de mettre fin aux effets inflationnistes du passage du secteur public vers le secteur privé des clauses d’indexation des salaires (« clauses de garantie de croissance du pouvoir d’achat ») : – Certains accords salariaux sont dénoncés (ex. EDFGDF…) – La norme de progression des salaires est fixée à 6,5% dans le secteur public – Elle doit s’étendre aux salariés du privé, aux loyers, aux dividendes et aux services. • À moyen terme, l’objectif structurel est : – de restaurer les marges des entreprises en limitant leurs charges, notamment salariales, – afin qu’elles soient incitées : • à réduire leur endettement • et à accroître leurs investissements, dans un contexte de faiblesse de la croissance et des débouchés. Conformément à l’enchaînement vertueux préconisé par le Chancelier allemand Helmut Schmidt : Les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain. 1.3- Une politique monétaire profondément révisée • Jusqu’en 1976, la politique monétaire : – n’était utilisée qu’épisodiquement pour lutter contre l’inflation – était plutôt accommodante – et visait plutôt à accompagner la politique budgétaire, qui constituait la principale composante du policy-mix keynésien des Trente glorieuses. • La rupture intervient en septembre 1976. • Dans une logique monétariste, la politique monétaire se voit assigner : – un objectif final de lutte contre l’inflation, qui doit être atteint grâce à… – un objectif intermédiaire de croissance de la masse monétaire Pol mon restrictive : taux de croissance de la masse monétaire < taux de croissance du PIB en valeur • Les instruments utilisés sont classiques : – Renforcement de l’encadrement du crédit (i.e. contrôle quantitatif) – Retour à une réglementation plus sévère des réserves obligatoires. • Résultats conformes aux prévisions pour la période 1977-1980, sauf en 1979. Section 2 – La création du SME Le Système monétaire européen (SME) succède au serpent. 2.1- La fin du « serpent monétaire européen » • La dégradation des échanges extérieurs va entraîner une profonde modification de la politique de change. • À partir de l’automne 1976, la fixation des taux d’intérêt directeurs par la Banque de France est dictée par la volonté : – de provoquer une appréciation du franc – et de maintenir sa stabilité à moyen terme. • Cette politique vise à la fois : – à limiter les pressions inflationnistes – et à soutenir la compétitivité de l’économie. • Par conséquent, à partir de l’automne 1976, la politique monétaire (dont la politique de change peut être considérée comme une composante) cherche à atteindre : – un objectif interne de lutte contre l’inflation – et un objectif externe de défense du taux de change. • Concernant le SMI, les accords de la Jamaïque (janvier 1976) entérinent le passage d’un système de changes fixes à un système de changes flottants. • Au niveau européen, les divergences en matière de politique conjoncturelle et de politique de change entraînent une très forte instabilité des taux de change. • Dès 1974, la France ne parvient plus à maintenir le franc dans le serpent. Elle en sort définitivement en mars 1976. • Le serpent monétaire se révèle inefficace, car réduit à une zone mark (RFA et Benelux). Ce mécanisme de change se solde donc par un échec. 2.2- Les principes du SME • Le SME, qui devient effectif en mars 1979, repose sur trois principes : 1. L’écu ou ECU (European Currency Unit) – – 2. Les cours pivots qui définissent la parité de chaque devise par rapport à l’écu : – – 3. Créé en juin 1973 Écu = panier de monnaies selon une pondération basée sur le poids macroéco. des économies concernées = moyenne pondérée (par le PIB) des monnaies nationales À partir desquels sont établis les cours pivots bilatéraux entre monnaies du SME (2 à 2) Les marges de fluctuation normales sont de + ou – 2,25 % autour des cours pivots bilatéraux Les mécanismes d’interventions mutuelles qui : – – définissent les modalités des interventions coordonnées des banques centrales sur les marchés des changes en cas de dépassement des marges de fluctuation. Section 3 – La recherche du rétablissement des grands équilibres • Tentative de rétablissement des trois grands équilibres : – Soldes extérieurs – Emploi – Finances publiques 3.1- Le difficile rééquilibrage des soldes extérieurs • Compétitivité favorisée par : – La dévaluation du franc de mars 1976 – Puis par la stabilisation du franc. • 1977-1978 : progression des importations ralentie par la faiblesse de la demande intérieure. • Mais, ↓ des exportations entraînant une dégradation du solde commercial en 1979-1980. • Les résultats du commerce extérieur traduisent un processus de désindustrialisation – importantes restructurations industrielles (sidérurgie, métallurgie, textile…) • qui entraîne : – une perte de compétitivité industrielle – et une montée régulière du chômage. 3.2- L’amplification de la politique de lutte contre le chômage • Cette amplification avait commencé à partir de 1973. • En mars 1977, le seuil du million de chômeurs est franchi. • Trois Pactes nationaux pour l’emploi des jeunes se succèdent de 1977 à 1981 : – Approfondissement des mesures antérieures (ex. stages de préformation) – Exonérations de charges sociales : • pour l’embauche des jeunes de moins de 25 ans • et pour l’apprentissage. – Expérimentation des emplois d’utilité publique (1977) • Plus marginalement, mesures visant à ↓ la population active, notamment étrangère. Principe d’aide au retour, d’abord limité aux chômeurs (1977) puis étendu. • Enfin, mesures visant la population active âgée : – Aides aux cessions volontaires d’activité – Avancement de l’âge de départ en retraite dans certains secteurs. 3.3 – Le difficile redressement des finances publiques et des comptes sociaux • Sur la période 1976-1979, le gouvernement cherche à ↓ la part des dépenses publiques dans le PIB. • Les modalités de financement sont modifiées : – Nette ↓ du financement monétaire des déficits publics – ↑ du recours à l’emprunt – ↑ de la fiscalité des ménages. • Il parvient à une relative stabilisation des dépenses publiques à un niveau inférieur à 50 % du PIB. • Mais, à partir de 1978, la détérioration des comptes sociaux s’accélère : – Indemnisation du chômage multipliée par 2 entre 1974 et 1978 – ↑ des prestations du régime vieillesse, car retraites désormais basées sur le 10 meilleures années de salaire. • D’où hausse nécessaire des cotisations vieillesse et chômage. Conclusion • Politique de rigueur qui se caractérise par : – Une pol. mon. restrictive affectée à l’objectif prioritaire de lutte contre l’inflation – Une volonté d’↑ la compétitivité de l’éco. française, en adéquation avec la recherche de la stabilité des changes au niveau européen (dans le cadre du SME) – Une pol. budgétaire restrictive • A court terme, les résultats de cette politique de rigueur s’avèrent décevants : – diminution de l’inflation et réduction des déficits publics – mais sans relance de la croissance, ni ralentissement de la progression du chômage. • Cela s’explique en partie par le 2nd choc pétrolier de 1979, provoqué par : – l’effondrement de la production iranienne en mars 1979 – puis de celle de l’Irak l’année suivante – et la ↑ du prix du pétrole par les autres pays producteurs. • D’où ralentissement de la croissance et rejet de la politique de rigueur par les français qui est une des raisons de l’arrivée au pouvoir de la gauche en mai 1981.