SURDITÉS GÉNÉTIQUES I Vincent Couloigner ORL Pédiatrique, Hôpitaux Robert Debré et Necker Surdité : épidémiologie Surdité: 1 naissance sur 1000 Surdités génétiques : 50 à 75% Liste de tous les gènes de surdité mises à jour sur le site «hereditary hearing loss home page” (http://dnalabwww.uia.ac.be/dnalab/hhh/) tenu par Guy Van Camp, université d’Anvers, et Richard Smith, Université de l’Iowa Les surdités génétiques sont caractérisées par: – leur mode de transmission – leur caractère isolé ou syndromique Modes de transmission Autosomique dominante Autosomique récessive Liée à l’X Mitochondriale Surdités autosomiques récessives Les deux parents sont normo-entendants, porteurs d’une copie (allèle) anormale du gène ¼ des enfants sourds Diagnostique difficile car souvent, il n’y a souvent qu’une personne atteinte dans la famille Consanguinité fréquente Les surdités isolées de transmission autosomique récessive sont plutôt d’emblée sévères à profondes et peu évolutives Surdités autosomiques dominantes L’un des parents est sourd et porteur d’une copie (allèle) anormale du gène la ½ des enfants sont sourds Diagnostic facile car il existe des sujets sourds sur plusieurs générations Expressivité variable = variations interindividuelles du degré de surdité; signes associés parfois très discrets voir absents dans les surdité syndromiques Surdités autosomiques dominantes Surdités isolées de transmission autosomiques dominantes de profils évolutifs plus variés que ceux des surdités récessives Surdités liées à l’X Gène porté par le chromosome X Garçons: 1 seul X la maladie s’exprime transmission de l’X muté à leurs filles Filles: – En général, l’X muté est compensé par l’autre X (surdité récessive liée à l’X) – Rarement, surdités dominantes liées à l’X (ex: syndrome d’Alport): femmes également atteintes, mais moins sévèrement que les hommes Surdités mitochondriales Mitochondries = éléments situés dans le cytoplasme cellulaire et contenant de l’ADN (ADN mitochondrial): 16569 paires de bases Transmission par la mère (les mitochondries du père restent dans le spermatozoïde au moment de la fécondation) les hommes et les femmes peuvent être sourds En théorie, tous les enfants d’une mère porteuse d’une mutation mitochondriale sont sourds Surdités syndromiques et non syndromiques Syndromiques 30% des surdités génétiques – Plus de 400 syndromes Isolées 70% des surdités génétiques Un seul gène peut être impliqué dans – des surdités autosomiques dominantes ou récessives ex: Cx 26, Cx31, MYO7A – des surdités isolées ou syndromiques ex: Cx26, PDS, MYO7A Principaux gènes impliqués dans des surdités Transports ioniques: – Potassium: KvLQT1/KCNE1, KCNQ4, GJB2 (Cx26), GJB6 (Cx30), GJB3 (Cx31), GJA1 (Cx 43) – Acido-basiques: PDS (SLC26A4), ATPB6 – Sodium: TMPRSS3 (régulateur du canal sodique épithélial ENaC?) Cellules ciliées: – Stéréocils: MYO3A, MYO6, MYO15, MYH9, MYO7A, CDH23, Sans, harmonine, STRC – Jonctions serrées: Claudine-14 – Fusion vésicule – membrane: OTOF (otoferline) Polarité cellulaire, motilité cellulaire: HDIA1 (diaphanous) Matrice extracellulaire: – Membrane tectoriale: collagènes II (2A1), et XI (11A2), COCH, TECTA (-tectorine), OTOA (otoancorine) – Membrane basale: collagène IV (4A3,4A4,4A5) Facteurs transcriptionnels: POU3F4 (oreilles « gusher »), POU4F3, TFCP2L3 Surdités non syndromiques Cas sporadiques ou familiaux Cas le plus fréquent = transmission autosomique récessive, avec des surdités habituellement congénitales Formes dominantes = surdités souvent progressives et d’apparition retardée dans l’enfance ou à l’âge adulte Surdités non syndromiques Nomenclature: – DFNA : autosomique dominante 20 % – DFNB : autosomique récessive 80 % – DFN : lié au chromosome X – Mitochondriale 1% – Numérotation par ordre chronologique de localisation Environ: – > 70 gènes liés à des surdités non syndromiques ont été localisés – 20 gènes ont été identifiés et caractérisés Nomenclature Gène DFNA1 HDIA1 (diaphanous) DFNA2 KCNQ4 DFNA3 Possibles syndromes Cx 31(GJB3) Neuropathie périphérique avec surdité Erythrokeratodermia variabilis sans surdité Cx 26 (GJB2), Cx 30 (GJB6) Kératodermie palmoplantaire syndrome de Vohwinkel KID syndrome DFNA5 DFNA5 (rôle inconnu) DFNA6 et A14 WFS1 DFNA8 et A12 TECTA DFNA9 COCH DFNA10 EYA4 BOR DFNA11 MYO7A (myosine non convent) Usher IB DFNA13 COL11A2 Stickler type 3, Marshall, OSMED DFNA15 POU4F3 DFNA17 MYH9 (myosine convent) DFNA22 MYO6A (myosine non convent) DFNA28 TFCP2L3 (facteur transcriptionnel) DFNA36 TMC1 (rôle inconnu) DFNA39 DSPP (sialoprotéine) Wolfram syndrome (DIDMOAD) syndromes de Fechnter, d’Epstein, d’Alport avec macrothrombocytopénie Dentinogenesis imperfecta Nomenclature Gène Possibles formes syndromiques DFNB1 GJB2 (Cx26) DFNB2 MYO7A DFNB3 MYO15 DFNB4 SLC26A4 DFNB8 et 10 TMPRSS3 DFNB9 OTOF DFNB12 CDH23 DFNB16 STRC (protéine stéréocils) DFNB18 USH1C (assembling protein) DFNB21 TECTA DFNB22 OTOA (otoancorine) DFNB29 CLDN14(Claudine-14) DFNB30 MYO3A (myosine non convent) - GJA1 (Cx 43) Usher IB Pendred Usher ID Usher 1C DFNB1, DFNA3 (gène GJB2, connexine 26) DFNB1, DFNA3 (gène GJB2, connexine 26) Scala Vestibuli Périlymphe K RM Scala media Endolymphe SV K K K PS I TM Ligament spiral K K Limbus spiral Scala tympani Périlymphe • Protéines de « gap junctions »: connexines 26, 30, 31,43 • Canaux permettant l’entrée de K dans les cellules ciliées externes: KCNQ4 DFNB1, DFNA3 (gène GJB2, connexine 26) Au moins 50% des surdités non syndromiques récessives et 30-40% de toutes les surdités génétiques 35delG dans la population européenne et nord-américaine: – 1,5 à 2,5% de sujets porteurs d’une mutation – 70% des mutations de GJB2 167delT chez juifs ashkénazes: 3-4% de sujets porteurs de la mutation Mutations 35delG et 167delT: 50% des surdités génétiques congénitales avec un parent sourd, 10-40% des cas sporadiques en Europe et aux USA DFNB1, DFNA3 (gène GJB2, connexine 26) Toutes les mutations de GJB2 ne sont pas pathologiques Parfois mutations associées Cx 26 / Cx 30 DFNB1, DFNA3 (gène GJB2, connexine 26) Surdité congénitale, peu ou pas progressive, de tous degrés mais le plus souvent profonde, avec courbes audiométriques plates ou descendantes Vestibulométrie et imagerie d’oreille normales Formes syndromiques: atteintes cutanées (KID syndrome (kératose, ichtyose, deafness, …) DFNB1, DFNA3 (gène GJB2, connexine 26) Denoyelle et coll., Lancet 1999;353:1298 Autres connexines associées à des surdités Cx 30 (GJB6): parfois mutations associées Cx26/Cx30; DFNA3 – GJB6 proche de GJB2 Cx 31 (GJB3): – formes récessives et dominantes (DFNA2) – Donne aussi une dermopathie autosomique dominante: erythokeratoderma variabilis Cx 32 (GJB1): syndrome de Charcot Marie Tooth lié à l’X associé à une surdité DFNB4 (gène SLC26A4, pendrine) Gène SLC26A4 (ancienne dénomination = PDS) surdité autosomique récessive isolée (DFNB4) ou syndrome de Pendred (surdité + goitre thyroïdien) Pendrine = échangeur anionique, notamment Cl-/ HCO3 Exprimé dans la cochlée, dans le vestibule et dans le sac endolymphatique DFNB4 (gène SLC26A4, pendrine) Surdité d’emblée profonde ou évoluant par paliers avec possibles améliorations partielles transitoires de l’audition DFNB4 (gène SLC26A4, pendrine) • Campbell (Hum Mutat 2001, 17): mutations du gène PDS (SLC26A4) dans 4/5 familles avec malformation de Mondini et dans Pendred 5/6 des familles avec dilatation de l’aqueduc du vestibule TDM, IRM: malformations d’oreille interne • dilatation de l’aqueduc du vestibule ± Mondini • anomalies parfois unilatérales DFNB4 (gène SLC26A4, pendrine) Devant surdité + malformation d’oreille interne évocatrice, rechercher mutation du gène SLC26A4 Si mutation confirmée: – Bilan thyroïdien (on parle alors de syndrome de Pendred) – En cas de persistance de reliquats auditifs utiles, éviter les traumatismes pouvant entraîner des dégradations auditives: certains sports, barotraumatismes, … DFNB9 (gène OTOF, otoferline) L’otoferline serait impliquée dans le traffic vésiculaire présynaptique des cellules ciliées internes Surdité sévère ou profonde, prélinguale Otoémissions conservées au moins temporairement et PEA abolis: ne plus utiliser le terme de « neuropathie auditive » DFNA2, gène KCNQ4, canal K Scala Vestibuli Périlymphe K Surdité progressive RM (début entre 1 et 30 ans) Scala media Endolymphe SV touchant initialement les K fréquences aiguës K K Acouphènes fréquents PS Gène = KCNQ4 = canal K situé sur la membrane Ligament spiral apicale des cellules ciliées externes I TM K K Limbus spiral Scala tympani Périlymphe • Protéines de « gap junctions »: connexines 26, 30, 31,43 • Canaux permettant l’entrée de K dans les cellules ciliées externes: KCNQ4 DFNA9, gène COCH, cochline Surdité commençant à l’adolescence ou chez l’adulte , touchant initialement les fréquences aiguës et progressant rapidement Dans 25%, tableau évocateur de maladie de Menière (vertiges, plénitude d’oreille et acouphènes) mais courbe audiométrique différente Gène COCH, exprimé en grandes quantités dans le cochlée protéine de la matrice extracellulaire, la cochline Histologie de rochers de patients atteints: dépôts cochléaires acidophiles mucopolysaccharidiques caractéristiques Surdité isolée liée à l’X = DFN3 (POU3F4, facteur transcriptionnel) Gène responsable, POU3F4, code pour un facteur de transcription exprimé durant le développement embryonnaire au niveau de l’oreille interne, du rein, du cerveau et du tube neural Surdité mixte, avec Rinne audiométrique pouvant atteindre 60 dB Vestibulométrie: le plus souvent une hypo ou une aréfléxie Surdité isolée liée à l’X = DFN3 (POU3F4, facteur transcriptionnel) Les femmes conductrices hétérozygotes peuvent présenter une surdité mixte sans malformation cochléaire ni déficit vestibulaire Risque de geyser avec cophose lors d’une intervention chirurgicale sur l’oreille moyenne Risques de méningite vaccins anti HI et anti-Pnc bonne couverture ATB des infections ORL Surdité isolée liée à l’X = DFN3 (POU3F4, facteur transcriptionnel) • Scanner du rocher: conduit auditif interne dilaté, large communication entre le conduit auditif interne et le tour basal de la cochlée • Si une intervention chirurgicale de colmatage d’une FPL est pratiquée, la platine de l’étrier apparaît hypomobile Surdités syndromiques Plusieurs centaines de syndromes (voir Gorlin, 1996) Plus d’une centaine de gènes identifiés Principales surdités syndromiques OREILLES EXT, MOY, INTERNE FISTULE PRÉHÉLICÉENNE KYSTE BRANCHIAL Syndrome branchio-oto-rénal ŒIL Usher PIGMENTATION, ÉCARTEMENT DES CANTHI Syndrome de Waardenburg Récessif Dominant Dominant lié à l’X PIERRE ROBIN MYOPIE, CATARACTE REIN, CATARACTE Syndrome d’Alport Sticklers Principales surdités syndromiques Trois syndromes autosomiques récessifs : Pendred, Usher, Jervell et Lange-Nielsen Nom du syndrome Transmission Gène muté Principaux signes à rechercher chez le sourd ou sa famille Examens clés Rétinite pigmentaire Troubles vestibulaires OPH avec FO; électrorétinogramme systématique si surdité profonde et anomalies vestibulaires (retard à la marche) Scanner des rochers Diagnostic moléculaire de la mutation Scintigraphie thyroïdienne, test au perchlorate ECG USH1C (harmonine b) Usher Pendred Jervell et Lange-Nielsen autos réc MYO VIIA CDH23 PCDH15 USH1G (SANS) USH 2A USH3 autos réc SLC26A4 Malformation d'oreille interne Goître hypo- ou euthyroïdien autos réc KvLQT1 KCNE1 (IsK) Malaises, mort subite Principales surdités syndromiques Deux syndromes dominants à bien connaître: Waardenburg et branchio-oto-rénal Nom du syndrome Waardenburg I Waardenburg II Waardenburg III Waardenburg IV Branchio-oto-rénal Gène muté Principaux signes à rechercher chez le sourd ou sa famille Examens clés autos dom PAX3 Mèche blanche, canitie; yeux vairons ou très bleus; dépigmentation rétinienne; dystopie canthale Imagerie oreille Examen ophtalmologique avec fond d'œil autos dom MITF SLUG idem mais sans dystopie canthale " autos dom PAX3 idem à I ± malformations des extrémités " autos réc EDNRB EDN3 SOX10 Idem à II ± Hirschsprung Malformation d’oreille interne évocatrice " EYA1 Anomalies oreille ext et/ou moy Fistules et kystes branchiaux Malformations rénales Imagerie oreille Echographie rénale, pouvoir de concentration des urines Transmission autos dom Principales surdités syndromiques Nom du syndrome Transmission Gène muté Principaux signes à rechercher chez le sourd ou sa famille Examens clés Alport dom lié à l'X autos réc autos réc COL4A3 COL4A4 COL4A5 Hématurie puis protéinurie insuffisance rénale Atteintes ophtalmologiques Bandelette urinaire COL2A1 COL11A1 COL11A2 Forte myopie Aspect marfanoïde Syndrome de Pierre Robin Anomalies squelettiques Examen ophtalmologique Treacle Atteinte bilatérale asymétrique Oreille ext: microtie, atrésie du CAE Oreille moyenne: aplasie mineure Face: obliquité des fentes palpébrales, colobome de la paupière inférieure, hypoplasie malaire, micrognatie, fente palatine Stickler Franceschetti ou Treacher Collins ou dysostose mandibulofaciale autos dom Autos dom Syndrome de Pendred (Gène SLC26A4, pendrine) Syndrome de Pendred = idem à DFNB4 + goitre thyroïdien Le goitre apparaît habituellement dans la deuxième décennie de vie; une hypothyroïdie s’y associe dans 50% des cas Syndrome de Usher Surdité + rétinite pigmentaire = première cause de surdité + malvoyance (vision tubulaire) Type I = les ¾ des Usher – Surdité congénitale profonde – Aréflexie bilatérale avec retard à ma marche (après 2 ans) – Rétinite pigmentaire: atteinte clinique vers 10 ans avec difficultés de vision dans la pénombre réduction progressive du champ visuel avec vision tubulaire; anomalies FO dès 3-4 ans; anomalies précoces détectables par l’électrorétinogramme: à demander systématiquement devant l’association surdité profonde + atteinte vestibulaire l’implant cochléaire doit être précoce pour obtenir le plus rapidement possible une bonne compréhension sans lecture labiale Syndrome de Usher Type II: surdité moyenne – sévère non progressive, prédominant dans les fréquences aiguës; pas d’atteinte vestibulaire; évolution de la rétinite proche de celle du type I Type III: surdité progressive, signes vestibulaires variables, évolution de la rétinite proche de celle du type I Le diagnostic génétique n’est pas encore instauré en routine diagnostic clinique Désorganisation des stéréocils dans le Usher de type I Complexe harmonine b-cadherine 23-myosine VII, Sans (Ush1D) (Ush1C) (Ush1G) (Ush1B) Boeda et coll., EMBO J 2002; 21: 6689; Weil et coll., Hum Mol Genet 2003; 12: 463 Syndrome de Jervell et Lange-Nielsen EL PL . Gènes KvLQT1 et KCNE1 (IsK) Na+ canal K situé dans la membrane apicale des cellules strie vasculaire • Sécrétion de K au pôle apical des cellules de marginales marginales la de la strie vasculaire: KvLQT1 et KCNE1 (Jervell et LangeNielsen) Surdité sévère ou profonde congénitale K+ KvLQT1/IsK K+ Na+ 2 Cl - K+ Cl- . (D’après Wangemann, 1995 et Ferrary et Sterkers, 1998) ECG: allongement du QT (risque de malaises voire de mort subite) Vetter et coll., Neuron 1996;17:1251 Syndrome de Waardenburg Wardenburg I Wardenburg II Wardenburg III Wardenburg IV PAX3 Dystopie canthale (100%) Racine du nez large (90%); Mèche blanche (30%); Canitie précoce (20%); Yeux vairons (35%) ou bleus «saphir»; Dépigmentation rétinienne; Dépigmentation cutanée MITF SLUG idem à I mais sans dystopie canthale autos dom PAX3 Idem à I + malformations des extrémités autos réc EDNRB EDN3 SOX10 idem à I mais sans dystopie canthale + Hirschsprung autos dom autos dom Mère et fille Syndrome de Waardenburg Surdité variable, uni- (15%) ou bilatérale (20%), légère à profonde, avec ou sans malformation de l’oreille interne Interrogatoire soigneux afin de rechercher dans la famille: mèche blanche, yeux vairons Waardenburg de type IV Apex cochléaire aplati Agénésie des canaux semi-circulaires Syndrome branchio-oto-rénal Surdité avec anomalies: – de l’oreille externe: pavillons mal ourlés, enchondromes, aplasies d’oreille, sténoses des conduits auditifs – de l’oreille moyenne: aplasies mineures = malformation des osselets – de l’oreille interne: malformations cochléo-vestibulaires diverses Fistules branchiales multiples: les plus habituelles = préhélicéennes bilatérales, 2ème fente avec résidus cartilagineux associés évocateurs Malformations rénales de sévérité variable, diagnostiqués par l’échographie Syndrome branchio-oto-rénal Bloc marteau –enclume Microcochlée Pavillons mal ourlés (Geneva foundation for medical education and research) (Photos extraites de la Monographie du CCA Groupe sur la surdité de l’enfant, Edition 2003) Syndrome branchio-oto-rénal En pratique, devant une surdité de perception ou mixte associée à un kyste ou à une fistule branchiale ou à un enchondrome ou à une malformation de l’oreille externe, faire échographie rénale 2 gènes identifiés, dont EYA1 Syndrome d’Alport Collagène IV = présent dans les membranes basales Forme la plus fréquente = dominante lié à l’X (COL4A3) – Hommes: Surdité postlinguale progressive durant la première décennie Hématurie d’abord microscopique durant plusieurs années insuffisance rénale vers 30-50 ans – Femmes: surdité légère + hématurie macroscopique – En pratique: bandelette urinaire systématique dans le bilan des surdités de perception progressives de l’enfant car surdité initialement isolée à répéter au cours de la surveillance Il existe aussi des formes autosomiques récessives (COL4A4, COL4A5) Syndrome d’Alport Atteintes ophtalmologiques possibles: cataracte Mutations de gènes codant pour des sous-unités de la vH+ATPase, notamment la sous-unité B1 (gène ATP6B1) Gène codant pour un transporteur, la vH+-ATPase Surdité de perception et acidose rénale tubulaire distale Imagerie: dilatation de l’aqueduc du vestibule Mutation de la vH+-ATPase Surdités mitochondriales Une surdité peut survenir comme un symptôme supplémentaire dans d’assez nombreuses affections syndromiques causées par des mutations de l’ADNmt. Il est habituel qu’une même mutation de l’ADNmt induise des phénotypes variables entre différentes familles ou différents patients d’une même famille Surdités mitochondriales Tableaux non spécifiques de myopathies, neuropathies, cardiomyopathies, dégénérescences rétiniennes, diabète sucré et surdités Les syndromes les plus fréquemment associés à des surdités sont: – Encéphalopathies mitochondriales – Acidoses lactiques – épisodes « AVC-like » – Syndrome de Kearns-Sayre – Epilepsie myoclonique associée à des « red ragged fibers » – Diabète sucré Surdités mitochondriales 2 mutations peuvent donner des surdités isolées: – 12SrARN Fréquents en Asie et en Espagne A1555G: surdités déclenchées ou non par la prise d’aminosides – tARNSER(UCN): A7445G = deuxième cause de surdité mitochondriale; possible kératodermie palmoplantaire Surdités mitochondriales Maternally inherited diabetes and deafness (MIDD) – Mutation = A3243G – 0,5% à 2,8% des diabètes (Smith et coll., Ophthalmology 1999;106:1101) Bilan d’une surdité de l’enfant en pratique clinique Nom, prénom, date de naissance Surdité niveau uni ou bilat progressive ou non Centre et correspondants Feuille de précautions surdité 100% - AES 1.Antécédents personnels : terme, poids de naissance incident en période néonatale (hypoxie, hyperbilirubinémie, séjour en réa) traumatisme, ototoxiques Infection: materno-fétale (toxoplasmose, rubéole, CMV), HIV, otite(s), méningite…. en faveur d’une atteinte génétique syndromique : yeux, thyroïde, rein, cœur, fente vélo-palatine,… en faveur de surdité mitochondriale: myopathie, neuropathie, cardiomyopathie, dégénérescence rétinienne, diabète sucré et surdités 2. Antécédents familiaux : Surdité avant 40 ans (10% des enfants sourds ont un parent sourd) Autre anomalie héréditaire (syndrome) Arbre généalogique +++ 3.Consanguinité (si oui, probable atteinte autos récessive) 4. Age de la marche (> 2 ans: atteinte vestibulaire) 4. Otoscopie (otite séreuse+++) 5.Anomalies ou malformations diverses à l’examen : dyschromie des yeux, de la peau ou des phanères, fistule ou enchondrome cervical(e), anomalie des pavillons de l’oreille, malformation des extrémités, … Intérêt de la détermination du profil évolutif de la surdité (Age d’apparition, Surdité stable ou évolutive) Diagnostique: – surdité progressive évoluant par paliers, notamment lors de traumatismes minimes: malformation oreille interne (Pendred, « gusher syndrome », …) – surdité progressive débutant dans les fréquences aiguës: sans atteinte vestibulaire: DFNA2 (KCNQ4) avec atteinte vestibulaire: DFNA9 (COCH) Pronostique: stable ou évolutive, pré- ou post-linguale Thérapeutique: précautions afin d’éviter les situations à risque de dégradation auditive dans les surdités progressives sur malformations = éviter les traumatismes Intérêt du bilan auditif Pronostique et prise en charge Diagnostique – Surdité prédominant dans les fréquences graves: DFNA6/14 (WFS1) – Surdité mixte Pression anormale dans les liquides d’oreille interne du fait d’une malformation: Pendred, Gusher+++ Anomalies associées oreille moyenne – oreille interne: BOR Intérêt de la vestibulométrie Dépister une atteinte bilatérale de l’oreille interne en cas de surdité unilatérale Surdité + atteinte vestibulaire: – Usher – COCH (DFNA9) Intérêt de l’imagerie des voies auditives (TDM, IRM+++) Diagnostique: Pendred, Gusher, BOR, Waardenburg – Transmission autosomique récessive, Mondini ou aqueduc vestibulaire élargi: recherche mutation du gène SLC26A4 (PDS; DFNB4) – Transmission dominante liée à l’X, dilatation du canal cochléaire (entre la cochlée et le CAI), dilatation globuleuse de la partie interne du CAI: recherche mutation du gène POU3F4 (DFN3) Pronostique: – évolution de la surdité: élargissement du canal cochléaire ou de l’aqueduc du vestibule dégradation auditive par paliers – possibilités d’implantation cochléaire: cochlée présente et non ossifiée, nerf auditif présent – acquisition du langage: lésions cérébrales, en particulier du cortex auditif Thérapeutique: précautions (éviter les traumatismes) + prévention de la méningite en cas de malformation d’oreille interne; bilan anatomique avant implantation cochléaire Parfois la nature des tests génétiques est guidée par les résultats du bilan clinique et complémentaire Transmission maternelle: atteinte mitochondriale (A1555G, A7445G), surdité liée à l’X Déclenchement ou aggravation de la surdité par: – petit traumatisme: Pendred, Gusher – prise d’aminoglycosides: surdité mitochondriale par mutation de type A1555G Eléments cliniques d’un syndrome (BOR, Waardenburg, Stickler, …) Profil auditif particulier: – Surdité progressive: Pendred, Gusher, KCNQ4, COCH – Surdité mixte (Pendred, Gusher), BOR – Atteinte préférentielle dans les fréquences graves (WFS1) – OEA présents pendant au moins un certain temps (OTOF)… Atteinte vestibulaire (Usher, COCH) Malformation d’oreille interne au scanner (Pendred, Gusher, BOR, Waardenburg) Résultats examens TROC (Thyroïde, Rein, Œil, Cœur) Parfois le bilan clinique et complémentaire n’oriente pas vers des tests génétiques particuliers Principaux tests disponibles en clinique dans les surdités non syndromiques (Robin, Gen Med, 2004; 6: 463): GJB2, GJB6, SLC26A4, WFS1 La recherche de mutations de GJB2+++ est systématique: plus de 50% des surdités autosomiques récessives de l’enfant et 30% des cas sporadiques Dans les prochaines années, il est possible que de nombreux tests puissent être effectués à partir d’un seul prélèvement grâce aux « puces à ADN » («microarray platforms») Intérêt des examens génétiques Diminuer le nombre d’examens complémentaires (mutation GJB2: recherche d’atteintes rénales, cardiaques, ophtalmologiques, thyroïdiennes inutiles) Disculpabiliser certains parents qui pensent être responsables de la surdité de leur enfant (infection insuffisamment traitée durant la grossesse, prise médicamenteuse, traumatisme, …) Intérêt des examens génétiques Conseil génétique = évaluation des risques de récurrence Pronostic de la surdité: – Ex: mutation GJB2: surdités modérées ou sévères habituellement stables, bons résultats de l’implant cochléaire – cependant, la corrélation génotype / phénotype est faible: Différentes mutations d’un même gêne peuvent entraîner des phénotypes très différents Une même mutation peut entraîne des phénotypes différents en fonction – De facteurs environnementaux – D’autres gênes dits modificateurs (« modifying genes ») Intérêt des examens génétiques Même lorsqu’un seul sujet est atteint dans la famille et même si le bilan complémentaire a préalablement permis de déterminer l’étiologie, les tests génétiques sont utiles. En effet, ils permettent de distinguer une mutation de novo d’une transmission autosomique récessive avec risque d’atteintes d’autres membres de la famille Quelques principes L’annonce de la surdité est un traumatisme être très prudent dans ses termes, être à l’écoute, avoir des entretiens longs et répétés, ne pas brusquer les décisions, orienter rapidement vers orthophoniste (explication de ce qu’est la surdité, guidance parentale) et vers psychologue, respecter la volonté des parents (ex: LSF vs implant cochléaire) La mise en route du traitement prime sur les bilans diagnostiques Quelques principes La génétique doit être gérée par un généticien; elle se fait seulement si les parents le souhaitent Parfois, les enquêtes génétiques peuvent être mal perçues: – ressenties comme une démarche d’eugénisme; – sources de conflits de couple et/ou de conflits familiaux (d’un point de vue légal, un patient porteur d’une surdité génétique peut s’opposer à ce que les autres membres de sa famille en soient informés) – prévenir de certains risques liés aux tests: détection de fausse paternité – informer qu’un bilan génétique négatif ne signifie pas que la surdité n’est pas génétique Quelques principes La surdité n’est pas un motif d’avortement pas d’amniocentèse à visée diagnostique Conclusions (1) Dialogue attentif et prudent avec l’enfant sourd et ses parents: – Certaines familles de sourds ne considèrent pas la surdité comme une maladie: se méfier de ne pas employer de termes péjoratifs à propos de la surdité tels que «handicap», … – A l’annonce d’un diagnostic de surdité, les aspects psychologiques et thérapeutiques de la prise en charge doivent primer sur le diagnostic étiologique – Méfiance de nombreuses personnes vis-à-vis de la génétique Place des tests génétiques dans le bilan des surdités de l’enfant non encore parfaitement définie et en évolution permanente Conclusions (2) Les intérêts potentiels de la découverte de l’étiologie d’une surdité sont: – de rassurer les parents – de donner des éléments pronostiques concernant le résultat de la prise en charge de la surdité (ex: si la surdité est associée à une atteinte des fonctions cognitives) – d’évaluer les risques de récurrence = conseil génétique – de modifier la thérapeutique; exemples: Usher: indication d’implantation rapide Surdité se dégradant par paliers dans le cadre d’une malformation d’oreille interne: éviter sports et activités à risque de traumatismes physiques ou pressionnels, … Prise en charge des atteintes associées dans le cadre de surdités syndromiques Le bilan étiologique négatif dans 30% des cas