a. legaut - DESC Réanimation Médicale

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ARGUMENTS EN FAVEUR DE
LA NUTRITION ENTERALE
PRECOCE
DESC Réa Med
Nice, juin 2004
Ariane Légaut
HISTORIQUE
• XIXe siècle : instillations rectales de
nutriments
• 1918 : invention de la sonde gastrique
(Andresen), stimulation motrice par l’AE
• 1943 : bénéfice nutritionnel de l’AE
(Mulholland)
• 1990 : AE ininterrompue chez le brûlé
(Buescher)
• 1992 : bénéfice infectieux (Moore, Kudsk)
Bengmark, J Hepatobiliary Pancreat Surg, 2002
CONTEXTE
• Principes sans preuve scientifique
– Nécessité de mise au repos du tube digestif en phase
aiguë
– Nécessité d’une SNG
– Ileus post-opératoire (inhibition neuronale réflexe,
phénomènes inflammatoires, opioïdes endogènes)
– Protection des sutures
– Tolérance
– Pneumopathie d’inhalation
Bisgaard, Nutrition, 2002
• AP : substitution énergétique et protéique
AE : limitation du retentissement digestif et
immunologique des états de stress
AVANTAGES
• Stimulation motrice et trophique du tube digestif :
– Péristaltisme dès 6-8h post-op, avec fonctions
d’absorption conservées
– Passage du bol alimentaire augmentant le débit
splanchnique, avec fonctions enzymatiques et
immunologiques stimulées
– Rôle majeur du tube digestif dans le système
immunitaire (lamina propria : 80% des cellules
productrices d’Ig)
– Trophicité, perméabilité / translocation Dervenis, Langenbeck’s Arch
Surg, 2003
• Maintien de l’état nutritionnel
• Réduction du coût
• Réduction des complications septiques (PCT)
Brown, JPEN, 2003
INCONVENIENTS
• Intolérance (hypoalbuminémie) :
météorisme abdominal, douleurs,
vomissements, diarrhée
• Sondes : déplacement, obstruction,
inhalation (SNG=SNJ)
• Stomies : obstruction, pneumopéritoine,
nécrose digestive, occlusion
Dervenis, Langenbeck’s Arch Surg, 2003
EN CHIRURGIE
• Réduction des complications septiques :
– 18% (AE) vs 35% (AP)
– Scores de gravité élevés Kudsk, Ann Surg, 1992
– Patients traumatisés Moore, Ann Surg, 1992
• Réduction des déhiscences anastomotiques
Lewis, BMJ, 2001
• Peu de complications propres, peu sévères
– diarrhée, vomissements, inhalation
– déplacement, occlusion
– fistule, abcès
EN CHIRURGIE
• Meilleure réhabilitation post-opératoire :
–
–
–
–
durée de séjour
complications, notamment infectieuses
durée de l’ileus post-opératoire
mortalité
• Apport de nutriments inexistants en AP :
–
–
–
–
Glutamine, arginine, cystéine
Acides gras poly-insaturés (oméga 3)
Fibres
Nucléotides
• Réduction du coût
Petit, AFAR, 1995
référence
niveau de
preuve
population
n
complications
infectieuses
autres complications
mortalité
coût
NE < NP
ns
NE < NP
NE < NP
Lim
Br J Surg 1981
2
néo œsophage
24
McArdle
Surgery 1981
3
réa chir et
traumato
24
Muller
Lancet 1982
2
cancer gastrointestinal
Adams
J Trauma 1986
2
trauma abdo
46
Bower
Arch Surg 1986
2
chirurgie sus
mésocolique
20
Heylen
Clin Nutr 1987
2
gastrectomie
totale
20
Cerra
Surgery 1988
2
hypermétabolisme
post-infectieux
66
SDMV : ns, intolérance
digestive avec NE
59
NE < NP
hyperglycémie et
cytolyse hépatique avec
NP
NE < NP
diarrhée avec NE, 1
occlusion sur
jéjunostomie
Moore
J Trauma 1989
2
Kudsk
Ann Surg 1992
Moore
Ann Surg 1992
2
métaA
trauma abdo
trauma abdo
agression
NE < NP
125
98
230
remarques
NE > NP
ns
NE < NP si
traumato
dénutrition plus
sévère dans le
groupe NE
NE > NP
hyperglycémie avec NP,
diarrhée avec NE
NE < NP
ns
NE < NP
ns
NE < NP
ns
Petit, AFAR, 1995
INDICATIONS EN CHIRURGIE
• AE pré-opératoire : bénéfice modeste,
recommandation limitée aux patients sévèrement
dénutris avant une chirurgie majeure
• AE post-opératoire, indications :
–
–
–
–
après une nutrition pré-opératoire
devant une dénutrition sévère
défaut d’alimentation normale > 1 semaine
complications sévères (hypermétabolisme)
Antoun, Réanimation, 2003
• Tout type de chirurgie
CRITERES DECISIONNELS
Bisgaard, Nutrition, 2002
CHIRURGIE COLO-RECTALE
• Tolérance de la voie orale dès J0 Antoun, Réanimation, 2003
• Programme de réhabilitation rapide :
–
–
–
–
Procédure laparoscopique
Analgésie épidurale par AL
Alimentation précoce
Mobilisation précoce
• Réduction de l’ileus post-opératoire, des
complications cardio-pulmonaires, de la durée de
séjour Basse, Ann Surg, 2000
• Facteurs d’échec (13,5% d’intolérance) :
– Sexe masculin, âge, comorbidités
– Durée opératoire, colectomie totale Di Fronzo, Arch Surg, 1999
EN TRAUMATOLOGIE
• Très nette supériorité de l’AE :
– Complications infectieuses
– Durée de séjour
– Coût
• Pas de recommandation en faveur de
l’immunonutrition
Vermesch, Réanimation, 2003
CHEZ LE TRAUMATISE CRANIEN
• Phase aiguë : limitation des apports glucidiques
• Akinésie gastrique chez 50% des patients, pouvant se
prolonger pendant plusieurs semaines (HTIC, cytokines,
opioïdes)
• Intolérance gastrique :
– Efficacité nutritionnelle : AP>AE
– Mortalité : AP>AE, corrélation avec l’état nutritionnel (maintien
de l’intégrité cellulaire, réorganisation neuronale)
• Fonction intestinale préservée
• AE très précoce : atténuation de l’hypermétabolisme postTC
• Alimentation jéjunale (SNJ, jéjunostomie) :
–
–
–
–
–
Bonne tolérance, sauf malposition
Efficacité nutritionnelle > voie gastrique
Possible dès 36h vs 72h par voie gastrique
Réduction des complications infectieuses
Pas de données sur la survie
De Deyne, AFAR, 1998
CHEZ LE TRAUMATISE
MEDULLAIRE
• Comparaison AE précoce (<72h) vs AE
tardive (>120h)
• Pas de différence significative en terme
d’infections, état nutritionnel, complications
liées à l’alimentation
• Echantillon trop faible (n=17)
Dvorak, Spine, 2004
EN REANIMATION
• Pas de contre-indication en cas de :
– Insuffisance hépatique, varices oesophagiennes
– Insuffisance rénale
– Décubitus ventral Reignier, CCM, 2004
Vermesch, Réanimation, 2003
CHEZ LE BRULE
• Particularités :
– Hypermétabolisme majeur et prolongé
– Cicatrisation
– risque infectieux
• AE : intégrité de la paroi, réduction de la sécrétion
d’hormones cataboliques, amélioration du débit
splanchique, réduction des ulcères de stress, de la mortalité
• Délai < 6h
• Besoins = DE de base * 1.2 (progression sur 72h)
Suralimentation : hyperglycémie, déséquilibre des
échanges gazeux splanchniques
• Nutriments essentiels : arginine, glutamine, acides gras
oméga 3
Andel, Burns, 2003
CHEZ LE BRULE
• Traitement précoce (AE intensive et excision)
– Pas de réduction de la dépense énergétique
– Réduction du catabolisme protéique
– Réduction des complications infectieuses locales et
systémiques
Hart, J Trauma, 2003
• Pas de retentissement sur le pronostic
– Inhalation, infection, diarrhée, durée de séjour,
mortalité
Gottschlich, J Burn Care Rehabil, 2002
DANS LE SEPSIS SEVERE
• AE aggrave le pronostic
• Etude sur l’immunonutrition
– Sur-stimulation de la réponse inflammatoire
– Effets pharmacologiques de certains nutriments
• Faible puissance statistique de l’étude
Bertolini, ICM, 2003
Bertolini, ICM, 2003
DANS LE SEPSIS SEVERE
• Nutrition artificielle non indiquée à la phase aiguë
(instabilité hémodynamique) ou à faible débit
• Avantages de l’AE :
– préservation de la barrière intestinale
– de la sécrétion d’IgA
– amélioration du débit splanchnique
• Inconvénients :
– Favorise les phénomènes d’ischémie-reperfusion
mésentérique
– Gastroparésie fréquente, risque d’inhalation
– Favorise la diarrhée à la phase aiguë
Raynard, Réanimation, 2003
DANS LA PANCREATITE AIGUE
• Physiopathologie :
– 30% de surinfection, translocation probable
– Mise au repos, diminution des sécrétions pancréatiques exocrines
• Mise au repos :
– Voie jéjunale
– Apports lipidiques limités (TCM > TCL)
– Apports protéiques sous forme d’acides aminés, d’oligopeptides
• Avantages :
–
–
–
–
Réduction du syndrome inflammatoire
Meilleur équilibre glucidique
Réduction des complications septiques, de la durée de séjour
Pas d’effet sur la mortalité
• Tolérance satisfaisante dans les 48 premières heures
• Intérêt discuté dans les formes peu sévères
Antoun, Réanimation, 2003
DANS LA PANCREATITE AIGUE
CHIRURGICALE
• AE distale hypocalorique en post-opératoire
• Tolérance excellente, ileus équivalent
• Bénéfices :
– Efficacité nutritionnelle
– Réduction des complications rénales et infectieuses
– Diminution de la mortalité
• Hypothèses :
–
–
–
–
Effet trophique
Réduction du 3e secteur
Réduction des translocations bactériennes
Amélioration de la réponse immunologique locale
Austrums, Nutrition, 2003
Qin, Hepatobiliary Pancreat Dis Int, 2002
Austrums, Nutrition, 2003
EN NEONATOLOGIE
• Chez le prématuré en détresse respiratoire :
– Immaturité du tube digestif (risque d’hyperammoniémie,
d’entérocolite nécrosante)
– Perte protéique majeure
– Classiquement, AP hypocalorique
• AE progressive + apport protéique IV :
–
–
–
–
Délai pour apports complets, durée d’AP complémentaire
Récupération du poids de naissance
Durée de ventilation, d’hospitalisation
Moins de pathologie pulmonaire chronique, canal artériel
persistant
– Pas de différence pour entérocolite nécrosante, hémorragie intraventriculaire
– Moins de complications de cathétérisme ombilical
Ho, Nutrition, 2003
Ho, Nutrition, 2003
EN PRATIQUE
• Contre-indications :
– Coma sans protection des VAS
– Instabilité hémodynamique
– Occlusion digestive mécanique
• Voie d’abord :
– Sonde buccale chez le nourrisson, si trauma
facial, en prévention des sinusites
– Stomie si AE prolongée (mais coût > SNG)
– Position distale (>Treitz) si trouble de la
vidange gastrique, pancréatite
– Même risque d’inhalation pour toutes les voies
EN PRATIQUE
• Complications :
– Régurgitation, RGO, pneumopathie d’inhalation
– Stomie : hémorragie, perforation gastrique, péritonite
(1-2%), occlusion, fistule
– Diarrhée, météorisme, nausées, douleurs
– Obstruction
• Type de préparation :
– Meilleure tolérance des produits semi-élémentaires
– Mais coût supérieur, pas de gain nutritionnel
EN PRATIQUE
• Modalités :
–
–
–
–
–
Débit continu à la pompe
Début précoce (<12h)
Position ½ assise
Asepsie, hygiène des mains
Rinçage après chaque prise médicamenteuse
• Surveillance :
– Contrôle radiologique, fixation
– Résidu gastrique, tolérance, état d’hydratation
– Glycémie, iono (P, Mg, Ca, K, urée, créat), TG, BH
• Traitement des troubles du transit :
– Prokinétiques Camberos, Am Surg, 2002
– Fibres
– Penser à Clostridium difficile
Thuong, Réanimation, juillet 2003
CONCLUSION
• Conférence de consensus SFAR 1994 : nutrition
artificielle péri-opératoire en chirurgie
programmée de l’adulte
« La voie entérale doit être utilisée de première
intention quand l’état anatomique du tube digestif le
permet. Son efficacité ne diffère pas significativement
de celle de la voie parentérale et son coût lui est
inférieur. […]
Les principales complications sont les régurgitations,
avec leur risque d’inhalation, et l’intolérance digestive.
Le risque de complications infectieuses et métaboliques
est nettement inférieur à celui de la voie parentérale. »
CONCLUSION
• AE précoce, c’est bien chez le traumatisé,
chez le patient chirurgical, en urgence
• AE précoce, c’est pas bien chez le patient
septique à la phase aiguë
• Réalisation simple
• Tolérance satisfaisante
• Efficacité nutritionnelle
• Moindre coût
• Amélioration du pronostic
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