Présentation

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De la philosophie du christianisme à la
spiritualité laïque...
Jacques J.Perron, philosophe &
Yvon R. Théroux, religiologue
29 janvier 2012
LENOIR, Frédéric, Le Christ
philosophe, Points/Essais,
Paris, Plon, 2007, 300 p.
Chrétienté contre christianisme
« Opposition de deux points
radicalement antinomiques:: le
message révolutionnaire du
Christ qui cherche à émanciper
l’individu du poids du groupe
et de la tradition en faisant de
sa liberté de choix un absolu, et
la pratique de l’institution
ecclésiale qui en arrive à nier
cette liberté intérieure pour
sauvegarder les intérêts du
groupe et de la tradition. »
Prologue, p. 12.
• Frédéric LENOIR
Quelques auteurs critiquent
cette chrétienté qui basculera à
compter du IVe dans le
christianisme:
1- Dostoïevski, L’épisode du
Grand Inquisiteur dans les Les
Frères Karamazov (1880)
stigmatisera ce passage.
a)S. Freud « considéra ce
roman comme le plus important
qui ait jamais été écrit »
Prologue p. 7)
b)Albert Einstein, The
Collected Papers Volume 9: The
Berlin Years: Correspondence,
January 1919 - April 1920
c) Benoît XVI, Encyclique Spes
Salvi, 2007
• Avant et après Constantin, Théodose,
Clovis et Charlemagne
2) Le philosophe danois
Soren Kierkegaard (18131855)
Il dénonce âprement cette
« spiritualité
révolutionnaire » devenue
la religion officielle de
l’Empire romain…à cause
des « clercs, responsables
de cette escroquerie…et
des millions de fidèles qui
y participent sans
broncher, se rendant ainsi
complices du mensonge. »
3) Jacques Ellul (1912-1994),
juriste, historien, théologien
sociologue, issu lui aussi du
protestantisme
Un ouvrage choc paru en 1984:
La subversion du christianisme
« Le message du Nouveau
Testament était subversif par
rapport à la religion, à la
morale, au pouvoir et à
l’argent. (…) La religion l’a
ramené au rang d’une religion
(avec ses rituels et ses dogmes)
et d’une morale (du devoir et de
la soumission) comme tant d’
autres et elle s’est laissé
corrompre par le pouvoir et
l’argent. » (Prologue, p. 15).
4) Marcel Gauchet, né en
1946 à Poilley (Manche), est
un historien et philosophe
français.
Le message éthique du
Christ et son rôle dans
l’avènement de la
modernité occidentale.
Avant lui, par rapport à
la même thèse:
Alexis de Tocqueville
(1805-1859)
Max Weber (1864-1920)
Friedrich Wilhelm
Nietzsche (1844-1900)
• Christianisme: la « religion de la
sortie de la religion ».
5) Érasme (Desiderius
Erasmus Roterodamus), né
en1469, mort le 12 juillet
1536 à Bâle.
« Il utilise pour la
première fois cette
formule de
« philosophie du
Christ » - qu’il
emprunte aux pères
apologistes
alexandrins du IIe
siècle – dans une
lettre à Paul Volz »
Prologue p..23
• Il est un prêtre catholique évangélique,
écrivain humaniste et théologien
néerlandais considéré comme l’une des
figures majeures de la Renaissance tardive.
(Wikipédia).
Jésus, né à Nazareth en
Galilée quelques années
avant notre ère…
a d’abord été un
« réformateur du judaïsme
et a transmis une éthique
à portée universelle: nonviolence, égale dignité de
tous les êtres humains,
justice et partage, primat
de l’individu sur le groupe
et importance de sa liberté
de choix, séparation du
politique et du religieux,
amour du prochain…et
amour des ennemis. » p.21
Jésus de Rembrandt (1606-1669)
« Jésus n’est ni un
théologien ni un agitateur
politique
mais un prophète
itinérant et indépendant,
qui pratique exorcismes et
guérisons, et prêche amour
et non-violence dans les
petites bourgades (…) Il
est entouré de douze
hommes (vg. 12 tribus
d’Israël), de disciples, de
femmes…toutes et tous
considérés égaux et il
exige un mode de vie
radical « (Lenoir, p. 47).
Jésus, un juif pieux dont
les paroles s’incarnent
dans des gestes.
Jésus s’adresse d’abord à
qui?
Qu’est-ce qu’on lui
reproche?
Pourquoi transgresser le
shabbat?
On le retrouve dans les
synagogues.
Auprès des païens.
Un discours de sagesse
universel.
Différents niveaux de
lecture du message de
Yeshua (Jésus) de
Nazareth
Le premier niveau,
spirituel, « renvoie à la
personne même de Jésus
qui s’est écarté des
institutions religieuses,
qui les a même
combattues, pour délivrer
une nouvelle
compréhension du salut:
être sauvé ne signifie pas
pratiquer, ni sacrifier,
mais être relié au Christ
de manière directe. »
Lenoir, p. 62-63.
Différents niveaux de
lecture du message de
Yeshua (Jésus) de
Nazareth
« Le second, que je
qualifierais de
philosophique…réside
dans un regard porté sur
l’homme avec une
profondeur universelle qui
a posé les bases des grands
principes éthiques. Ceux-ci
inspireront bien plus tard
ce que l’on appellera les
« droits de l’homme . »
Lenoir, p. 63.
(12)
Des disciples de la Voie
aux « chrétiens » Ac 11,26
D’un point de vue
philosophique les «sages »
comme Socrate (-479 à -399)
ou des prophètes d’Israël
avaient des disciples qui les
suivaient. Mais aucune relation
de dépendance n’était tolérée.
Ainsi en fut-il de Yeshua
(Jésus) et de ses disciples ,
qualifiés dans les Actes des
Apôtres d’abord de disciples de
la Voie et vers 70 , à Antioche,
de « chrétiens » (traduisant en
grec Chrestos les équivalents de
messie en hébreu et en araméen.
• L'école d'Athènes - les disciples
de Socrate - fresque de Raphaël
Redonner ses lettres de
créance aux valeurs
universelles
Yeshua n’a pas créé
beaucoup de nouveautés
qui ne soient pas déjà
établies dans sa tradition
juive. C’est sa manière
ultime de les présenter –
affranchies de l’hypocrisie
et du légalisme religieux –
qui donne la portée
universelle aux valeurs
hautement humaines telles
que promues.
La sagesse judéochrétienne inverse des
perceptions durcies,
acquises et inaliénables.
« Jésus renverse non
seulement toutes les
hiérarchies humaines
dominantes fondées sur la
force et la réussite
visible…mais que Dieu
est présent au plus intime
de ce qui est humble,
douloureux, méprisé. Il est
du côté des victimes et
non plus des bourreaux
(Voir Matthieu 9, 13)
Lenoir, p. 68.
La nouvelle signification
de la souffrance et de la
mort (Lenoir p. 68-71)
« Librement acceptées,
quand rien ne peut être
fait pour les éviter sans se
trahir soi-même, elles
grandissent l’homme au
lieu de l’écraser. On
pourrait dire la même
chose de Socrate, dont
l’acceptation sereine de la
mort a bouleversé ses
disciples. » Lenoir, p. 69.
L’éthique du Christ
Fonder une nouvelle manière
du « vivre ensemble » appuyée
sur l’agapè…message éthique
qui débordera le champ
religieux du christianisme
« pour fonder une éthique que
nous considérons aujourd'hui en
Occident comme universelle et
laïque: l’égalité entre tous les
êtres humains, la fraternité, la
liberté de choix, la promotion de
la femme, la justice sociale, la
non-violence, la séparation des
pouvoirs spirituel et temporel. »
Lenoir p. 71
Mohandas Karamchand Gandhi
Un exemple illustratif de
l’influence des Évangiles
« Gandhi a répété de
nombreuses fois que les
Évangiles avaient inspiré
sa lutte non-violente pour
l’indépendance de l’Inde.
Jésus entend en effet faire
comprendre à ses
interlocuteurs que la
violence est un cycle qui
s’alimente en permanence
de la réaction de l’autre. »
Lenoir, p. 84
Le discours éthique
capital: la « règle d ’or ».
« Tout ce que vous voulez que
les hommes fassent pour vous,
faites-le vous-même pour eux»
Matthieu 7,12 et Luc 6,31.
« Ne fais à personne ce que tu
n’aimerais pas subir’.» Tobie
4,15.
Aristote (-384 à -322) Diogène
Laërce, Vie et doctrines, 5, 21.
Sénèque (-4 à +65) Il
recommande aux aristocrates de
distribuer leurs bienfaits au
peuple « de la manière dont ils
voudraient les recevoir » , Des
bienfaits, 2, 1, 1
• Évolution de la notion de « prochain »
Premier Testament: définition restrictive
Philon, philosophe juif de culture grecque,
inclut l’étranger.
Le concept de personne
humaine
Une révolution en soi de
la part de Yeshua: L’être
humain est un sujet
autonome qui a une
valeur inestimable, et
chaque individu est
rétabli dans sa pleine
dignité et dans sa pleine
liberté et cela quel que soit
l’âge, le sexe, le statut
social, la religion…
Lenoir, p. 89-95.
• Prosôpon (masque) de la Grèce antique.
Persona (notion juridique) de la Rome
ancienne dont les esclaves, les étrangers et
les enfants sont exclus. Absence d’une
portée humaniste.
Une nouvelle cohésion
sociale dans la foulée
constantinienne?
En 379, Gratien (359-383)
renonce au titre impérial de
Pontifex Maximus…
récupéré par la hiérarchie
ecclésiale.
En 391, Théodose Ier (347395) établit le christianisme
comme religion d’État de
l’empire…avec toutes les
conséquences funestes.
La faiblesse de l’Empire
occidental renforce l’Église.
• Fin de cet empire en 476 par la déposition à
Ravenne de Romulus Augustulus /460-511 (?)
Divisions internes d’une
Église « impérialisée ».
L’Église orthodoxe d’Orient
fonctionnera selon un mode
particulier et « seule
Constantinople continuera,
pendant un millénaire, de
ferrailler avec Rome, frôlant à
plusieurs reprises la rupture »
(Lenoir, p. 134)…jusqu’au
grand schisme de 1054.
Après, au XVIe siècle, le
protestantisme.
Et il y a toujours eu des sous
groupes religieux (sectes)
jusqu’à maintenant.
Naissance du
monachisme, gardien de
l’esprit évangélique et de
la culture
Retrouver l’esprit du message du
Christ « dans l’expérience
monastique, qu’elle soit
anachorétique (l’ermite solitaire)
ou cénobitique ( en petites
communautés de moines ou de
moniales) - pour toucher
l’expérience humaine et spirituelle
de Jésus, devenu un Maître
intérieur-.
Les premiers monastères de
Constantinople et d’Asie Mineure
voient le jour vers 240, les
premières laures (monastères en
Orient), entre 275 et 280 chez les
moines de Palestine. »
Yvon R. Théroux (dir.), En quête
de l’Absolu, p. 87.
Pour qu’advienne la
grandeur de la christianité
après les misères
Le pré requis à toute identification
d’appartenance religieuse est le
suivant: une femme ou un homme
debout, engagé(e) fermement en ce
monde au cœur de ses débats et
défis.
Un être humain intégral, à part
entière, qui s’engage pour des
causes visant d’abord à humaniser
– facteur civilisateur du
fondement même de toute
philosophie – et à spiritualiser
l’humain pour l’élever à sa plus
haute valeur.
L’identification à Mahâvîra,
Bouddha, Yahvé, Jésus,
Allah…est seconde.
Conclusions:
Des indigné-e-s depuis 2,000 ans
Des voies d’espérance à
actualiser.
Le phénomène de
l’indignation a l’âge de
l’humanité, car la lacune
la plus sévère chez
l’humain est l’absence du
« devoir de se souvenir ».
Or l’humanité ne vit que
d’espoir et d’espérance, et
cet élan précurseur de
toute son activité se
vérifie aussi dans son
expérience spirituelle.
Merci. Yvon R. Théroux
[email protected]
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