Qu’attend un gastroentérologue de la collaboration d’un diététicien à propos des maladies inflammatoires de l’intestin? Dr Arnaud Colard CHC, Liège Réponses! 1. Connaissance des MICIs 2. Connaissance de la physiologie de la digestion 3. Problèmes nutritionnels observés dans les MICIs 4. Prise en charge de la dénutrition 5. Adaptation de l’alimentation du patient au cas par cas Connaissance des MICIs 1. Maladie de Crohn/RCH/Colite indéterminée 2. Etiologies 3. Localisations 4. Comportements de la maladie 5. Pathologies ou syndromes associés 6. Traitements médicaux et chirurgicaux Maladie de Crohn Affection inflammatoire chronique transpariétale de la paroi du système digestif pouvant s’exprimer de la bouche à l’anus. Les localisations les plus fréquentes sont la partie terminale de l’intestin grêle (l’iléon) et le colon. Inflammation discontinue Evolution variable avec tendance a la récidive naturelle après la resection chirurgicale Atteinte ano-périnéale sous forme d’abcès ou de fistules Maladie de Crohn Rectocolite (ulcéro) hémorragique Affection inflammatoire chronique de la muqueuse du colon. L’intestin grêle et le système digestif haut sont épargnés Atteinte superficielle, moins délabrante Inflammation continue Evolution variable sous forme de poussées Rectocolite (ulcéro) hémorragique Colite indéterminée Pas de critère suffisant pour différencier la pathologie entre une maladie de Crohn et un RCH 10 à 30 % des maladies inflammatoires chroniques intestinales Etiologies Multifactorielles: désordre immunitaire + facteurs d’environnement + facteurs génétiques Désordres de l’immunité du tube digestif -augmentation de la production de cytokines proinflammatoires Facteurs d’environnements -tabac, microbiote Facteurs génétiques -gènes de susceptibilités (NOD2/CARD15…) Etiologies: alimentation De nombreux accusés, peu jugés coupables. Mais les habitudes alimentaires interviennent probablement dans la physiopathologie des MICIs Accusés: édulcorants, soda, microparticules contenus dans les aliments industriels, margarine, sucres, graisses, manque d’omega3… Il n’y a pas d’aliment qui déclenche une poussée Connaissance de la physiologie de la digestion 1. Rôles de l’intestin grêle: jéjunum et iléon Connaissance de la physiologie de la digestion Rôles du colon Absorber l’eau et les electrolytes Digestion terminale de la cellulose par la flore intestinale Evacuation des déchets alimentaires Problèmes nutritionnels observés dans les MICIs Malnutrition protéino-énergétique Carences en vitamines et en micronutriments Vitamine D B12 et acide folique: atteinte iléale terminale, attention à l’hyperhomocystéinémie Vitamine C: diminution apports Fer, calcium, zinc Ostéoporose Troubles de la croissance Prise en charge de la dénutrition 1. Causes de la dénutrition 2. Critères de la dénutrition 3. Prise en charge diététique 4. Supplémentation en vitamines et en micronutriments 5. Alimentation artificielle Causes de la dénutrition 20 à 75% des patients présentent une perte de poids 75% des hospis pour MC sont dénutris 1/3 des patients ont un BMI < 20 Diminution de la masse grasse, du contenu minéral total, de la force musculaire Patients âgés plus à risque de sarcopénie Causes de la dénutrition Diminution des apports énergétiques Anorexie: symptômes postprandiaux Trouble de la régulation de l’appétit dû au syndrome inflammatoire (cytokines) Hospitalisations fréquentes avec période de jeune Régimes abusifs: sans résidu, sans sel Sténoses Causes de la dénutrition Augmentation des pertes Malabsorption: longueur atteinte du grêle, résection intestinale étendue, résection iléocaecale Entéropathie exsudative avec perte protéique++: atteinte grêle étendue Saignement sur lésions ulcérées: anémie, carence martiale Causes de la dénutrition Anomalies métaboliques Augmentation de la dépense énergétique Augmentation de l’oxydation des lipides Traitements Corticoides: gain de poids et de masse grasse, perte de masse osseuse et de masse musculaire, troubles glucidiques Cholestyramine: vitamines liposolubles Méthotrexate, azathioprine Les critères de dénutrition Chez l’adulte jeune au moins un de critères suivants: BMI </= 18,5 Perte de poids > 5% en 1 mois ou 10% en six mois Albuminémie < 30 g/L , préalbumine <110 mgr/l • Chez le malade de plus de 70 ans au moins un des critères suivants : BMI </= 21 Perte de poids > 5% en 1 mois ou 10% en six mois MNA< 17 Albuminémie < 35 g/L , préalbumine <110 mgr/l Les critères de dénutrition sévère Chez l’adulte jeune au moins un des critères suivants : BMI </= 17 Perte de poids > 10% en 1 mois ou 15% en six mois Albumine <20gr/l, préalbumine<50 mgr/l Chez le malade de plus de 70 ans au moins un des critères suivants: BMI</= 18 Perte de poids > 10% en 1 mois ou 15% en six mois Albuminémie < 30 g/L , préalbumine <50 mgr/l Les critères de dénutrition Personnes à risque Sujets agés Corticothérapie prolongée Sténoses Multiples chirurgies Atteinte grêle étendue Prise en charge diététique Bilan nutritionnel: BMI, cinétique du poids, biologie, prise du poids à chaque consultation Bilan de la maladie, communication avec le médecin Enquête alimentaire Support nutritionnel Régime, enrichissement, collation Compléments Alimentation artificielle: entérale > parentérale Prise en charge diététique Eviter les erreurs classiques Régime sans sel inutile chez les jeunes Régime d’exclusion n’évite pas une poussée Pas de régime prolongé Supplémentation en vitamines et en micronutriments Dosage B12 et ac folique 1x/an Corticoïdes > 2 mois: 800UI vitD + 1gr de calcium par jour, discuter d’un biphosphonate, penser à l’ostéodensitométrie Grossesse: acide folique! Attention aux vitamines liposolubles si traitement par Questran Patient dénutri: complexe multivitaminique Alimentation artificielle Alimentation artificielle (entérale et parentérale) aussi efficace que les corticoides pour une poussée Alimentation entérale parfois moins bien tolérée Mélange polymérique aussi efficace qu’un semi-élémentaire Supplantée par les biologiques Indication principale chez l’enfant comme thérapeutique Chez l’adulte, indications se situent dans la prise en charge de la dénutrition principalement Entérale versus Parentérale TOUJOURS favoriser l’alimentation par voie entérale Plus physiologique Trophicité intestinale Stimulation du système immunitaire Moins de complications métaboliques Donc réduction de morbidité, notamment infectieuse Contre-indications formelles à l’entérale Occlusion intestinale organique ou motrice Vomissements répétés ou incoercibles Surface d’absorption intestinale insuffisante u inefficace Péritonite généralisée ou ischémie intestinale Contre-indications relatives à l’alimentation entérale Distension abdominale majeure Péritonite localisée Abcès intrapéritonéal Fistules entérocutanées Hémorragie digestive haute non controlée Coma Indications vraies de la parentérale Insuffisance intestinale aigue ou chronique Alimentation entérale insuffisante dans un contexte d’indication formelle d’alimentation artificielle Parentérale indiquée dans le Crohn: sténose, grêle court, entéropathie exsudative Choix de la thérapie nutritionnelle Adaptation de l’alimentation du patient au cas par cas 1. Maladie en poussée ou en rémission 2. Localisation de la maladie 3. Sténose intestinale 4. Traitements associés médicaux et chirurgicaux 5. Tolérances et susceptibilités individuelles 6. Timing et organisation Maladie en poussée Le patient peut-il s’alimenter? 35 à 40 kcal/kgPS/jour en calories 1,2 à 1,5 gr/kgPS/jour en protéines Régime sans résidus strict Limiter lactose Prendre en compte les susceptibilités individuelles Compléments alimentaires Fractionner Alimentation artificielle: totale ou partielle, entérale ou parentérale? Maladie en rémission Normalisation du régime le plus rapidement possible 1 à 1,5 gr/kgPS/jour en protéines Eviter les régimes prolongés, les restrictions et les interdictions Corriger les carences en vitamines et oligo-éléments: D, Ca, B12, ac folique, fer, ionogramme… Respecter les sensibilités individuelles tout en évitant d’exagérer les effets des aliments ou de la maladie Localisation de la maladie Maladie de Crohn: tout le système digestif Iléon terminal Colon Atteinte digestive haute: estomac Longueur d’atteinte • RCUH: colon Longueur d’atteinte Sténoses intestinales Régime pauvre en fibres: d’autant plus sévère que la sténose est serrée, du strict à l’élargi. A éviter: les légumes et fruits crus, les fruits oléagineux, les fruits secs, les céréales complètes, les graines, les légumineuses, champignons, céleri fibreux, vert de poireaux , les crustacés. Si chirurgie, reprise d’une alimentation normale. Traitements médicamenteux Cortisone: forte dose, durée prolongée Quand le régime est indiqué, pas trop de sel ne veut pas dire pas de sel! VitD et Ca Protéines Attention à l’intolérance au glucose Traitements chirurgicaux Résection iléocolique: carence B12, malabsorption selles biliaires Colectomie subtotale ou réservoir iléoanal: diarrhée+ Intestin grêle court: malabsorption, indication alimentation parentérale Timing chirurgie: l’intestin s’adapte mais il faut un peu de temps Sensibilités alimentaires fréquentes Céréales complètes et produits laitiers Légumes : oignons et choux Fruits : pommes, fraises, citrons Viandes : bœuf Intolérance lactose FODMAPs Timing et organisation Consultation diététique systématique au diagnostic Prise en charge systématique lors des hospitalisations Consultation post hospitalisation Sensibiliser le corps médical! CHC: itinéraire clinique des maladies inflammatoires chroniques intestinales Merci de votre attention!