Polycopi du Cours Echocardiographie Doppler

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~ Échocardiographie - Doppler ~
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Échocardiographie - Doppler
S. Lafitte, M. Lafitte, P. Réant, R. Roudaut
C.H.U. de Bordeaux ~ Hôpital Cardiologique du Haut Lévêque Pessac ~ France
Myocardiopathies Dilatées
Généralités
Définition
Les myocardiopathies dilatées sont définies par une dilatation ventriculaire prédominant souvent sur le
ventricule gauche.
Cette modification morphologique s’accompagne d’une altération variable de la cinétique globale avec
réduction de la fraction d’éjection.
Formes cliniques
Les myocardiopathies dilatées sont classées suivant leurs étiologies, en formes secondaires ou
primitives.
Dans les formes secondaires, on distingue principalement les myocardiopathies d’origine
ischémique, valvulaire, hypertensive, infectieuse, rythmique, métabolique, neuro-musculaire ou encore
toxique.
Les formes primitives sont plus rares, de l’ordre de 20 pour 100 000 habitants, avec 5,5 % de formes
familiales et une nette prédominance chez l’adulte jeune.
Anatomopathologie
On observe à l’examen anatomopathologique une dégénérescence fibrillaire accompagnée d’une
fibrose plus ou moins diffuse. Classiquement, on ne met pas en évidence d’élément inflammatoire.
Aspects échocardiographiques
La place de l’écho-Doppler est prédominante dans le diagnostic positif de cette maladie.
Nous verrons également avec le diagnostic de gravité, son intérêt dans le suivi des malades et nous
évoquerons quelques notions permettant d’orienter le diagnostic étiologique.
Nous envisagerons également une forme plus rare de myocardiopathie : la myocardiopathie
arythmogène du ventricule droit.
Enfin, nous évoquerons le rôle de l’échocardiographie dans le choix de traitement des
myocardiopathies dilatées.
Diagnostic positif
Deux anomalies essentielles sont retrouvées constamment en échocardiographie : la dilatation
cavitaire, prédominant sur le VG, et l’altération de la contractilité.
Les conséquences physiopathologiques qui en découlent sont à rechercher systématiquement pour le
diagnostic de gravité, telles que l’altération du remplissage, l’hypertension artérielle pulmonaire, les
dilatations des autres cavités, l’insuffisance mitrale et les thromboses intracardiaques.
Dilatation des cavités ventriculaires
La dilatation des cavités ventriculaires est l’élément essentiel que l’on observe d’emblée. Prédominant
sur le ventricule gauche, cette déformation cavitaire donne au ventricule un aspect sphérique et
globuleux.
Plusieurs méthodes de calcul des volumes ventriculaires ont été décrites :
- nous retiendrons, plus particulièrement, la formule de Teicholz en TM, validée sur des ventricules
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symétriques, donc inexploitable en cas de troubles segmentaires de contraction. Les volumes sont
obtenus à partir des mesures des diamètres télé-systolique et télé-diastolique du VG,
- en incidence apicale 4 cavités et mode bidimensionnel, la formule de l’ellipsoïde monoplan,
- ou selon les recommandations de l’ASE, la méthode de Simpson biplan préférée devant une
déformation asymétrique du ventricule. La planimétrie de la surface VG en incidence apicale 4 et 2
cavités permet alors l’approche la plus fiable des volumes ventriculaires gauches.
Dilatation des cavités ventriculaires
Par définition, on parle de dilatation ventriculaire gauche lorsque le diamètre télédiastolique
dépasse 55 mm ou 35 mm/m² en TM et lorsque le volume télédiastolique calculé en TM ou en
bidimensionnel est supérieur à 80 ml/m².
Altération de la contractilité
L’altération de la contractilité est définie par un pourcentage de raccourcissement inférieur à 25% en
TM et par une fraction d’éjection inférieure à 60% en bidimensionnel.
L’hypokinésie peut être globale, homogène et diffuse à toute la paroi myocardique dans les formes
primitives.
A l’opposé, elle sera localisée, secondaire à une anomalie segmentaire de contraction dans les formes
ischémiques.
Au delà des paramètres chiffrés, on observe sur les images TM un aspect de bas débit mitro-aortique
caractérisé par une valve mitrale miniature avec un espace ES dépassant 10 mm.
On note également une diminution de l’amplitude du mouvement de l’aorte et de l’ouverture des
sigmoïdes aortiques.
Doppler
L’altération de la contractilité ventriculaire s’évalue également en Doppler par l’étude du flux aortique,
fidèlement corrélé au débit aortique.
Le déficit fonctionnel global se traduit par la diminution de la vitesse du flux aortique, selon Gardin, 47
cm/s contre 92 cm/s, la diminution de l’ITV, 6,7 cm contre 15,7 cm, et la réduction du débit aortique
calculé à des degrés divers selon le stade évolutif et le degré de compensation.
Une autre approche en Doppler consiste en l’analyse du flux d’insuffisance mitrale qui permet en
étudiant la pente descendante du flux de déterminer le paramètre dP sur dt. Pour cela, selon la
méthode de Bargiggia, on mesure la durée entre deux valeurs définies de vélocité sur la courbe, en
pratique 1 et 3 m/s. Ainsi, on obtient les valeurs dP et dt dont on effectue le rapport. La dP/dt est
anormale en dessous de 1000 mmHg/s.
Enfin, il est intéressant de vérifier l’état pariétal myocardique avec des épaisseurs normales, une
masse VG augmentée, et un stress pariétal télésystolique augmenté.
Diagnostic de gravité
Fonction diastolique
L’atteinte de la fonction diastolique est fréquente dans les myocardiopathies dilatées. Cette altération
du remplissage se traduit par une diminution de l’ITV mitrale et par une anomalie du profil de
remplissage. On observe, suivant l’évolution, un type 1 d’Appleton ou trouble de la relaxation, jusqu’au
type 2 ou aspect restrictif, en passant par le type normalisé.
Le Doppler tissulaire à l’anneau avec la mesure de l’onde Ea et l’enregistrement de la vitesse de
propagation en TM couleur permettent une approche des pressions de remplissage.
En effet, un rapport Emi/Ea > 10 ou Emi/Vp > 2 sont en faveur d’une élévation de la PTDVG au
delà de 15 mmHg.
Retentissement droit
Une conséquence hémodynamique des anomalies de remplissage est l’apparition d’une hypertension
artérielle pulmonaire avec une dilatation des cavités droites, du TAP et de la VCI.
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L’IT permet d’évaluer la PAPS et l’IP nous donne la PAPD et le PAPM.
Enfin, le temps d’accélération du flux antérograde pulmonaire est diminué, inférieur à 90 ms.
Dilatation des cavités
La dilatation du ventricule gauche peut s’accompagner d’une expansion des autres cavités.
Une oreillette gauche est dilatée lorsque son diamètre en TM est supérieur à 40 mm.
En coupe apicale 4 cavités, lorsque le diamètre transversal est supérieur à 45 mm, et le diamètre
longitudinal supérieur à 52 mm.
L’oreillette droite, la veine cave inférieure et le ventricule droit peuvent être de même dilatés avec une
valeur péjorative particulière concernant ce dernier.
A noter qu’un VD hypercontractile est souvent observé s’observer dans une myocardiopathie
ischémique en l’absence d’infarctus du VD.
Insuffisance mitrale
L’insuffisance mitrale est fréquente dans les myocardiopathies dilatées, de l’ordre de 30 à 40 %.
Elle est en général minime à modérée, mais peut être plus importante en cas d'atteinte myocardique
sévère.
Cette fuite est le plus souvent fonctionnelle, secondaire à la dilatation de l’anneau mitral : le rapport
grande valve mitrale sur diamètre de l’anneau est < 1 en coupe parasternale grand axe.
Complications
Deux complications sont à rechercher systématiquement :
Thrombose intracardiaque
La thrombose intracardiaque reste très fréquente. Localisée au VG, elle est généralement murale,
parfois apicale d’où l’intérêt des sondes de haute fréquence.
Au niveau de l’oreillette gauche, elle sera détectée par ETO. La thrombose, lorsqu’elle existe, est
fréquemment associée à un contraste spontané. Elle siège préférentiellement au niveau de l’auricule
dont la surface est augmentée et le flux diminué.
Épanchement péricardique
On peut enfin observer un épanchement péricardique, en règle minime, plus fréquent dans les formes
évoluées.
Diagnostic Étiologique
Myocardiopathie ischémique
Sur un plan étiologique, l’échocardiographie suspecte une cardiopathie d’origine ischémique par
ses anomalies segmentaires de contraction et ses zones hypo voir dyskinétique.
L’échographie de contraste peut aider à la visualisation des segments myocardiques non perfusés.
Cependant, l’échographie est en règle insuffisante et le recourt à la coronarographie nécessaire.
Dans les formes diffuses, il faut souligner l’intérêt de l’écho dobutamine faible dose pour rechercher
une réserve de contractilité.
Myocardiopathie valvulaire
Devant un rétrécissement aortique évolué avec altération sévère de la contractilité VG et à faible
gradient, l’écho dobutamine faible dose sera utile pour l’appréciation de la réserve contractile en vu
d’une indication opératoire.
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Une insuffisance mitrale évoluée sera de pronostic péjoratif.
Myocardiopathie primitive
Le diagnostic de myocardiopathie primitive sera porté après élimination des autres étiologies :
ischémiques, valvulaires, toxiques, infectieuses, rythmiques, métaboliques…
Il est à noter que les myocardiopathies primitives sont en règle caractérisées par une hypokinésie
diffuse, mais que dans certains cas la présence d’une anomalie segmentaire de contraction peut être
trompeuse.
Myocardiopathie du nouveau-né
Enfin, chez le nouveau né, le nourrisson ou l’enfant, il faudra éliminer avant tout un obstacle à
l’éjection du ventricule gauche, rétrécissement aortique, coarctation..., et rechercher une anomalie de
naissance des coronaires.
Cas particulier
Myocardiopathies arythmogènes du VD
Les myocardiopathies arythmogènes du VD se définissent par l’association de troubles du rythme
ventriculaire et d’une dégénérescence fibro-adipeuse de la paroi libre du VD.
Cette entité touche préférentiellement les sujets jeunes (25-45 ans) et masculins.
Le diagnostic est suspecté devant l’apparition d’une arythmie ventriculaire à type de retard gauche.
Sur le plan échocardiographique, on peut opposer les formes diffuses avec aspect papyracé du VD et
dont la reconnaissance est évidente, aux formes focales plus atypiques caractérisée par une dilatation
modérée du ventricule droit, une voussure arrondie et akinétique de l’apex, une hypertrophie de
colonnes charnues, des voussures dyskinétiques de la région sous-tricuspidienne.
Mais, ces éléments échographiques sont inconstants et finalement le diagnostic sera posé sur les
images de cinéangiographie sélective du VD, voir de résonance magnétique nucléaire.
Évolution des patients sous traitement médical
L’évolution des myocardiopathies dilatées est directement corrélée au profil de remplissage
diastolique.
D’après cette étude de Rihal, un profil restrictif caractérisé ici par un temps de décélération inférieur à
130 ms est associé à un pronostic défavorable et une mortalité de l’ordre de 75% à 2 ans chez des
patients ayant une fraction d’éjection en dessous de 25%. La survie passe à 70% si le temps de
décélération est supérieur à 130 msec.
Plus récemment, il a été souligné l’importance du caractère réversible du profil restrictif alors associé à
un bien meilleur pronostic que le profil restrictif fixé.
Ces critères de fonction diastolique s’avèrent très utiles à l’orientation des patients vers la
transplantation.
Traitement non pharmacologique
Resynchronisation biventriculaire
A côté du traitement pharmacologique conventionnel, la resynchronisation biventriculaire peut dans
certaines situations améliorer la symptomatologie des patients en insuffisance cardiaque.
L’échocardiographie permet alors de cibler les malades répondeurs en objectivant de façon
quantitative l’asynchronisme de contraction pariétale. Ce dernier est calculé à partir des délais
électromécaniques de chaque paroi basale.
Insuffisance mitrale
L’insuffisance mitrale majeure par dilatation de l’anneau peut bénéficier d’une annuloplastie
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chirurgicale.
Transplantation cardiaque
Ultime recourt, la transplantation cardiaque doit être envisagée sur des critères cliniques (récurrence
des décompensations), hémodynamiques (HTAP), de tolérance à l’effort (VO2max) et également de
fonction diastolique avec notamment la présence d’un profil restrictif fixé.
Le suivi échographique des patients transplantés évalue la fonction globale du ventricule gauche, sa
fonction diastolique et les cavités droites.
Il faut rechercher plus précisément un contraste spontané dans l’OG, un anévrisme du septum inter
auriculaire natif et du greffon, une pseudo-dilatation de l’oreillette associée à un asynchronisme de
contraction entre les deux oreillettes, qui sont des causes potentielles d’AVC.
Enfin, devant une brutale dégradation de la contraction segmentaire, l’apparition d’un profil de
remplissage de type restrictif, l’abolition du gradient de vélocités transmyocardiques en DTI ou la
présence d’un épanchement péricardique de moyenne à grande abondance, il faudra suspecter un
rejet subaigu voir aigu du greffon.
Conclusion
Nous concluons ce chapitre sur les myocardiopathies dilatées en rappelant l’importance de l’examen
écho-Doppler pour le diagnostic positif et la surveillance des patients sous traitement dans un but
d’orienter au mieux les malades vers les ressources thérapeutiques non médicamenteuses comme la
resynchronisation, l’annuloplastie mitrale ou la transplantation cardiaque.
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