Journées scientifiques 24/25 mars 2015 URSI-France SONDER LA MATIÈRE PAR LES ONDES ÉLECTROMAGNÉTIQUES Propagation et diffusion Radar microondes par une surface de mer en incidence rasante et dans un milieu stratifié ________________________________________________________________________________ Christophe BOURLIER*, Hongkun LI**, Dusan CVETKOVIC***, Sami BELLEZ**** et Vincent FABBRO***** * IETR, christophe.bourlier@ univ-nantes.fr ** ElectroScience Laboratory, [email protected] *** IETR, [email protected] **** IETR, [email protected] ***** ONERA/DEMR, [email protected] Mots clés: Diffusion EM, propagation dans un milieu hétérogène, surface rugueuse de mer, Equation parabolique. Keywords: EM scattering, propagation in an inhomogeneous medium, rough sea surface, parabolic wave equation. Résumé en anglais One popular approach to solve sea surface scattering and propagation in a ducting environment is the Parabolic Wave Equation (PWE) method. An alternative method is the Boundary Integral Equation (BIE) method. The implementation of the BIE in inhomogeneous media (ducting environments) is not straightforward, since the Green’s function for such a medium is not usually known. In this paper, a closed-form approximation of the Green’s function for a two-dimensional (2-D) ducting environment made up of a duct having a linear-square refractive index profile below a medium of constant refractive index, recently published, is used. This paper demonstrates how the BIE method can model the combined effects of surface roughness and medium inhomogeneity. Furthermore, it illustrates its capability of accurately predicting scattering in all directions including backscattering. Then, the PWE solved with the Split-Step Fourier (SSF) method is compared with this method. Résumé en français La méthode de l'équation d'onde parabolique (PWE) est couramment appliquée pour résoudre le problème conjoint de la diffusion électromagnétique par une surface de mer et la propagation due à la présence d'un conduit d’évaporation audessus de celle-ci. Un moyen de valider cette approche est de résoudre ce problème à l'aide des équations intégrales de frontière (BIE). La mise en œuvre de la BIE dans un milieu non homogène (présence d'un conduit) n'est pas aisée, puisque la fonction de Green pour un tel milieu n'est généralement pas connue. Ainsi, dans cet article, une forme approchée de la fonction de Green considérant un conduit, dont l'indice de réfraction au carré suit une loi affine, et récemment publiée, est intégrée dans la BIE. Puis la BIE est résolue par la méthode des moments. Cette méthode peut alors modéliser les effets combinés de la diffusion par la surface et de la propagation. Ainsi, cette méthode peut prédire avec précision la diffusion dans toutes les directions, y compris en rétrodiffusion. La PWE résolue par la méthode Fourier Split-Step (SSF) est alors comparée avec la BIE. Introduction Dans cet article, pour des incidences rasantes et aux fréquences Radar microondes, le problème de la diffusion électromagnétique par une surface de mer et de la propagation dans un milieu stratifié (conduit au-dessus de la mer) est résolu conjointement à l'aide d'une méthode rigoureuse. Elle est basée sur les équations intégrales résolues par une Méthode des Moments (MdM). La propagation dans un milieu atmosphérique stratifié (conduit) est traitée par une fonction de Green calculée analytiquement pour un indice de réfraction au carré suivant une loi affine. Puis, le problème de diffraction par la surface de mer est résolu numériquement en injectant cette fonction de Green dans les équations intégrales. Puisque le phénomène de guidage de l'onde EM diffusée par la surface est observé sur une distance relativement longue (le gradient de l'indice de réfraction est faible devant l'unité), une méthode rapide itérative stationnaire est utilisée pour réduire les ressources informatiques nécessaires à la résolution du système linéaire de grande dimension (matrice impédance à inverser de taille 200 0002 et plus). Ainsi, connaissant les courants sur la surface de mer, le champ total en tout point dans le conduit est calculé à l'aide du principe d'Huygens. Des résultats présentant les puissances diffusées cohérente et incohérente sont montrés puis comparés avec ceux calculés par la méthode PWE (Parabolic Wave Equation), résolue par la méthode SSF (Split-Step Fourier). 187 URSI-France Journées scientifiques 24/25 mars 2015 1. Contexte et formulation mathématique 1.1 Contexte Considérant les systèmes Radar fonctionnant à basse élévation, l’environnement marin peut avoir une influence considérable sur la propagation des ondes EM. En effet, la basse atmosphère, située au-dessus d’une surface de mer présentant différentes échelles de rugosité, présente fréquemment des variations d’indice de réfraction importantes. La surface de mer se comporte alors comme un miroir imparfait pour les ondes propagées au-dessus de celle-ci. Les milieux côtiers ou même terrestres peuvent également avoir de tels phénomènes dus à la rétrodiffusion par le relief ou par des conditions atmosphériques particulières. Dans ce contexte, la méthode de l'équation parabolique (PWE : Parabolic Wave Equation) résolue par un algorithme nommé SSF (Split-Step Fourier) [1, 2] est couramment utilisée. Les avantages principaux de cette méthode sont sa rapidité de calcul et sa flexibilité car elle peut s'appliquer pour des profils d'indice de réfraction quelconque. Son inconvénient est que la réflectivité (problème de diffraction) par la surface de la mer est calculée en introduisant des approximations. L'objet de cet article est de confronter cette approche à une méthode rigoureuse, résolvant notamment le problème de diffraction sans approximation à l'aide des équations intégrales de frontière (BIE : Boundary Integral Equation), résolues par la MdM [3]. Dans la BIE, l’approximation est alors sur la fonction de Green pour la prise en compte de la structure atmosphérique. Son calcul est basé sur la PWE. De plus, puisque le nombre d'inconnues sur la surface de mer est au moins de 200 000, la méthode itérative ForwardBackward (FB, conduisant à la méthode BIE/FB) [4] est appliquée pour résoudre rapidement ce système et ainsi calculer les courants sur la surface de mer. La BIE nécessite la connaissance de la fonction de Green du conduit [5]. Pour l'évaluer analytiquement, nous considérons que le milieu Ω2 (voir figure 1), défini pour des hauteurs ζ(x)≤z≤h, a un profil d'indice de réfraction au carré qui suit une loi affine n2(z) = 1+ ε(h-z), ou ε est le paramètre du conduit (gradient d'indice) et h la hauteur du conduit. La fonction ζ(x) représente le profil des hauteurs de la surface en fonction de l'abscisse x. Le milieu Ω1 (z>h) est homogène et assimilé au vide et le milieu Ω3 (z<ζ(x)) est le milieu marin. Ce dernier est supposé très conducteur (|n3|>>1) aux fréquences microondes Radar considérées, permettant d'appliquer la condition aux limites simplifiée de Leontovitch. La Fig. 1, à droite, représente la hauteur z en fonction du module du profil d'indice de réfraction des milieux Ω1, Ω2, et Ω3. Fig. 1 : Géométrie du problème 1.2 Formulation mathématique Dans le conduit, la fonction de Green s'écrit [5] où H0(1) est la fonction de Hankel de première espèce et d'ordre 0. De plus, X=|x-x'| est la distance horizontale entre deux points d'abscisses x et x' et (z,z') sont leurs hauteurs respectives, k0 = 2π/λ0 est le nombre d'onde dans lequel λ0 est la longueur d'onde d'émission du radar. Ainsi, si le paramètre de conduit ε=0, le terme exponentiel vaut l'unité et la fonction de Green d'un milieu homogène est retrouvée. Cette fonction de Green est alors introduite dans les équations intégrales conduisant à où ψinc est le champ incident sur la surface. De plus les points r = (x,z(x)) et r' = (x',z(x')=z') sont sur la surface. Pour la polarisation TE, l'inconnue sur la surface est la dérivée normale du courant de surface ∂ψ2/∂n et pour la polarisation TM, l'inconnue sur la surface est le courant de surface ψ2. Ainsi, à partir de l'approximation de Leontovitch, les quantités ψ2 et ∂ψ2/∂n sont données par 188 Journées scientifiques 24/25 mars 2015 URSI-France où (n20 )2= (n1)2 + εh. Le champ émis à l'ouverture de l'antenne sur la verticale Sa à l'abscisse xa = 0 est défini par où : za,0 est le centre de l'antenne (constante) selon la verticale z, θinc est l'angle d'incidence mesuré selon la verticale z, ∆θ = 2/(k0G) = 2/(k0gzsinθinc), dans lequel G est la largeur transverse du faisceau (perpendiculaire à la direction de propagation) et gz est l'étendue verticale de l'antenne. A partir de ce champ, le champ incident sur la surface de mer s'écrit Connaissant les courants sur la surface, le principe d'Huygens est alors appliqué en tout point de l'espace pour calculer le champ diffracté. Il s'écrit 2. Résultats numériques Plusieurs réalisations indépendantes de la surface sont générées. Pour chaque surface de numéro p, les courants sur la surface ∂ψ2/∂n et ψ2 sont calculés. A partir du théorème d'Huygens, le champ total ψp = ψinc + ψsca,p est alors calculé. Les puissances cohérente Pcoh et incohérente Pinc sont alors proportionnelles à où Nr est le nombre de réalisations. Sur la Fig. 2 les paramètres de simulation sont les suivants : hauteur du conduit h=50 m, paramètre du conduit ε=0.0001, fréquence Radar f=3 GHz, permittivité de la mer 70.4+40.6j, longueur de la surface L=3600 m, angle d'incidence 89°, hauteur de l'antenne 10 m (diagramme d'antenne de type gaussien), la vitesse du vent à 10 m au-dessus de la mer u10 = 5 m/s, polarisation TE. Pour la BIE/FB, le nombre d'inconnues est de 288 000. La surface de mer est supposée obéir à un processus Gaussien dont le spectre des hauteurs est donné par le modèle de Elfouhaily [7]. Les Figs. 3 (méthode BIE/FB) et 4 (méthode PWE/SSF) présentent les mêmes variations que sur la Fig. 2 mais pour les trois abscisses x0={30, 1800, 3600} m (coupe selon x0). Lorsque la vitesse du vent augmente, la puissance cohérente diminue alors que la puissance incohérente augmente, qui est en accord avec le principe de la conservation de l'énergie. A noter que pour u10 = 5 m/s, la différence des résultats issus d'une surface lisse est faible, tandis que pour u10 = 10 m/s, cette différence est significative. La Fig. 5 compare la puissance cohérente, issue des approches suivantes : Modèle de Ament labellisé par « Ament ». Il est obtenu en multipliant le champ issu de la PWE/SSF et calculé pour u10 = 0 (surface lisse) par exp(-2nrRa2}, où Ra est le paramètre de Rayleigh défini par Ra=k0σzcosθr1. De plus, nr est le nombre de rebonds, σz l'écart type des hauteurs de la surface et θr1 est l'angle du premier rebond sur la surface ξ=0 défini par cotθr1 = (εza,0+cot2 θinc)1/2. Modèle de Ament avec ombrage labellisé par « Ament+O ». Il est calculé à partir des travaux de V. Fabbro et al. [8]. Il est obtenu en multipliant le champ issu de la PWE/SSF et calculé pour u10 = 0 (surface lisse) par 189 URSI-France Journées scientifiques 24/25 mars 2015 Fig. 2 : Panel de gauche : Puissance cohérente totale en dB en fonction de l'abscisse et de la hauteur. En haut, méthode BIE/FB et en bas, méthode PWE/SSF. Panel de droite : Puissance incohérente totale en dB en fonction de l'abscisse et de la hauteur. En haut, méthode BIE/FB et en bas, méthode PWE/SSF. Fig. 3 : Panel de gauche : Puissance cohérente totale en dB en fonction de la hauteur calculée avec la BIE/FB et pour les abscisses x0={30, 1800, 3600} m. La vitesse du vent est indiquée dans la légende. Panel de droite : Mêmes variations mais c'est la puissance incohérente. Fig. 4 : Mêmes variations que sur la figure 2 mais la puissance totale est calculée avec la PWE/SSF. 190 Journées scientifiques 24/25 mars 2015 URSI-France La notation tilde signifie que l'ombrage est pris en compte dans le calcul du paramètre de Rayleigh (σz substitué par σz tilde) et que la valeur moyenne (égale à zéro pour la cas sans ombrage) est substituée par m tilde. Physiquement, puisqu'en incidence rasante, la majorité des points localisés sur les hauts des vagues sont éclairés, l'écart type des hauteurs avec ombrage diminue tandis que la valeur moyenne avec ombrage augmente. Pour plus de détail, lire la référence [8]. Fig. 5 : Puissance cohérente en fonction de la hauteur calculée par différentes approches. La Fig. 5 montre un bon accord entre les méthodes BIE/FB et PWE/SSF. De plus, le modèle de Ament surestime le niveau de champ cohérent propagé et le modèle de Ament avec ombrage produit également des niveaux plus forts. Ceci montre que faire du Monte-Carlo sur une surface rugueuse avec la PWE/SSF (ou la BIE/FB) n'est pas équivalent à utiliser le modèle de Ament sur une surface lisse, surtout après deux réflexions successives sur la mer comme dans le cas proposé ici. La Fig. 6 compare les puissances incohérentes calculées avec la PWE/SSF et BIE/FB. La vitesse du vent u10 = 5 m/s. Elle montre un bon accord entre la PWE/SSF et la BIE/FB sauf pour x0=30 m, correspond à une configuration quasimonostatique. En effet, la contribution du champ provient essentiellement des vagues de capillarité, dont leur contribution n'est pas prise en compte dans le modèle de Ament, basé sur une approximation haute fréquence. Des simulations réalisées en polarisation TM conduisent aux mêmes conclusions dressées en polarisation TE. La différence majeure est que le niveau du champ diffracté après le premier rebond est beaucoup plus faible que le champ incident car l'angle θr1 du premier rebond est proche de l'incidence de Brewster, produisant alors une forte diminution du coefficient de réflexion de Fresnel. Conclusion Une étude de comparaison entre les méthodes BIE/FB (Boundary Integral Equation/Forward Backward) et PWE/SSF (Parabolic Wave Equation, résolue par schéma Split Step Fourier) a été menée. Elle a consisté à effectuer des calculs avec la méthode parabolique PWE/SSF (via le code EPEE de l’ONERA) sur une série de profils de mer afin de comparer les résultats avec la méthode BIE/FB. Le profil atmosphérique est un conduit linéaire canonique à très fort gradient sur plusieurs dizaines de mètres. Sur mer lisse, les résultats sont identiques (cf. [9], non montrés dans cet article), quelle que soit la polarisation. Sur une réalisation de surface de mer rugueuse les résultats sont très proches. Les méthodes étant par nature différentes, la comparaison présente un grand intérêt. Ensuite, par approche de Monte Carlo sur 20 profils, les puissances cohérentes et incohérentes moyennes ont été calculées. Pour une vitesse du vent u10 = 5 m/s, la BIE/FB et la PWE/SSF donnent des résultats très semblables à la fois sur les puissances cohérente et incohérente. L'étude doit être finalisée pour une vitesse de vent de u10 = 10 m/s. 191 URSI-France Journées scientifiques 24/25 mars 2015 Fig. 6 : Puissance incohérente en fonction de la hauteur calculée avec la PWE/SSF et la BIE/FB. La vitesse du vent u10 = 5 m/s. Remerciements Ce travail de recherche a été financé par les ministères du “Redressement Productif (Direction Générale de la Compétitivité, de l'Industrie et des Services)” et de la défense (DGA), dans le cadre du projet PRORASEM, dont les partenaires sont l'ONERA, ALYOTECH et l'IETR. Références bibliographiques [1] M. 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Pinel, “Low-grazing angle propagation and scattering above a sea surface in presence of a duct jointly solved by the boundary integral equations,” IEEE Trans. Ant. Prop., Vol. 63, no. 2, pp. 667-677, 2015 [7] T. Elfouhaily, B. Chapron, K. Katsaros, and D. Vandermark, “A unified directional spectrum for long and short wind-driven waves,” Journal of Geophysical Research, vol. 102, no. C7, pp. 781-796, 1997. [8] V. Fabbro, C. Bourlier and P. F. Combes, “Forward propagation modeling above Gaussian rough surfaces by the Parabolic Wave Equation: Introduction of the shadowing effect,” Progress In Electromagnetic Research, vol. 58, pp. 243-269, 2006. 12. [9] C. Bourlier, H. Li, V. Fabbro, “Radar propagation modeling using the boundary integral equations in a maritime environment with a duct”, RADAR 2014, October 2014, Lille France. 192