CAPITALISME NATUREL UNE NOUVELLE RÉVOLUTION INDUSTRIELLE Capitalisme naturel : l’expression peut sur­ LES 3 FAMILLES DE CAPITAUX prendre, voire choquer. Pourtant, elle ne fait que traduire ceci : l’économie ne dépend pas uniquement du capital financier, nécessaire pour investir, innover et se développer, mais également du capital humain (la somme des compétences, savoir­faire et savoir­être qu’elle mobilise), et du capital naturel (res­ sources fossiles non renouvelables et ressources renouvelables issues de la produc­ tion des écosystèmes, sous forme de « biens et services rendus par les écosystèmes »). L’enjeu du capitalisme naturel est de recon­ naître la valeur de ces trois capitaux, de les gérer durablement afin d’en garantir la pérennité. Plus spécifiquement, il s’agit de ré­ investir dans le capital naturel (on parle de recapitalisation écologique), pour restau­ rer le potentiel d’évolution et la fonctionnalité d’écosystèmes affaiblis par deux siècles de surexploitation. BIENS ET SERVICES RENDUS PAR LA NATURE Le millenium Ecosystem Assessment, étude menée en 2005 sous l’égide de l’ONU, mettait en évidence 4 types de services écosystémiques, sous forme de biens tangibles, de ser­ vices de régulation, de valeurs culturelles ou esthétiques, ou encore de services de sou­ tien, tous indispensables à la prospérité économique et au bien­être humain : Approvisionnement Régulation Biens ou produis tirés des écosystèmes Services et Bénéfices tirés des processus naturels Culturels Bénéfices intangibles, types récréatifs, valeur spirituelle, valeur patrimoniale ou d’existence Soutien Processus naturels qui servent de support aux autres services L’INVERSION DES RARETÉS L’économie de ce début de XXIème siècle se caractérise, par rapport aux siècles précédents, par une « inversion des raretés ». Ce qui était abondant est devenu rare : ressources éner­ gétiques fossiles, métaux, forêts primaires, zones humides, ressources halieutiques, jusqu’aux sols qui sont dégradés, érodés ou salinisés. En contrepartie, ce qui était rare est devenu plus abondant que jamais : connaissances scientifiques, savoir­faire technique, édu­ cation, information, ressources immatérielles ; d’où l’opportunité d’un changement de pa­ radigme économique, fondement du capitalisme naturel. LES QUATRE « PILIERS » DU CAPITALISME NATUREL Accroître, dans des proportions considérables, l’efficacité des res­ sources naturelles, par une réingénierie des modes de production, par des innovations de rupture (penser global, agir en amont) et la recherche systèmatique d’un découplage entre satisfaction des besoins et consommation des ressources naturelles. Ce découplage doit être absolu, et non uniquement relatif, afin de dépasser ce qu’on appelle « l’effet rebond ». S’inspirer du vivant et de la dynamique des écosystèmes pour mette en oeuvre une économie circulaire. Cette dernière s’oppose à l’éco­ nomie linéaire (prélever, transformer, utiliser, rejeter) qui prévaut actuellement, et vise à refermer les boucles de production, à tra­ vers des démarches d’écoconception de type « du berceau au ber­ ceau » par exemple, et à valoriser systèmatiquement les flux d’énergies et les co­produits, comme dans le cadre de symbioses industrielles. Mettre en oeuvre une économie de fonctionnalité, centrée sur la satisfaction des besoins plutôt que sur la vente d’objets. Cette approche permet d’intensifier en services, et donc en emplois, la création de valeur par les entreprises, tout en limitant la consom­ mation de ressources naturelles, notamment en évitant le recours à « l’obsolescence programmée », aujourd’hui destinée à favoriser le renouvellement anticipé des équipements par les entreprises et les particuliers. Ré­investir dans le capital naturel, afin de restaurer la pleine fonc­ tionnalité des écosystèmes, dont les activités économiques dépen­ dent, et de renforcer leur résilience et leur capacité d’adaptation face aux changements globaux. Cette approche passe notamment par le génie écologique, qui permet d’intervenir activement pour restaurer des écosystèmes dégradés par une exploitation inadap­ tée, et recréer les conditions nécéssaires pur une reconquète par la biodiversité des espaces naturels. QUELLES AVANTAGES POUR MA STRUCTURE ? l Anticiper et se préparer aux changements globaux : appliquer les quatre piliers du capitalisme naturel dans le contexte de votre activité, c’est préparer votre organisation aux changements globaux en cours, l’adapter, la rendre moins dépendante des ressources fossiles et plus résiliente. l Multiplier ses sources d’inspiration : le capitalisme naturel est une source d’inspiration pour des innovations techniques, organisationnelles et sociétales. l Créer de nouvelles opportunités d’affaires : comprendre vos liens d’interdépendance vis­à­vis des services écosystémiques et les intégrer dans votre stratégie permet de limiter les risques et de détecter les gisements d’opportunités. QUELS RISQUES ÉVENTUELS ? l Ethique : oublier qu’au­delà de sa contribution à l’économie et au bien­être humain, le vivant a une valeur intrinsèque, irréductible à toute utilité. l Dérives possibles : le génie écologique est une technique d’intervention proactive sur les écosystèmes, en vue de les restaurer. Pour éviter toute dérive, cette activité doit être encadrée scientifiquement, transparente et conduite en concertation avec les parties prenantes. l L’effet rebond est un phénomène connu et difficile à contourner. Tout gain de productivité dans l’exploitation des ressources naturelles peut entrainer un surcroît de consommation pour cette même ressource, ou un report du pouvoir d’achat vers la consommation d’une autre ressource. l La tragédie des communs : valoriser le capital naturel ne veut pas dire favoriser son appropriation ou l’émergence de mécanismes de spéculation. Les travaux d’Elinor Orstrom, prix Nobel d’économie en 2009, démontrent qu’une gouvernance économique des biens communs est possible, permettant de dépasser la fameuse « tragédie des communs». Perspectives et Travaux scientifiques en cours ­ Inversion des régulations : des travaux scientifiques sont en cours pour valider la faisabilité d’une « inversion des régulations », changement complet de paradigme fiscal visant, par un report des charges fiscales du travail vers la consommation des ressources naturelles, à mieux protéger le capital naturel tout en développant l’emploi. ­ Cadre règlementaire international : il évolue très rapidement sur les questions relatives à la conservation de la biodiversité et sur le partage des avantages tirés des ressources naturelles, notamment suite à la conférence de Nagoya en 2010. ­ Stratégie Nationale de Biodiversité : en France, elle a été rénovée suite à un vaste chantier de concertation lancé en 2010, et sera présentée, avec des applications sectorielles concernant l’industrie, l’agriculture et les collectivités locales, en mai 2011. COMMENT TRADUIRE LE CAPITALISME NATUREL EN ACTIONS ? Se préparer à l’inversion des raretés, anticiper les changements globaux, mettre en œuvre un vrai développement durable pour votre organisation, autant de raisons de s’intéresser aux concepts et aux principes du capitalisme naturel. Vous avez un projet, une question ? L’Institut INSPIRE est à même d’analyser votre besoin et de vous mettre en relation avec des experts scientifiques, économistes ou consultants à même de vous aider. Pour aller plus loin WEBOGRAPHIE www.natcap.org www.etopia.be/spip.php?article236 BIBLIOGRAPHIE Réparer la planète ­ Maximilien Rouer et Anne Gouyon L’entreprise légère ­ Julia Haake et Basile Gueorguievsky Natural Capitalism ­ Paul Hawken, Amory et Hunter Lovins Cradle to cradle ­ William McDonough et Michael Braungart A PROPOS DE L’INSTITUT INSPIRE INSPIRE est un centre de ressources et d’actions au service de modèles économiques innovants, favorables à l’attractivité des territoires, à la compétitivité des entreprises et la création d’emplois. INSPIRE œuvre à rassembler et diffuser les connaissances, à tisser des réseaux de par­ tenariats pluridisciplinaires, à sensibiliser les décideurs, et contribue à l’émergence d’initiatives innovantes, par ses actions de formation, de conseil et d’accompagne­ ment du changement. Contact : Institut INSPIRE Tél.: 04 91 67 96 22 – [email protected] www.inspire-institut.org Conception : www.magenta­numerique.com // Crédits photos : Bruno Locatelli, stock.xchng Par où commencer ? Forger avec vos parties prenantes une vision partagée d’un futur souhaitable, analyser vos liens de dépendances vis­à­vis des ressources natu­ relles et des services rendus par les écosystèmes, identifier vos atouts et les valori­ ser, mettre en œuvre une stratégie et un plan d’action. Tout commence par des questions. A condition de se poser les bonnes.