Agro-écologie, la recette française pour le futur de l’agriculture Entretien du ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll. Pour faire face à la crise environnementale et énergétique, l’agriculture doit évoluer. Et pour la France, l’agro-écologie est la bonne solution. Nourrir plus de neuf milliards de personnes, mais aussi combattre la pauvreté agricole, préserver les ressources naturelles et affronter le changement climatique. Le secteur agricole mondial doit actuellement faire face à d’innombrables défis et pour les remporter, selon les experts, un changement est nécessaire : une nouvelle façon de produire doit être mise en œuvre, compétitive mais également plus durable. Et ce n’est pas impossible. En France, on le sait bien : c’est là que, avant tout le monde en Europe, on en est train de repenser le secteur de manière écologique. Le 11 septembre dernier, le Parlement français a voté à une large majorité la loi sur l’agro-écologie proposée en 2012 par Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, de l’Agro-alimentaire et de la Forêt. : un projet ambitieux qui prévoit des formations, des expérimentations de nouveaux systèmes de production et des subventions de l’Etat. Objectif : que d’ici 2050 la majorité des entreprises agricoles soient vouées à l’agroécologie. Mais de quoi s’agit-il ? La Stampa en a parlé avec le Ministre Le Foll, présent à Rome au Symposium international sur “l’Agro-écologie pour la sécurité alimentaire et la nutrition » organisé par la FAO les 18 et 19 septembre. Q : Ministre Le Foll, quels sont les objectifs fixés par cette loi ? SLF : Notre projet naît de l’idée que la nature et l’environnement ne sont pas un obstacle mais plutôt des alliés précieux et des points de force pour la compétitivité. La loi analyse toutes les composantes nécessaires pour permettre une transition vers une agriculture plus écologique dont la consommation d’énergie, d’eau, de pesticides et de fertilisants chimiques est réduite au minimum et où l’on se base sur l’écosystème afin d’assurer la fertilité du sol, la productivité et la protection des cultures. Par exemple, plus on travaille la terre de manière mécanique, plus la terre s’appauvrit. En revanche, les micro-organismes qui vivent naturellement dans le sol ont la même fonction tout en préservant la qualité de la terre. Et c’est justement ce que prévoit cette loi : limiter l’utilisation de produits phytosanitaires, expérimenter de nouvelles formes de production agricole, la rotation et la diversification des cultures et l’augmentation des superficies cultivées en biologique. Pour rendre cela possible, nous avons prévu des interventions dans le secteur de l’éducation et de la formation pour les agriculteurs et des primes pour le développement de projets d’agroécologie. Bien entendu, pour nous le défi ne se pose pas uniquement au niveau national mais au niveau global. Je suis donc très satisfait du succès du Symposium International organisé par la FAO à l’initiative de la France et qui concerne plus de 30 pays. Il témoigne d’une prise de conscience par la communauté internationale de l’importance de la thématique. Q : La France est pionnière dans ce secteur mais quelles sont les données sur la productivité ? SLF : L’expérience des agriculteurs a montré la validité du projet même en termes économiques. Prenons l’exemple de Quentin Delachapelle, cultivateur de céréales, à la tête de la Fédération française des Centres de valorisation de l’agriculture et du milieu rural. Il a réussi à produire, en utilisant des méthodes naturelles, autant que ses collègues qui utilisent des pesticides. Il faut cependant avoir une grande conviction et prendre des risques, les résultats du passage de l’agriculture traditionnelle à l’agriculture durable se voient avec le temps. Q. : L’agro-écologie et la sécurité alimentaire. Que pouvons-nous dire en vue de l’Expo 2015 ? SLF : Le thème sera au centre des activités du Pavillon français. Le secteur agricole est appelé à maintenir et à augmenter la productivité pour parvenir à nourrir neuf milliards de personnes et en même temps de préserver les ressources naturelles. Pour cela, il faut une agriculture intensive mais basée sur une approche écologique. Q. : La France accueillera la Conférence de l’ONU sur le climat en 2015. Quels sont vos objectifs? Notre défi pour la COP21 est celui de parvenir à un accord global qui permettra de limiter à 2°C l’augmentation du réchauffement climatique. La France s’est engagée au niveau national, avec l’objectif ambitieux de réduire les émissions à gaz de serre de 40% d’ici 2030 par rapport à 1990, et est favorable à cet objectif également pour l’Europe. Dans la lutte contre le changement climatique, l’agro-écologie peut nous aider, grâce à des émissions polluantes moins importantes et à une capacité plus forte d’absorption d’anhydride carbonique des terrains.