Violaine Sebillotte, Séminaire, 29 novembre 2016. 1 1. L’anthropologie historique de Louis Gernet et l’introduction du féminin FINLEY 1963 : Moses I. Finley, Les anciens Grecs. Une introduction à leur vie et à leur pensée, Paris, F. Maspéro, 1979, en part. p. 131-133. HUMPHREYS 1978: Sally C. Humphreys, Anthropology and the Greeks, Londres, Routledge, 2003. GERNET 1976 : Louis Gernet, Anthropologie de la Grèce antique, Paris. JEANMAIRE 1951 : Henri Jeanmaire, Dionysos. Histoire du culte de Bacchus, Paris, Payot. GERNET 1953 : Louis Gernet, « Dionysos et la religion dionysiaque : éléments hérités et traits originaux », in L. Gernet, Anthropologie, op. cit., p. 110-111 : « Ce qui a toujours frappé, en effet, c’est l’importance de l’élément féminin dans cette religion. Les égarements et la frénésie que désigne le mot d’orgiasme, c’est le plus souvent des femmes qui y sont sujettes ; dans les représentations figurées, nous ne voyons guère qu’elles aux moments pathétiques du culte. Comment comprendre cette donnée ? Il est bien connu que la nature féminine fournit le « terrain favorable ». […] On peut comprendre, dans le dionysisme, le rôle prééminent de la femme parce que cette valeur essentielle [i.e. l’évasion, caractéristique du dionysisme selon Jeanmaire et Gernet], la femme est mieux faite pour l’incarner. Elle est moins engagée, moins intégrée. Elle est appelée à représenter, dans la société, un principe qui s’oppose à la société elle-même – et dont celle-ci a pourtant besoin. Il faut croire que ce besoin, sur le plan religieux, a été ressenti par les Grecs avec acuité. » VERNANT 1963 : Jean-Pierre Vernant, « Sur l’expression religieuse de l’espace et du mouvement chez les Grecs », L’Homme, 1963, vol. 3, p. 12-50, p. 19 : « L’espace domestique, espace fermé, pourvu d’un toit (protégé) est, pour le Grec, à connotation féminine. L’espace du dehors, du grand air, à connotation masculine. La femme est dans son domaine à la maison. C’est là qu’est sa place ; en principe elle n’en doit pas sortir. (…) Il est pourtant un cas où cette orientation de l’homme vers le dehors, de la femme vers le dedans, se trouve inversée : dans le mariage, contrairement à toutes les autres activités sociales, la femme constitue l’élément mobile dont la circulation fait le lien entre groupes familiaux différents, l’homme restant au contraire fixé à son propre foyer domestique. L’ambiguïté du statut féminin consiste donc en ceci que la fille de la maison – plus liée que le garçon, par sa nature féminine, à l’espace domestique –, ne peut pourtant s’accomplir en femme par le mariage sans renoncer à ce foyer dont elle a la charge. La contradiction se trouve résolue, sur le plan de la représentation religieuse, par l’image d’une divinité qui incarne, dans la nature féminine, les aspects de permanence tout en demeurant étrangère, par son statut virginal, à l’aspect de mobilité ». 2. La différence des sexes comme symbole de division : la thèse de Nicole Loraux. Les voies traversières de Nicole Loraux, EspacesTemps Les Cahiers/Clio HFS, 87-88 (2005) Les femmes, le féminin et le politique après Nicole Loraux, colloque édité par C. Darbo-Peschanski, N. Ernoult, S. Georgoudi, V. Sebillotte Cuchet, E. Varikas : http://chs.harvard.edu/, classics@ issue 7. LORAUX 1981 : Nicole Loraux, Les enfants d’Athéna. Idées athéniennes sur la citoyenneté et la division des sexes, Paris, F. Maspéro. LORAUX 1986 : Nicole Loraux, « Repolitiser la cité (1986) », dans N. Loraux, La cité divisée, l'oubli dans la mémoire d'Athènes, Paris, Payot, p. 41-58 LEVI-STRAUSS 1949 : Claude Lévi-Strauss, Les Structures élémentaires de la parenté, Paris, PUF. Notions de « mythe civique », de « représentation de la cité » ou « d’imaginaire civique » : LORAUX 1979a : Nicole Loraux, « L‘imaginaire des autochtones (1979) », in Loraux, Les enfants d’Athéna, p. 7-25, en part. p. 15. LORAUX 1979b : Nicole Loraux, « L’autochtonie : une topique athénienne (1979) », in Loraux, Les enfants d’Athéna, p. 69-70. LORAUX 1981 : Nicole Loraux, L’Invention d’Athènes. Histoire de l’oraison funèbre dans la « cité classique », Paris, Mouton. LORAUX 1989 : Nicole Loraux, « Et l’on déboutera les mères », in N. Loraux, Les expériences de Tirésias : le féminin et l'homme grec, Paris, Gallimard, p. 219-232, en part. p. 225 LORAUX 1996 : Nicole Loraux, Né de la terre, mythe et politique à Athènes, Paris, Éd. du Seuil, p. 128-168. Violaine Sebillotte, Séminaire, 29 novembre 2016. 2 1. « Ainsi, toutes les instances imaginaires de la cité s’accordent à réduire tendanciellement la place faite à la femme dans la polis : la langue lui refuse un nom, les institutions la cantonnent dans la maternité, les représentations officielles lui retireraient volontiers jusqu’au titre de mère » (in Les enfants d’Athéna, op. cit., p. 131). 2. « À l’étude de la cité une a succédé la réflexion sur la division des sexes, et [que] la division des sexes a subrepticement introduit la cité comme cité divisée » (in La cité divisée, op. cit., p. 24). 3. « [L’] envie des hommes Grecs à laquelle il faut bien donner sa juste désignation d’« envie de grossesse » : le désir de s’alourdir de sensations pénétrantes que leur intensité toute féminine devrait précisément interdire au citoyen paradigmatiquement viril » (in Les expériences de Tirésias. Le féminin et l'homme grec, Paris, Gallimard, 1989, p. 24) LORAUX 1993 : Nicole Loraux La Grèce au féminin, Paris, Les Belles Lettres, 2009 : « L’histoire des femmes doit-elle aussi prendre en charge les figures d’«héroïnes », que le discours général de l’histoire n’oublie pas de mentionner et dont le caractère exceptionnel a trop souvent servi à reconduire, voire à cautionner le silence généralement observé sur les autres, les femmes « ordinaires » ? La question se repose régulièrement, toujours aussi embarrassante, enjeu de discussions toujours aussi ardentes. Or comment tenir un discours un peu suivi sur des vies de femmes grecques sans que celles-ci constituent par définition des exceptions au sein de leur sexe ? » (p. xi) « … dans ce livre, il ne saurait y avoir de place pour la vie d’une femme d’Athènes parmi d’autres, puisque ce qui en tient lieu n’est pas une vie et ne concerne jamais qu’une Athénienne à chaque fois » (p. xxiv). LORAUX 1997 : Loraux, La cité divisée. L'oubli dans la mémoire d'Athènes, Paris, Payot, 1997, p. 24 : « … à l’étude de la cité une a succédé la réflexion sur la division des sexes, et (que) la division des sexes a subrepticement introduit la cité comme cité divisée » 3. L’histoire des femmes en anthropologie historique : plaidoyer pour une histoire mixte, une histoire des représentations sociales du féminin (et du masculin) et une histoire de la hiérarchisation sociale des sexes. POMEROY 1975: Sarah Pomeroy, Goddesses, Whores, Wives and Slaves, Women in classical Antiquity, New York, Schocken Books. SCHMITT PANTEL 1982 : Pauline Schmitt Pantel, « La différence des sexes. Histoire, anthropologie et cité grecque (1982) », in M. Perrot (éd..), Une histoire des femmes est-elle possible ?, Marseille, 1984, p. 98-119 et 223-225 (reproduit dans P. Schmitt Pantel, Aithra et Pandora. Femmes, Genre et Cité dans la Grèce antique, Paris, L’Harmattan, 2009, p. 23-37). MOSSE 1983 : Claude Mossé, La femme dans la Grèce antique, Paris, Albin Michel. SCOTT 1988 : Joan W. Scott, « Gender: A Useful Category of Historical Analysis » American Historical Review, 91.5, 1986, trad. fr. « Genre: une catégorie utile d’analyse historique » Cahiers du GRIF « Le genre de l’histoire », 37-38, 1988, p. 125-155, p. 141. SCHMITT PANTEL 1991-1992 : Pauline Schmitt Pantel (dir.), Histoire des femmes en Occident, I. L’Antiquité, dans Duby et Perrot, Histoire des femmes en Occident, 5 vols. Plon. ERNOULT SEBILLOTTE 2007 : Nathalie Ernoult et Violaine Sebillotte (éd.), Problèmes du genre en Grèce ancienne, Paris, Publications de la Sorbonne, 2007. Diotima. Materials for the Study of Women and Gender in the Ancient World (www.stoa.org/diotima). La base de données n’a pas été mise à jour depuis le 7 avril 2011 (visite du 17 nov 2016). 4. L’apport de l’histoire de la sexualité et la déconstruction des catégories de sexe BEAUVOIR 1949 : Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe [1949], vol. 1, Gallimard, Folio essais 2000, p. 1112 : « Tout le monde s’accorde à reconnaître qu’il y a dans l’espèce humaine des femelles. Elles constituent aujourd’hui comme autrefois à peu près la moitié de l’humanité, et pourtant, on nous dit que « la féminité est en péril » : on nous exhorte : « soyez femmes, restez femmes, devenez femmes ». Tout être humain femelle n’est donc pas nécessairement une femme. Il lui faut participer à cette réalité mystérieuse et menacée qu’est la féminité » Violaine Sebillotte, Séminaire, 29 novembre 2016. 3 WITTIG 1976 : Monique Wittig, La catégorie de sexe [1976], Paris, 2001, p. 63 : « Les lesbiennes de sont pas des femmes ». Slogan des féministes radicales françaises (Colette Guillaumin, Monique Wittig, Nicole-Claude Mathieu notamment) : « Je ne serai ni homme ni femme au sens historique actuel ; je serai quelque Personne dans un corps de femme », Questions féministes 1, 1977, p. 15. FOUCAULT 1976-1984 : Michel Foucault, Histoire de la sexualité, I, II, III, Paris, Gallimard. HALPERIN 1990 : David Halperin, Cent ans d’homosexualité et autres essais sur l’amour grec [1990], trad. fr. Paris, Epel, 2000. HALPERIN 1988 : David Halperin, Oublier Foucault. Mode d’emploi, 1998, trad. Paris, EPEL, 2004 p. 18-19 : « Quelque chose de nouveau s’est produit dans les divers rapports qu’entretiennent les rôles sexuels, les choix d’objets sexuels, les catégories sexuelles, les conduites sexuelles et les identités sexuelles dans l’Europe bourgeoise de la fin du XVIIe au début du XXe siècle ; le sexe acquiert de nouvelles fonctions sociales et individuelles, et revêt une nouvelle importance pour définir et normaliser le soi moderne ». BUTLER 1990 : Judith Butler, Trouble dans le genre. Pour un féminisme de la subversion [1990], Paris, La Découverte 2005. BOEHRINGER 2012 : Sandra Boehringer, « Le genre et la sexualité. Etat des lieux et perspectives dans le champ des études anciennes », Lalies, 32. SEBILLOTTE CUCHET 2012 : Violaine Sebillotte Cuchet, « Régimes de genre et Antiquité grecque classique (Ve-IVe siècles av. J.C.) », Annales HSS 67, p. 573-603. 5. Un questionnement qui traverse l’ensemble du champ de la production sociale BOEHRINGER & SEBILLOTTE CUCHET 2011 : Sandra Boehringer & Violaine Sebillotte Cuchet (dir.), Hommes et femmes dans l’Antiquité grecque et romaine. Le genre : méthode et documents, Paris, A. Colin. FOXHALL 2013, Lin Foxhall, Studying Gender in Classical Antiquity, Cambridge, Cambridge University Press. Le champ du juridique et de l’économique BARRERE-MAURISSON 1984 : Barrère-Maurisson, Marie-Agnès (ed.), Le Sexe du travail, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble. FOXHALL 1996: Lin Foxhall, « The Law and the Lady : Women and Legal Proceedings in Classical Athens » dans L. Foxhall, A. D. Lewis (éd.), Greek Law in its Political Setting, Oxford, Clarendon Press, p. 133-152. VIAL 1996 : Claude Vial, « Statut et subordination », dans O. Cavalier (éd.), Silence et fureur. La femme et le mariage en Grèce. Les antiquités grecques du Musée Calvet, Avignon, Fondation du Musée Calvet, p. 339358, en part. p. 355. BROCK 1994: Roger Brock, “The labour of Women in classical Athens”, Classical Quaterly 44 (ii), p. 336346. SEBILLOTTE 2016, Violaine Sebillotte Cuchet, “Women and the Economic History of the Ancient Greek World. Still a challenge for gender studies”, in B. Lion et C. Michel (dir.), The Role of Women in Work and Society, Studies in Ancient Near Easter Records SANER, De Gruyter, p. 543-563. Le champ du politique PATTERSON 1987: Cynthia Patterson, « Hai Attikai: The other Athenians », dans Rescuing Creusa: new methodological approaches in antiquity, Helios, ns 13 (2), p. 49-67 KRON 1996: Uta Kron « Priesthoods, Dedications and Euergetism. What part did religion play in the Poitical and Social status of Greek Women?” dans Religion and power in the ancient Greek world, proceedings of the Uppsala Symposium 1993, ed. By Pontus Hellström et Brita Alroth, Uppsala, 139-182. BLOK 2005: Josine H. Blok, « Becoming citizens : Some Notes on the Semantic of Citizen’ in archaic and Classical Greece », Klio, 87-1, p. 7-40 JACQUEMIN 2005 : Anne Jacquemin, « Un autre conte de deux cités ou… Athéniennes et fières de l’être » Ktema, p. 337-347 Violaine Sebillotte, Séminaire, 29 novembre 2016. 4 SEBILLOTTE 2016: Violaine Sebillotte Cuchet, “Ces citoyennes qui reconfigurent le politique. Trente ans de travaux sur l’antiquité grecque”, Clio FGH 43/2, p. 185-215. 1. Aristote, Politique, III, 1,12 (1275b) : « La nature du citoyen (politês) ressort ainsi clairement de ces considérations : quiconque a la possibilité de participer au pouvoir délibératif et judiciaire (archês bouleutikês kai kritikês), nous disons dès lors qu’il est citoyen (politês) de cette cité, et nous appelons cité (polis) la collectivité des individus de ce genre en nombre suffisant pour vivre, en un mot, en autarcie. » 2. Aristote, Pol. 1275b21-25: “On définit dans l’usage le citoyen (politês) comme celui qui est né de deux parents citoyens (politai) et non d’un seul, son père ou sa mère » 3. [Aristote], Constitution des Athéniens, 26.4: « … Sur proposition de Périclès, on décida de ne pas partager la polis avec celui qui n’était pas né de deux astoi » 4. « Cette femme qui s’est prostituée dans toute la Grèce et [aurait voulu passer pour Athénienne], elle resterait impunie alors qu’elle n’est ni astê par ses ancêtres ni politis par décision du peuple (dêmos). » [Démosthène], C. Nééra 111 La question de la visibilité des femmes (normes statistiques et normes discursives) SCHAPS 1977: David M. Schaps, « The Woman Least Mentionned : Etiquette and Women’s Names », Classical Quaterly 27, p. 323-330 SCHMITT PANTEL 1994-1995 : Pauline Schmitt Pantel, « Autour d’une anthropologie des sexes. À propos de la femme sans nom d’Ischomaque », Mètis 9-10, 1994-1995, p. 299-305 GEORGOUDI [1993] 2003: Stella Georgoudi, « Lysimaché la prêtresse » dans La Grèce au féminin, N. Loraux, dir., Paris, p. 167-214. « Lysimachè, fille de Drakontidès, qui vécut 88 ans. Pendant toutes ces 64 années, elle servit Athéna et vit 4 générations d’enfants. Lysimachè, mère de (..) de Phlya. Démétrios a fait la sculpture » BIELMAN 2002 : Anne Bielman, Femmes en public dans le monde hellénistique. SEDES, Paris, Paris. Carnet de recherche « Eurykléia, Celles qui avaient un nom » : http://eurykleia.hypotheses.org/ S. Boehringer, A. Grand-Clément, S. Péré-Noguès, V Sebillotte Cuchet, « Celles qui avaient un nom. Eurykleia ou comment rendre les femmes visibles », Dossier Laisser son nom. Femmes et actes de mémoire dans les sociétés anciennes, Pallas 99, 2015, p. 11-20. V Sebillotte Cuchet, « Touchée par le féminisme. l’Antiquité et le genre », dans Anthropologie de l’Antiquité. Anciens objets, nouvelles approches, Pascal Payen et Evelyne Scheid-Tissinier (dir.), Turnhout, Brepols 2013, Publishers, 2012 ("Antiquité et Sciences humaines. La traversée des frontières", n° 1), p. 143-172