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Tiphaine Loiseaux
Tuteur : Jean-Loup Lemoine
Stage n°4, service de Médecine Interne à orientation Addictologique de
l’hôpital Fernand Widal, de mai à octobre 2011
RSCA N°4
Récit :
Un des premiers patients que je prends en charge dans le service de
médecine addictologique est M. B, 37 ans, hospitalisé de manière programmée
pour sevrage en alcool. A son arrivée, M. B. est alcoolisé (2.38g/l), fatigué, avec
un syndrome cérébelleux important. Son bilan d’entrée montre des stigmates
d’alcoolisme (VGM 102µ, bilirubine 24µmol/l, PAL 135UI/l, gGT 378 UI /l,
cytolyse 10N). Le sevrage se déroule sous doses dégressives de
benzodiazépines et vitamine B1. Malgré ce traitement, une crise comitiale
généralisée survient à J15 d’hospitalisation. L’EEG et l’IRM cérébrale réalisés à
cette occasion ne montrent pas d’autre étiologie que l’alcoolisme chronique. Le
travail addictologique réalisé par M. B. avec l’équipe soignante avance
doucement. Le patient revient notamment sur une histoire familiale lourde
avec de nombreux antécédents d’alcoolisme. A distance du sevrage, M. B.
semble se « regonfler » et retrouver une vie sociale avec les autres patients, et
construit un projet de sortie avec un séjour en post cure après une période
courte de retour à domicile. De mon côté, jeune interne motivée et
enthousiaste, j’investis beaucoup la prise en charge de ce patient sympathique,
et passe beaucoup de temps à discuter avec lui d’alcoolisme et à faire un bilan
général complet, insistant notamment sur la médecine préventive (remise à
jour des vaccins, règles hygiéno-diététiques…)
La déception est donc assez dure à supporter lorsque je croise M. B. à
peine trois jours après sa sortie dans les couloirs de l’hôpital, très fortement
alcoolisé et souhaitant à tout pris me voir pour ajouter du valium sur son
ordonnance de sortie. Les internes ne suivant pas les patients en consultation
après leur sortie je ne suis pas sensée répondre à sa demande, et le renvoie
vers son médecin traitant sans oublier de lui redonner le compte rendu
d’hospitalisation qu’il avait déjà reçu lors de sa sortie. Son médecin traitant me
le renvoie quelques jours plus tard avec une lettre qui m’est adressée
personnellement me demandant lui aussi de prescrire du Valium et de le
reprendre en charge. Pour tenter de débloquer la situation, je le contacte par
téléphone : visiblement dépassé par les évènements, le généraliste souhaitait
pour M. B. une nouvelle hospitalisation rapide. Le patient ne lui avait apporté
aucun document, et parmi tous les médecins du service n’avait retenu que mon
nom. Gênée d’enfreindre une règle du service, avec néanmoins l’accord de
mon chef de clinique, je reçois en consultation M. B.
Toujours aussi alcoolisé, il se montre très revendicatif, assez agressif,
accusant le service de l’avoir laissé tomber, d’être responsable de sa rechute.
Ne voulant pas entrer dans cette violence, je l’écoute patiemment. Son
agressivité se calme peu à peu et après un bon quart d’heure il devient capable
d’entendre mes propositions de prise en charge. Il était prévu un suivi en
hôpital de jour et en consultation avec un médecin du service, ce que je lui
réexplique. Prescrire des benzodiazépines ne me parait pas adapté. Il repart
moins agressif, avec une date de rendez vous de consultation et une lettre pour
son médecin traitant.
J’aurai l’occasion de le revoir une autre fois par la suite, pendant une
autre hospitalisation de M.B. suivi à cette occasion par un autre interne.
La première hospitalisation de ce patient aura permis d’entamer une
prise en charge alcoologique et de faire un bilan de son état de santé. Les
épisodes de retour dans le service en état d’alcoolisation aigue, bien que
désagréables pour les soignants, lui ont montré qu’une prise en charge dans la
durée était possible après la sortie d’hospitalisation, sans jugement sur ses
rechutes.
Axes d’étude :
Le cas de ce patient me posait problème à plusieurs niveaux :
1- Le médecin traitant de M. B. paraissait dépassé par les évènements et
peu à l’aise avec le suivi d’un patient alcoolique en médecine
ambulatoire. Comment organiser ce suivi avant et après une
hospitalisation pour sevrage ?
2- Si ce patient consultait son médecin généraliste dans les suites d’une
crise d’épilepsie, quelle serait la conduite à tenir ? Quelle prévention de
l’épilepsie chez les patients alcooliques ? Doit-on instaurer un traitement
de fond ?
3- Malgré une prise en charge optimale, le médecin ne peut pas tout
contrôler, spécialement dans la maladie alcoolique. La rechute si rapide
de M. B. m’a laissé un sentiment d’échec important. Comment gérer
cette impression tout en gardant son objectivité dans le soin ?
Partie 1 : sevrage d’alcool en ambulatoire
Comment organiser le sevrage d’un patient alcoolo-dépendant en ville ?
Quels en sont les pré-requis ? Quel traitement médicamenteux est
indispensable et dans quel but ? Quelles sont les mesures psychosociales à
associer ? Peut on réaliser tous les sevrages en ambulatoire ? Que faire en cas
de rechute ?
1/ Alcoolo-dépendance :
Selon l’Observatoire Français des Drogues et Toxicomanies, 10% des
adultes français ont une consommation d’alcool problématique (questionnaire
DETA). L’alcoolo-dépendance se définit selon les critères du DSM-IV par la
présence d’au moins trois des critères suivants dans les 12 mois précédents :
tolérance (besoin de quantités notablement plus fortes de la substance pour
obtenir l’effet désiré, effet notablement diminué en cas d’utilisation continue
d’une même quantité de la substance) ; syndrome de sevrage à l’arrêt
(tremblements, nausées et/ou vomissements, sueurs, anxiété, hallucinations,
agitation); prise d’alcool en quantités plus importantes ou pendant une période
plus prolongée que prévu, désir persistant ou efforts infructueux pour diminuer
ou contrôler l’utilisation de la substance ; beaucoup de temps passé à des
activités nécessaires pour obtenir la substance, à utiliser le produit ou à
récupérer de ses effets ; activités sociales, professionnelles ou de loisir
abandonnées ou réduites à cause de l’utilisation de la substance ; utilisation de
la substance poursuivie bien que la personne sache avoir un problème
psychologique ou physique récurrent susceptible d’avoir été causé ou exacerbé
par la substance. La dépendance à l’alcool peut être évaluée en consultation
par le questionnaire AUDIT développé par l’OMS.
Questionnaire AUDIT (dépendance à l'alcool)
Calculez votre score de dépendance à l'alcool. Pour chacune
de ces dix questions, cliquez dans la case qui répond le mieux
à votre cas.
Quelle est la fréquence de votre consommation d'alcool ?
jamais
2 à 4 fois par
mois
au moins 4 fois
1 fois par mois ou moins
2 à 3 fois par semaine
par semaine
Combien de verres contenant de l'alcool consommez-vous un jour typique où vous
buvez ?
1 ou 2
3 ou 4
5 ou 6
7 ou 8
10 ou plus
Avec quelle fréquence buvez-vous six verres ou davantage lors d'une occasion
particulière ?
jamais
une fois par
mois
moins d'une fois par mois
une fois par semaine
tous les jours
ou presque
Au cours de l'année écoulée, combien de fois avez-vous constaté que vous n'étiez
plus capable de vous arrêter de boire une fois que vous aviez commencé?
jamais
une fois par
mois
moins d'une fois par mois
une fois par semaine
tous les jours
ou presque
Au cours de l'année écoulée, combien de fois votre consommation d'alcool vous a-telle empêché de faire ce qui était normalement attendu de vous ?
jamais
une fois par
mois
moins d'une fois par mois
une fois par semaine
tous les jours
ou presque
Au cours de l'année écoulée, combien de fois avez-vous eu besoin d'un premier
verre pour pouvoir démarrer après avoir beaucoup bu la veille ?
jamais
une fois par
mois
moins d'une fois par mois
une fois par semaine
tous les jours
ou presque
Au cours de l'année écoulée, combien de fois avez-vous eu un sentiment de
culpabilité ou des remords après avoir bu ?
jamais
une fois par
mois
tous les jours
ou presque
moins d'une fois par mois
une fois par semaine
Au cours de l'année écoulée, combien de fois avez-vous été incapable de vous
rappeler ce qui s'était passé la soirée précédente parce que vous aviez bu ?
jamais
moins d'une fois par mois
une fois par
mois
une fois par semaine
tous les jours
ou presque
Avez-vous été blessé ou quelqu'un d'autre a-t-il été blessé parce que vous aviez
bu ?
non
oui mais pas au cours de l'année écoulée
oui, au cours de
l'année
Un parent, un ami, un médecin ou un autre soignant s'est-il inquiété de votre
consommation d'alcool ou a-t-il suggéré que vous la réduisiez ?
non
oui mais pas ou cours de l'année écoulée
oui, au cours de
l'année
Calculer votre score
Recommencer
Interprétation des résultats
Score entre 0-8 :
Ce questionnaire n'évoque pas une
consommation nocive
Score entre 9-12 :
Consommation nocive d'alcool
Score au delà de 13 : dépendance à l'alcool
Les complications de l’alcoolo-dépendance sont nombreuses. Parmi les
complications chroniques on note :
- Hépatiques : stéatose, cirrhose et ses complications, CHC
- Digestives :
pancréatite
chronique,
diarrhée
chronique,
malabsorption, œsophagite, gastrite, ulcères gastroduodénaux,
cancers du tube digestif
- ORL : cancers, pathologies dentaires, ulcérations, infections
- Cardiaques et vasculaires : HTA, troubles du rythme (flutter, ACFA,
ESA), myocardiopathie, AVC
- Métaboliques :
hypertriglycéridémie,
lipomatose,
carences
vitaminiques
- Hématologiques :
anémie,
macrocytose,
pancytopénie,
thrombopénie, leuconeutropénie, hypercoagulabilité
- Infectieuses : prévalence plus importante d’infections à
pneumocoques, BK, hépatites B et C
- Neurologiques : épilepsie alcoolique (y compris en dehors d’un
sevrage), troubles cérébelleux, encéphalopathie de Gayet Wernicke,
troubles cognitifs précoces, syndrome de Korsakoff, encéphalopathie
alcoolique, encéphalopathie de Machiafava Bignami, polynévrites des
membres inférieurs, NORB, douleurs chroniques
- Psychiatriques : dépression induites, troubles du sommeil, troubles
alimentaires, majoration ou découverte d’une pathologie préexistante
- Ostéo-musculaires : myopathies chroniques avec déficit musculaire
des ceintures, fractures itératives, ostéoporose, ostéonécrose
aseptique des têtes fémorales
- Dermatologiques : érythrose faciale, couperose, psoriasis, acné
Parmi les complications aigues de la consommation d’alcool, on note :
- Ivresse aigue, ivresse pathologique, coma éthylique
- Hépatites aigues, pancréatite aigue, complications d’une cirrhose
- Ulcères gastroduodénaux
- Encéphalopathie hépatique, épilepsie
- Troubles psychiatriques aigus, en particulier manifestations anxieuses,
risques suicidaires
- Décompensations aigues de pathologies sous jacentes
2/ Quand ?
Pour débuter un sevrage en alcool, il importe d’évaluer la consommation
d’alcool, le degré de dépendance et la motivation du patient. Avant le sevrage
proprement dit, plusieurs consultations sont nécessaires pour préparer avec le
patient un projet de prise en charge.
Le patient alcoolo-dépendant peut être conscient de sa dépendance ou au
contraire en phase de déni. Il importe de construire un conseil personnalisé
pour faire évoluer le patient à l’aide de techniques d’entretien motivationnel,
en s’appuyant si nécessaire sur l’entourage. Selon l’évolution du patient dans
sa démarche, les conseils portent sur les règles hygiéno-diététiques,
l’information sur les risques aigus et chroniques de l’alcool, les seuils de
prudence, éviter les situations à risque. Au fur et à mesure du suivi, les
stratégies et tactiques tendant à réduire la consommation évoluent vers l’aide
à maintenir une consommation modérée avant d’envisager un sevrage
complet. Un agenda des consommations peut être utile pour le suivi et la
valorisation du patient.
Le sevrage ambulatoire ne peut s’envisager qu’avec une participation active
du patient, il est donc dans l’idéal à l’initiative de celui-ci. Dans certains cas
c’est l’entourage qui en est à l’origine. Il faut alors s’assurer de la motivation
personnelle réelle du patient dans le projet. Certains sevrages sont dictés par
une certaine forme d’urgence, dans le cas d’une grossesse par exemple, et
pourraient être plus efficaces en hospitalisation qu’en ambulatoire.
La prise en charge de l’alcoolo-dépendance débute donc longtemps en
amont de la phase de sevrage proprement dite, par l’élaboration d’un projet
personnalisé, la maîtrise progressive des consommations et la planification de
l’arrêt et du suivi.
3/ Faut il prévoir un bilan ?
Le bilan avant le début du sevrage doit être systématique. Il a pour
objectif de rechercher les complications liées à l’alcool, et d’évaluer les risques
liés au sevrage. Il comprend au minimum :
- Biologie : NFS, plaquettes, TP, TCA , ASAT, ALAT, gGT, PAL, bilirubine,
ionogramme, créatinine avec calcul de la clairance, glycémie à jeun,
EAL, lipase, TSH, 25OH vitamine D, sérologies VHB, VHC, VIH avec
accord du patient, CRP, EPP
- ECG
- Radiographie de thorax
- Echographie abdominale
- Consultation ORL à la recherche de foyer infectieux ou néoplasique
Ce bilan doit être adapté à chaque patient en fonction de ses
antécédents et autres facteurs de risque.
4/ Quel traitement médicamenteux ?
Le sevrage en alcool présente des risques médicaux aigus. Le syndrome
de sevrage (sueurs, tremblements, nausée, vomissements, anxiété, HTA) peut
se compliquer :
- Délirium tremens : agitation, état confusionnel, hallucination à type
de zoopsies, tremblement rapide, troubles du sommeil, signes
neurovégétatifs intenses (sueurs, hyperthermie, tachycardie, HTA)
- Crise comitiale
- Hypokaliémie fréquente, potentiellement inductrice de troubles du
rythme cardiaque
- Carence en vitamine B1 : favorise la survenue de pathologies
neurologiques aigues (encéphalopathie de Gayet Wernicke)
- Déshydratation (carence d’apports liquidiens, sueurs)
- Décompensation d’une pathologie préexistante, en particulier
psychiatrique
L’intensité du syndrome de sevrage se mesure à l’aide de l’échelle de
Cushman :
Points
Fréquence
cardiaque
Pression
artérielle
systolique
0
1
2
3
< 80
81 à 100
101 à 120
> 120
< 125
126 - 135
136 - 145
> 145
< 135
136 - 145
146 - 155
> 155
< 145
146 - 155
156 - 165
> 165
< 16
16 à 25
26 à 35
> 35
Tremblements
0
Main
Sueurs
0
Paumes
Agitation
0
Discrète
18 à 30 ans
31 à 50 ans
> 50 ans
Fréquence
respiratiore
Membre
Généralisés
supérieur
Paumes et
Généralisées
front
Généralisée et Généralisée et
contrôlable incontrôlable
Phonophobie
Troubles
sensoriels
0
Photophobie
Hallucinations Hallucinations
critiquées
non critiquée
Prurit
Score < 7 : état clinique contrôlé
Score 7 à 14 : sevrage modéré
Score > 14 : sevrage sévère
Pour prévenir la survenue de ce syndrome et de ses complications, un
traitement médicamenteux est nécessaire.
a/ les benzodiazépines
Les benzodiazépines permettent de prévenir le syndrome de sevrage et
le risque de crise comitiale. On choisit une molécule de demi-vie intermédiaire
comme le diazépam. Leur utilisation est systématique à l’arrêt de l’alcool, et la
dose doit être adaptée au patient au jour le jour. Une trop forte dose induit
une somnolence mal acceptée par le patient. Les retours de patients trop dosés
en benzodiazépines portent sur le sentiment d’avoir été privés de leur
jugement pour arrêter l’alcool, et de subir le sevrage au lieu d’y participer
activement. Une trop forte dose majore également le risque d’effets
indésirables des benzodiazépines.
On débute souvent le sevrage par une dose de diazépam de 60mg par
jour (10mg toutes les 4h) avec adaptation au patient (ses antécédents de crise
comitiale, de syndrome de sevrage, de consommation de psychotropes) et au
déroulement du sevrage (survenue de signes de sevrage, signes de surdosage).
Les doses de benzodiazépines doivent être diminuées progressivement sur une
semaine (10 à 20mg de moins par jour). Il n’y a pas lieu de continuer un
traitement par benzodiazépines plus de 10 jours après le sevrage total en
alcool.
Chez le patient insuffisant hépatique, l’utilisation de benzodiazépines
doit être discutée en fonction du rapport bénéfices-risques. L’absence de
prévention du syndrome de sevrage et des crises comitiales est trop
dangereuse pour se passer de benzodiazépines et de surveillance quotidienne,
un sevrage hospitalier sera préférable.
Chez le patient qui consomme déjà des benzodiazépines, sa dose
habituelle doit être augmentée pour prévenir le syndrome de sevrage, selon un
tableau d’équivalences, pour ne garder qu’une seule BZD.
BENZODIAZÉPINES ET SOMNIFERES
Demi-vie (en h)
[Métabolite actif]
But commercial1
Équivalence approximative
Doses orales en (mg)2
Alprazolam (Xanax)
6-12
a
0.5
Bromazépam (Lexotan, Lexomil)
10-20
a
5-6
5-30 [36-200]
a
25
Clobazam (Frisium, Urbanyl)
12-60
a,e
20
Clonazépam (Klonopin, Rivotril)
18-50
a,e
0.5
[36-200]
a
15
Diazépam (Valium, Novazam)
20-100 [36-200]
a
10
Estazolam (ProSom, Nuctalon)
10-24
h
1-2
Benzodiazépines
Chlordiazépoxide (Librium, Librax)
Clorazépate (Tranxène)
Flunitrazépam (Rohypnol)
18-26 [36-200]
h
1
Flurazépam (Dalmane, Somnal)
[40-250]
h
15-30
Halazépam (Paxipam)
[30-100]
a
20
30-100 [36-200]
a
15-30
Loprazolam (Dormonoct, Havlane)
6-12
h
1-2
Lorazépam (Ativan, Témesta)
10-20
a
1
Lormétazépam (Noctamid, Noctamide)
10-12
h
1-2
Médazépam (Nobrium)
36-200
a
10
Nitrazépam (Mogadon)
15-38
h
10
Nordazépam (Nordaz, Calmday)
36-200
a
10
4-15
a
20
[36-200]
a
10-20
25-100
h
20
8-22
h
20
2
h
0.5
Zaleplon (Sonata, Starnoc)
2
h
20
Zolpidem (Ambien, Stilnoct, Stilnox)
2
h
20
5-6
h
15
Kétazolam (Anxon, Loftran)
Oxazépam (Serax, Serenid, Serepax, Séresta)
Prazépam (Centrax, Lysanxia)
Quazépam (Doral)
Témazépam (Restoril, Normison, Euhypnos)
Triazolam (Halcion)
Non-Benzodiazépines mais avec des réactions similaires3
Zopiclone (Zimovane, Imovane)
Pour un patient qui consomme par exemple quotidiennement un
comprimé de Rohypnol au coucher, on veut ne garder que du Diazépam. Si on
veut une dose de diazépam de 60mg par jour en début de sevrage, il faudra
ajouter 10mg de Diazépam par jour, en supprimant le Rohypnol. L’information
du patient est capitale au moment de la prescription, pour lui expliquer que sa
dose habituelle de BZD est bien prise en compte, que les équivalences existent
et qu’il est important de ne pas continuer plusieurs BZD en même temps.
Le risque de syndrome de sevrage de BZD à l’arrêt de ces traitements est
important chez le patient qui en prend depuis longtemps. Il est difficile
d’envisager un sevrage concomitant alcool et benzodiazépines. Il est donc
préférable de laisser le patient sous BZD après le sevrage en alcool avant
d’envisager dans un second temps un sevrage en BZD.
Pour un patient traité au long court par Carbamates il est préférable de
remplacer ce traitement par benzodiazépines, ou de préférer un sevrage
hospitalier.
Chez le patient qui continue une consommation d’alcool pendant la
période de prescription, les BZD n’auront plus ce rôle de prévention du
syndrome de sevrage ni des crises comitiales. Elles sont donc inutiles, et parfois
prises par le patient uniquement comme anxiolytique. On doit revoir avec le
patient les objectifs du sevrage, réévaluer sa motivation, pour adapter la prise
en charge.
b/ Vitaminothérapie
La supplémentation par vitamine B1 est indispensable pour éviter le
risque d’encéphalopathie de Gayet Wernicke. Elle doit se faire à la dose
minimale de 500mg par jour (type Bévitine 200mg trois fois par jour) per os de
préférence. Une voie IV est également disponible en cas de sevrage hospitalier.
On peut également utiliser les vitamines B1 et B6 (également 500mg par
jour) associées, il faudra alors ajouter de la vitamine PP comme cofacteur.
En dehors d’une maladie de Biermer ou d’une carence avérée en
vitamine B12, la prescription de celle-ci n’est pas nécessaire.
c/ Autres traitements
Les autres traitements seront décidés au cas par cas, en fonction des
symptômes : anxiété majeure indépendante du sevrage ou se poursuivant
après la période de sevrage physique d’alcool, hypokaliémies…
Les traitements d’appoint de l’alcoolisme, anciens ou en court
d’évaluation (Naltrexone, Acamprosate, Baclofène), n‘ont pas d’indication en
période aigue et peuvent être discutés par la suite en dehors de la phase de
sevrage.
5/Surveillance
Le patient doit être revu régulièrement par son médecin au cours de la
phase de sevrage, tous les deux à trois jours (ou plus selon les patients) en
début de sevrage puis de manière plus espacée. L’objectif de chaque
consultation est de rechercher des signes de sevrage, d’évaluer la tolérance des
traitements, de les adapter et de soutenir le patient dans sa démarche.
Un bilan biologique est recommandé après quelques jours à la recherche
d’hypokaliémie de sevrage ou de signes de déshydratation.
6/Mesures associées
Le sevrage s’intègre dans une prise en charge globale. Un soutien et un
suivi psychiatrique ou par un psychologue est souvent utile dès le début du
projet.
L’alcoolo-dépendance est souvent liée à des difficultés sociales, à
l’origine de la consommation ou qui en découlent. La prise en charge
s’accompagne d’un bilan social pour assurer au patient une ouverture de
droits, des aides financières, humaines ou techniques si nécessaire. L’alcoolodépendance est une maladie prise en charge à 100% par la sécurité sociale si le
patient présente des complications somatiques (délirium tremens, pathologie
hépatique etc.…) ou psychiatriques.
Les associations d’aide aux patients dépendants (Vie Libre, Alcooliques
Anonymes…) favorisent la poursuite de l’abstinence. Elles ont chacune leurs
particularités et leur fonctionnement propre, et peuvent être proposées aux
patients qui choisissent celle qui leur convient le mieux.
Par la suite, les traitements d’appoint d’aide au maintient d’abstinence
(Naltrexone, Acamprosate, Baclofène) peuvent être discutés.
Selon le projet du patient, un séjour en post cure peut être envisagé pour
consolider le sevrage, travailler sur les raisons de sa dépendance et pour les
patients désocialisés débuter une démarche d’intégration (par le travail ou
dans des communautés thérapeutiques)
7/ Quand hospitaliser ?
Le sevrage hospitalier ne concerne que 10% des sevrages en alcool. Il est
parfois nécessaire en cas de nombreuses tentatives de sevrages ambulatoire se
soldant par une rechute rapide ou un échec du sevrage, ou compliquée de
dépendance sévère, avec un syndrome de sevrage majeur ou la survenue de
crise comitiale. Il peut également s’envisager d’emblée en cas de pathologie
associée somatique ou psychiatrique, de dépendance à plusieurs produits, ou
de contexte socio environnemental difficile. Dans ce dernier cas, soustraire le
patient à son environnement est un facteur favorisant la réussite du sevrage. Il
faudra en revanche préparer avec attention la sortie du patient en travaillant le
projet social (logement, aides sociales, éventuelle post cure) pour limiter le
risque de rechute précoce à la sortie et éviter que l’hospitalisation soit
inutilement prolongée pour des raisons sociales.
Concrètement pour le médecin généraliste confronté à des difficultés
face au sevrage en alcool, adresser le patient à un médecin addictologue qui
décidera ou non de l’hospitalisation peut être une solution. Il ne s’agit pas de
multiplier les intervenants mais de donner au patient toutes les chances
d’adhérer au soin. Avant toute hospitalisation pour sevrage le patient doit être
préparé : le médecin doit lui donner des informations claires sur le
déroulement du sevrage, le cadre et les règles du séjour hospitalier. Le projet
doit dans l’idéal émaner du patient et pas uniquement du médecin ou de
l’entourage, même si certaines hospitalisations permettent au patient de sortir
d’un déni de son alcoolo-dépendance et constituer une première étape dans le
soin.
8/Que faire en cas de rechute ?
La demande du médecin traitant de M. B. dans le courrier qu’il m’avait
adressé était de lui prescrire des benzodiazépines dans le cadre d’une rechute
précoce d’alcoolisation. Quelle est l’attitude la plus adaptée en ville dans ce
cas ?
La ré alcoolisation s’intègre dans la maladie complexe et présentant de
nombreuses rechutes qu’est l’alcoolo-dépendance. Elle peut être le fait d’une
préparation insuffisante, de l’absence de projet de soin après le sevrage, de la
survenue d’un évènement de vie, d’une affection intercurrente, ou dans la
plupart des cas sans raison apparente. Il est important de ne pas culpabiliser le
patient face à cette rechute, et de rester dans une attitude empathique sans
banaliser l’évènement. L’arrêt total de la consommation d’alcool se fait
souvent après de nombreuses rechutes, sans pour autant repartir à zéro à
chaque fois. On fait avec le patient le constat de cet échec relatif, et on tente
d’en analyser les raisons pour mieux préparer le sevrage suivant.
Sur le plan médicamenteux, les médicaments de prévention du
syndrome de sevrage alcoolique peuvent être arrêtés, mais l’arrêt des
benzodiazépines doit se faire avec une grande prudence pour éviter le
syndrome de sevrage de benzodiazépines. Le patient les utilise souvent comme
anxiolytique, indication à réévaluer pour éventuellement les remplacer par une
autre classe moins à risque de dépendance.
Après plusieurs rechutes, la prise en charge hospitalière doit être
discutée pour un sevrage plus adapté et encadré.
Partie 2 : Consultation après une 1ère crise comitiale
Pour un patient adulte consultant en ville après une première crise
comitiale, dont le bilan étiologique réalisé le plus souvent aux urgences est
négatif, quelle prise en charge préventive doit-on organiser ?
Après une première crise d’épilepsie le patient aura le plus souvent été
reçu aux urgences. Il aura à cette occasion bénéficié d’un bilan étiologique de
débrouillage selon les recommandations de la SFMU.
Le bilan étiologique recommandé aux urgences est le suivant :
- Biologie : glycémie capillaire, bHCG pour les femmes en âge de
procréer, ionogramme sanguin, NFS, recherche de toxiques et
alcoolémie selon le contexte, bilan infectieux selon la présentation
clinique
- EEG : non recommandé en urgence, peut être réalisé dans les 48
premières heures, sauf état de mal épileptique non convulsivant,
méningo-encéphalite de forme fruste, déficit post critique, étiologie
toxique non précisée
- TDM cérébral : recommandé dans le cadre d’une première crise
d’épilepsie chez l’adulte (grade C), une IRM est recommandée dans la
suite du bilan (grade B)
Si ce premier bilan étiologique est négatif se pose la question de la sortie
du patient. Pour l’urgentiste elle est possible si tous ces critères sont remplis :
- Retour à un état clinique basal, en particulier en l’absence totale de
symptômes neurologiques.
- Normalité de toutes les investigations cliniques et paracliniques
- Transmission d’un document écrit précisant toutes les
recommandations de sécurité nécessaires à cette pathologie.
- Accompagnement d’une personne responsable garantissant la
sécurité du patient dans le suivi immédiat
- Adhésion au suivi médical ultérieur
- Consultation neurologique possible dans la semaine qui suit
Le patient sortira alors souvent avec une liste de recommandations à
suivre jusqu’à la consultation neurologique :
- Arrêter le travail
- Se reposer : éviter toute situation entraînant un risque de surmenage
- Beaucoup dormir : éviter toute situation favorisant le manque de
sommeil
- Ne pas prendre de médicaments potentiellement convulsivants
(exemple : tricycliques)
- Ne pas prendre irrégulièrement des médicaments ayant des
propriétés anticonvulsivantes (exemple : benzodiazépines )
- Ne pas pratiquer d’activité dangereuse (conduite d’un véhicule à
moteur, natation, escalade)
- Éviter de consommer de l’alcool
Muni de toutes ces informations en vrac, le patient consulte alors
souvent son médecin traitant pour plus de précisions. Quelle attitude adopter ?
1/ Reprendre les circonstances de la crise et compléter le bilan étiologique
Rappel des principales étiologies des crises comitiales :
- Tumeurs
- Vasculaires : accidents ischémiques et hémorragiques, malformations
vasculaires
- Traumatiques : crises précoces, dans la première semaine suivant le
traumatisme, réactionnelles à une agression cérébrale aiguë et qui
constituent un facteur de risque d’une épilepsie ultérieure ; crises
tardives ou épilepsie post- traumatique (EPT) : répétition spontanée
de crises en rapport avec une lésion post-traumatique
- Infectieuses
- Toxiques, médicamenteuses
- Métaboliques
- Anomalies du développement cortical
- Criptogénique
Il faut si possible récupérer le compte rendu de la prise en charge
hospitalière, et revoir avec le patient les circonstances de la crise : facteur
déclenchant, caractéristiques de la crise, conséquences traumatologiques.
Détailler toute prise d’alcool, de drogue ou de médicament.
On reprendra l’examen clinique complet en particulier neurologique en
recherchant d’une part des conséquences traumatologiques de la crise
comitiale, d’autre part des points d’appels étiologiques infectieux et
neurologiques, des facteurs de risques d’emboles, de lacunes ou d’accidents
vasculaires cérébraux.
Si cela n’a pas été fait aux urgences, on complète le bilan étiologique en
s’adaptant au contexte. L’IRM cérébrale est systématique pour une première
crise chez un patient adulte.
2/ Mise en route d’un traitement
Après le bilan étiologique de la crise se pose la question du traitement de
fond. En pratique le patient consultera un neurologue dans la semaine qui suit
la crise. Le médecin généraliste peut rarement être amené à prendre ce genre
de décision, mais doit en connaitre les indications, effets indésirables et
modalités de suivi.
La discussion de traiter ou non dès la première crise ne se pose qu’en cas
de crise généralisée tonico-clonique car le risque de récidive est difficile à
estimer (30 à 40%), l’efficacité du traitement impossible à déterminer mais, à
l’inverse, les conséquences sociales et psychologiques de l’« étiquette
épileptique » sont certaines. L’indication de traiter une première crise
généralisée tonico-clonique spontanée peut être licite :
o
en l’absence de facteur déclenchant;
o
en présence de paroxysmes EEG intercritiques;
o
selon le vécu de la première crise et de ses conséquences directes
(chutes, blessures, traumatisme crânien, luxation d’épaule,
tassement vertébral, etc.);
o
selon l’âge (risque des chutes chez les personnes âgées), la
profession (à risques ou non);
o
selon l’anxiété et la demande du malade.
La décision de traiter dès la première crise est immédiate pour tous les
autres types de crises : absences, myoclonies, crises partielles symptomatiques
ou non car elles se caractérisent par leur propension à récidiver ; la seule
exception en pratique est l’épilepsie à paroxysmes rolandiques.
Le choix du traitement dépend du type de crise. Pour une crise
généralisée tonico-clonique on propose du Valproate de sodium (Depakine®),
Carbamazépine (Tegretol®), Lamotrigine (Lamictal®), ou Lévétiracétam
(Keppra®).
3/ Surveillance des traitements
La surveillance clinique est recommandée à un mois, six mois et un an
par un neurologue, puis régulièrement pour contrôler l’efficacité et la tolérance
du traitement, ainsi que son observance. On recherchera les risques
d’interactions médicamenteuses.
La surveillance biologique recommandée par l’HAS comprend :
- NFS pour recherche de leucopénie fréquente, thrombopénie ou
agranulocytose
- Bilan hépatique : élévation isolée des gGT fréquente, rares hépatiques
- Ionogramme sanguin : hyponatrémie fréquente
- ECG : troubles de la conduction
- INR
Le rythme conseillé est pour les carbamazépines une fois par semaine le
premier mois puis une fois par mois, moins régulièrement pour les autres
traitements.
Si le traitement est mal toléré, il faut immédiatement arrêter le
médicament en cas d’éruption cutanée ; vérifier si possible les taux sanguins du
médicament, rechercher un éventuel surdosage, une interaction
médicamenteuse et d’autres effets indésirables biologiques selon le
médicament en cause. Si l’arrêt est décidé, on choisira un autre antiépileptique
avec prescription temporaire d’une benzodiazépine en attendant des taux
sanguins actifs.
4/ Mesures associées
On reprend avec le patient les RHD préventives et les situations à risque
à éviter. Aucun régime alimentaire, consommation possible avec modération
de vin ; éviter les dettes de sommeil, favoriser la régularité des horaires de
sommeil, prévenir les risques domestiques, par des moyens simples : mobilier
sans arêtes, literie basse, système de sécurité pour l’arrivée d’eau chaude,
protection des plaques de cuisson, les douches sont préférées aux bains. La
télévision, les jeux vidéo sont parfaitement supportés chez la plupart des
épileptiques. Des précautions simples sont à prendre en cas de photosensibilité
(pièces suffisamment éclairées, port de lunettes de soleil, regarder la télévision
à une distance suffisante, éviter de s’approcher pour régler l’image). Seulement
certains sports mettant le pronostic vital constamment en jeu sont interdits :
alpinisme, plongée sous-marine, deltaplane, planche à voile, sports
mécaniques, etc. La piscine est autorisée si les crises sont bien maîtrisées.
L’orientation professionnelle pourra conduire à l’aménagement du poste
de travail. Il est recommandé au patient de consulter son médecin du travail.
Cependant, les métiers qui peuvent perturber le sommeil ou qui requièrent une
attention continue ou qui présentent des dangers en cas de crise pour le
malade lui-même ou pour les autres personnes sont déconseillés et parfois
interdits par la loi :
- le travail à la chaîne, en hauteur, sur machines dangereuses,
- les emplois nécessitant un permis de conduire professionnel,
- les secteurs d’activité à l’accès réglementé : transport ferroviaire,
aviation civile, plongeurs professionnels et travaux en caisson, police
nationale, etc.
Le médecin a une obligation légale d’informer son patient des démarches
concernant le permis de conduire. L’accès au permis de conduire ou sa
conservation nécessite le passage devant la commission médicale
départementale qui accorde ou non une autorisation d’aptitude, généralement
temporaire, uniquement pour les permis B. Dans le cadre des épilepsies graves,
la conduite automobile est interdite par la loi. Le patient doit déposer une
demande de convocation auprès de la commission départementale du permis
de conduire de la préfecture ou de la sous-préfecture de son domicile.
Les épilepsies graves donnent lieu à une prise en charge à 100% au titre
d’ALD selon les critères suivants :
- retentissement cognitif, psychoaffectif, familial et éducatif, scolaire
pour l’enfant, professionnel pour l’adulte ;
- fréquence, nature et pharmacorésistance des crises (pouvant être à
l’origine de chutes ou entraîner une rupture du contact avec
l’entourage, sévérité allant jusqu’à l’état de mal épileptique) ;
- effets indésirables liés aux traitements antiépileptiques.
Partie 3 : gérer ses émotions face au patient
Lors d’une de mes premières supervisions de stage chez le praticien, le
médecin avec qui je travaillais m’a dit qu’une des choses les plus importantes
dans la relation thérapeutique était de ne pas faire peser son angoisse sur le
patient. Que ce soit lors de l’annonce d’une mauvaise nouvelle ou comme dans
le cas de M. B. pour une rechute, le médecin doit rester dans une attitude de
soin. Comment apprendre à améliorer son attitude thérapeutique ?
« La fonction apostolique comprend aussi le besoin irrésistible du
médecin de prouver à ses patients, au monde entier et à lui-même qu’il est
bon, bienveillant, avisé et efficace ». Dans ce contexte d’exigence, comment
gérer une déception vis-à-vis de l’efficacité d’une prise en charge sans la faire
peser au patient ?
1/ Au cours des études de médecine
a- Les cours
Au cours des premier et deuxième cycles des études médicales, la majorité
de la formation repose sur le « savoir faire » et non sur le « savoir être ».
Quelques cours sont consacrés à la relation soignant-soigné. Un des items du
concours de l’internat concerne l’annonce d’une mauvaise nouvelle. Ces cours
théoriques donnent des bases de réflexion que chacun doit utiliser par la suite
pour construire sa propre pratique. A l’occasion de certains TP les étudiants ont
la possibilité de participer à des jeux de rôles sur des thèmes choisis : conflit
avec la famille, annonce d’une mauvaise nouvelle… Ces jeux de rôle sont
l’occasion de réfléchir sur des situations complexes sur le plan relationnel, mais
interviennent au cours de l’externat, pendant lequel l’étudiant n’a pas toujours
été confronté directement à ces situations en position de responsabilité.
Lors des stages chez le praticien, des groupes d’échanges de pratiques
permettent de débattre et de partager ses expériences sur les prises en charges
médicales, et des groupes de « relation thérapeutique » permettent une
première approche des techniques d’amélioration de l’attitude soignante.
Chaque séance dure 2h, par petits groupes de 8 à 10 internes, accompagnés
d’un médecin formé aux techniques Balint. Deux à trois internes présentent un
cas qui leur a posé problème sur le plan relationnel, et les autres peuvent réagir
en soulignant certains aspects de la relation, cherchant ce que pouvait sousentendre l’attitude du patient, ce qu’il attendait de la consultation, ce que
l’interne qui présente lui a apporté non, afin d’analyser le contenu relationnel
de l’histoire racontée. L’objectif est de chercher à comprendre l’attitude du
patient, du soignant et l’interaction entre les deux personnes pour chercher
des moyens de l’améliorer. Une initiation au psychodrame Balint est également
proposée. La présentation du cas est différente, plus proche du jeu de rôles,
puisque les internes jouent les rôles des soignants et des soignés, et que
chacun peut intervenir en se plaçant derrière le personnage à qui ils peuvent
faire prononcer une phrase pertinente dans la relation thérapeutique.
La pertinence de ces groupes est plus importante que lors des années
d’études précédentes, chacun des cas se reportant à une situation vécue réelle,
avec un mode de fonctionnement proche de celui qui sera utilisé lors
d’éventuels groupes Balint au cours de notre pratique future.
b- Les stages
La relation thérapeutique s’apprend beaucoup plus avec les patients
qu’avec les cours. Ce sont leurs réactions face à notre attitude qui nous
apprennent à nous adapter et à améliorer nos pratiques.
Les premiers stages cliniques ou l’externat sont l’occasion de rencontrer des
médecins plus expérimentés et d’avoir un aperçu de leur pratique, de leur
relation aux patients, aux familles, à l’équipe soignante. Assister aux
consultations de séniors dans des spécialités aussi variées que gériatrie, soins
palliatifs, urgences, addictologie, médecine générale… permet d’apprendre à
s’adapter à chaque patient.
Face à toutes ces situations, il est tentant de se construire un personnage en
tant que médecin, qui peut servir de refuge en cas de consultation compliquée.
La difficulté est que ce personnage peut rester inamovible et ne pas convenir à
chaque patient. Il faut savoir s’en détacher pour garder une attitude
thérapeutique adaptée.
2/ Lors de la pratique
a- Groupes Balint
Lors de son exercice, et dans le cadre de la formation continue, le médecin
généraliste peut choisir de participer à un groupe Balint.
Une définition du groupe Balint a été formulée lors du Congrès international
Balint à Bruxelles en 1974 : «Groupe de médecins se réunissant régulièrement
pour examiner la relation médecin-malade à travers l’exposé d’un cas. Ce
travail s’appuie sur les données de la psychologie de l’inconscient. La
verbalisation des problématiques extra-professionnelles n’est pas posée
comme but. Ces groupes sont animés par un ou des leaders psychanalystes
formés à cette méthode. Ces groupes peuvent être étendus à des personnes
non-médecins ayant des responsabilités thérapeutiques. »
Le mode de fonctionnement du groupe est proche de celui utilisé lors des
études de médecine. Selon la définition de la Société Médicale Balint, le travail
repose sur la prise en compte de l’inconscient, basée sur une « position
centrale de l’évocation libre de l’histoire clinique et des associations d’idées.
Elle favorise l’apparition d’images, de souvenirs, d’émotions, de fantasmes,
autant chez le présentateur du cas que chez les autres participants, la mise en
lumière des dimensions inconscientes présentes dans la demande du patient,
dans les réactions du médecin et dans leur relation (projections, identifications,
transfert et contre-transfert...). » Les scènes de psychodrame utilisent des
techniques comme les soliloques, le jeu en miroir, l’inversion de rôles, le
doublage à partir du groupe, ou la méthode du double. Les animateurs de
groupes Balint sont des psychanalystes ou des soignants ayant effectué un
travail analytique personnel. Ils sont accrédités selon des critères et par une
démarche fixée par la Société Médicale Balint. Ils ont pour rôle d’assurer la
liberté de parole et de veiller à ce que les participants puissent aborder en
profondeur les différents niveaux de leur implication relationnelle avec les
patients, d’aider chaque participant à avancer dans la compréhension et la
résolution des problèmes posés par la rencontre avec les patients et de
maintenir le cadre du dispositif de travail.
b- Autres
Les groupes Balint explorent les aspects de la relation thérapeutique.
Certaines questions posées par le travail en groupe peuvent évoquer des
problèmes plus personnels qui ne seront pas l’objet du groupe Balint.
Bibliographie :
DSM-IV
Cours des Dr Questel (PH) et Dr Petit (CCA) du service de Médecine Interne
Addictologique de Fernand Widal)
Observatoire Français des Drogues et Toxcomanies http://www.ofdt.fr/
Stratégies d’évaluation des problèmes d’alcool, S. Coscas, L. Karila, A.
Benyamina, M. Reynaud, hôpital Paul Brousse, Département de Psychiatrie et
d’addictologie
Société Française d’Alcoologie, Référentiel de Bonnes Pratiques, Sevrage simple
en alcool (2006)
HAS santé : Conférence de consensus : Objectifs, indications et modalités du
sevrage du patient alcoolo-dépendant (17 mars 1999)
Société Française de Médecine d'Urgence - sous commission veille scientifique
2007 Les crises convulsives de l’adulte au service d’Accueil et d’Urgence : 1ère
conférence de consensus en Médecine d’Urgence, Genève, avril1991, actualisé
en 2001 : deuxième actualisation 2006. Albert Trinh-Duc, Olivier Fougeras,
Jean-Marc Philippe, Sandrine Charpentier, Valérie Raphaele, Christophe Perrier,
Christophe Sureau, James Couvreur, Mirko Cristiano, Claude Poio, Françoise
Carpentier, Sandrine Stempfle, Catherine Le Gall. Groupe de veille scientifique
de la SFMU. COMMISSION DU CONSENSUS, VEILLE SCIENTIFIQUE, PARIS, 2006,
SFMU
Collège des enseignants en neurologie : www.cen-neurologie.fr
Guide HAS épilepsie grave (guide médecin et guide patient)
Société Médicale Balint : http://www.balint-smb-france.org/
Thèse pour le doctorat en médecine, Sophie Brenuchot, Paris Descartes, 7 avril
2010, « Psychodrame Balint pour les internes en médecine générale à
l’université Paris Descartes : Etude Qualitative »
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