Pour une meilleure prise en compte des Anthophila (abeilles

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Pour une meilleure prise en compte
des Anthophila (abeilles sauvages) dans
les espaces naturels et forestiers - Partie 1
Des abeilles domestiques pour favoriser la biodiversité ?
par Guillaume Lemoine (Société entomologique du Nord de la France)
[email protected]
Face à la diminution importante des pollinisateurs
sauvages et domestiques, et compte tenu
de l’importance du rôle qu’ils jouent dans la
pollinisation et la reproduction de la flore dans
les écosystèmes naturels et les agrosystèmes, de
nombreux acteurs se mobilisent pour leur prise en
compte et leur protection afin d’en enrayer le
déclin. Les pollinisateurs sauvages et domestiques
(abeilles de ruches) font l’objet d’une attention
particulière de la part de la Région wallonne (Plan
Maya à partir de 2011) et sont l’objet depuis de
nombreuses années de diverses études et suivis
de la part de différents laboratoires universitaires
ou de recherche de Mons, Gembloux, Liège…
ou de Bruxelles (ULB, Institut royal des sciences
naturelles) qui ont su conserver et développer
une véritable connaissance scientifique sur les
abeilles sauvages. Cette prise de conscience
n’est toutefois pas récente. Elle s’inscrit dans
le cadre d’une recommandation de 1991 du
Comité permanent de la Convention de Berne
(Conseil de l’Europe), qui concernait la protection
des insectes de l’ordre des Hyménoptères et de
leurs habitats. La Région wallonne a également,
dans ce sens, modifié par décret en date du
06 décembre 2001, la loi de la Conservation
de la nature (du 12 juillet 1973) pour la prise en
compte de la directive « oiseaux » de 1979, de
la directive habitats-faune-flore de 1992 et de
la Convention de Berne. Cette loi, qui définit
le statut de protection et les listes des espèces
concernées par une protection, impose ainsi
la protection de 47 taxons d’Hyménoptères
(ces taxons regroupent soit une espèce soit
l’ensemble des espèces d’un genre complet).
De l’autre côté de la frontière franco-belge, les
pollinisateurs sauvages font l’objet d’un plan
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Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
© GUILLAUME LEMOINE
Introduction
Le Dasypode à pied hérissés (Dasypoda hirtipes)
ou Abeille à culotte, une espèce protégée en Wallonie
national d’actions (PNA) « France, Terre de
pollinisateurs » coordonné par le ministère français
de l’Écologie et du Développement Durable et
de l’Énergie et dont la rédaction a été confiée
à l’Office pour les insectes et leur environnement
(OPIE). Celui-ci a été présenté en conseil des
ministres le 20 mai 2015. La rédaction de ce PNA
était prévue dans le code de l’environnement
(article 129 de la loi dite « Grenelle 2 » du 12
juillet 2010) et a été rappelée dans la feuille de
route pour la transition écologique lors de la
conférence environnementale du gouvernement
des 14 et 15 septembre 2012. Ce plan a pour
vocation d’être complémentaire du Plan de
développement durable de l’apiculture mis en
œuvre au premier semestre 2013. Une initiative
similaire est également développée au Grand
Duché de Luxembourg (2014).
Nord – Pas-de-Calais et la Wallonie (Sud Hainaut)
partage la même « abeille ». Il s’agit de l’écotype
Chimay-Valenciennes décrit par Hubert Guerriat
et Jean Vaillant suite à des mesures biométriques
et des analyses réalisées sur l’ADN mitochondrial
(Demarcq, 2010).
© GUILLAUME LEMOINE
L’objet du présent numéro de Parc et Réserves
est de présenter le groupe des Anthophila que
sont les Hyménoptères apocrites (caractérisés par
un net étranglement au niveau de l’abdomen),
aculéates (à aiguillon) et apiformes (abeilles),
et les principaux enjeux liés à leur préservation.
Il s’agit en effet d’insectes qui sont dans leur
majorité menacés. Après avoir présenté ce
groupe d’espèces (écologie, cycle de vie…), les
causes de leur déclin, leurs rôles et les menaces
qui pèsent sur lui… diverses pistes d’actions très
générales sont proposées pour préserver ou
renforcer les populations d’Anthophila dont
le rôle est stratégique pour la pollinisation des
plantes sauvages et cultivées, et la stabilité des
écosystèmes.
Abeille domestique et biodiversité
Où est passée l’abeille noire ?
Commençons notre présentation par la plus
connue : l’Abeille domestique, très médiatique
et qui fait l’objet de toutes les attentions. Les
apiculteurs se mobilisent contre l’effondrement
des colonies fragilisées par l’usage de nombreux
pesticides et la disparition progressive des
éléments écologiques et paysagers présents dans
les espaces agricoles. La situation de l’Abeille
domestique est préoccupante. Mais de quelle
espèce ou de quel taxon parle t-on ? Apis mellifera
est une espèce à large répartition. Présente
originellement en Afrique, Europe et Proche-Orient,
elle montre quatre lignées évolutives différentes et
forme un ensemble de 26 sous-espèces (Garnery,
2013). Chez nous c’est une espèce originaire de
la lignée ouest-méditerranéenne qui a réussi à
se réfugier dans le pourtour méditerranéen lors
de la dernière glaciation avant de reconquérir,
lors du réchauffement qui a suivi, une grande
partie de l’Europe jusqu’au sud de la Scandinavie
(60° de latitude) et jusqu’à l’Oural. Une aire de
répartition aussi vaste, aux climats très contrastés,
a vu apparaître diverses sous-espèces clairement
identifiées dont l’abeille noire (Apis mellifera
mellifera) pour l’Europe du nord-ouest et du nord
(Albouy, 2011) pour laquelle différents écotypes
existent dans les diverses régions européennes. Le
Des abeilles noires de plus en plus rares
Utilisées comme source de miel depuis la
Préhistoire, comme l’atteste une scène d’une
peinture rupestre trouvée en Espagne dans la
Cueva de la Araña datant de 5 ou 6000 ans
avant J.C. (Darchen, 2003 ; Marchenay, 1979),
puis domestiquées au cours de l’Antiquité comme
le montrent les traces écrites de son exploitation
figurant sur des tablettes de Mésopotamie (3000
ans avant J.C.) et sur le temple du soleil à Abu
Ghorab (Egypte) datées de 2400 ans avant J.C.
(Darchen, 2003), les abeilles sont exploitées par
l’homme dans les régions méditerranéennes
depuis bien longtemps.
Dans nos régions, le développement de
l‘apiculture semble plus récent. Il a été
encouragé par Charlemagne en 799. Dans
son célèbre Capitulaire « de Villis » l’empereur
donne ses instructions : « Que chaque intendant
ait autant d’hommes employés à nos abeilles,
pour notre service, qu’il a de terres dans son
ressort » (Marchenay, 1979). Pourtant, depuis
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© GUILLAUME LEMOINE
quelques décennies, l’abeille noire s’est faite rare
dans les ruchers de nos régions, voire disparaît
de certaines régions d’Europe d’où elle était
native. Les apiculteurs l’ont délaissée au profit
de sous-espèces importées à partir de 1850
originaires d’autres régions d’Europe comme les
sous-espèces suivantes : l’italienne (Apis mellifera
ligustica), la carniolienne (Apis mellifera carnica)
originaire des pays de l’ex-Yougoslavie, de la
Hongrie, de l’Autriche…, et la caucasienne (Apis
mellifera caucasica) originaire du Caucase
(Géorgie), et de leurs hybrides comme la buckfast,
régionales ou de moins en moins régionales.
Les ruchers de certaines régions françaises
sont formés d’abeilles « importées » à 90 %. Le
taux moyen d’abeilles exogènes en France est
proche de 30 % (Garnery, 2013). L’abeille noire
devient rare dans les ruchers et nombreuses sont
les initiatives qui visent à la conserver (ruchers
conservatoires) et en faire la promotion. L’Abeille
domestique est, comme son nom le rappelle, une
espèce « domestique » que l’on peut facilement
manipuler, déplacer, contrôler et élever en grand
nombre dans une promiscuité qui n’a souvent
rien de naturelle. Elle est ainsi
« domestique » même si l’homme
n’en a pas profondément modifié
ni la forme, ni le comportement. On
estime à 16 millions le nombre de
ruches en Europe. Elles produisent
12 % de la production mondiale
de miel. Les abeilles sont élevées
et « exploitées » dans les ruchers
dont une partie est placée à
proximité de cultures industrielles
(verger, colza, tournesol…), et
sont fortement dépendantes de
l’homme qui prélève leur miel
et doit souvent le remplacer par
un succédané pour assurer la
nourriture hivernale de la colonie.
Les traitements anti-parasitaires,
contre l’acarien Varroa destructor
une race issue de multiples croisements, créée
au début du XXème siècle (Albouy, 2011, Astier,
2014). Ces introductions ont été faites dans le
but de donner des colonies plus productives,
plus fortes en nombre d’individus et ayant une
plus longue période d’activité (et parfois des
individus plus doux !). La « course » à la production
de miel est d’autant plus regrettable lorsqu’elle
est faite par des apiculteurs « amateurs » qui
pratiquent l’apiculture par plaisir et comme loisir.
La sélection artificielle, l’élevage et le clippage
des reines… ainsi que le déplacement des
colonies (transhumance) sont monnaie courante
dans l’apiculture moderne. Les différentes races
d’abeilles domestiques utilisées depuis le début
du XXème siècle peuvent donc être considérées
comme des sous-espèces pas forcément
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Colonie d'abeilles nombreuses et plus douces
Inspection d’un cadre de hausse
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et contre diverses maladies, sont quasiment
obligatoires si les apiculteurs souhaitent conserver
une partie de leurs cheptels tant la mortalité des
colonies est importante en fin d’hiver (entre 30
et 70 % en fonction des régions et des années).
Les colonies « sauvages » des nombreuses sousespèces introduites et leurs hybrides peuvent
difficilement survivre seules l’hiver (Layec, 2010)
contrairement à l’abeille noire, notamment dans
les régions du nord-ouest européen, à hivers froids
et humides. L’abeille noire étant une sous-espèce
adaptée au climat frais et aux hivers longs. Les
colonies sauvages pérennes sont probablement
inexistantes en métropole (Vaissière, 2015) ou
dehors de la région méditerranéenne. Même
dans cette région, l’indigénat de l’abeille peut
être discuté tant le mélange entre les souches
domestiques et sauvages est important (Rasmont,
2012 in Aubert, 2014). L’Abeille domestique
actuellement utilisée est ainsi un animal d’élevage
continuellement « amélioré » et suivi par l’homme.
Considérer l’Abeille domestique, actuellement
utilisée, comme une espèce sauvage, se résume
à comparer un groupe de chiens errants à une
meute de loups.
Des abeilles mortes retrouvées sur un cadre de ruche
Le complexe représenté par ce que l’on appelle
l’« Abeille domestique », stratégique pour les
services de pollinisation des cultures et la
production de miel, n’en est pas moins menacé
par diverses pratiques agricoles. L’intensification
de l’agriculture et les changements dans
l’utilisation des terres agricoles sont les menaces
principales auxquelles cette espèce est
confrontée. La pollution découlant des déchets
agricoles et la destruction des milieux naturels
liée à l’urbanisation contribuent aussi à leur
régression (Magiera & Pullen, 2014). En France,
l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire
de l’alimentation, de l’environnement et du
travail) cite diverses causes de mortalité des
abeilles domestiques qui ici sont brièvement
présentées. Les principales sont de deux ordres :
l’exposition aux produits chimiques et la perte
des ressources alimentaires. La première cause
de déclin correspond très probablement à
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Une espèce menacée
L’usage généralisé des traitements biocides est la première
cause de disparition des abeilles
l’exposition des abeilles, comme l’ensemble des
organismes vivants, aux divers agents chimiques
susceptibles d’être présents dans l’environnement.
Dans les zones cultivées, la majeure partie de
ces agents chimiques appartient à la catégorie
des produits phytopharmaceutiques, encore
appelés produits phytosanitaires ou pesticides.
Les abeilles sont exposées directement lors de
l’application des traitements, mais également
via les résidus de pesticides contenus notamment
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• e
n l’échange de cheptels apicoles entre
pays et continents, principalement des reines,
mais aussi des essaims entiers qui apportent
et disséminent nombreux parasites auprès de
populations locales n’ayant pas développé
les résistances naturelles ad hoc au cours du
temps,
La simplification des cultures et l’extension
des parcelles limitent les ressources disponibles
Des reines ou des essaims échangés entre les continents
© GUILLAUME LEMOINE
© GUILLAUME LEMOINE
dans les matrices récoltées par les abeilles
(ANSES 2013). Les pesticides, notamment les
neurotoxiques désorientent les abeilles, modifient
leur comportement et fragilisent leurs systèmes
immunitaires. La seconde raison du déclin des
abeilles correspond à la diminution des ressources
alimentaires. Les abeilles ont besoin pour assurer
leur cycle de vie, d’un pollen de qualité issu d’une
flore diversifiée (source de protéines) et de nectar
(source d’énergie). La diminution de la biodiversité
dans les espaces agricoles, liée notamment à la
monoculture a pour conséquence une réduction
du nombre d’espèces de plantes disponibles et
un raccourcissement de leur temps de floraison.
Au manque de pollen qui entraîne l’absence
de réserves suffisantes, s’ajoute un manque de
diversité dans les pollens récoltés qui affecte la
bonne santé des populations d’abeilles (ANSES,
2013). Le syndrome d’effondrement des colonies
d’abeilles (colony collapse disorder) est constaté
à l’échelle mondiale sur tous les continents
avec plus ou moins d’importance, mais plus
particulièrement dans les pays industrialisés,
notamment aux Etats-Unis. Deux grands types
de facteurs peuvent l’expliquer. En plus des
facteurs liés à l’environnement (pesticides et
érosion de la biodiversité) s’ajoutent ceux, moins
connus, liés aux pratiques des apiculteurs. Cellesci correspondent :
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• a
ux difficultés que rencontrent les apiculteurs
pour les soigner, accompagnées de
mauvaises pratiques en matière de lutte et
de disséminations des vecteurs pathogènes, et
• à
des pratiques de sélection qui privilégient
les lignées d’abeilles peu agressives et très
productrices au détriment de caractères
rusticité.
Le syndrome d’effondrement des colonies résulte
très probablement de l’effet cumulatif de différents
facteurs (pesticides, carences alimentaires et
attaques des parasites et virus favorisées par le
Varroa qui agirait comme une « porte ouverte »
Les espaces urbains et naturels convoités
par les apiculteurs
Devant la dégradation des conditions de vie et de
production des abeilles et voulant sauvegarder
leurs cheptels dans les lieux moins pollués et
plus fleuris, nombreux apiculteurs répondent
favorablement aux multiples sollicitations qui
leur sont faites pour implanter des ruches à la
demande des collectivités, des gestionnaires
d’espaces naturels ou des entreprises dans les
espaces urbains et dans certains espaces naturels
protégés. Ces pratiques qui pourraient paraître à
première vue favorables à la biodiversité méritent
d’être analysées, surtout si l’un des objectifs ou
l’objectif unique de l’installation de ruches en ville
ou dans les espaces protégés vise à préserver
la biodiversité, car faire la promotion de la
biodiversité dans les espaces naturels et dans
les espaces urbains avec l’Abeille domestique
est riche en paradoxes et questionnements.
© GUILLAUME LEMOINE
sur l’organisme). Cette action « combinée » aurait
des effets bien plus conséquents que la somme
des actions isolées de chacune d’entre elles,
conduisant au franchissement d’effets de seuil
et à l’effondrement massif de colonies entières
(Mathieu, 2015).
L’apiculture urbaine une pratique très à la mode
Attention toutefois à ne pas généraliser ce type
de conclusion, car les ruches en ville donnent
généralement de très bonnes récoltes de « miel
béton » sans pour autant que l’on puisse considérer
que le milieu urbain soit un habitat (au sens
botanique) exceptionnel ! La réalisation de bonnes
récoltes traduit plutôt la présence de ressources
abondantes sans pour autant que la flore y soit
diversifiée. L’autre prétexte régulièrement avancé
par les promoteurs de l’apiculture urbaine est
Payant un lourd tribut à l’agriculture intensive
dans les campagnes, l’installation de ruchers
se développe de plus en plus en ville par effet
de mode, mais surtout pour profiter des efforts
de fleurissement, de la chaleur et sécheresse
des villes, et de l’absence de biocide d’origine
agricole. Les apiculteurs en ville produisent ainsi du
miel souvent de façon plus abondante et étalée
au cours de la période d’activité des abeilles alors
que la majorité des espaces agricoles sont de
plus en plus intensivement cultivés et de plus en
plus pauvres en flore sauvage. Pour certains, la
capacité qu’ont les abeilles domestiques à faire
des récoltes abondantes semble en théorie un
indicateur de la bonne santé des écosystèmes.
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Des abeilles domestiques en villes, pourquoi faire ?
À celui qui mettra le plus de ruches sur son toit !
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Par exemple la ville de Paris compte déjà près de
700 ruches dont près de 150 sont implantées sur
des équipements municipaux. Elles sont gérées
par des associations, des professionnels ou des
particuliers apiculteurs dont une partie d’entre
eux s’est engagée auprès de la collectivité à
développer des ruchers pédagogiques qui
allient production de miel et sensibilisation du
grand public aux enjeux de la pollinisation. Le
récent « plan de développement des ruches de
Paris 2016-2020 » a toutefois une communication
ambiguë. En effet, il vise à mobiliser tous les
vecteurs de développement des ruchers à
Paris, avec (sic) une attention particulière portée
aux insectes pollinisateurs sauvages : abeilles,
bourdons, papillons, mouches, guêpe ou encore
scarabées…. où quatre axes seront privilégiés :
développer un environnement favorable à ces
insectes, installer de nouveaux ruchers sur le
patrimoine public et privé, faciliter la vente de
miel et de produits dérivés, et mieux informer les
Parisiens », détaille Pénélope Komitès, adjointe à la
maire en charge des espaces verts, de la nature
et de la préservation de la biodiversité. On voit
ici, une fois de plus, que les insectes pollinisateurs
sauvages sont les parents pauvres voire les alibis
« biodiversité » de la démarche.
À quel objectif « naturaliste » ces installations
répondent-elles en dehors d’un simple effet
médiatique ? Il est très peu probable que la
communauté scientifique ait recensé des
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Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
difficultés dans la pollinisation des arbres
d’alignement urbains, et des difficultés de
reproduction chez les plantes des jardins ou
au niveau d’une éventuelle flore patrimoniale
urbaine qui justifieraient l’implantation de ruchers.
Il n’y a, à ma connaissance, aucune plante
patrimoniale urbaine en manque de pollinisateurs
dans nos villes et aucune plante (patrimoniale
ou non) dont l’Abeille domestique serait le
pollinisateur exclusif, donc indispensable à la
fécondation de ses fleurs. Si l’on revient sur le statut
des arbres et arbustes mellifères abondamment
fréquentés par l’Abeille domestique en espaces
urbains, on peut citer le Robinier faux-acacia
(Robinia pseudacacia), l’Arbre à papillons
(Buddleja davidii), le Marronnier d’Inde (Aesculus
hippocastanum), l’Ailanthe glanduleux (Ailanthus
altissima), le Sophora du Japon (Styphnolobium
japonicum)… qui sont entomophiles et pour
certains sont clairement décrits comme des
espèces exotiques envahissantes.
© GUILLAUME LEMOINE
celui de vouloir favoriser la biodiversité en ville
et/ou autour de l’entreprise publique ou privée
qui accueille des ruches. Ici encore, attention
aux faux prétextes et au green washing. On
constate plus généralement que certaines villes,
collectivités et entreprises privées développent
entre elles une surenchère médiatique à qui fera
le plus d’opérations étiquetées comme relevant
du développement durable, d’un agenda 21
ou de la protection de la biodiversité. Diverses
entreprises spécialisées surfent sur ce créneau
et proposent aujourd’hui ce type de prestations
à visée commerciale (parrainage, fourniture et
entretien de ruches) clefs en main, en utilisant
l’argument d’un soutien à la biodiversité comme
prétexte d’installation. On voit ainsi s’installer dans
les jardins, les enceintes d’entreprises et sur les
toits des édifices publics quantité de ruches…
L’Abeille domestique favorise t-elle la reproduction
donc la dissémination des buddleias ?
Celles-ci ne peuvent qu’être favorisées dans leur
reproduction, donc dans leur capacité à produire
des graines et à se disséminer dans de nouveaux
milieux grâce aux abeilles domestiques. Favoriser
de fortes populations d’Abeille domestique en
ville ne serait-il pas tout simplement un facteur
de biodiversité négative en rendant plus efficace
la reproduction et la dissémination d’espèces
indésirables ? La question de l’éventuelle
concurrence entre abeilles domestiques et
© GUILLAUME LEMOINE
détecter les polluants organiques et inorganiques
dans l’environnement de la ruche. Baptisée
par certains « sentinelle de l’environnement »,
l‘abeille réagit en présence des substances
phytosanitaires (mortalité, malformation...) et
stocke des polluants que l’on peut retrouver
dans son corps ou dans les produits de la ruche
(Detremmerie, 2010). Sa disparition peut constituer
sauvages présentes en ville ou ailleurs se pose
également, et sera développée ultérieurement.
Les « apidologues » bruxellois s’inquiètent même
de l’éventuel surnombre de ruches dans la
capitale belge (La Capitale, 2013, Hennuy, 2014).
Enfin, développer l’apiculture en ville devant les
difficultés que cette dernière rencontre dans les
espaces agricoles est également une réponse
inadaptée et « trop facile » face aux objectifs
de reconquête de la qualité écologique des
agrosystèmes (Lemoine, 2010).
En ville, l’apiculture a probablement d’autres
vertus. Elle a une dimension sociale et humaine
(lien social dans les quartiers et au sein de certains
projets d’entreprise pour réunir les habitants ou
les salariés sur un thème fédérateur voire culturel,
ou festif et gastronomique avec la récolte et la
production de miel) et devient de plus en plus
à la mode comme loisir urbain. Elle permet aux
yeux de ses promoteurs d’attirer l’attention des
citadins sur l’existence du vivant et sur la présence
d’écosystèmes en milieu urbanisé. De façon plus
générale, l’Abeille domestique apparaît comme
un bio-indicateur facile à utiliser. Au cours de
chaque vol une ouvrière visite entre 500 à 3000
m2 de terrain (Fléché et al., 1997, in Detremmerie,
2010) et est ainsi capable de faire, à moindres
frais, un échantillonnage efficace qui permet de
© GUILLAUME LEMOINE
Des essaims : une denrée rare
et convoitée par les apiculteurs
La production de miel peut s’accompagner
de campagnes de mesures pour connaître
l’environnement de la ruche
un indicateur simple et commode puisqu’il s’agit
d’une espèce domestique et proche de l’homme
pour évaluer la dégradation de notre cadre
de vie et des écosystèmes (simplification des
paysages, pollutions, excès de biocides...). En ville,
comme ailleurs, l’intérêt de l’Abeille domestique
est surtout économique avec la pollinisation des
cultures potagères et des vergers, et la production
de miel, mais en aucun cas la présence de ruches
semble être un agent favorable à la biodiversité.
Des sous-espèces exotiques introduites
dans les écosystèmes naturels !
À côté du développement de l’apiculture urbaine,
et devant la dégradation de la matrice paysagère
(intensification agricole, biocides) et la disparition
progressive des éléments topographiques et
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
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apiculteurs (Marot, 2013). L’État français apportait
ainsi une aide de 17 euros par ruche pour les
apiculteurs qui ont entre 75 et 447 ruches et qui
mettent au minimum 25 ruches (par tranche de
100 ruches) pendant 3 semaines dans « une zone
intéressante au titre de la biodiversité » (Chambre
d’Agriculture des Bouches-du-Rhône, 2000). Les
abeilles domestiques actuellement utilisées dans
nos territoires, aux caractéristiques « améliorées »,
correspondent en très grande majorité à des sousespèces ou races nouvelles (comme la buckfast)
dont l’arrivée dans l’histoire de notre flore est
assez récente. Cela pourrait sous-entendre que
la flore sauvage n’a pas forcément besoin de
l’« efficacité » et du (sur)nombre des abeilles
domestiques « modernes » pour assurer son cycle
de reproduction. Il est clair que les pollinisateurs
« sauvages » (Anthophila, Lépidoptères, Diptères…)
ont assuré le rôle pollinisateurs bien avant elles,
avec ou sans la présence modérée de l’abeille
noire originelle. Pour Vereecken et al (2015) il
est justifié de considérer que l’augmentation
rapide, importante, localisée et artificielle de la
densité des ouvrières de l’Abeille domestique, par
l’introduction de ruches chez nous, s’apparente
aux phénomènes d’introduction observés dans
les milieux récemment colonisés par l’apiculture
en Amérique, Australie et sur les îles océaniques.
© GUILLAUME LEMOINE
naturels (talus, bosquets, haies…) nombreux sont
les apiculteurs qui souhaitent mettre leurs cheptels
dans les espaces naturels et forestiers pour la
sauvegarde de leurs colonies et pour assurer la
production d’un miel de qualité. En parallèle à
cette démarche, l’installation de ruches dans
les espaces protégés peut être également de
l’initiative des gestionnaires qui voient là un moyen
de développer la biodiversité. Mais qu’elles
soient de souche régionale, méditerranéenne ou
issue d’une hybridation et d’une sélection, nous
sommes en droit de nous poser la question de la
légitimité et des conséquences de l’introduction
des colonies d’abeilles domestiques dans les
écosystèmes, d’autant plus que la tendance est à
l’installation de ruchers aux colonies nombreuses
(Albouy, 2011). Cette tendance était également
encouragée par l’État français dans le cadre
des mesures agro-environnementales (MAE) et
par la Région wallonne dans le cadre du Plan
Maya, qui labellise les provinces et communes
qui mettent à disposition des terrains pour les
L'abeille italienne, à l’abdomen très clair,
n’a rien à voir avec l’abeille noire régionale
12
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
Les cultures de colza sont très appréciées
par les abeilles domestiques
© GUILLAUME LEMOINE
L’Abeille domestique, bien que polylectique
(pollinisateur généraliste) (Bellmann,1999),
concentre ses récoltes sur une seule et même
espèce lorsque la ressource est productive
(Bellmann, 1999) ; ressource qui correspond
dans la grande majorité des cas à des cultures
monospécifiques sur de grandes surfaces ou à des
boisements homogènes d’espèces entomophiles.
Ce type de formation végétale est très rare à
l’état naturel…
Une concurrence probable avec les
espèces sauvages.
L’abeille noire n’est qu’un pollinisateur parmi
d’autres par rapport au millier d’espèces vivant
en France et au 376 espèces potentiellement
présentes en Belgique (Pauly, 1999). Mettre
des abeilles domestiques « améliorées » et/ou
en grand nombre dans les espaces naturels
et forestiers, c’est très probablement introduire
un concurrent très efficace vis-à-vis des autres
espèces (Aubert, 2014). Sachant qu’une ouvrière
récolte par voyage entre 8 et 20 mg de pollen, les
ouvrières d’une seule ruche qui récolterait dans
son année entre 20 et 50 kg de pollen auront fait
entre 80 et 200 millions de visites florales…
Bien qu’aujourd’hui, la question de l’éventuelle
compétition entre les abeilles domestiques et les
abeilles sauvages reste ouverte, les études
réalisées laissent entrevoir que la compétition est
plus significative dans les régions du nord de
l’Europe, là où l’abeille s’éloigne le plus des zones
méditerranéennes (Gadoum, comm. pers,
Rasmont et al., 1995). A contrario, ces dernières
zones ont des écosystèmes plus diversifiés qui
ressemblent davantage aux régions d’origine de
l’Abeille domestique. Le nombre de taxons de la
flore et de pollinisateurs « sauvages » présents,
nettement plus important, permettrait une
meilleure cohabitation des espèces. À l’inverse,
dans les régions plus septentrionales, les
écosystèmes semblent moins complexes et
l’impact de l’Abeille domestique pourrait être
préjudiciable aux pollinisateurs « sauvages ». Une
espèce, le Bourdon rural (Bombus cullumanus),
a d’ailleurs disparu de l’île d’Öland (Suède) suite
au développement de l’apiculture (Cederberg,
Le Chalicodome des murailles n’a pas supporté
la concurrence des abeilles domestiques là
où les ressources sont devenues rares
2006). Sans faire de calculs simplistes, l’arrivée de
dix ruches sur un site momentanément
(transhumance) ou durablement, va apporter
dans le milieu en période de miellée entre 300 000
et 600 000 abeilles qui ne seront probablement
pas sans effet sur l’accès aux ressources
alimentaires pour les autres espèces d’Anthophila
présentes sur le site et dont les rayons d’action
sont limités de 100 à 300 mètres (Zurbuchen et
al., 2010) alors que celui des abeilles domestiques
peut aller jusqu’à 5 000 mètres (Bellmann, 1999),
voire 10 000 mètres (Vaissière, 2015). La large
distribution et la présence dominante de l’Abeille
domestique peut donc avoir une influence sur
les abeilles solitaires. Même si les abeilles
domestiques vont se spécialiser sur des ressources
abondantes, les fleurs moins nombreuses
localement seront également visitées (Vereecken
et al., 2015). Si on excepte les fleurs à corolles
profondes, qui ne peuvent être visitées que par
les abeilles à langue longue (certains bourdons
par exemple), le spectre alimentaire des abeilles
domestiques recouvre largement celui des
abeilles sauvages qui ont toutes un spectre
largement plus étroit (Thorp 1996, in Vereecken
et al., 2015). L’adaptation des abeilles sauvages,
n’ayant plus accès à leurs ressources, peut
s’imaginer pour les espèces généralistes
(polylectiques) mais est impossible pour les
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
13
première espèce, la Mélitte de l’Euphraise est
spécialisée sur le genre Odontites et peut
difficilement rivaliser avec les abeilles domestiques,
souvent agressives pour l’accès aux fleurs. Trop
de ruches sur ce site peut affecter directement
la taille des populations d’abeilles sauvages, voire
provoquer leur disparition (Michez comm pers.).
Vereecken et al., (2015) illustrent cette contrainte
par deux autres exemples. L’Anthidie à
manchettes (Anthidium manicatum) a par
exemple besoin de la totalité du pollen produit
par plus de 1000 fleurs d’Épiaire droite (Stachys
recta) pour avoir la ration nécessaire à la
croissance d’une seule de ses larves. De même
une population de 50 femelles d’Andrène de la
scabieuse (Andrena hattorfiana) doit avoir accès
au pollen produit par 920 Knautie des champs
(Knautia arvensis) pour se maintenir localement.
On comprendra vite les difficultés rencontrées
par ces espèces au faible rayon d’action si des
colonies populeuses d’Abeille domestique sont
installées à proximité de leurs lieux de nidification.
La Mélitte de l’Euphraise
est une espèce rare chez nous
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Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
© GUILLAUME LEMOINE
espèces spécialisées (oligolectiques et
monolectiques), pour qui un changement de
régime alimentaire est impossible (Vereecken et
al., 2015). Dans les lieux où l’on installe l’Abeille
domestique, elle supplante aussitôt les espèces
sensibles (Bellmann, 1999). Dans un jardin
botanique, il a été constaté que le nombre
d’abeilles solitaires avait très vite doublé après le
retrait des colonies d’abeilles domestiques
(Bellmann, 1999). C’est ce qui a également été
constaté sur l’une des rares populations de
Chalicodome des murailles (Chalicodoma
parietina) allemandes du Nördlinger Ries. La mise
en place d’un rucher dans une réserve naturelle
mal gérée (pâturage intensif ovin) a rendu
considérable la concurrence pour les quelques
fleurs restantes entre abeilles sauvages et abeilles
domestiques (Bellmann, 1999). À Moulin-sousTouvent (Somme - France), deux espèces très
intéressantes à l’échelle européenne, la Mélitte
de l’Euphraise (Melitta tricincta) et le Bourdon
grisé (Bombus sylvarum) ont été recensées. La
Au niveau des bourdons, contrairement aux
espèces à langue courte, comme le Bourdon
terrestre (Bombus terrestris), qui sont aussi les moins
menacés et qui souffrent peu de la concurrence
des abeilles domestiques, les espèces à langue
longue, comme le Bourdon grisé en souffrent
beaucoup plus. Non seulement, les abeilles
domestiques repoussent les bourdons à proximité
des ruches, mais elles occupent également les
biotopes sauvages adjacents dont elles chassent
les bourdons à langue longue (Walther-Hellwig
et al., 2006). D’autres études ont également
montré que pour assurer la conservation des
abeilles sauvages et favoriser le développement
de leur population, la distance de butinage ne
doit pas excéder 100 à 300 mètres. Les distances
de butinage courtes augmentent notablement
la performance de la reproduction des abeilles
sauvages (Zurbuchen et al., 2010). Les fortes
densités d’abeilles domestiques peuvent dans
ce sens avoir une influence sur la collecte de la
nourriture des autres pollinisateurs situés à
proximité immédiate des ruches (Delbrassine et
Rasmont, 1988 ; Walter-Hellwig et al., 2006 in
Gadoum et al., 2007, Voltz, 2011, Aubert, 2014)
qui n’ont pas les moyens de rechercher des
ressources alimentaires sur de longues distances.
Dans le même ordre d’idée, Kosior et al., (2007)
cités par Gadoum et al., (2007) indiquent que,
dans six pays d’Europe sur onze examinés, la
© GUILLAUME LEMOINE
© GUILLAUME LEMOINE
L'Anthidie à manchettes en train de récolter du coton
concurrence de l’Abeille domestique est
considérée comme un facteur explicatif de la
régression des bourdons. Nielsen et al. (2012) in
Gadoum (2014) constatent également que la
présence de l’Abeille domestique affecte la
composition de la communauté des pollinisateurs
en modifiant la fréquence des visites des autres
espèces et cela défavorablement pour les
bourdons. L’introduction de l’Abeille domestique
entraîne ainsi une concurrence avec les autres
pollinisateurs et probablement un recul de ces
derniers comme cela a été constaté en Ecosse
sur quatre espèces de bourdons qui, lorsqu’ils
doivent cohabiter avec l’Abeille domestique ont
des tailles sensiblement plus petites, ce qui indique
des colonies plus faibles aux développements et
succès moindres (Goulson & Sparrow, 2008). Le
même constat a été fait par Elbgami et al. (2014)
près de Leeds (Angleterre) où pendant deux
années consécutives furent comparés le poids
des colonies de bourdons, le nombre et le poids
des reines produites issues des colonies implantées
à proximité de ruches avec les données issues
de colonies implantées loin du rucher. Ainsi, si l’on
encourage trop la présence de l’Abeille
domestique, on augmente le risque de déprimer
les espèces sauvages cohabitantes et par
ricochets certaines plantes sauvages qui en sont
dépendantes (Gadoum et al., 2007). On a
également constaté en Pennsylvanie (USA) qu’un
Le Bourdon terrestre, une des rares espèces
de bourdons non menacées
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
15
© SYLVIANE POULAIN
Un bourdon du sous-gentre Psithyrus trouvé avec des ailes déformées
virus était présent tant chez les abeilles domestiques
que chez certaines abeilles solitaires, et que celuici pouvait passer de l’un à l’autre et vice-versa. Le
virus viendrait à l’origine des abeilles domestiques
et aurait été transmis aux abeilles solitaires. Il est
suggéré que cela puisse être l’une des (nombreuses)
causes du déclin des pollinisateurs sauvages (Singh
et al., 2010). En Europe, la BBC a rapporté que deux
maladies affectant habituellement les abeilles
domestiques viennent d’être trouvées sur les
bourdons. Il s’agirait du Nosema ceranae et de la
maladie des « ailes déformées » qui affectent les
bourdons adultes, et qui semblent avoir des impacts
importants sur leurs populations (Genersch et al,
2006 in Aubert, 2014 ; et Fürst et al., 2014, Evison et
al., 2012 in Vereecken et al., 2015). La maladie des
ailes déformées a également été constatée sur
des bourdons (sous genre Psithyrus) en Nord – Pasde-Calais (observation de Sylviane Poulain, juin
2014). Les équipes de chercheurs à l’origine de
cette constatation insistent sur le fait que les
apiculteurs doivent essayer de maintenir leurs
ruches dans le meilleur état sanitaire possible pour
essayer de réduire les conséquences sur les
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Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
populations de bourdons déjà en grande difficulté
dans le monde et qui sont par endroits en très fort
déclin, comme par exemple Bombus cullumanus
aujourd’hui disparu du Royaume Uni (Morelle, 2014).
Les abeilles sauvages, solitaires et discrètes jouent
un rôle essentiel dans la stabilité des écosystèmes
en participant à la pollinisation d’un nombre
bien supérieur de plantes sauvages que celles
fréquentées par l’Abeille domestique (Michez,
2010). Les abeilles sauvages ont aussi un impact non
négligeable sur la pollinisation des fleurs cultivées
(Michez, 2010). Dans ce sens, divers chercheurs
ont écrit qu’il était opportun d’arrêter d’opposer
les abeilles domestiques aux abeilles solitaires, que
ces dernières jouent un rôle important dans la
pollinisation des cultures et qu’il est donc opportun de
se préoccuper aussi de ce groupe d’abeilles (Aebi
et al., 2012). En l’absence de données précises, le
principe de précaution devrait nous inviter à ne pas
mettre de ruchers à sous-espèces exotiques dans
nos espaces naturels, dans les espaces riches en
abeilles sauvages ou dans les secteurs accueillants
des espèces rares et menacées pour éviter toute
© GUILLAUME LEMOINE
Ruches en milieu naturel (lande acide)
© GUILLAUME LEMOINE
concurrence avec les espèces sauvages ou de
saturer le milieu avec une seule espèce.
Introduire des ruches (dont on s’occupe)
dans les espaces naturels c’est également
s’éloigner des logiques de naturalité. La
seule concession serait de permettre
éventuellement et très modérément
la présence de ruches à abeilles noires
locales. Il ne s’agit pas ici de dire que
l’Abeille domestique (Apis mellifica
mellifica), écotype Chimay-Valenciennes
indigène dans notre territoire, n’a pas sa
place dans les espaces naturels, mais
plutôt de favoriser une coexistence entre
les différentes Anthophila sans saturer
le milieu avec un nombre important de
colonies installées par l’homme. La charge
maximale ou idéale en ruches d’abeilles
domestiques sur un milieu naturel serait de
5 unités au kilomètre carré et les ruchers
devraient être distants les uns des autres
d’un minimum de 2,5 km (Vaissière, comm
pers). Précisons également que les pays du
Nord de l’Europe (dont la Belgique) interdisent
la présence des abeilles domestiques dans les
espaces protégés (Fayet, 2013).
La Mélitte (Melitta leporina) une espèce inféodée au Fabacées
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
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© GUILLAUME LEMOINE
L’apiculture moderne, telle qu’elle est pratiquée,
utilise généralement des ruches de forte taille
(par exemple ruche Dadant 12 cadres de
50cm de côté) à cadres mobiles. Ces modèles,
lorsque les colonies sont faibles comme c’est
le cas actuellement où 30 à 70 % des colonies
meurent chaque année, sont difficiles à remplir
(pollen, nectar et couvain) et à chauffer par les
abeilles. Dans une logique du développement
d’une apiculture plus écologique tournée vers le
bien-être des abeilles et moins vers une logique
de production (anthropocentrée), il pourrait
être suggéré de développer des ruchers à base
de ruches Warré. Ce modèle tient son nom de
son inventeur l’abbé Émile Warré. La version la
plus aboutie de cette ruche est la ruche dite
« populaire » qui est décrite dans la dernière
édition, de son livre « L’apiculture pour tous »
parue en 1948. C’est une ruche de conception
plus récente que les « classiques » ruches Dadant
Une ruche tronc
18
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
© GUILLAUME LEMOINE
Vers une apiculture écologique ?
Les abeilles dès qu’elles en ont l’occasion
construisent leurs propres rayons de cire
ou Langstroth. Les deux idées maîtresses qui ont
guidé Émile Warré dans l’élaboration de cette
ruche sont la priorité donnée à l’abeille et sa
simplicité d’utilisation. C’est une ruche divisible
de faible volume, car il n’y a pas de distinction
entre hausses et corps de ruche. Tous les éléments
sont de la même taille. Les dimensions internes
(30 cm x 30 cm x 21 cm) sont proches des cavités
que l’on rencontre dans la nature (arbre creux).
Rappelons que le nom de ruche vient du gaulois
rusca, mot désignant l’écorce puis un tronc évidé
accueillant une colonie. Cette forme est de plus,
la plus proche du cercle donc mieux adaptée
à la forme ovoïde que prend la colonie quand
elle se regroupe en grappe pour passer l’hiver.
Par ailleurs, la ruche écologique n’utilise pas
de cadres mais des barrettes avec une petite
amorce de cire d’un centimètre. Le but de cette
amorce est d’orienter le travail de construction
des abeilles du haut vers le bas. Elles construisent
elles même leurs rayons fixes qui pourront être
détruits en partie au moment de la récolte du miel.
Cette pratique permet aux abeilles de construire
des rayons neufs (propres) chaque année. La
taille des cellules est adaptée aux besoins des
abeilles, et le comportement des abeilles cirières
est préservé et encouragé. Autre particularité de
la ruche écologique : l’agrandissement de la
ruche écologique se fait par le bas. Quand la
colonie a besoin de place, on ajoute un, voire
deux éléments, en dessous des éléments déjà en
place… ce qui permet aux abeilles d’agrandir
leurs rayons vers le bas, comme elles le font dans la
nature. Et lorsque l’on ajoute un élément en partie
inférieure, l’apiculteur n’a pas besoin d’enlever
le toit et le couvre-cadres, ce qui n’entraîne pas
de perturbation au sein de la ruche.
Dans le même esprit et en essayant
progressivement de s’affranchir totalement des
logiques de production, Gilbert Veuille (1919 -2014)
a imaginé une première ruche ronde divisible en
plâtre (et paille) qui correspond encore plus à la
forme des cavités naturelles que l’on trouve dans
les arbres. M. Veuille à la fin de sa vie travaillait
sur un second modèle destinée uniquement à
la sauvegarde des abeilles mellifères sauvages
et à la pollinisation. Il s’agit de la « ruche nichoir »
ou « ruche de biodiversité » : un modèle en bois,
hexagonal ou carré, en forme de pyramide
tronquée dont le planché est incliné vers l’avant.
Comme le système Warré, les ruches « Veuille »
donnent la priorité au bien-être des abeilles
et visent pour les « ruches nichoirs » à maintenir
des colonies dans des habitacles adaptés sans
vouloir produire du miel ni devoir bénéficier d’une
formation apicole. Il s’agit de donner ici aux
abeilles les moyens de survivre et d’évoluer sans
l’intervention de l’homme et loin des formations
végétales mellifères « productives » naturelles
(garrigue, bruyère) ou cultivées (lavandin,
robinier, tournesol, colza…) (Veuille, 2009). Ce
modèle de ruche, adaptable avec une petite
hausse qui permet une modeste récolte de miel,
est actuellement utilisé par l’association Apicool
(Lorraine française) qui en fait la promotion et
qui permet aux habitants et structures collectives
(associations, entreprises, collectivités…) de
s’intéresser au monde de l’abeille et de s’initier
à l’apiculture familiale sans investissements
financiers importants ni chronophages.
Présentons également une troisième initiative
d’apiculture alternative. Il s’agit du retour aux
ruches primitives : les ruches-troncs. Celles-ci,
comme leur nom l‘indique, sont creusées dans
une portion de tronc d’arbre. Cet habitacle créé
par l’homme est très proche de l’arbre creux où
les colonies d’abeilles s’installent spontanément
à l’état naturel sous nos latitudes. Il est probable
que les « premiers apiculteurs » aient « inventé »
la ruche-tronc en s’inspirant de ce penchant
naturel des abeilles à peupler les cavités des
arbres. Les ruches-troncs ou bruscs (en patois
cévenol) ont été développées principalement
dans l’aire de culture du châtaignier car l’aubier
de cet arbre riche en tanins éloigne les parasites
du bois et probablement certains pathogènes.
Ces tanins restant actifs très longtemps après
la mort de l’arbre le rendent imputrescible,
sauf en son coeur, qui en est dépourvu. Cette
particularité chimique permet aux apiculteurs de
bénéficier d’un tronc qui s’évide facilement et
ainsi d’une ruche qui dure trois ou quatre siècles
sans traitement chimique (anonyme, 2016).
L’apiculture écologique devrait également
s’attacher à réorganiser la rusticité et l’adaptation
des abeilles domestiques aux lieux de leur
d’implantation, et bien sûr limiter et contrôler
les hybridations et métissages divers (Vanhée,
2010). Garnery (2013) insiste sur les conséquences
des pesticides et autres facteurs de mortalité
(monoculture) qui par les « dépopulations »
massives qu’ils produisent dans les ruchers
entraînent un appauvrissement du réservoir
génétique et une fragilisation de la capacité
d’adaptation des abeilles aux variations de
l’environnement.
Conclusion
Considérée comme l’un des symboles de la
qualité de notre environnement, ou plutôt
comme le témoin gênant de sa dégradation,
l’Abeille domestique et ses races allochtones
(exotiques) deviennent paradoxalement, par
effet de mode et matraquage médiatique,
l’image d’une nature préservée ! Pourtant en
ville comme dans les espaces naturels préservés,
les abeilles domestiques « améliorées » ne sont
probablement pas indispensables, ni nécessaires,
au bon fonctionnement des écosystèmes… et
l’arrêt de l’apiculture telle qu’elle est pratiquée
dans nos régions du nord-ouest européen n’aurait
probablement pas d’impact négatif sur les
écosystèmes en question. Les promoteurs de
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
19
genre peu diversifié (8 espèces) et se trouve
au même niveau que de nombreuses autres
espèces dans l’histoire de l’évolution (Michez,
2007). Une politique qui viserait à préserver les
pollinisateurs et leurs rôles pour la biodiversité des
écosystèmes devrait d’abord se préoccuper des
abeilles sauvages, des insectes de façon globale
et de la préservation et de la restauration de leurs
habitats et conditions de vie.
© GUILLAUME LEMOINE
l’Abeille domestique dans les discours médiatiques,
politiques et environnementalistes ignorent bien
trop souvent le reste des pollinisateurs sauvages
(Anthophila, Lépidoptères, Syrphes…), leurs
rôles et leurs diversités. Ils placent régulièrement
l’Abeille domestique sur un piédestal, en
considérant à tort qu’Apis mellifera est, à l’image
de l’homme, l’abeille la plus évoluée et qu’elle
se trouve au sommet d’un arbre phylogénétique
(classification) alors qu’elle appartient à un
L'Abeille domestique est présentée ici comme la gardienne de la biodiversité…
pourtant sur les photos du panneau, elle butine sur des bidens (à feuilles de férule),
cosmos et lavande horticoles.. bien éloignés de la flore locale !
20
Parcs & Réserves, vol. 71, fasc. 2
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http://cluster010.ovh.net/~apicool/
Apis Bruoc Sella : www.apisbruocsella.be, Rue des
Passiflores 30, B-1170 Bruxelles
Centre Apicole de Recherche et d’Information (CARI) :
Place Croix du Sud, 4 bte L7.07.09 B -1348 Louvain-laNeuve, http://www.cari.be/accueil/
INRA : laboratoire Pollinisation et écologie des abeilles,
Domaine Saint-Paul - Site Agroparc 228 route de
l'Aérodrome CS40509 F- 84914 Avignon cedex 9, France
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