NATURE Le long périple de l’eau L’eau est l’élément principal qui constitue notre monde. Elle est présente dans les océans, dans les airs et dans les sols, dans les nuages, dans les glaciers et dans chacun de nous. Le voyage d’une goutte d’eau est long. Et elle ne s’arrête jamais. L’eau et ses haltes tout au long de son voyage infini… Nuages, glace, chutes d’eau, arc-en-ciel, des phénomènes qui dépendent directement du cycle de l’eau. Texte et photos: Stefanie pfändler Commençons par les faits: notre Terre est bleue (du moins si on la regarde avec un petit peu de distance). Et si l’on cherche l’origine de cette couleur bleue, mieux vaut naviguer en mer, puisque c’est ici qu’elle se trouve: 96,5% de l’eau présente sur Terre se trouve dans les océans. Le reste est plutôt négligeable: 2% à peine de l’eau de la Terre existe sous forme de glace et 2% sous forme d’eau souterraine dans les sols. Les proportions deviennent ensuite encore plus minimes: le reste est en effet contenu dans le permafrost, sous forme d’eau souterraine, dans les lacs, dans l’atmosphère, dans les marais, dans les cours d’eau ou dans les plantes. Malgré ces quantités négligeables, l’eau est nécessaire partout où elle se trouve. Cet élément est le mo54 juillet / août 10 marina.ch teur et l’origine du climat, de la météo et en fin de compte de toute forme de vie que l’on trouve sur notre Terre. Les gouttes d’eau parcourent chaque jour de longs chemins et transportent avec elles de l’énergie, des nutriments ou même de la chaleur. Il s’agit là d’un voyage sans fin.. Evaporation et condensation Pour nous autres humains, le trajet le plus impressionnant de l’eau est son cheminement vertical: peut importe le lieu où se trouve une goutte d’eau sur notre Terre, elle finira toujours par monter dans l’atmosphère. Comment? En s’évaporant. Pour simplifier, représentonsnous une surface d’eau composée d’une infinité de gouttes d’eau. Ces dernières sont elles-mêmes composées de molécules toujours en mouvement. On peut dire que, de manière générale, plus il fait chaud, plus ces particules effectuent des mouvements rapides. Les plus rapides d’entre elles réussissent alors à se défaire de la force d’attraction des particules voisines et s’en détachent: elles s’évaporent. Le passage d’un état d’agrégat à un autre état est toujours lié à un échange d’énergie. Etant donné que la chaleur est nécessaire à l’évaporation, cette chaleur se retrouve alors sous forme d’énergie latente dans le paquet d’air qui a accueilli les particules de vapeur au-dessus de la surface de l’eau et qui les transportera. Où? Vers le haut, pour commencer… L’ascension de l’air est une science à part entière, mais il est possible de donner quelques définitions de base: l’air humide est plus léger que l’air sec et il monte. Et lorsqu’un paquet d’air est plus chaud que son environnement, il gagne également de l’altitude. Une fois dans 55 NATURE Le mouvement perpétuel de l’eau... l’atmosphère, l’eau (resp. la vapeur) peut être transportée par les vents et les grands systèmes aériens d’un endroit à un autre. L’énergie latente est alors toujours de la partie. C’est ainsi que la chaleur des régions chaudes, où l’eau s’évapore, termine sa course dans des régions froides, où l’eau se condense, entraînant ainsi des précipitations et une libération de l’énergie latente. En deux mots, il s’agit là d’un gigantesque transfert d’énergie qui se déroule en continu au-dessus de nos têtes. Mais comment fonctionne exactement le mouvement ascendant et descendant de ces paquets d’air? Et que se passe-t-il alors avec l’eau? En règle générale, un paquet d’air ascendant se refroidit d’un degré par 100 mètres parcourus. Chaque paquet d’air ne peut emmagasiner qu’une quantité précise d’eau et plus il est froid, moins il peut contenir d’eau. En se refroidissant, l’air atteint ainsi un niveau de saturation: la vapeur doit alors se retransformer en eau en se fixant à des aérosols. Les aérosols sont des particules microscopiques de poussière, de pollen, de suie, de sel marin ou de gaz qui se trouvent partout dans l’atmosphère. Ils servent d’amarres à la vapeur qui peut alors se condenser. Ces petites gouttes d’eau commencent alors à grandir, elles s’unissent, entrent en collision et deviennent plus lourdes. Dans un nuage, les gouttes d’eau ne font que 10 micromètres, mais dès qu’elles atteignent une dimension d’un millimètre, elles se transforment en gouttes de pluie et tombent vers le sol. Le cycle de l’eau commence petit à petit à prendre forme. Selon la température ambiante, l’eau ne reste pas liquide, mais passe à un autre état et se 56 transforme en glace: la vitesse de refroidissement des gouttes d’eau, les turbulences et l’humidité de l’air entraînent l’apparition de différents cristaux et donc de différentes formes de glace. Si une goutte d’eau reste une goutte d’eau, elle tombera au sol sous forme de pluie chaude. Mais il existe différents états intermédiaires allant de la pluie froide au flocon de neige, en passant par le grésil ou la grêle. En moyenne (et donc théoriquement), une goutte d’eau passe huit jours dans l’atmosphère. Après une semaine, elle retrouve la surface de la Terre et alimente les plantes, les sols, les lacs et les mers. Le voyage continue… A la fin, la mer Afin de connaître les lieux où l’eau tombe au sol et les quantités d’eau qui atteignent la terre, les scientifiques ont associé un bassin de réception à chaque étendue d’eau. Ce bassin de réception est la zone dans laquelle les précipitations alimentent l’étendue d’eau considérée. Les bassins de réception peuvent afficher différentes tailles et formes en fonction de leur topographie, de la nature du sol et des écoulements qui s’y trouvent. Lorsque l’eau atteint le sol, ce dernier commence à la filtrer. Il le fera plus ou moins rapidement en fonction de sa consistance. La zone proche de la surface comporte un système de répartition complexe. Le sol est humide mais pas saturé d’eau: de nombreux pores sont remplis d’air. Cet espace est utilisé par les plantes qui aspirent alors l’eau à nouveau vers le haut avec leurs racines pour ensuite alimenter le cycle de l’eau grâce à leur transpiration (évaporation à leur surface). Une partie de l’eau contenue dans les sols s’évapore directement et retourne ainsi dans l’atmosphère sans faire de détour. Une autre partie est transportée vers les lacs ou les cours d’eau par différents canaux. Il est difficile de mesurer le temps que l’eau passe dans les sols. Selon les experts, une goutte d’eau reste en moyenne de deux à 50 semaines sous terre pour ensuite poursuivre son chemin. L’eau qui ne s’est pas écoulée dans des étendues d’eau plus grandes continue à être filtrée et finit par atteindre une zone où le sol est saturé d’eau. On parle alors de nappe phréatique. Une fois arrivée dans une de ces nappes, une goutte d’eau ne pourra pas facilement s’en échapper: elle peut en effet reposer pendant près de plusieurs siècles dans ces couches basses du sol. Mais peu importe sa vitesse, l’eau est toujours en mouvement. Même la dernière des gouttes d’eau souterraines finira par retrouver l’air frais pour retomber sur nos têtes sous forme de goutte de pluie. Mais dans certains cas, il faudra faire preuve de beaucoup de patience: dans les régions les plus froides, l’eau gèle et se transforme en glace ou en permafrost. Elle reste ainsi «emprisonnée» parfois pendant des dizaines de milliers d’années dans des glaciers, des calottes glaciaires ou des sols gelés. On peut dire que la mer se trouve en même temps au début et à la fin du cycle de l’eau. Que ce soit sous forme de pluie, de cours d’eau ou sous tout autre forme, l’eau finit toujours sa course dans les océans. L’eau y reste alors pendant 50 à 3000 ans. Elle circule autour du globe et entre des courants profonds et froids et des eaux de surface chaudes. Mais elle reste toujours à la merci de l’évaporation: la boucle est ainsi bouclée… marina.ch juillet / août 10 marina.ch Ralligweg 10 3012 Berne Tél. 031 301 00 31 [email protected] www.marina-online.ch Service des abonnements: Tél. 031 300 62 56