21 septembre 2010 DEUXIÈME SECTION Requête no 60245/08 présentée par Şerife YAKICI contre la Turquie introduite le 4 décembre 2008 EXPOSÉ DES FAITS EN FAIT La requérante, Mme Şerife Yakıcı, est une ressortissante turque, née en 1953 et résidant à Konya. A. Les circonstances de l’espèce Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par la requérante, peuvent se résumer comme suit. Le 19 août 2003, vers 6 heures, le fils de la requérante, Adem Faruk Yakıcı (« Adem »), fit une chute malencontreuse au sein du commandement de la gendarmerie de Beşiri (Batman) où il effectuait son service militaire et se blessa à la tête. Le médecin de la gendarmerie étant en mission le jour même, Adem, blessé à la tête, fut amené au cabinet médical d’un médecin généraliste privé, H.B. Celui-ci fit des points de suture sur la blessure et décida qu’il appartenait au médecin de la gendarmerie de soumettre le soldat à une tomographie de la tête afin de déterminer si une hémorragie cérébrale s’était produite des suites du choc de la tête sur le sol. Par la suite, l’appelé fut renvoyé dans les locaux de la gendarmerie pour repos. Vers EXPOSÉ DES FAITS – YAKICI c. TURQUIE 2 8 h 30, Adem, dont l’état de santé s’était aggravé, fut amené à l’hôpital civil de Batman, où son décès fut constaté. Le même jour, une autopsie fut pratiquée sur le corps d’Adem. Selon le rapport établi à l’issue de celle-ci, il n’existait aucune anomalie au niveau du cerveau et du cervelet ni autour de ceux-ci. La cause du décès n’étant pas déterminée, le dossier fut envoyé à l’institut médicolégal. Le 24 septembre 2004, le comité d’experts médicolégal dressa son rapport d’expertise et indiqua que le décès d’Adem était dû à une insuffisance respiratoire relevant d’une maladie qui existait déjà chez le soldat. Le 8 novembre 2004, le procureur militaire rendit une ordonnance de non-lieu. La requérante semble ne pas avoir attaqué cette ordonnance devant le tribunal militaire. B. L’action de la requérante devant la Haute Cour administrative militaire Le 10 septembre 2007, la requérante demanda une pension à la Direction de la caisse de retraite. Cette demande fut rejetée le 19 septembre 2007. Le 8 novembre 2007, la requérante entama alors une action visant à obtenir une pension devant la Haute Cour administrative militaire (« la Haute Cour »). Par un jugement du 27 mars 2008, la Haute Cour débouta la requérante de son action, en l’absence d’un lien de causalité entre le décès d’Adem et ses fonctions lors de son service militaire. Pour parvenir à cette conclusion, elle se fonda sur le rapport de l’institut médicolégal du 24 septembre 2004. Le 19 juin 2008, la Haute Cour rejeta également le recours en rectification formé par la requérante. GRIEFS Sans invoquer une quelconque disposition de la Convention, la requérante allègue que les événements qui ont entrainé la mort de son fils, alors qu’il était sous les drapeaux, emportent violation du droit à la vie et du droit à un procès équitable. Elle soutient que le décès d’Adem résulte de la négligence médicale. La requérante se plaint également du manque d’indépendance et d’impartialité de la Haute Cour administrative militaire. Elle lui reproche d’avoir rejeté sa demande de pension sans statuer sur le fond de l’affaire. EXPOSÉ DES FAITS – YAKICI c. TURQUIE 3 QUESTIONS AUX PARTIES Le droit à la vie du fils de la requérante, consacré par l’article 2 de la Convention, a-t-il été violé en l’espèce en raison d’éventuelles négligences de la part des autorités ou du retard dans l’administration de soins adéquats lors de son service militaire ? Plus particulièrement, compte tenu de la jurisprudence bien établie de la Cour (Kılınç et autres c. Turquie, no 40145/98, § 43, 7 juin 2005), les autorités militaires/médicales ont-elles fait tout ce que l’on pouvait raisonnablement attendre d’elles pour empêcher la matérialisation d’un risque certain et immédiat pour la vie d’Adem, dont elles avaient ou auraient dû avoir connaissance ? Le Gouvernement est invité à produire tout document relatif à la présente affaire.