Le point de vue d’AllianzGI sur le Brexit Mars 2017 Le déclenchement de l’article 50 par le Royaume-Uni ressemble à un coup de feu lançant le départ du processus de sortie de l’UE, mais la course n’en sera pas moins longue, sinueuse et parsemée d’embûches. Nous analysons, dans le présent article, ce qui attend les investisseurs, et la meilleure façon pour eux de s’y préparer. Points clés Alors que le Royaume-Uni vient de passer huit mois à définir sa position, le déclenchement prochain de l’article 50 donnera le coup d’envoi des négociations sur le Brexit À mesure que le temps passe, l’extrême complexité des questions qui doivent être réglées suscite une prise de conscience croissante La complexité du processus exigera de la ténacité et un sens technocratique du détail, ce qui va à l’encontre d’une partie de la rhétorique populiste et de l’opportunisme politique que l’on observe actuellement Les négociations devraient durer au moins deux ans, et des incidents de parcours ne sont pas à exclure Les résultats des élections au sein de l’UE pourraient changer le ton et le contexte des débats, pour le meilleur ou pour le pire Un enlisement des négociations pourrait accentuer la sous-évaluation de la livre sterling, suscitant des achats étrangers d’actifs britanniques dépréciés ; les entreprises fortement exposées au Royaume-Uni seront probablement pénalisées, mais des stratégies actives sont en mesure de tirer profit de ces accès de faiblesse injustifiés Introduction Dans le sillage immédiat du vote britannique du 23 juin 2016 en faveur de la sortie de l’Union européenne, Allianz Global Investors a présenté son point de vue sur certaines implications de ce plébiscite historique. Alors que le Royaume-Uni est sur le point d’activer l’article 50 du Traité de Lisbonne et d’entamer les négociations de sortie avec l’UE et ses membres, le moment semble opportun pour passer en revue les développements des huit derniers mois. Le présent article inclut également une mise à jour de notre point de vue sur les devises, la politique et l’économie, ainsi que sur les conséquences pour les investisseurs. Le point de vue d’AllianzGI sur le Brexit | Mars 2017 Devises Comme nous l’avions anticipé, à l’instar de la majorité des observateurs, l’impact le plus immédiat et le plus notable du résultat du référendum a concerné la valeur de la livre sterling, qui a chuté d’environ 13,2% contre le dollar, et de 10,7% contre l’euro au cours des semaines qui ont suivi le 23 juin 2016. La devise a de nouveau abandonné du terrain à deux occasions : en août, lorsque la Banque d’Angleterre a renforcé sa politique d’assouplissement monétaire afin de protéger l’économie britannique en prévision de potentiels chocs économiques ; et en octobre, quand il est devenu clairement improbable que le gouvernement britannique privilégie le maintien de l’adhésion au marché unique européen dans ses négociations, la perspective d’un « hard Brexit » s’en trouvant renforcée. Si la chute de la livre sterling a été immédiate et notable, les conséquences de cette dévaluation ne sont pas encore évidentes. Grâce aux couvertures de change et aux décalages dans les cycles de vie des produits, les effets inflationnistes de la dévaluation de la livre commencent à peine à se faire sentir. En effet, nous anticipons une hausse de l’inflation douloureuse pour les consommateurs, notamment parce que la Banque d’Angleterre devrait, selon nous, s’enferrer dans une relance monétaire tournant le dos à son mandat de ciblage de l’inflation. La livre sterling est sous-évaluée au vu des fondamentaux de long-terme, ce qui suggère que l’essentiel de l’incertitude liée au Brexit et touchant le Royaume-Uni est d’ores et déjà intégré dans les prix. Néanmoins, de nouveaux pics de faiblesse au cours des négociations sont très probables, ce qui pourrait attirer les investisseurs internationaux souhaitant acquérir des actifs britanniques à bas prix. L’euro est également relativement malaimé et sousévalué, mais sa marge d’appréciation est faible car la Banque centrale européenne poursuit son programme d’assouplissement quantitatif, tandis que l’incertitude entourant les résultats des élections aux Pays-Bas, en France et en Allemagne, voire en Italie, persiste. Toutefois, au vu des fondamentaux, l’euro reste bien soutenu par la croissance économique actuelle et par d’énormes excédents des comptes courants, notamment en Allemagne. Tandis que la BCE devrait faire preuve d’une grande prudence, veillant à éviter les décisions susceptibles de déstabiliser davantage les banques, le calibrage de la politique monétaire s’avérera sans doute plus compliqué pour celle-ci que pour la Banque d’Angleterre. Si la BCE diminue ses achats obligataires dans le courant de l’année, cette décision interviendra dans un contexte de risques de redénomination, de menaces sur la solvabilité des banques de la zone euro, et de problèmes récurrents tels que la viabilité de la dette grecque. Economie À long terme, l’impact économique du Brexit dépendra des contours de la nouvelle relation Royaume-Uni/UE qui émergera des négociations à venir. En apparence, l’économie britannique déjoue provisoirement les craintes de nombreux observateurs. Cette situation s’explique en partie par le soutien apporté par la dévaluation de la devise, une banque centrale accommodante et un environnement économique international plus favorable. Mais un autre facteur important doit également être pris en compte : de nombreuses entreprises britanniques attendent des clarifications sur la forme des futures relations avant d’engager des décisions d’investissement ou de délocalisation. Si la Banque d’Angleterre a été critiquée pour avoir surréagi aux menaces économiques et systémiques que comporte le Brexit pour le Royaume-Uni, le gouvernement britannique s’est plutôt montré attentiste dans sa politique de relance budgétaire (même s’il a dû accepter de revoir à la baisse ses ambitions de réduction du déficit). Le Royaume-Uni a certes évité le choc économique que certains avaient prédit, mais il serait naïf de penser que les coûts associés, que ce soit en termes absolus ou en termes de perte d’opportunités, ne pèseront pas sur ses perspectives économiques. À un certain stade du processus, tandis que les entreprises, les consommateurs et les investisseurs resteront dans l’expectative, la pression économique se fera plus forte. Le marché des actions donne un aperçu de la prise en compte de ces perspectives : alors que les actions internationales ont progressé significativement au cours des derniers mois, le marché britannique se situe toujours, en dollars US, sous ses niveaux de pré-référendum. Dans ce contexte, nous réitérons nos prévisions, annoncées avant le référendum, d’u- Le point de vue d’AllianzGI sur le Brexit | Mars 2017 ne amputation de 5% du PIB britannique suite au Brexit, sur une période de 5 à 10 ans. Bien entendu, ce scénario dépendra du résultat des négociations. Après l’ouverture des négociations, l’UE (et plus particulièrement certains membres, secteurs ou industries) sera également confrontée à une hausse de l’incertitude économique liée au Brexit. Le Royaume-Uni représente un marché d’exportation particulièrement important pour les producteurs européens d’automobiles, de vin, de produits alimentaires et de vêtements, même si, au niveau macroéconomique, le Royaume-Uni exporte une part plus large de sa production vers l’UE que l’inverse. La potentielle diversion causée par les négociations sur le Brexit et ses épigones populistes pourraient également retarder des réformes structurelles susceptibles d’accroître la confiance dans le bloc européen et sa monnaie unique. Ces conséquences deviendraient plus visibles si les vents favorables soutenant actuellement l’économie venaient à faiblir. En fonction des résultats des élections qui se profilent à l’horizon, l’UE pourrait même être amenée à adopter de nouveau des mesures d’austérité au cours de l’année 2018. Cela serait notamment le cas si l’UE continuait de faire preuve d’hésitation face aux réformes en profondeur qui s’imposent. Politique L’issue du Brexit, et son impact sur les perspectives de croissance, la valorisation des actifs et les investissements, est conditionnée par des considérations politiques. Plusieurs scénarios sont envisageables. Les événements politiques de l’année 2016 semblent défier les principes fondamentaux du fameux « consensus de Davos », selon lequel les démocraties établies privilégieront la mondialisation et la croissance, adopteront la logique de marché et admettront que le commerce n’est pas un jeu à somme nulle. De fait, la position définie par la Première ministre britannique Theresa May en janvier annonce explicitement que les questions de souveraineté et de contrôle de l’immigration auront priorité sur l’adhésion au marché unique européen. Dans le même temps, les dirigeants de l’UE ont parlé d’une seule voix en faveur du principe de la liberté de circulation, même si ce point pourrait constituer le dernier obstacle au maintien par le Royaume-Uni de son adhésion au marché unique. Ces conflits seront réactivés en Europe à maintes reprises au cours de l’année 2017, avec des élections générales aux Pays-Bas en mars, en France en avril et en mai, en Allemagne en septembre et en Italie entre le mois de juin et le début de l’année 2018. Dans ces pays et ailleurs, on observe une montée des populismes nationaux qui fustigent les politiques d’immigration en place et se méfient de plus en plus des accords de libre-échange. S’il nous semble probable que les groupes les plus nuisibles soient maintenus à l’écart du pouvoir, leurs politiques ou leurs arguments pourraient, dans une certaine mesure, être repris par les responsables des formations politiques dominantes. Jusqu’à présent, le gouvernement britannique semble plutôt stable, en dépit d’une majorité parlementaire extrêmement courte. Il s’est montré capable de répondre à l’aile droite anti-UE de son propre parti, sans avoir à craindre l’opposition la plus divisée et inefficace depuis une génération. Sa capacité de résistance, au cours des deux années de négociation qui s’annoncent, sera cruciale. La perspective d’un second référendum sur l’indépendance de l’Écosse constitue une autre source d’instabilité politique potentielle au sein du Royaume-Uni. Tandis que les perspectives économiques d’une Écosse naviguant en solitaire semblent nettement plus fragiles qu’en 2014, quand le pays avait voté en faveur de son maintien dans le Royaume-Uni, il sera nettement plus difficile pour les unionistes de recourir au même argument de la « rationalité économique » la prochaine fois. La situation de l’Irlande est également épineuse. Tandis que le gouvernement du Royaume-Uni cherche à maintenir une frontière ouverte entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande, le Brexit créera sans doute une frontière « dure » entre l’Irlande et le Royaume-Uni, susceptible de déboucher sur un défi constitutionnel supplémentaire. Ces divers éléments forment un point de départ compliqué pour ce qui s’annonce comme l’un des processus de négociation les plus complexes de l’histoire. Tout en cherchant un accord sur les termes d’un divorce intervenant après 45 années de mariage, le Royaume-Uni et l’UE tenteront d’établir un nouveau partenariat, sans pouvoir s’appuyer sur un véritable précédent. En réalité, le premier élément de négociation concernera certainement les termes mêmes de la négociation. En effet, il convient de déterminer si le divorce RoyaumeUni/UE et la relation commerciale ultérieure seront négociés simultanément ou par étapes. Même dans le cas Le point de vue d’AllianzGI sur le Brexit | Mars 2017 de discussions simultanées, il semble très peu probable qu’elles soient conclues dans le cadre des deux années envisagées par l’article 50. Dans le cas du Groenland, dont le PIB atteint 2,4 mds USD et la population 56 000 habitants, la sortie du Marché commun européen enclenchée en 1982 avait nécessité trois années de travail. L’économie britannique éclipse de loin celle du Groenland, et une comparaison plus adaptée avec Hong-Kong, par exemple, ne laisse pas présager d’une négociation rapide sur le Brexit : en effet, 13 années de négociations ont été nécessaires avant que le Royaume-Uni restitue finalement Hong-Kong à la Chine. Un facteur crucial, dans les mois et années à venir, sera la capacité de l’UE et du Royaume-Uni à maintenir des rapports cordiaux et à s’abstenir de toute rhétorique négative et préjudiciable. Avec la progression des négociations, une telle retenue ne sera guère aisée. Jusqu’à présent, on a surtout parlé de la position britannique, tandis que l’UE s’en est tenue à des commentaires très concis et mesurés, expliquant : « nos règles sont claires, la balle est dans le camp du Royaume-Uni ». Une fois l’article 50 activé, la balle en question reviendra vers l’UE, et cette posture sera plus difficile à maintenir. En résumé, activer l’article 50 constitue un grand pas en avant vers l’application effective du Brexit, mais le chemin sera sans aucun doute long et sinueux. Alors que la politique donnera le ton et que l’économie sèmera des obstacles sur le trajet, les incidents de parcours ne sont pas à exclure. Conséquences pour l’investissement La livre sterling est peu susceptible de se raffermir dans un avenir proche, même si le potentiel de baisse est désormais limité. Dans les mois à venir, les élections nationales constitueront le principal défi pour l’euro, mais la monnaie unique pourrait s’affaiblir si les discussions autour du Brexit venaient à révéler des divergences de position parmi les États membres. Étant donné la possibilité que le Royaume-Uni quitte l’UE sans l’adoption d’un nouvel accord commercial ou de dispositions transitoires, nous recommandons aux investisseurs de rester vigilants. Rester prudent sur les entreprises et secteurs fortement exposés au Royaume-Uni Analyser avec minutie la chaîne logistique des constructeurs et fournisseurs, notamment leur dépendance à l’accord Royaume-Uni/UE, et leur capacité à se protéger contre le risque d’instauration de droits de douane Se préparer à une remise en cause de la reconnaissance de « l’équivalence » des normes et règlementations par le processus de négociation Utiliser des stratégies d’investissement actives afin de bénéficier de tout accès de faiblesse injustifié de la livre sterling, en investissant au Royaume-Uni dans des infrastructures ou des actifs de long terme attrayants Tout investissement comporte des risques. La valeur et le revenu d’un investissement peuvent diminuer aussi bien qu'augmenter et l’investisseur n’est dès lors pas assuré de récupérer le capital investi. Les avis et opinions exprimés dans la présente communication reflètent le jugement de la société de gestion à la date de publication et sont susceptibles d’être modifiés à tout moment et sans préavis. Certaines des données fournies dans le présent document proviennent de diverses sources et sont réputées correctes et fiables, mais elles n’ont pas été vérifiées de manière indépendante. L’exactitude ou l’exhaustivité de ces données/ informations ne sont pas garanties et toute responsabilité en cas de perte directe ou indirecte découlant de leur utilisation est déclinée, sauf en cas de négligence grave ou de faute professionnelle délibérée. Les conditions de toute offre ou contrat sous-jacent, passé, présent ou à venir, sont celles qui prévalent. 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