Des fournisseurs de téléphonie sans fil d`envergure

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Des fournisseurs de téléphonie sans fil d’envergure poursuivis par le Bureau : réclamation de 31 millions de
dollars plus le remboursement
Bulletin(s)
Canadian Marketing, Advertising & Regulatory Law Update
Citation(s)
Numéro 11
Expertise
Marketing, publicité et réglementation
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En bref : Le 14 septembre 2012, le Commissaire de la concurrence (le Commissaire) intentait un
autre recours d'envergure pour publicité mensongère contre d’importants fournisseurs de téléphonie
sans fil au Canada, ainsi que contre l'Association canadienne des télécommunications sans fil. Si un
doute persistait quant à l’application de la nouvelle sanction pénale maximale permise en vertu de
la Loi sur la concurrence (augmentée en 2009 de 100 000 $ à 10 M$), la question ne se pose plus.
Depuis 2009, le Bureau de la concurrence (le Bureau) a réclamé ou obtenu une somme équivalente
quatre fois au moins. Mais l'intérêt de cette nouvelle tient également au fait que le Bureau n’a pas
fondé sa contestation uniquement sur les déclarations des fournisseurs de téléphonie sans fil, mais
également sur celles des fournisseurs et des agrégateurs de contenu (collectivement les fournisseurs
de contenu).
L'essentiel de la poursuite
Cette poursuite, engagée contre Rogers Communications inc., Bell Canada, TELUS Corporation (les
fournisseurs de téléphonie sans fil) et l'Association canadienne des télécommunications sans fil
(l'ACTS), est fondée sur le fait d’avoir diffusé et avoir permis de diffuser de la publicité trompeuse (y
compris la présentation faussée des prix) sur les coûts de leurs services de messagerie texte à tarif
supplémentaire et de leurs services de contenu étoffé.
Le Commissaire réclame non seulement une sanction de 10 millions de dollars contre chacune des
trois compagnies de téléphone (15 millions pour celles ayant déjà fait l'objet d'une ordonnance), mais
aussi 1 million de dollars contre l'ACTS. En outre, il réclame que les compagnies de téléphone
remboursent tous les clients, actuels et anciens, lésés par la publicité trompeuse (depuis au moins le
1er décembre 2012).
Tarif supplémentaire et contenu étoffé
Petite explication si vous n'avez jamais entendu parler des « services de messagerie texte à tarif
supplémentaire ». Certains fournisseurs de contenu proposent aux consommateurs des services ou
des occasions à saisir (p. ex., la possibilité de participer à un concours, des nouvelles, des conseils,
des alertes, des questionnaires, des devis ou des horoscopes) pour un coût supplémentaire
(supérieur au prix habituel d'un message texte ordinaire). Il arrive également qu'ils offrent des biens
et services pour appareils sans fil, comme des sonneries de téléphone, des papiers peints
électroniques ou d'autres contenus, programmes ou applications, également facturés aux
consommateurs. Les messages publicitaires des fournisseurs de contenu qui font la promotion de ce
type de service (déclarations d'appel à l'action) sont diffusés par divers moyens en ligne et sur des
appareils sans fil. Il s'agit, par exemple, de bannières publicitaires dans des applications sans fil (p.
ex., le très apprécié jeu « Angry Birds »). Lorsque les consommateurs sélectionnent ce type
d'annonce, le site Web du fournisseur de contenu s'affiche, et ils sont invités à télécharger le contenu
numérique en question (p. ex., une sonnerie de téléphone). Selon le Commissaire, une fois que le
client confirme souhaiter obtenir le contenu numérique prétendument gratuit, il est abonné à son insu
et reçoit une facture.
En quoi les fournisseurs de téléphonie sans fil sont-ils concernés ?
Le Commissaire avance que certaines publicités ne communiquent pas convenablement le prix
(entre autres conditions) aux consommateurs et donnent l'impression générale, erronée, que l'offre
ou les services sont gratuits. Les fournisseurs de téléphonie sans fil n'ont pas conçu ni publié de
publicités pour ces produits ou services (ce sont les fournisseurs de contenu qui les ont créées et
publiées). Le Commissaire prétend toutefois qu'ils ont permis aux fournisseurs de contenu de faire
ces déclarations en leur donnant accès à leur réseau et à leur système de facturation (les frais sont
inclus dans la facture de téléphone des clients). Il affirme en outre qu'elles ont conclu avec ces
mêmes fournisseurs une entente de partage des revenus leur permettant de conserver une partie
des recettes (selon lui, de l'ordre de 27 % à 60 %). Les fournisseurs de téléphonie sans fil auraient
également reçu des plaintes pour frais inattendus, mais ils ont tout de même continué à autoriser les
déclarations d'appel à l'action identiques ou similaires. Outre l'article 74.01 de la Loi sur la
concurrence, le Commissaire s'appuie sur l'article 52(1.2), qui interdit d'autoriser des déclarations
fausses ou trompeuses.
De manière plus directe, le Commissaire prétend que la section relative aux pourriels du site Web de
chacun des fournisseurs de téléphonie sans fil donne l'impression générale que des mesures ont été
mises en place pour empêcher l'imposition de frais non autorisés, ce qui, selon lui, n'est pas toujours
le cas.
Qu'en est-il de l'Association canadienne des télécommunications
sans fil ?
Selon le Commissaire, l'ACTS tient à jour le registre des numéros agrégés communs pour le secteur
(il s'agit de numéros de quatre à six chiffres autorisant la prestation du service) et assure la gestion
du mécanisme par lequel les numéros sont attribués aux fournisseurs de contenu. Le Commissaire
affirme qu'en établissant, en facilitant et en exerçant le contrôle sur l'attribution des numéros agrégés
communs, l'organisme a autorisé les déclarations d'appel à l'action.
Ici aussi, il affirme de manière plus directe que l'ACTS a également établie, et prétend assurer la
gestion, des directives au nom de ses membres encadrant, entre autres, l’utilisation des numéros
abrégés communs. Sur son site Web, l'ACTS affirme que ses membres souscrivent à un code de
conduite qui « fait en sorte que [ses] clients ont les renseignements dont ils ont besoin pour prendre
des décisions d’achat éclairées ». Le Commissaire soutient que ce code de conduite ne fournit pas
une telle assurance.
Pourquoi des sanctions aussi imposantes ?
La liste de facteurs aggravants du Commissaire donne un aperçu de ce qui le motive à imposer des
sanctions importantes et du moment de la poursuite. Ces facteurs incluent la portée nationale et le
nombre de consommateurs de services sans fil, de la messagerie texte à tarif supplémentaire et de
contenu étoffé; la fréquence et la durée des déclarations; le fait qu’il est peu probable que le principe
d'autocorrection du marché remédie le problème de façon adéquate; le fait que des consommateurs
vulnérables ont été lésés (y compris des enfants, des personnes handicapées et des personnes
n'ayant pas les capacités linguistiques nécessaires); l'importance des recettes obtenues et la
situation financière des fournisseurs de téléphonie sans fil.
Et maintenant ?
La poursuite n’en est qu’à ses débuts, et au moment de la rédaction de cet article, les défendeurs
n'avaient pas encore déposé leur défense. Comme nous l’évoquions dans l'article précédent, Rogers
prépare déjà une importante défense dans le cadre d'une autre poursuite pour publicité trompeuse
intentée par le Commissaire. Sans doute que les parties livreront chacune un combat acharné dans
ce dossier.
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