10/12/13 13:55 LE CHOC ACOUSTIQUE M-J. ESTEVE-FRAYSSE M.OHRESSER LILLE Vendredi 13 septembre Le syndrome du CHOC ACOUSTIQUE Contexte : - Entité pathologique, survenant après une exposition à un bruit fort, inattendu et soudain, provoquant un groupe de symptômes neurophysiologiques (l’otalgie étant le plus marquant) et psychologiques (anxiété, stress, peur) Quasi inconnu des professionnels de santé. - Touche le personnel des centres d’appels téléphoniques, mais pas uniquement 1 10/12/13 13:55 CHOC ACOUSTIQUE/TRAUMATISME SONORE Phénomène différent : Traumatisme sonore : Après une exposition au bruit prolongé, ou bruit à très forte intensité Normes de protection connues Surdité symétrique sur les fréquences aiguës Trouble de la discrimination Perte majeure CCE et aussi CCI CHOC ACOUSTIQUE (CA) 1 - Circonstances de survenue Typiquement centres d’appels téléphoniques : Milieu ambiant bruyant Travail au casque Attention auditive permanente Risque de bruit fort inattendu et soudain si autres chocs acoustiques dans le centre Contexte de stress, travail compétitif, anxiété, interlocuteurs mécontents Les bruits : Effet Larsen, signaux sonores, sonnerie de fax, alarmes, sifflements malveillants (casque) Pourrait se développer sans incident acoustique particulier (voix dérangeantes si CA antérieur…) 2 10/12/13 13:55 CHOC ACOUSTIQUE 2 – Signes cliniques Otalgie +/- douleur mâchoire, cou, face Brûlure Aigu (coup de couteau) Sourde Acouphènes Troubles de l’équilibre Hyperacousie Céphalées Echo (audition voilée, distorsion) Plénitude 98% Disparition le plus souvent en quelques jours 50% 48% 32% 30% 18% 11% Origine évoquée : syndrome tonique du muscle tenseur du marteau Étude australienne sur 16 000 employés de centres d’appels 103 cas entre 1994-1996 Westcott M. Acoustic Shock Injury (ASI) Acta Otolaryngol Suppl 2006; 556: 54-8 CHOC ACOUSTIQUE 3 – Examens Surdité peu fréquente Vinodh 2010 : 340 cas de chocs acoustiques 34 cas de surdité Si surdité : Plutôt fréquence graves, modérée Peut atteindre le 4000 Hz Unilatéral, corrélable au CA Récupération totale fréquente DPOAE Plus sensibles / audiométrie tonale Vinodh 2010 : 340 cas 34 audios pathologiques 125 DPOAE pathologiques 3 10/12/13 13:55 SYNDROME du CHOC ACOUSTIQUE (SCA) Si symptômes persistent (favorisés par la récidive des chocs et terrain d’anxiété et de stress) : Installation du syndrome du choc acoustique (SCA) Caractéristiques cliniques Troubles psychologiques Nécessité d’une prise en charge Retentissements professionnels Retentissements médicaux-légaux SYNDROME du CHOC ACOUSTIQUE 1 – Signes cliniques Signes cliniques variables Acouphènes, blocage, plénitude de l’oreille moyenne Sensation d’audition étouffée, distorsion, fluctuation suggérant des variations minimes d’impédance de l’OM Tangage, petit trouble de l’équilibre Douleur, aigue ou sourde, brûlure au niveau de l’oreille ou région péri auriculaire, niveau joue, cou et ATM Sans pathologie de l’oreille moyenne ou de l’ATM sous jacente = Syndrome Tonique du Muscle Tenseur du Tympan (STMTT ) 4 10/12/13 13:55 Circonstances de survenue Données acoustiques : 82 à 110dB Au niveau du tympan 2.3 à 3.4 KHz Durée brève (variable) jusqu’à ce que le casque soit retiré À la différence du trauma sonore long) (+ fort et souvent + ETUDE DE LA PREVALENCE DES SIGNES DE STMTT CHEZ DES PATIENTS AVEC ACOUPHENE HYPERACOUSIE Etude multicentrique, Australie, USA, Brésil 345 patients répartis en 3 groupes Acouphène seul (Ac) Ac + hyperacousie (Ac + H) Hyperacousie seule (H) 49% 42% 9% ] Soit 91 % avec Ac 24% début symptômes par choc acoustique dont 50% unilatéral 82% signes STMTT 81% si Hyperacousique Si CA unilatéral : 66% signes du même côté 30% signes bilatéraux Wescott M. et al. Tonic tensor tympani syndrome in tinnitus and hyperacusis patients : A multi-clinic prevalence study Noise & Health 2013;15:117-28 5 10/12/13 13:55 REPARTITION DES SYMPTÔMES Wescott M. et al. Tonic tensor tympani syndrome in tinnitus and hyperacusis patients : A multi-clinic prevalence study Noise & Health 2013;15:117-28 Tout les patients Plénitude Céphalées Troubles de l’équilibre Douleurs ATM, cervicales Otalgies } 33% 20% Groupe H et H +Ac Plénitude Céphalées Otalgies sourdes Otalgies aiguës Douleurs cervicales Douleurs ATM } 52% 25% Si exposition au bruit = aggravation Distorsion Douleur sourde Douleur aiguë 75% 74% 66% Si H sévère / STMTT Signes très fréquents 92% LES TROUBLES PSYCHOLOGIQUES Signes : stress, anxiété, peur du bruit, peur des récidives Conduite d’évitement Arrêt de travail prolongé Cas majeur : décompensation psychologique, état dépressif, isolement Fausses croyances, peur de surdité, de lésion de l’oreille interne (exacerbé par la douleur) Protections excessives qui augmentent l’acouphène et l’hyperacousie Nécessité d’explications claires, physiopathologiques STMTT = premier outil indispensable Réassurance Permet d’entreprendre la désensibilisation par thérapie sonore des Ac et HA La diminution de ces deux symptômes réduit les autres symptômes du STMTT 6 10/12/13 13:55 RETENTISSEMENT PROFESSIONNEL ET MEDICO-LEGAL Nécessite de faire connaître le STMTT : Sa survenue, dans les chocs acoustiques Son association très fréquente dans le contexte Ac et surtout HA Sensibiliser les professionnels à rechercher les signes cliniques évocateurs Un mode de début, non pas par traumatisme sonore, mais par bruit soudain, inattendu, sur contexte de fatigue, stress, attention auditive Concernés : Personnel des centres d’appels, armée, explosion, open-space ,travail stressant et attention auditive…… +++++ CAS CLINIQUE n°1 Mme C . Géraldine - 40 ans 7 10/12/13 13:55 Histoire de la maladie Téléconseillère santé à la plate-forme SOPHIA de la CPAM d’Albi Antécédents: HTA limite sup/normale non traitée Traitements en cours: aucun 1er choc acoustique 13/10/2012 • Bruit soudain ,bref violent dans le casque à droite • Signes fonctionnels: Hypersensibilité au bruit / hyperacousie Otalgies droites (« coups d’aiguilles ») Acouphènes aigus droits à type de sifflement Arrêt de travail 15 jours Symptomatologie régressive en quelques semaines 8 10/12/13 13:55 2ème choc acoustique 29/01/2013 Signes fonctionnels: Hyperacousie débutante Otalgies vives droites irradiant dans la mâchoire Plénitude oreille droite durable invalidante Acouphènes intenses droits à type de sifflements Examen ORL strictement normal Arrêt de travail prolongé Retentissement psychologique ++(peur de la recédive,anxiété,stress …..) Audiogramme et seuils d’inconfort 125 250 500 1000 2000 4000 6000 8000 0 -10 -20 -30 dB (HL) -40 -50 -60 -70 -80 -90 Conduc'on osseuse -100 Conduc'on aérienne -110 Seuils d'inconfort -120 Fréquence (Hz) OEA présentes des 2 côtés 9 10/12/13 13:55 Proposition thérapeutique Thérapie cognitive comportementale Thérapie sonore (MP3) Anxiolytiques à la demande Suivi rapproché Réévaluation à 2 mois Reprise du travail impossible Signes fonctionnels: Diminution des otalgies puis disparition à 1 mois Persistance des acouphènes aggravés à l’exposition sonore, insomniants Hyperacousie invalidante Symptômes augmentes par le bruit +++ Manifestations de stress post-traumatique Aggravation de l’HTA limite (nécessitant la mise en place d’un traitement β-bloquant) Tachycardie 10 10/12/13 13:55 Audiogramme et seuils d’inconfort 125 250 500 1000 2000 4000 6000 8000 0 -10 -20 -30 dB (HL) -40 -50 -60 -70 -80 -90 Conduc'on osseuse -100 Conduc'on aérienne -110 Seuils d'inconfort -120 Fréquence (Hz) Questionnaires acouphènes THQ = 68% 480 Sensibilité 480 Santé physique 460 Emotionnel 420 Auditif 0 Subjectif SEV = 11/16 DET = 64/104 11 10/12/13 13:55 3ème choc acoustique 21/06/2013 • Quelques semaines après la reprise du travail • Signes fonctionnels identiques • Symptomatologie droite Suivi Audiométrie 125 250 500 1000 2000 4000 6000 8000 0 -10 -20 dB (HL) -30 -40 -50 -60 -70 -80 -90 -100 21/06/2013 12/07/2013 22/07/2013 -110 -120 Fréquence (Hz) 12 10/12/13 13:55 Dernière consultation 29/08/2013 • Arrêt de travail prolongé • Persistance: hyperacousie acouphène droit à type de sifflement (questionnaires inchangés) plénitude de l’oreille droite Audiogramme normalisé Amélioration des seuils d’inconforts Acouphènométrie: 4200Hz, seuil 25dB, 5 dB au dessus du seuil Audiogramme et seuils d’inconforts 250 500 1000 2000 4000 6000 8000 125 0 -10 -10 -20 -20 -30 -30 -40 -40 -50 -50 dB (HL) dB (HL) 125 0 -60 -70 -80 -90 -100 -110 Conduction osseuse Conduction aérienne Seuils d'inconfort -120 Fréquence (Hz) 250 500 1000 2000 4000 6000 8000 -60 -70 -80 -90 Conduc'on osseuse -100 Conduc'on aérienne -110 Seuils d'inconfort -120 Fréquence (Hz) 13 10/12/13 13:55 Proposition Inaptitude au poste de travail Infirmière de formation Thérapie sonore adaptée de l’hyperacousie et de l’acouphène à poursuivre Notre attitude: Explication pas assez claires au départ Mauvaise connaissance du SCA Prise en charge différé Pas de prise en charge psychologique adaptée CAS CLINIQUE n°2 Mme WAC . Laur. - 37 ans 14 10/12/13 13:55 Histoire de la maladie Agent d’accueil à la gare routière Contexte: Surmenage professionnel, stress+++ Conditions de travail difficiles (horaires, clients socialement problématiques, hiérarchie) Attention auditive permanente dans un environnement bruyant 1er choc acoustique 15/10/2010 1er CS Urgence Pas d’évènement déclencheurs apparents Signes fonctionnels survenue brutale la veille Otalgies bilatérales violentes Sensation de « brûlure » dans les oreilles Hypersensibilité aux bruits Augmentation d’un acouphène ancien préexistant Distorsions Audiogramme normal Résolutif sous corticothérapie, DIAMOX, repos auditif 15 10/12/13 13:55 2ème choc acoustique 30/03/2011 Même contexte professionnel Exposition prolongée (9heures) à une alarme Consultation en urgence Signes fonctionnels: Otalgies bilatérales violentes Sensation de « brûlure » dans les oreilles Hypersensibilité aux bruits ++++ (voiture, TV, radio, groupes…) Augmentation de l’acouphène à droite Plénitude bilatérale des oreilles Tangages Audiogramme normal Evolution Pas de diagnostic /Arrêt de travail Chronicité de la symptomatologie hyperacousie sévère Reprise du travail impossible Réactivation des symptômes au moindre bruit Détresse psychologique majeure Isolement social 16 10/12/13 13:55 Examens complémentaires Audiogrammes normaux OEA présentes sans hyperactivité des CCE Radiographies (cervicales, ATM) normales TDM rochers normal PEA normaux PEMV normaux VNG: légère hyporéflexie droite 27% Acouphénomètrie: Ac droit à 6000Hz, intensité 5dB. Evolution seuils d’inconfort 17 10/12/13 13:55 Prise en charge Thérapie sonore (GBB) Thérapie cognitive comportementale EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) Sophrologie Anxiolytiques à la demande Essai médicamenteux (Rivotril, Laroxyl…) Arrêt de travail prolongé ,reconnaissance AH par la MDPH Compte rendu psychothérapeute (01/09/2012) Etat de stress post-traumatique Terrain fragilisé: travail depuis 12 ans dans des conditions déplorables, surmenage… Agression par Larsen → syndrome de dissociation: Mouvements automatiques Larmes qui s’écoulent Impossibilité de partir Aboutissement à une hyperacousie de grade 4/5 Etat de choc (réveils nocturnes, cauchemars mortifères, corps en alerte) Echelle d’évaluation de l’ESPT positive plus d’un an après : 55 pour un minimum à 44 Bonne évolution sous EMDR 18 10/12/13 13:55 Evolution TRES lentement favorable Amélioration lente et fluctuante des acouphènes, des otalgies, de l’hypersensibilité aux bruits Phase positive psychologique A près de 3 ans du début des symptômes: Hyperacousie+++malgré l’évolution favorable (peut faire la vaisselle, écouter la radio, faire quelques courses sans protections auditives) Acouphènes bilatéraux fluctuants déclenchés aux bruits Persistance d’otalgies fluctuantes déclenchées aux bruits IMPLICATIONS CLINIQUES / a retenir Présence de signes STMTT n’implique pas obligatoirement un dysfonctionnement de l’ATM Penser au STMTT surtout : Si début par choc acoustique Si hyperacousie associée (+++) Si tendance à augmenter avec le bruit et l’anxiété (+++) Les seuils d’inconfort, souvent difficiles à réaliser (si HA). Le suivi des signes cliniques est aussi un bon marqueur de l’évolution 19 10/12/13 13:55 SCA : prise en charge 1) Explications physiopathologiques (conseils et explications pour contenir l’anxiété) 2) utilisation judicieuse de filtres sonores, à diminuer très rapidement 3) stratégies d’enrichissement sonore recommandées 4) MP3 ou GBB avec Bruit Blanc, ou bruit environnant 5) traitement des facteurs psychologiques obligatoire pour réduire l’hypervigilance auditive et la phonophobie Syndrome du CHOC ACOUSTIQUE / 2) Le traitement: Médicamenteux: corticothérapie, myorelaxants, anxiolytiques, antidépresseurs, anticonvulsivants Prise en charge - Chirurgicales: Toxine botulique, Section du tendon du TT sont à l’étude. 20 10/12/13 13:55 CHOC ACOUSTIQUE : Conduite à tenir 1) limitateurs pour restreindre le volume maximum, pour diminuer les probabilités du 1er incident 2)A retenir facteurs dominants = début soudain et inattendu de l’impact de sons assez forts, hors de la possibilité de commande plutôt qu’ un son très fort. 3) Implications medico-légales du SCA - Reconnaissance en tant qu’entité pathologique - Reclassement professionnel si chronique IMPLICATIONS MEDICO LEGALES Reconnaissance en tant qu’entité pathologique Reclassement professionnel si chronique 21 10/12/13 13:55 Circonstances de survenue Donnes acoustiques : supposées : 82 à 110dB Au niveau du tympan 2.3 à 3.4 KHz Durée brève (variable) jusqu’à ce que le casque soit retiré À la différence du trauma sonore long) (+ fort et souvent + 22 10/12/13 13:55 HYPOTHESES Admis : Muscle oreille moyenne sont influencés par le système sérotoninergique, lien entre le système émotionnel et les contractions de l’oreille moyenne Il existe une médiation centrale du seuil du réflexe du muscle tenseur du tympan basé sur trois observations : 1. 2. 3. Grande prévalence STMTT chez les hyperacousiques Caractère unilatéral des symptômes si CA unilatéral Prévalence des symptômes suivant l’exposition au bruit, corrélable au stress, à l’anxiété, à la menace Baguley DM, Andersson G Hyperacousis Mechanisms, Diagnosis and Therapies Thompson AM, Thompson Gc, Britton BH Serotoninergic Innervation of Stapedal and Tensor Tympani Motoneurons San Diego Plural Publishing, 2007;p.12-3,15 Brain Res 1998; 787: 175-8 23