REVUE DES SYSTEMES SOLAIRES PHOTOVOLTAIQUES Mamadou Lamine Doumbia*, Kodjo Agbossou*, Abdoulaye Traoré** * Université du Québec Département de génie électrique et de génie informatique 3351 boul. des Forges Trois-Rivières (Québec) Canada G9A 5H7 Email de correspondance: [email protected] ** École Nationale d’Ingénieurs 410 Avenue Van Vollenhoven, B. P 242, Bamako, Mali 1. Introduction Depuis la fin des années 1990, le marché du solaire photovoltaïque connaît une croissance très rapide, plus de 30% par an. Ce regain d’intérêt pour le photovoltaïque, et en général envers les énergies renouvelables, est dû à la prise de conscience mondiale qui débouche sur la nécessité de revoir les politiques énergétiques pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre et pour prévenir une pénurie énergétique majeure. Les hausses récentes du prix du pétrole attestent ce fait : l’énergie est plus que jamais un enjeu majeur des sociétés modernes. Les installations photovoltaïques connectées aux réseaux électriques sont de plus en plus en fréquentes dans les pays industrialisés, grâce à des incitations financières ou mesures de défiscalisation. D’autre part, on estime qu’actuellement, plus de deux milliards de personnes ne sont pas reliées à un réseau électrique [1] et ne le seront pas dans un avenir proche à cause de questions de rentabilité liées à l’éloignement, à la faible densité de population ou à la pauvreté. Pour ces populations, les systèmes photovoltaïques autonomes peuvent jouer un rôle très important en apportant une solution pour couvrir les besoins de base en électricité. Dans un pays comme le Mali, où le soleil brille en abondance et où l'on trouve une vaste population rurale sans l'infrastructure nécessaire pour se doter d’un réseau d'électricité, les systèmes photovoltaïques 141 présentent un attrait certain. Ils sont évolutifs et donc adaptables aux nouveaux besoins; ils peuvent produire de l'électricité à l'endroit même où on en a besoin; ils n’exigent qu’un entretien minimal; ils ne polluent pas. Ils conviennent particulièrement bien aux besoins élémentaires des communautés rurales : éclairage domestique, alimentation en énergie des centres de santé ou d’autres services publics, pompage et purification de l’eau, etc. Cependant, cette technologie exige un investissement initial élevé. Aussi, le rendement de conversion photoélectrique reste faible. Cet article présente une revue des technologies solaires photovoltaïques. Une classification des installations est effectuée. Les principales composantes des systèmes autonomes et systèmes connectés au réseau électrique, sont décrites et comparées. 2. Classification Les systèmes photovoltaïques peuvent être divisés en deux catégories (Figure 1) : les installations autonomes « Stand-Alone Systems » et les installations connectées au réseau électrique « Grid-Connected Systems ». Les systèmes autonomes peuvent être sans stockage (fonctionnement au fil du soleil) ou avec stockage d’énergie. L’élément de stockage (batteries) ou la source secondaire fait correspondre la production à la demande. En général, les batteries de stockage requièrent un régulateur qui gère leur état de charge. Ainsi, un système MSAS'2008 photovoltaïque autonome classique avec stockage, est composé d’un ou plusieurs modules connectés généralement en parallèle, d’un régulateur, de batteries et de charges. Pour des raisons de simplicité, les charges peuvent être alimentées en courant continu (cc). Cependant, lorsque les charges exigent une alimentation en courant alternatif (ca), un onduleur est utilisé pour assurer la conversion du courant continu (cc) en courant alternatif (ca). Quant aux systèmes photovoltaïques connectés sur le réseau électrique, ils utilisent le réseau public d’électricité comme élément de stockage en y renvoyant le surplus d’énergie. Ces installations sont généralement composées : d’un ou plusieurs modules connectés en série et en parallèle, d’un onduleur, d’un régulateur, de batteries, de disjoncteurs cc et ca de protection et de charges. Systèmes photovoltaïques Installations autonomes sans stockage avec stockage Installations connectées au réseau électrique connexion directe hybrides applications cc génératrice diesel applications ca éolienne connexion à travers un réseau résidentiel Figure 1 : Classification des systèmes photovoltaïques 3. Modules photovoltaïques Les modules photovoltaïques peuvent être classifiés selon le type de cellules ou de matériau d’encapsulation. En général, les cellules sont faits de silicium cristallin ou de silicium amorphe. La technologie du silicium cristallin représente environ 85% du marché. Cette technologie se subdivise en deux sousfilières : le silicium monocristallin et le silicium polycristallin (ou multicristallin). Elles sont différenciées par le procédé d’obtention du cristal. Les modules en silicium amorphe ont une apparence uniforme (ils ne sont pas découpés en petites cellules comme le cristallin). Il est MSAS'2008 142 possible de donner un aspect semitransparent en ménageant des petites rayures entre les bandes de silicium. Un module photovoltaïque est composé de cellules (photopiles) connectées en série et en parallèle. La mise en série des cellules (Figure 2) permet d’obtenir la tension nécessaire au fonctionnement du module. Ainsi, on utilise généralement des modules qui comportent 32 à 44 cellules pour alimenter les batteries de 12V. Une tension d’environ 17V est mesurée aux bornes du module afin de tenir compte de la chute de tension dans les conducteurs de câblage. La mise en parallèle (Figure 3) permet d’augmenter le courant produit par le module. La puissance générée par les modules dépend de l’ensoleillement et de la température. Lors du fonctionnement du système photovoltaïque, la puissance générée par un module, est généralement différente (inférieure) de la puissance spécifiée sur la fiche technique du fabricant. La puissance indiquée par le fabricant correspond aux conditions « Standard Test Conditions » (STC) d’ensoleillement G=1000 W/m2, de température T= 25°C et de densité de l’air AM=1.5. Ces conditions sont établies par la norme 60904 de la Commission électrotechnique internationale (CEI). La CEI est une organisation mondiale qui a pour objet de favoriser la coopération internationale pour toutes les questions de normalisation dans les domaines de l'électricité et de l'électronique. La Norme internationale CEI 60904 a été élaborée par le comité d'études 82: Systèmes de conversion photovoltaïque de l’énergie solaire. Figure 2 : Caractéristiques courant-tension de cellules connectées en série [2] 4. Batteries En général, le stockage de l’énergie dans les systèmes photovoltaïques autonomes est assuré par des batteries. Dans ces systèmes, le stockage de l’énergie représente environ 15% des investissements initiaux, sur une durée d’exploitation de 20 ans, ce coût peut atteindre 50% des frais totaux, car il faut remplacer les batteries plusieurs fois. Les batteries utilisées dans les installations autonomes sont en général de type plombacide (Pb). Les batteries cadmium-nickel sont de moins en moins utilisées à cause de leur prix plus élevé et la présence du cadmium qui est toxique. Elles sont de plus en plus remplacées par des batteries nickel-metalhydrure (NiMH). 4.1 Batterie au plomb Ce type de batterie comprend deux électrodes de plomb et d’oxyde de plomb qui sont plongées dans un électrolyte. L’électrolyte, constitué d’acide sulfurique dilué dans de l’eau distillée est un excellent transporteur d’ions. En reliant les deux électrodes à un récepteur externe consommant du courant, elles se transforment en sulfate de plomb et l’acide se dilue. En fournissant un courant inverse au système, l’acide se concentre et les deux électrodes reviennent à leurs états initiaux. La charge et la décharge sont représentées par les équations chimiques suivantes : PbO2 + 2 H 2 SO4 + Pb ⇔ 2 PbSO4 + 2 H 2O A l’électrode négative (cathode) : Pb + H 2 SO4 ⇔ PbSO4 + 2 H + + 2e − A l’électrode positive (anode) : PbO2 + H 2 SO4 + 2 H + + 2e − ⇔ PbSO4 + 2 H 2O Chaque cellule de batterie fournit une tension moyenne de 2V. On assemble en série/parallèle le nombre d’éléments nécessaires pour obtenir la tension et le courant désirés. La capacité nominale de la Figure 3 : Caractéristiques courant-tension de cellules connectées en parallèle [2] 143 MSAS'2008 Diode 4.2 5. Régulateurs de charge Régulateur shunt Ce type de régulateur est le plus répandu. Durant la charge, le courant du panneau solaire est envoyé à la batterie (Figure 4). Lorsque la batterie atteint sa pleine charge, le courant passe par l’interrupteur de puissance MSAS'2008 144 Charge Régulateur série Ce régulateur est de plus en plus populaire. Dans son circuit, l’interrupteur de charge est placé en série avec la batterie et s’ouvre lorsque la fin de charge est atteinte (Figure 5). L’avantage de cette configuration est que la tension aux bornes de l’interrupteur est plus faible (réduite de la tension de la batterie). Le désavantage par rapport au régulateur shunt est que la chute de tension due à la résistance de l’interrupteur s’ajoute à la chute de tension supplémentaire dans le câblage entre les panneaux et la batterie. Le régulateur est un élément important d’un système photovoltaïque. Il contrôle le flux d’énergie et protège la batterie contre les surcharges et décharges profondes. On distingue trois types : les régulateurs shunt, les régulateurs série et les régulateurs à recherche de point de puissance maximum « Maximum Power Point Tracking » (MPPT). 5.1 Batterie 5.2 Interrupteur Diode Interrupteur Régulateur Panneau solaire Charge Batterie au lithium Les principaux avantages du lithium sont sa haute densité énergétique et son rendement de stockage. Les désavantages principaux sont la fragilité et le danger de destruction en cas de fonctionnement en dehors des conditions strictes (température et tension). A cause de sa complexité et de sa nouveauté, cette technologie doit encore faire ses preuves. Figure 4 : Régulateur shunt Batterie 4.3 Interrupteur Panneau solaire Interrupteur Batterie au nickel-metal-hydrure Cette batterie remplace de plus en plus la batterie NiCd (nickel-cadmium) qui est surtout utilisée dans les appareils portables et dans des applications particulières (sites d’accès difficile, montagnes, désert, etc.) demandant des batteries de très longue durée de vie (15 à 20 ans). Les batteries au NiMH sont plus chères que celles au plomb. (transistor bipolaire ou MOSFET). Une diode est placée entre cet interrupteur et la batterie pour ne pas court-circuiter la batterie. Cette diode joue également le rôle de blocage du courant inverse pouvant circuler de la batterie vers le panneau. Régulateur batterie est la quantité d’ampère-heure (Ah) qui peut être extraite en un temps donné. L’état de charge « State of Charge » (SOC) est la quantité d’électricité encore disponible en Ah divisée par la capacité nominale de la batterie. L’état de charge est égal à 1 si la batterie est pleine, et il égal à zéro, si la batterie est vide. Figure 5 : Régulateur série 5.3 Régulateur MPPT Dans ce régulateur (Figure 6), un circuit mesure en permanence la tension et le courant du panneau pour extraire l’énergie au point de puissance maximale. Ainsi, on peut obtenir un fonctionnement à puissance de l’inductance s’inverse, ce qui fait conduire la diode qui protège l’interrupteur. Interrupteur Figure 7 : Hacheur élévateur Figure 6 : Régulateur MPPT Batterie + 6. Convertisseurs Les convertisseurs sont des dispositifs électroniques de puissance qui transforment la tension continue fournie par les panneaux ou les batteries pour l’adapter à des charges (appareils) fonctionnant, soit à une tension continue différente, soit à une tension alternative. 6.1 Convertisseurs cc/cc On distingue les convertisseurs type hacheur élévateur « Boost Converter » et ceux de type hacheur abaisseur « Buck Converter ». A) Hacheur élévateur Ce type de convertisseur (Figure 7) produit une tension de sortie plus élevée que la tension d’entrée. Lorsque l’interrupteur est fermé, l’inductance se charge ; lorsque l’interrupteur s’ouvre, l’énergie de la batterie et celle emmagasinée dans l’inductance, sont transmises à la charge. Le condensateur sert à lisser la tension de sortie. B) Hacheur abaisseur Ce type de convertisseur (Figure 8) sert à produire une tension de sortie plus basse que celle des batteries. Lorsque l’interrupteur est fermé, le courant circule de la batterie vers le récepteur à travers l’inductance, lorsque l’interrupteur s’ouvre, la tension aux bornes 145 Diode Inductance Charge Interrupteur Condensateur Charge Batterie _ Régulateur MPPT Convertisseur cc-cc Condensateur + Interrupteur Panneau solaire Diode Charge Inductance Batterie maximale quels que soient la température et l’ensoleillement. Cette technique est surtout recommandée pour les systèmes de plusieurs centaines de watts pour que le gain d’énergie compense le coût plus élevé du régulateur [3]. _ Figure 8 : Hacheur abaisseur 6.2 Onduleurs autonomes Lorsque les charges (appareils) alimentées sont en courant alternatif (ca), il faut intégrer un onduleur au système photovoltaïque. L’onduleur convertit la sortie cc du champ photovoltaïque ou des batteries en électricité ca standard, semblable à ce que fournissent les services publics. Il existe trois types d’onduleurs autonomes qui se distinguent par l’onde ca de sortie qu’ils produisent. Cette onde peut être : carrée, pseudo-sinusoïdale et sinusoïdale pure. A) Onduleur à onde carrée L’onduleur à onde carrée est la plus simple. Il est peu coûteux et effectue simplement la commutation de l’entrée cc en une sortie ca « carrée ». Le signal carré généré contient des harmoniques susceptibles de causer l’échauffement des charges. Ce type d’onduleur convient aux petites charges de chauffage par effet Joule et aux systèmes d’éclairage pour lesquels on ne peut utiliser de matériel cc. MSAS'2008 C) Onduleur à onde sinusoïdale pure L’onduleur à onde sinusoïdale pure, utilise généralement la modulation de largeur d’impulsions (MLI) et filtre bien la sortie des transformateurs pour en éliminer la majorité des harmoniques indésirables (selon les normes, le taux de distorsion harmoniques doit être inférieur à 5%). En règle générale, il convient lorsque la charge exige une forme d’onde de grande qualité, telle l’onde nécessaire à des appareils de commutation électroniques sensibles. Les semiconducteurs de puissance utilisés dans ces onduleurs sont généralement commandés par des signaux issus d’une comparaison entre une onde sinusoïdale et une onde triangulaire (porteuse). Pour alimenter une habitation autonome, le système choisi peut être hybride et incorporé une génératrice diesel auxiliaire qui suppléera au manque de soleil. Dans ce cas, il est plus intéressant d’utiliser un onduleur/chargeur qui fonctionne en chargeur de batterie lorsque la génératrice fonctionne. Onduleurs pour couplage au réseau Pendant de nombreuses années, les systèmes photovoltaïques utilisaient des onduleurs centraux pour la connexion aux réseaux électriques (Figure 9). Ces onduleurs sont synchronisés au réseau électrique et incorporent des caractéristiques de surveillance de tension, de fréquence et de déconnexion automatique en cas d’absence du réseau. Ils génèrent très peu d’harmoniques. La plupart utilisent un transformateur pour assurer une séparation galvanique avec le réseau, ce qui permet d’isoler les panneaux du réseau électrique. Certains fabricants d’onduleurs renoncent à la séparation galvanique par transformateur pour améliorer le rendement (~2%). Dans ces cas, le câblage des panneaux doit être fait avec précautions afin d’éviter tout problème de liaison directe au réseau électrique. Onduleur central cc Figure 9 : Onduleur central Depuis quelques années, les onduleurs décentralisés ont fait leur apparition. Les onduleurs de type « string » sont branchés sur un ensemble de modules photovoltaïques connectés en série ou en parallèle selon la tension et le courant désirés (Figure 10). 6.3 MSAS'2008 146 ca Rangées de panneaux solaires B) Onduleur à onde pseudo-sinusoïdale L’onduleur à onde pseudo-sinusoïdale produit des séquences de tension positive et négative avec des passages par zéro qui réduisent les harmoniques par rapport à l’onde carrée. Cet onduleur peut bien faire fonctionner différents types de charges, mais peut causer certains problèmes avec les équipements électroniques sensibles. cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca Onduleurs ca Figure 10 : Onduleurs décentralisés « string » Dans le cas des onduleurs modulaires, chaque module photovoltaïque est connecté sur un onduleur (Figure 11). Les systèmes de ce type présentent l’avantage d’être facile à agrandir. Cependant, le coût de l’onduleur reste le principal facteur limitatif. cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca cc/ ca autonomes et systèmes connectés au réseau, sont décrites et comparées. Les dernières tendances technologiques des onduleurs connectés au réseau sont également exposées. Références [1] Anne Labouret, Michel Villoz, Énergie solaire photovoltaïque, 3e édition, Editions Lemoniteur, Dunod, 2006. [2] The German Solar Energy Society (DGS), Planning and Installing Photovoltaic Systems : A guide for installers, architects and engineers, 2005. [3] T. Tafticht, K. Agbossou, M.L. Doumbia, A. Cheriti, “ An improved maximum power point tracking method for photovoltaic systems”, Elsevier, Renewable Energy 33 (2008), 1508– 1516. ca Figure 11 : Onduleurs décentralisés modulaires 7. Conclusion Dans cet article nous avons présenté une revue des systèmes solaires photovoltaïques. Les principales composantes des systèmes 147 MSAS'2008