L’architecture face à la biodiversité Caroline Rainette DU Biodiversité et Grandes Infrastructures Université Paris 1 Panthéon Sorbonne 2011-2012 2 Une surprise encore pire m’attendait. On avait loti le clos. Il s’y pressait de petites maisons ouvrières qui me parurent innombrables. Les raisins dans les sacs, la fièvre des pêches, les groseilles à maquereau poilues et qui éclatent dans la bouche, l’odeur des géraniums dans la serre, les dalles du poulailler, les reines-claudes qui s’y fendent la tête et saignent de l’or, les grenouilles du bassin, mortes dans des poses d’opéra, la main sur le cœur, tous ces prestiges devinrent, à la minute, un spectre d’assassiné qui demande justice. Jean Cocteau, La Difficulté d’être Page de garde : Baltimore, USA ©Caroline Rainette 3 4 SOMMAIRE I Vers une prise en compte de la protection de l’environnement A La prise en compte de l’impact des bâtiments B Vers l’architecture à biodiversité positive II Une architecture qui reste à inventer A L’architecture contemporaine entre protection de l’environnement et prouesse technique B Une réflexion à mener au niveau du territoire 5 En juin 1992, le sommet planétaire de Rio de Janeiro a marqué l'entrée en force sur la scène internationale des préoccupations vis-à-vis de la diversité du monde vivant. La biodiversité1 rend de nombreux services écologiques gratuits, invisibles et indispensables à l'homme et à ses activités. Elle est la source première des services rendus par les écosystèmes : elle fournit l'oxygène que nous consommons, ce que nous mangeons, elle contribue à l'épuration et au cycle de l'eau, aux grands cycles biogéochimiques et à la régulation climatique, elle fournit des fibres pour l'habillement, du bois pour le chauffage et la construction, etc. La biodiversité, patrimoine naturel vital pour chaque peuple et pays, est donc intimement liée aux besoins de l'homme, à sa santé, son alimentation, et sa richesse. Car elle a aussi un aspect économique : elle est utilisée pour fabriquer des produits agro-alimentaires, pharmaceutiques, cosmétiques, etc. Mais les activités humaines, en particulier industrielles, impactent les services rendus par la biodiversité, les détruisent ou les appauvrissent. Ce n'est en effet pas tant la présence de l'homme qui perturbe l'équilibre écologique des écosystèmes que ses activités de plus en plus intensives qui, notamment dans les plaines, fragmentent de plus en plus les secteurs où existe encore une certaine biodiversité. La destruction des habitats et leur fragmentation sont donc les deux principaux facteurs de la perte d'un haut niveau de richesse biologique. La biodiversité est ainsi devenue l’autre enjeu environnemental du 21ème siècle, avec le réchauffement climatique Le secteur de la construction participe à la suppression d’espaces ruraux. Le bâti a une emprise sur l’équilibre des habitats et des espèces. Or aujourd’hui la « biodiversité urbaine » est sans doute un des éléments clés pour contrer la perte de biodiversité. Face à une densité de plus en plus grande, face à l’étalement urbain et à la croissance des villes, l'intégration dans la gestion urbaine et l'architecture de la biodiversité est une nécessité. En effet la croissance urbaine actuelle est grande consommatrice d’espaces, essentiellement prélevés sur les terres agricoles et les milieux naturels. En conséquence, les distances s’allongent et les infrastructures de transport ajoutent au morcellement et à l’enclavement des territoires, à la détérioration de la qualité de vie, des milieux et de la biodiversité2. Pourtant le différentiel entre cette croissance inéluctable et la consommation d'espaces peut être réduit : à nombre d'habitants équivalent, la France consomme annuellement deux fois plus de terrain naturel que l'Allemagne. Alors même que le nombre de familles monoparentales ou de personnes âgées dépendantes connaissent une augmentation sans précédent, le défaut d'organisation de la croissance urbaine se traduit notamment par une dépendance automobile sans alternative et par une dispersion résidentielle, commerciale et industrielle qui aggravent la congestion automobile et allongent les distances parcourues par les ménages. Pour sortir de ce mode de développement, les politiques publiques et les acteurs privés doivent s’impliquer véritablement dans une écologie qui doit devenir de plus en plus urbaine3. Il est nécessaire de recourir conjointement à une urbanisation plus dense organisée autour de transports en commun renforcés, et privilégier la croissance interne des villes par la reconquête des friches urbaines et la rénovation des centres-villes et des quartiers existants. Par ailleurs, il est nécessaire de préserver ou rétablir la biodiversité faune/flore dans les grands espaces urbains en travaillant notamment sur les corridors écologiques (parcs, squares, cimetières) et l’architecture. 1 C’est-à-dire « la variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie ; cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes ». 2 Par exemple le Nord-Pas de Calais a perdu plus de 75 % de sa biodiversité. 3 L’engagement n°76 du Grenelle de l’environnement a d’ailleurs présenté la question de la réintroduction de la nature en ville comme un axe stratégique fort pour la politique de la ville en France. 6 I Vers une prise en compte de la protection de l’environnement A La prise en compte de l’impact des bâtiments Le secteur construction/immobilier est l’un des plus concernés par l’environnement : ses impacts sont multiples (consommation énergétique – émissions de gaz à effet de serre qui contribuent lourdement à l’érosion des espèces –, infrastructures – destruction, fragmentation ou altération des habitats et des continuités écologiques –, gestion des espaces verts – introduction d’espèces invasives, utilisation d’intrants chimiques –, etc.). Or, de leur construction à leur démentiellement éventuel, les immeubles ont un impact sur l’équilibre des espèces et de leurs habitats, et ce. Ainsi en France le secteur immobilier représente : • 43 % des consommations d’énergie (et près de 60 % si on intègre les transports induits) 4 ; • 21 % des émissions de gaz à effet de serre5 ; • 41 % des déchets6 ; • 18 % des consommations d’eau7. Le secteur immobilier représente donc le principal gisement d’économies d’énergies, aussi l’amélioration énergétique des bâtiments figure parmi les objectifs prioritaires du Grenelle de l’environnement, qui d’une part impacte la rénovation du bâti existant et induit d’autre part une rupture technologique pour les immeubles neufs. La loi de programmation n°2009-967 du 3 août 2009 dite « Grenelle 1 » fixe pour le parc existant l’objectif de 50 kWhep/m2/an à l’horizon 2050, avec une étape intermédiaire de réduction des consommations d’énergie de 38% d’ici 2020. Elle fixe pour les bâtiments neufs, à l’horizon 2020, la généralisation des bâtiments à énergie positive : un immeuble produira plus d’énergie qu’il n’en consomme. Afin de diviser par deux les consommations énergétiques des bâtiments neufs, il est également fixé comme objectif la généralisation des bâtiments basse consommation dès 2012 pour les immeubles tertiaires. La mise en œuvre de cet objectif se traduit par l’adoption d’une nouvelle réglementation thermique, qui s’applique aux permis de construire déposés depuis le 28 octobre 2011 pour les bâtiments neufs des secteurs tertiaire et public, et à partir du 1er janvier 2013 pour tous les autres types de bâtiments neufs. Cette nouvelle réglementation thermique fixe également de plus fortes exigences dans la conception des bâtiments. Ces exigences devraient réduire de 35 millions de tonnes les émissions de CO2 à l’horizon 2020. La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle 2 », aborde quant à elle six chantiers majeurs : le bâtiment et l’urbanisme, les transports, l’énergie, la biodiversité (trame verte et bleue), les risques, la gouvernance. La prise en compte de la performance environnementale par le marché immobilier est donc une obligation : • travaux d’amélioration de la performance énergétique pour les bâtiments du tertiaire existants, à compter du 1er janvier 2012, dans un délai de huit ans ; 4 C’est le plus gros consommateur d’énergie parmi tous les secteurs économiques, avec 70 millions de tonnes équivalent pétrole (tep) par an. 5 Cette énergie consommée entraîne l’émission de 120 millions de tonnes de CO2 par an (soit environ 32,5 millions de tonnes de carbone). 6 L’activité globale génère environ 360 millions de tonnes de déchets par an. 7 Au delà de sa phase de construction, un immeuble est également très consommateur d’eau (la consommation par personne et par jour est passée de 7 à 150 litres en un siècle). Chiffres extraits du rapport d’activité Gecina 2011 : http://www.gecina.fr/fo/fileadmin/user_upload/img/2012/P52-20120615_GECINA_RADD_2011-VFMEL-1506.pdf 7 • • • bilan carbone pour les entreprises de plus de 500 salariés ; reporting de données environnementales et sociales, dans un rapport annuel, devant faire l’objet d’une vérification par un organisme tiers indépendant, à partir de l’exercice clos au 31 décembre 2012 ; affichage de la performance énergétique dans les annonces immobilières pour les mises en vente ou location. Toutes ces exigences réglementaires ont conduit les processionnels à favoriser les constructions labélisées, et notamment le label Haute Qualité Environnementale (HQE) sur le marché de l’immobilier de bureaux. Ainsi en 2011 environ 10 % du parc de bureaux francilien était certifié HQE8. Figure 1 Evolution des m2 certifiés et non certifiés HQE en Ile-de-France, tiré de Jones Long LaSale -2012 Datant du début des années 1990 et inspirée du label Haute Performance Energétique (HPE)9 auquel elle ajoute une dimension sanitaire, hydrologique et végétale, la HQE est un concept français enregistré comme marque commerciale et qui a fait l’objet d'une certification par l'AFNOR. C'est une initiative privée, basée sur un référentiel de 14 cibles, qui peut être intégrée dans les offres commerciales d'ingénierie visant à améliorer la conception ou la rénovation des bâtiments et des villes en limitant le plus possible leur impact environnemental : Eco - Construction : 1. Relation harmonieuse des bâtiments avec leur environnement immédiat 2. Choix intégré des procédés et produits de construction 3. Chantier à faibles nuisances Eco - Gestion : 4. Gestion de l’énergie 5. Gestion de l’eau 6. Gestion des déchets d’activité 7. Gestion de l’entretien et de la maintenance Confort : 8. Confort hygrothermique 9. Confort acoustique 10. Confort visuel 11. Confort olfactif 12. 8 Chiffres JLL/Certivea – février 2011. Le HPE est un ensemble de labels publics qui rend compte des performances énergétiques, sanitaires et environnementales d'un bâtiment au niveau de sa conception et de son entretien. Il comporte plusieurs degrés et donne droit à un financement bonifié, à des primes ou à des avantages fiscaux. 9 8 Santé : 13. Qualité sanitaire des espaces 14. Qualité sanitaire de l’air 15. Qualité sanitaire de l’eau Figure 2 Les 14 cibles HQE, tiré de http://www.lesenr.fr/hqe/demarche-hqe/22-les-cibles-hqe.html La HQE n'est pas un ensemble de normes, mais un ensemble d'objectifs posés au moment de la conception. Elle est définie en fonction du coût global du bâtiment : bilan énergétique, bilan carbone, cycles d'entretien et de renouvellement. Deux principes sous-tendent donc l'approche HQE : la construction, l'entretien et l'usage de tout bâtiment induisent un impact sur l'environnement, et donc un coût global, que la HQE tentera de réduire ou compenser, au-delà de ce que demande la loi et en visant la performance maximale. L'économie d'un projet de construction HQE est donc appréhendée sous l'angle du coût global ; elle tient compte à la fois de l'investissement et du fonctionnement. la cible est atteinte si dans le domaine concerné, le niveau relatif de performance est égal à celui du meilleur projet connu au même moment. Toutefois, afin de permettre la labellisation HQE de constructions au budget plus restreint, l'association HQE a admis que toutes les cibles ne soient pas traitées avec un objectif de performance maximum. La démarche HQE est donc adaptée à chaque projet, dès sa conception, en étudiant si possible soigneusement le choix du lieu. Ainsi elle implique notamment de travailler avec un écologue car elle s’intéresse aux besoins et fonctions du vivant, s’appuie sur la biodiversité, et doit intégrer les atouts et contraintes liés au contexte (économique, social, etc.) ; autant d’éléments qui varient selon le lieu, l’époque et les caractéristiques du projet. Pour être labelisé HQE le bâtiment doit atteindre au minimum : 7 cibles au niveau de base ; 9 4 cibles au niveau performant ; 3 cibles au niveau très performant. Un retour d'expérience sur les bâtiments neufs a été publié en 2012 par l'association HQE, l'Ademe, le CSTB et le MEDDTL. L'ensemble testé correspond à 20 maisons, 19 immeubles de 800 appartements, 21 bâtiments de bureaux et 14 bâtiments commerciaux ou d’enseignement (300.000 m² de surface tertiaire) 10. De cette étude il ressort que : la consommation moyenne d'énergie était de 234 kWh/m²/an (dont 30 % pour la consommation énergétique réglementée (chauffage, climatisation, eau chaude sanitaire, éclairage et auxiliaires), 51 % pour la consommation énergétique non réglementée et 19 % pour les produits & équipements (énergie grise). Le test a confirmé l'importance des usages non réglementés (56 % de la consommation énergétique totale), surtout dans le tertiaire. Ceci est souvent non pris en compte puisque dépendant en grande partie de l'usager. Les émissions de gaz à effet de serre étaient de 15,6 kgeqCO2/m²/an en moyenne. 0,7 kgeqCO2/m²/an provenait de la consommation d’eau et 2,2 kgeqCO2/m²/an des rejets induits par la consommation énergétique non réglementée. 4 kgeqCO2/m²/an venaient de la consommation énergétique réglementée. 8,7 kgeqCO2/m²/an étaient émis par les produits et équipements. Les bâtiments tertiaires émettaient le plus d'équivalent CO2 avec 22,2 kgeqCO2/m²/an. Les déchets proviennent surtout de la construction/déconstruction et sont estimés à 25,4 kg/m²/an. La consommation moyenne d'eau était de 1.767 l/m²/an dans les maisons individuelles, de 799 l/m²/an dans le tertiaire et de 690 l/m²/an dans le logement collectifs. La qualité de l'air mesurée dans le bâtiment neuf à réception était conforme aux normes ou valeurs sanitaires recommandées. Les mesures ont confirmé les fortes variations de qualité de l'air selon les pièces d'un même bâtiment. La rupture technologique impulsée par le Grenelle consiste donc à concevoir des bâtiments vertueux sur le plan environnemental et infiniment moins consommateurs d’énergie lors des différentes phases de leur utilisation (de la construction au démantèlement). L’environnement, le développement durable sont désormais de nouvelles exigences en matière de construction, et les bâtiments passifs (compensation des apports énergétique par l’énergie solaire, la géothermie voire la biomasse) ont pu se développer. Le concept des bâtiments à énergie positive, bâtiments qui produisent plus d’énergie qu'ils n’en consomment pour leur fonctionnement, a également fait son apparition ses dernières années. Il s’agit généralement de bâtiments passifs très performants et fortement équipés en moyens de production d'énergie par rapport à leurs besoins propres en énergie. Les toits, murs, voire les fenêtres ou d'autres éléments (verrières de véranda, balcons, murs d'enceinte, toiture de garage, fondations, etc.) peuvent être mis à profit pour accumuler et restituer de la chaleur ou produire de l’électricité. Selon l'Ademe, le retour d'expérience disponible pour une centaine de réalisations à énergie positive en France11, montre que la consommation de ces bâtiments est d'environ 50 kWh/m2/an, soit un niveau équivalent à celui des bâtiments basse consommation12. 10 Test de performance environnementale au regard de l’analyse du cycle de vie et de la qualité de l'air intérieur, lancé fin 2010 sur 74 bâtiments basse consommation. 11 65 % dans le tertiaire ; 29 % en maisons individuelles et 6 % en logements collectifs, construits à 55 % dans la moitié nord de la France. 12 Toutefois, la production passive ou excédentaire d'énergie n'impose pas nécessairement de qualité environnementale ni sociale (toxicité et provenance des matériaux, santé et sécurité au travail, etc.). 10 Mais au-delà des questions énergétiques, avec l’étalement urbain et la croissance des villes l’impact des bâtiments sur l’environnement tangible est peu à peu devenu une réalité à considérer, et la question de la biodiversité s’est introduite dans les préoccupations d’architecturales. De même que depuis longtemps on réfléchit à la construction de bâtiments positifs en matière énergétique, une réflexion s’est instaurée autour de la création de bâtiments dits « à biodiversité positive », c’est-à-dire des constructions abritant dans ou sur ses structures extérieures une biodiversité supérieure à ce qu’elle aurait naturellement été sur le site s'il était resté vierge de construction. Ainsi la forme, l’architecture d’un bâtiment (conjuguer avec le choix des matériaux) peut participer à la préservation de la biodiversité et même devenir un refuge pour de nombreuses espèces. B Vers l’architecture à biodiversité positive 1) La végétalisation des toitures et des façades Face à la perte de biodiversité et aux nouvelles exigences juridiques, la végétalisation des bâtiments a pris un large essor. Le principe de la toiture végétale existe depuis très longtemps : des fameux jardins suspendus et légendaires de Babylone, à la pergola italienne, tout est prétexte à élever les plantes le plus loin possible du sol, en créant ainsi des structures architecturales avec de la végétation. Si cette végétalisation répondait autrefois à des impératifs d’ordre esthétique, depuis les années 1970, face aux nouveaux enjeux liés à l’urbanisation, certains pays tels que l’Allemagne, les Pays-Bas, la Suisse et les Pays Scandinaves, se sont penchés sur les intérêts supplémentaires d’un point de vue technique et scientifique de la végétalisation. Il est apparu que ces installations pouvaient jouer un rôle intéressant, notamment dans la rétention des eaux de pluie, dans la restauration ou protection de la biodiversité et dans l’amélioration de la qualité de vie en ville. Ainsi, pour certains pays européens le Coefficient de Biotope par Surface constitue une norme « d’écologie minimale » dans tout projet de rénovation, de restructuration et de construction nouvelle13. Il intègre tous les espaces potentiels de verdure comme les cours, les toitures et les murs, et peut également être augmenté par la végétalisation du mobilier urbain (poteaux des transports publics, éclairage public, barrières, arrêts de bus, etc.), permettant ainsi d’établir en ville des liaisons entre les îlots de verdures. Depuis quelques années se développe donc le concept de mur végétalisé, extérieur ou intérieur, notamment porté par Patrick Blanc14. 13 La municipalité de Paris a désormais introduit la notion de « coefficient de biotope » dans son plan d'urbanisme afin d'imposer aux promoteurs immobiliers de végétaliser une surface minimale attenante à toute construction. Si le constructeur ne peut répondre à ces obligations de restauration de zones végétalisées, il doit construire des murs et/ou terrasses ou toitures végétalisés. 14 Patrick Blanc est docteur en botanique. Il effectue des recherches sur la croissance comparative des plantes et leur capacité à s’adapter à des environnements extrêmes. Il a breveté son système du mur végétal : « Sur un mur porteur ou une structure porteuse est placée une ossature métallique qui soutient une plaque de PVC expansé de 10 mm d'épaisseur, sur laquelle sont agrafées deux couches de feutre de polyamide de 3 mm d'épaisseur chacune. Ces couches de feutre miment en quelque sorte les mousses qui se développent sur les parois rocheuses et qui servent de support aux racines de nombreuses plantes. Un réseau de tuyaux commandés par des électrovannes apporte une solution nutritive contenant les éléments minéraux dissous nécessaires à la croissance des plantes. Le feutre s'imprègne par capillarité de cette solution nutritive, laquelle descend le long du mur par 11 Figure 3 Patrick Blanc, Rue Bélliard 14, Bruxelles, végétalisation de l’immeuble La végétalisation des façades et des murs est censée permettre d’atteindre plusieurs objectifs : • favoriser le rapport homme-nature ; • compenser la perte végétale induite par le bâti en créant un nouveau type d’espace vert, moins gourmand en surface au sol, car il occupe l’espace vertical, non utilisable ; • favoriser la biodiversité en milieu urbain, en offrant un habitat naturel favorable à la faune, l’avifaune et les insectes, en protégeant les espèces végétales et animales indigènes, en leur offrant des milieux nourriciers et en permettant leur déplacement ou leur migration entre les surfaces végétalisées (corridors) ; • améliorer la qualité de l’air (dépollution de l’air ambiant) : fixation du CO2, des poussières, et de certains métaux lourds ; • garantir la qualité de vie et le bien-être social (aspects psychologiques, esthétiques, acoustiques, olfactifs des végétaux) ; • confort thermique : en été, la végétalisation permet d’abaisser la température des façades de 15° ; le confort d’été dans le bâtiment est amélioré et les consommations éventuelles de climatisation sont réduites. En hiver, le complexe substrat + végétation et les feuillages persistants des grimpantes, permettent d’isoler les murs du froid et du vent. • confort acoustique : la végétalisation des murs permet d’amortir les bruits aériens (isolement de 5dB) ; • esthétique du bâtiment et protection contre les dégradations (graffitis, etc.) gravité. Les racines des plantes y prélèvent les éléments nutritifs dont elles ont besoin, et l'eau en excès est recueillie en bas du mur par une gouttière, avant d'être réinjectée dans le réseau de tuyaux : le système fonctionne en circuit fermé. Les plantes sont choisies pour leur capacité à croître sur ce type de milieu et en fonction de la lumière disponible. » http://fdaf.org/jtissot/jt_blanc.htm 12 Figure 4 Hundertwasser House, Vienne15 Mais biodiversité ne doit pas être confondue avec diversité : ce n’est pas la simple multiplicité de plantes et d'animaux qui est recherchée, mais le maintien de leurs interrelations et fonctions écosystémiques. En effet, dans les décennies antérieures, exceptionnellement on conservait un arbre vivant qui émergeait hors du bâtiment, ou on en plantait dans le bâtiment là où le volume disponible le permettait, mais les objectifs étaient plus esthétiques et/ou visaient la qualité de vie, la qualité de l’air16. Dans les années 1990/2000, le souci de protection de la biodiversité a rejoint celui de « remboursement de la dette écologique » du bâti, pour aboutir à la notion d'architecture à biodiversité positive. Ce sont les espèces naturellement et normalement présentes sur le site concerné que l’on va chercher à préserver et favoriser. En effet on ne trouvera pas sur une maison les mêmes espèces que sur un chêne de 500 ans qui aurait occupé le même espace au sol ou le même volume, mais l'objectif est de permettre une biodiversité, une biomasse, une nécromasse et des fonctions écosystémiques qui approcherait au moins celle que l’on trouverait autour d'un objet minéral évoquant la forme de cette maison, mais qui aurait été colonisé depuis longtemps par la nature. Figure 5 Toiture végétalisée extensive (sédums), du centre d'interprétation de la Nature, Parc national du Biebosch, Pays-Bas Figure 6 Toiture jardin dans une ville américaine, Alyson Hurt de Alexandria, Va. 15 L'architecte autrichien Hundertwasser (1928-2000) considérait que chaque surface construite devait être compensée par une surface équivalente végétalisée. Il se souciait de l'empreinte écologique du citoyen et du citadin moderne. En conséquence il créait des immeubles avec des arbres aux fenêtres (l'arbre-locataire), concevait et réalisait en ville et à la campagne des maisons dont les toits sont recouverts de verdure et de végétaux, des sols à niveau inégal. 16 Les espèces plantées étaient d'ailleurs souvent exotiques. 13 Ainsi dans le choix de la conception des toitures intégrant une préoccupation pour la biodiversité, deux logiques coexistent : soit diversifier les habitats en créant par exemple dans une plaine agricole au sol profond un sol superficiel pierreux qui contiendra une diversité différente au même titre qu’une falaise naturelle. soit reproduire le milieu alentour pour assurer une continuité maximale et le remplacement de l’espace perdu au sol. La stratégie à adopter dépend des objectifs du projet et de la sensibilité de l’écosystème que la construction perturbe. Le diagnostic initial doit permettre de mettre en évidence les points sensibles en termes d’espèces, d’habitats et d’écosystème (présence actuelle ou historique d’une espèce animale ou végétale menacée, présence d’un habitat remarquable sur site ou à proximité, destruction d’un élément ayant une fonction ecosystémique majeure...). La diversité faunistique sera assurée grâce à la qualité et la diversité du substrat ainsi que la structure du matériel végétal, et non par la composition précise du mélange des espèces implantées. Les plantes indigènes sont importantes pour la conservation de certaines espèces animales mais les propriétés fonctionnelles, structurelles et phrénologiques du milieu sont déterminantes pour la diversité, notamment des invertébrés. Le choix de la stratégie de végétalisation s’effectue donc au cas par cas, après étude des caractéristiques et des sensibilités du site. Un bon compromis peut consister à consacrer une partie du toit à une végétation plus horticole et visible alors qu’une partie sera réservée à la colonisation spontanée. Il est important de mettre en place délibérément des espèces locales, pionnières ou non choisies pour leur fiabilité, leur valeur esthétique, leur valeur écologique, pour cela il peut être intéressant de s’inspirer des associations de plantes des milieux naturels aux caractéristiques similaires à celles du toit en question. Il est préférable de diversifier la palette végétale, en recherchant des plantes capables de s’adapter aux conditions des toits parmi les plantes sauvages de la région. Figure 7 Caractéristiques des toitures végétalisées 14 Figure 8 Exemple sélection : Espèces de prairie sèche du Nord-Pas-de-Calais, tiré de www.biodiversitepositive.fr/wp.../Toitures-végétalisées-05-janv.pdf Les toitures intensives peuvent paraître plus favorables à la biodiversité que les toitures extensives. Cependant, plusieurs études ont montré que la diversité des communautés d’insectes, araignées et oiseaux entre ces deux types de toits était certes différentes puisque l’habitat diffère mais qualitativement comparables. A long terme, en climat tempéré, la faible épaisseur du substrat est, sous certaines conditions, un avantage en termes de conservation des espèces. En effet, les diversités les plus importantes et les espèces rares se trouvent souvent sur des milieux peu productifs en termes de biomasse (falaises, éboulis…). 15 Les toits peuvent également avoir une fonction écosystémique importante en ayant une fonction d’alimentation pour les oiseaux et une éventuelle fonction de reproduction. On a pu remarquer que le design spécifique des toits est capable de compenser certaines pertes d’habitats. Ainsi à Bâle17 en Suisse, lors de la construction de la Jacob Burckhardt-house, il a été décidé de reproduire sur le toit la structure des berges naturelles de la rivière Birs, dont la disparition occasionnait une perte d’habitat notamment pour des oiseaux menacés qui venaient y nicher. L'utilisation de substrats variés, y compris de la lave classique, des graviers alluviaux provenant du sol d'origine et des sables locaux, constituent une gamme d'habitats potentiels pour les invertébrés. Ensemencé d'un mélange de graines locales et de mélanges de sédums, la végétation reproduit la végétation locale des prairies sèches associée aux graviers alluvionnaires du Rhin, et le toit a rapidement été colonisé par diverses espèces. Figure 9 Toit de la Jacob Burckhardt-house, Bâle Les toits peuvent donc être un moyen efficace de conserver la diversité, ainsi une étude sur différents types de toits végétalisés londoniens a montré qu’au moins 10% des espèces d’araignées, coléoptères (coccinelles, scarabées), et hyménoptères (fourmis, abeilles…) collectées sur les toits faisaient partie soit de la liste rouge des espèces menacées à l’échelle Européenne, soit étaient rares ou menacées au niveau national. Par ailleurs une conception et un design adaptés au contexte climatique permettent à une communauté végétale de survivre à long terme et de s’enrichir petit à petit même avec un entretien limité. Ainsi on constate que l’écosystème des toits les plus anciens est stable et s’est 17 À Bâle les règles d'urbanisme imposent que tous les toits soient conçus pour favoriser les espèces rares d'araignées, de coléoptères et d'abeilles. 16 adapté au fur et à mesure des échanges avec l’environnement. En laissant cette dynamique végétale agir, l’entretien est faible et l’irrigation n’est pas nécessaire. Figure 10 Balestrand, Norvège ©Caroline Rainette Or pour être véritablement efficace, la végétalisation ne doit supposer l’intervention humaine qu’au minimum. Il s’agit de trouver un compromis combinant les avantages environnementaux à un coût raisonnable : préférer une épaisseur d’au moins 10 cm avec des variations (mosaïques de milieux), varier la composition et la structure du substrat (sol local, compost, sable, calcaire…), éviter le tout extensif et la monoculture de sedums, mettre en place une palette végétale diversifiée privilégiant les espèces locales, aménager des zones refuges pour la faune (bois mort, nichoirs). Figure 11 Avant/après rue traversière St-Josse, Bruxelles, utilisation de Sphaignes 2) Favoriser l’installation de la biodiversité Le concept de biodiversité positive comprend le bâti comme un outil d’action sur l’environnement. En effet l’écosystème urbain permet de recréer des conditions proches des écosystèmes naturels : le climat y est exacerbé, et les conditions physico-chimiques et hydrauliques y sont particulières. 17 Figure 12 Le milieu urbain peut être favorable à la biodiversité en reproduisant des milieux similaires L’intégration des bâtiments dans leur environnement en privilégiant l’aménagement d’espaces verts, en favorisant le maintien, voire le développement de la biodiversité, contribue à développer une empreinte écologique positive du bâti. La végétation est un élément indispensable d’équilibre des écosystèmes, les espaces plantés participent à l’amélioration de la qualité de l’air, ils contribuent à la sauvegarde de la faune. Mais la végétalisation n’est pas le seul outil pour développer et maintenir une biodiversité intéressante. Ainsi la végétalisation des façades et des murs peut se coupler avec l’implantation de structures refuges pour la faune. Le bâtiment et son périmètre peuvent devenir un refuge pour la biodiversité de manière globale : une terrasse végétalisée, un mur végétalisé, garni de nichoirs ou de structures permettant aux plantes grimpantes de s'y épanouir et d'accueillir leur faune associée augmentent la biodiversité ; une clôture ou un mur peut être garnis de plantes grimpantes et/ou de structures nichoir ; une clôture de type mur peut être remplacée par une haie, ou par un fossé (végétalisé), plus écologiquement perméable, ou au pire par un mur végétalisé ; un fil électrifié peut aussi être utile s'il s'agit de protéger des cultures ou enclore des animaux. sous l'eau un récif artificiel peut fortement multiplier l'offre en habitats et en refuges, permettant d'accroître la biomasse. la non utilisation de produits phytosanitaires autour du bâtiment permettra l’installation de différentes espèces de faune et de flore. 18 Figure 13 Agir sur et autour du bâtiment Il est également important de préserver la biodiversité présente sur le site, par exemple en incluant un arbre dans la construction ou un élément minéral présent antérieurement sur le site. Figure 14 Inclusion d’un arbre sur une promenade piétonne, Portofino, Italie ©Caroline Rainette Parmi les structures d’accueil pour la faune, on peut facilement installer des hôtels à insectes, espèces dont le rôle est primordial : 19 les fagots de tiges creuses : ce type de refuge attire les espèces caulicoles comme les abeilles et les guêpes solitaires qui établissent leurs nids à l’intérieur des tiges. Les plantes adaptées à cette réalisation sont le bambou, le roseau, la paille de céréale, les tiges de certaines ombellifères. Les fagots de tiges avec moelles : Ce type de refuge attire les insectes rupicoles. Les plantes adaptées à cette réalisation sont la ronce, le rosier, le framboisier, le sureau, l’arbre à papillons. La bûche percée ou la pierre percée est destinée aux insectes xylicoles. Cela concerne certaines espèces de guêpes ou d’abeilles solitaires. Le refuge à coccinelles va imiter les interstices que les coccinelles trouvent sous l’écorce des arbres ou dans les vieux murs. Le nichoir pour chauve-souris permet de palier à la menace de leur habitat : de moins en moins de lieux existent en ville pour leur offrir un gite. Les ruchers : Les insectes pollinisateurs sont le maillon essentiel du maintien du maillage vert. La promotion de l’abeille comme acteur environnemental du paysage urbain, peut se faire par l’installation de ruchers pédagogiques ou de sentiers didactiques dans des espaces publics facilement accessibles à tous.. Enfin pour les oiseaux, le nid est uniquement un lieu de ponte et non un lieu de repos. Son rôle est donc directement lié à la reproduction. Il existe une grande disparité en fonction des espèces au niveau de la fabrication des nids. Les nichoirs artificiels vont servir aux oiseaux cavernicoles qui vont rechercher une anfractuosité suffisamment grande pour accueillir leur nid. Or ce type d’oiseau à de plus en plus de difficultés à trouver de vieux arbres ou des murs présentant des fissures ou des cavités pour s’installer. Ainsi pour les hirondelles l’expérience montre que les nids artificiels sont un moyen efficace de redynamiser une colonie en déclin, principalement en milieu urbain : les nids naturels sont trop souvent détruits par les habitants des maisons concernées ; le manque de boue de qualité dû à la disparition des chemins de terre empêche ou retarde la construction de nouveaux nids naturels ; les nids artificiels – prêts dès le retour des hirondelles – permettent à celles-ci de démarrer immédiatement la reproduction, assurant ainsi la possibilité de mener deux nichées à terme ; le volume intérieur des nids artificiels est souvent plus important que celui des nids naturels. Cela permet l’élevage, dans de bonnes conditions, d’un plus grand nombre de jeunes ; les nids artificiels ouvrants peuvent être nettoyés, ce qui permet de réduire la présence des parasites dont la surabondance affaiblit parfois certaines colonies ; les nids artificiels permettent de faire revenir les hirondelles après un éventuel ravalement de façade ; les nids artificiels permettent aux oiseaux de nicher sous des corniches en PVC, où les nids naturels ne tiennent généralement pas. Figure 15 Tour d’hirondelles Ainsi le bâti peut prendre plusieurs fonctions, positives pour la biodiversité : il sert de support physique à des plantes grimpantes qui elles-mêmes abriteront et alimenteront d'autres espèces ; il peut être conçu de manière à intégrer des structures-nichoirs ; il peut être conçu de manière à développer des micro-habitats, éventuellement dégradables (brique de bois amovibles pour les invertébrés xylophages) ; il peut être accompagné d'autres mesures compensatoires : dans le jardin le cas échéant, et sur les éléments construits annexes (murs, clôtures, mobiliser urbain, poteaux, accès, etc). il est un potentiel d’accueil d’espèces animales et végétales (flore, oiseaux, insectes, araignées…) il permet de créer un milieu pionnier (pelouse sèche). Les bâtiments ont dont un impact important sur l’environnement, comme le note Grégoire Bignier : « [La cathédrale de Chartres] crée de par sa taille et son architecture [un microclimat]. Effet Venturi des tours jumelles, inertie thermique créant des variations de la température de l’air et donc des courants ascendants ou descendants, niches, poches de rétention d’eau et de végétation, écoulement libre d’eau pluviale, façades fractalisées offrant ombres, lumière, sécurité, abris, il n’est que jusqu’au bréviaire sculptural dont on peut se demander s’il n’est pas apprécié des oiseaux ! […] En fait la cathédrale est un milieu vivant pour la faune et, dans une certaine mesure, pour la flore. Tout simplement, elle reproduit l’habitat de falaise originel de certains oiseaux (martinets, pigeons, faucons, par exemple), comme habitat de substitution. De surcroit il faut considérer la longévité de la cathédrale et donc la permanence du service rendu. Or, pour un naturaliste, il est intéressant d’estimer le nombre de générations concernés par tel ou tel phénomène. Pour ce qui est de la cathédrale sa vie a concerné, et seulement jusqu’à ce jour, approximativement 25 générations d’hommes, 800 d’oiseaux, 5000 de souris et 30000 d’insectes divers ! »18. Figure 16 Mousses installées sur la cathédrale de Chartres ©Caroline Rainette Pourtant, tous ces éléments favorables à la biodiversité ne peuvent véritablement fonctionner que s’ils sont utilisés de manière adéquate et mis en place au sein d’une réflexion globale. 18 G.Bignier, Architecture & écologie, comment partager le monde habité ?, Eyrolles, 2012, p. 77-78. 22 II Une architecture qui reste à inventer A L’architecture contemporaine entre protection de l’environnement et prouesse technique 1) HQE : une réelle préoccupation de la biodiversité ? Jusqu’en 2006 la biodiversité est restée relativement ignorée de la démarche HQE, aussi l'idée d'une 15ème cible complémentaire, autour des problématiques de biodiversité, est peu à peu apparue, reprenant le concept de biodiversité positive et avec comme objectif de ne plus dégrader par des constructions l’environnement de qualité là où il subsiste. La première des 14 cibles de la HQE préconise déjà une relation harmonieuse des bâtiments avec leur environnement immédiat, par l’intermédiaire de quatre sous-cibles (utilisation des opportunités offertes par le voisinage et le site ; gestion des avantages et inconvénients de la parcelle ; organisation de la parcelle pour créer un cadre de vie agréable ; réduction des risques de nuisances entre le bâtiment, son voisinage et le site) et au moyen d’exigences minimales : traiter l'insertion du bâtiment dans son environnement en réalisant une étude préalable au projet : étude d'organisation de la parcelle et étude de traitement des espaces extérieurs et intermédiaires ; respecter un niveau minimal de protection acoustique de 50dB des bruits émis par des équipements ou des pratiques extérieures, en réalisant éventuellement un traitement acoustique ; repérer les sources de bruit extérieur et créer un isolement acoustique satisfaisant. Ce cadre permet d’insérer une priorité à la biodiversité, mais ne propose ni seuil minimal, ni indicateurs, ni même clairement de compensation fonctionnelle. Sans l’interdire, cette cible n’engage donc pas à une approche compensatoire. Or l’approche compensatoire pose des questions complexes, en particulier quant aux objectifs de qualité éco-paysagère et donc de biodiversité à rechercher, et quant à l’échéance visée (il faut 300 à 800 ans pour produire un vieux chêne, et d’ici là le climat sera peut-être bouleversé au point de dépasser ses conditions de survie). L’objectif sous-jacent d’une 15ème cible est donc d’augmenter la capacité du projet à contribuer durablement à l’amélioration de l’environnement, protéger, voire restaurer la biodiversité, dans l’objectif de tenter de rembourser la dette écologique. Cette cible sera donc totalement atteinte s’il y a autant de biodiversité après la construction que si le milieu était resté naturel. La construction modifiant peu ou prou, le milieu, cette cible-objectif fait donc appel au concept de réparation écologique. L’architecte doit donc s’appuyer sur le génie écologique, et doit utiliser le vivant comme élément dynamique et fonctionnel de sa construction, notamment en collaborant avec les écologues. Sur le modèle de la construction de grosses infrastructures ou encore de l’exploitation des carrières, l’approche pourrait par exemple être : état des lieux, étude d’impact et d’empreinte écologique ; mesures conservatoires, compensatoires et restauratoires ; évaluation ; mesures rétrocorrectrices. La 15ème cible proposée implique donc de restaurer, gérer ou le cas échéant protéger les fonctions écopaysagères du projet au moyen de zones-refuges, de zones-tampons, d’une 23 connectivité biologique protégée ou restaurée avec l’environnement naturel, via un maillage fonctionnel de corridors biologiques. Toutes ces fonctions devant être intégrées pour partie sur et dans l’enveloppe bâtie et les infrastructures associées. Il s’agit d’offrir un réseau d’habitats retrouvé, reconstruit ou de substitution aux espèces qui devraient être naturellement présentes en veillant à ce que l'architecture soit éco-compatible. L’objectif à moyen et long terme est celui d’une nature dont le cycle est le plus auto-entretenu possible. La 15ème cible s’articulerait donc autour de quatre principes : 1) la complexité inhérente au fonctionnement des écosystèmes, vue comme condition nécessaire à la restauration ou au maintien de la biodiversité. Plus un milieu est complexe (creux, bosses, zones d’ombre, de soleil, milieu boisé, strates herbacées, etc.), plus il est susceptible d’accueillir une faune et une flore riches et diversifiées et plus il développera de fonctions écologiques qui deviendront des services écologiques. En effet les processus naturels de colonisation sont nombreux et efficaces. Le vivant se développe et se différencie en fonction de conditions particulières et souvent nécessaires. C'est pourquoi il s’agit de développer l'offre en biotopes (naturels ou de substitution, mais adaptés au contexte local), afin qu’un grand nombre d’espèces puisse y trouver refuge, nourriture, ou simplement utiliser ces biotopes comme corridors biologiques. Figure 17 Exemple de colonisation naturelle sur un toit (Chartres), plusieurs espèces se sont installées ©Caroline Rainette Figure 18 Exemple de colonisation naturelle sur un ancien lavoir et un mur, près de Sours ©Caroline Rainette 2) le milieu doit s’auto-entretenir. L’écosystème doit pouvoir se stabiliser et se réguler de lui-même ou à faible coût pour les occupants humains. L'homme doit y intervenir le moins possible, ce qui nécessite paradoxalement d’établir dès la construction et même 24 avant elle, un plan de gestion du milieu. Il faut par ailleurs souvent des années, voire des dizaines d’années (ou siècles), pour qu’un milieu perturbé par l’homme retrouve un certain équilibre. Figure 19 Exemple de colonisation naturelle sur la roche et d’autoentretien, Portofino, Italie ©Caroline Rainette 3) le remboursement de la dette écologique du bâti, en veillant à ce que la faune ou la flore ne posent toutefois pas de problème de compatibilité avec l'infrastructure construite en question (ex : en cas de plantation d’un arbre trop proche d’un bâtiment et qui risque de s’y abattre). 4) la sécurité pour l'homme (incendies, santé…) Le projet de la quinzième cible est donc de contribuer à restaurer une matrice de nature dans laquelle les taches réservées à l’habitat, aux productions et aux réseaux d’infrastructures soient les moins nuisantes et fragmentantes possibles. Il faut donc réduire l’effet de fragmentation écopaysagère et la pollution des infrastructures de transport, des villes linéaires, et restaurer un solide maillage écologique. Cette approche permet également de considérablement diminuer la contribution, voire l'exposition aux risques naturels et donc les coûts externes. Mais cette 15ème cible reste seulement à l’état de réflexion. De plus la norme HQE fait l’objet de nombreuses critiques. Ainsi l’architecte Rudy Ricciotti19, en recevant le Grand Prix national de l'architecture en janvier 2006, a prononcé un réquisitoire virulent contre la HQE, qualifiée de « fourrure verte, futur opium de l'urbain ». Selon Rudy Ricciotti, « il y a lieu en urgence d'engager une réflexion critique autour de la question environnementale et les conséquences de la doctrine HQE et des normes sur les économies d'énergie ». L’auteur qualifie la HQE d’« impensé politique » permettant de générer du profit sur le dos de l'environnement grâce à la mode de l'écologie, tout en continuant à blesser la planète d'une manière différente. Elle aurait également pour conséquence une surconsommation de matériaux et un enlaidissement du paysage architectural20. Ainsi « la notion de développement durable est peut-être née d’un réel bouillonnement de réflexion et d’intelligence, mais c’est aujourd’hui devenu un leurre, vicié par des enjeux de pouvoir et d’argent, réglé par les 19 Rudy Ricciotti, HQE, les renards du temple, Éditions Al Dante/Clash, 2009. On peut remarquer en effet que certains bâtiments labélisés HQE sont éloignés des réseaux de transports en commun, construits en zone inondable, ou encore qu’ils contribuent à fragmenter les écosystèmes. 20 25 nouveaux commerciaux du HQE, pour qui ÉCOLOGIE rime avec MARKETING ». Il conclut par : « la fourrure verte, c'est l'eldorado de l'arnaque ». D'autres critiques s’attaquent à la proximité de la méthode avec les intérêts de l'AIMCC21 propriétaire de la marque HQE : le système HQE ne permet pas de comparer deux bâtiments certifiés, les retours d’expérience ne peuvent donc pas être totalement fiables. Enfin le Conseil national de l'ordre des architectes a lui aussi développé une réflexion critique visant à dépasser l'approche HQE par une innovation architecturale globale. La doctrine du Conseil national de l'ordre des architectes ne vise plus un seul pilier du développement durable mais ses 4 piliers : le social, l'économique, l'environnemental et le culturel. Ainsi le Conseil National de l’Ordre des Architectes a quitté l’Association HQE en 200522. 2) La biodiversité, nouveau défi de l’architecture contemporaine L'environnement bâti doit avoir un degré élevé de perméabilité pour la faune et devrait contribuer de manière significative à l'augmentation et au maintien de la biodiversité. Les structures naturelles ayant disparu, certaines espèces dépendent maintenant presque exclusivement de nos structures construites (chouette, hirondelle, moineau domestique, étourneau, chauves-souris). Ceci implique un changement sans précédent dans l'industrie du bâtiment, avec de nouvelles techniques, de nouveaux matériaux et de nouveaux styles de construction. La conception détaillée des bâtiments, de même que pour les autoroutes ou les LGV par exemple, devraient inclure des mesures spécifiques pour biodiversité. Or on ne peut que constater que l’architecture contemporaine favorise peu la biodiversité, sans doute à cause d’une peur infondée de l’attaque des végétaux sur les matériaux, d’une absence de compétences en la matière, ou encore d’objectifs de prouesses technologiques plutôt que de respect de l’environnement. On peut par exemple citer les constructions de David Chipperfield23, qui a reçu en 2011 le prix Mies Van der Rohe qui récompense tous les deux ans le meilleur projet construit en Europe. On voit très bien dans les constructions de cet architecte, reconnu par ses pairs et par 21 Association des industries des Produits de Construction. « Par rapport aux enjeux de développement durable auxquels est confronté l’ensemble des acteurs de la chaîne de construction, la démarche HQE, dans sa conception actuelle, s’avère ainsi être tout à la fois réductrice, minimaliste, technicienne et castratrice. Réductrice, car elle ne porte que sur l’un des aspects de notre responsabilité sociale, la préservation de l’environnement au sens strict. […] Minimaliste, car il suffit de satisfaire trois des quatorze cibles pour qu’un ouvrage puisse être identifié comme répondant à la « norme » HQE. […] De nombreux ouvrages revendiquant aujourd’hui la marque « HQE », affichent des résultats très peu probants sur leur efficacité environnementale, et ne se sont pas par ailleurs des démonstrations significatives de grande qualité architecturale. Technicienne, car elle entretient l’illusion du tout mesurable et du tout normatif. […] Il ne s’agit pas d’être naïf ; derrière la prétendue ingénuité d’une association revendiquant son statut d’utilité publique se cachent les appétences d’acteurs qui ont compris les enjeux financiers énormes liés au développement du marché de la certification : méthodes, grilles de calcul, formations, etc… […] S’appuyer sur des valeurs et des bonnes pratiques plutôt que sur des critères techniques est ce qui nous singularise et nous légitime en tant qu’architectes du développement durable. C’est le sens de notre retrait de l’association HQE », Patrice Genet, Président de la commission « Développement durable », Conseil National de l’Ordre des Architectes, http://www.architectes.org/developpement-durable/debats/l2019ordre-des-architectes-quittel2019association-hqe/l-ordre-des-architectes-quitte-l-association-hqe 23 David Alan Chipperfield est un architecte britannique de renommée internationale et une des figures majeures de la conception de bâtiments publics et culturels à travers l’Europe et les États-Unis. 22 26 les critiques24, qu’il s’agit d’un travail purement technique et artistique, sans préoccupation de la biodiversité : les lignes pures des bâtiments ne permettent pas à la faune de s’y protéger, rien n’est prévu pour les abriter, les toits ne sont pas végétalisés, et les rares éléments végétaux sont utilisés pour leurs aspects esthétique et de mise en valeur l’architecture. Figure 20 David Chipperfield, extension pour le Museum Folkwang Essen, Allemagne 24 Cf Jean-François Lasnier, David Chipperfield l’as des musées, Connaissance des Arts n° 707, septembre 2012, p. 126. 27 Figure 21 David Chipperfield, Turner Contemporary gallery, Margate L’architecture mondiale n’est trop souvent qu’un catalogue de productions spectaculaires et totalement inadaptées à la donne écologique. Une nouvelle architecture, recherchant moins la prouesse technique, le design, que l’harmonie avec la faune et la flore, reste donc à inventer. Certains projets s’y essaient, tels celui de Jean Nouvel pour le musée de l’Evolution Humaine à Burgos en Espagne, qui fait de la végétalisation l’élément déterminant de son projet : « cette architecture va évoquer Atapuerca, terre d’apparence anodine où sont ensevelis quelques uns des mystères de nos origines, site de recherches scientifiques où notre savoir le plus actualisé, nos techniques les plus pointues s’expriment par des mises au carreau de fils colorés, par des étalonnages codés et des étiquetages savants sur fond de terre ocre. Le musée est comme une résurgence dans la ville de la géographie et du paysage qui entourent Burgos. Relief identitaire entre forme et informe troué d’une grande cavité. Il est recouvert par la traditionnelle végétation d’arbustes et de petits arbres des environs »25. Figure 22 Jean Nouvel, projet pour le musée de l’Evolution Humaine à Burgos en Espagne 25 http://www.jeannouvel.com. Le projet n’a pas été retenu. 28 La Worldwide fund for nature a imposé le respect de la biodiversité dans son cahier des charges lors de la commande de son nouveau siège situé dans la réserve naturelle de Schoonoord en 2003. Ainsi des tuiles de toiture favorables aux oiseaux ont été utilisées et des caves pour les chauves-souris ont été crées. Figure 23 Worldwide fund, Zeist La Fondazione Pietro Rossini Pavilion à Briosco en Italie, est un bel exemple d’intégration d’une structure dans un paysage dans une démarche de développement durable et de préservation de la biodiversité. Le bâtiment se veut une extension de la topographie vallonnée du site. La plupart des matériaux ont une provenance locale, les murs sont en briques et en pierres recyclées, récupérées dans les environs immédiats, et le toit est planté de végétations locales. Le bâtiment se fond véritablement dans son enivrement et accueille de nombreuses espèces. Figure 24 Fondazione Pietro Rossini Pavilion in Briosco Dans les immeubles de bureaux certains architectes tentent également un approche axée sur la biodiversité. À Lyon le projet Velum expérimente la réinsertion d’espèces végétales indigènes. L’immeuble de bureaux se développe sur six étages, surmonté d’un attique. Dans cet ensemble architectural, une large place a été faite aux aménagements extérieurs et une attention particulière portée à la végétation, notamment avec un choix affirmé pour la plantation d’espèces préservées. Les 15250 m2 sont structurés autour de deux jardins 29 suspendus et d’un jardin d’ombre. Du Nord au Sud se développent deux volumes identiques séparés par deux patios traversants. L’arrière du bâtiment s’articule également autour d’un jardin paysager. Le choix d’essences végétales anciennes et locales a été privilégié. La réalisation d’un bassin de récupération des eaux de pluies facilitera leur implantation. Elles ont été choisies en raison de leur lien avec l’histoire de la parcelle, située sur la rive gauche du Rhône : essences rappelant les vastes forêts alluviales, lorsque le Rhône présentait encore un cours sauvage avec de grandes zones inondables formant les marécages du Val-de-Rhône. Dans les vallées du fleuve, 15 à 20 espèces ligneuses différentes subsistent dont l’orme lisse qui peut atteindre 35 m. Cette essence a fait l’objet d’un inventaire national et de mesures de conservation. Quelques plantes indigènes, aujourd’hui en voie de disparition, seront aussi plantées comme l’Acorus Calamus, l’Euphorbia villosa, la Glyceria, l’Hypericum palustris, l’Equisetum palustre ou le Salix acuminata. Enfin les plantes proviendront de pépinières régionales pour garantir leur acclimatation. Reste à voir une fois achevé ce que sera concrètement ce bâtiment, dont les objectifs semblent intéressants. Figure 25 Projet Velum, Lyon Mais on peut aussi se demander si les solutions envisagées par l’architecture contemporaine afin d’avoir le minimum d’impact sur le paysage ne sont pas parfois une atteinte à la biodiversité. En effet, certains architectes, afin de minimiser l’impact paysager du bâtiment, construisent en sous-sol. Mais cette solution, si elle n’est pas précédée d’une étude poussée sur la biodiversité du monde souterrain, peut bouleverser l’équilibre d’un écosystème, détruire certaines espèces et habitats. La biodiversité du sous sol est souvent bien moins prise en compte car méconnue, et cependant elle existe. Construire en sous-sol, pour réinstaller ensuite une couverture végétalisée n’est pas forcément une bonne solution et peut s’avérer catastrophique si elle détruit des habitats rares ou remarquables, pire si la couverture végétale mise en place par la suite contient des espèces envahissantes venant bouleverser l’écosystème. 30 Figure 26 Chichu Art Museum, Naoshima, Japon26 L’intégration des bâtiments dans leur environnement en privilégiant l’aménagement d’espaces verts, en favorisant le maintien, voire le développement de la biodiversité, contribue à développer une empreinte écologique positive du bâti. La végétation est un élément indispensable d’équilibre des écosystèmes. Les espaces plantés participent à l’amélioration de la qualité de l’air. Ils contribuent à la sauvegarde de la faune. Mais les bâtiments doivent également comporter un haut degré de perméabilité à la faune, afin de contribuer à l’accroissement et au maintient de la biodiversité. Par ailleurs, la préservation des terres de l’urbanisation nécessite d’impulser une politique volontariste de croissance interne des territoires urbanisés par une reconquête systématique des friches urbaines (industrielles, ferroviaires, militaires…). Aménager de nouveaux habitats sur ces sites déjà aménagés permet de ne pas détruire de nouvelles terres et donc des habitats et des espèces. Il est par conséquent indispensable de rénover les centres-villes via une stratégie de reconquête des centres anciens pour endiguer le flot des départs des ménages, en créant dans les centres-villes des conditions de vie et d'habitat comparables à celles du périurbain, de maintenir et relancer l'activité commerciale des centres-villes par une stratégie mieux adaptée en matière de commerce de périphérie, et limiter ainsi les friches commerciales de périphérie et de rez-de-chaussée en ville, de privilégier la réhabilitation des bâtiments et le recyclage des matériaux (réduire à la source l’utilisation de matières premières) et enfin de développer les bâtiments à biodiversité positive (murs végétaux, toitures végétalisées, …). Mais pour être véritablement efficaces toutes ces actions doivent être pensées au niveau global, c’est-à-dire au niveau du territoire. B Une réflexion à mener au niveau du territoire L'étalement urbain et l'expansion de la forme bâtie en général conduisent à la rupture des continuités écologiques, ainsi qu’à la perte et à la fragmentation de l'habitat de nombreuses espèces animales. Les corridors naturels se heurtent en effet aux nombreux obstacles 26 L’architecte, Tadao Ando déclare : « J’ai un penchant presque inconscient pour les espaces souterrains. Quelle que soit la nature du site, j’essaie de créer une architecture que ne s’impose jamais dans son environnement… », Reflections on Undergrouds Space, l’Architecture d’Aujourd’hui, mai juin 2003. L’exemple est pris en hasard, rien ne dit que le site sur lequel le musée a été construit comportait des espèces ou un écosystème qu’il aurait fallu préserver. 31 artificiels en milieu urbain. Il faut donc recréer ces connexions afin que les échanges écologiques s’effectuent et que la biodiversité se développe à nouveau. Figure 27 Près de Chartres ©Caroline Rainette Figure 28 Portofino, Italie ©Caroline Rainette Un mur végétalisé peut constituer un corridor si l’environnement autour y est propice La végétalisation des toitures participe à la production de paysages urbains vivants et au rétablissement des corridors écologiques en ville, principalement selon la configuration de pas japonais. Des toitures végétalisées intégrant des arbres peuvent offrir des habitats et des refuges convenables à maintes espèces d'oiseaux. De façon générale, les toits végétaux peuvent accueillir de nombreuses espèces d’insectes et d'invertébrés, et contribuer ainsi à minimiser la perte de biodiversité en milieu urbain. Ils sont le lieu de nouveaux équilibres naturels où l’on peut même implanter des espèces végétales en voie de disparition, et leurs cortèges faunistiques associés. On peut également y installer des ruches, ce qui permet notamment la réintroduction des abeilles en ville, indispensables à la pollinisation des végétaux. Toutefois, sans équipement vertical complémentaire tel que plantes grimpantes, mur végétalisé, ou colonne de pierre sèche, permettant des mouvements ascendants et descendants des espèces faunistiques et floristiques, les échanges écologiques ne pourront se faire et ne serviront qu’aux déplacements d’oiseaux. Pour être véritablement efficaces, l’ensemble des outils permettant d’améliorer la biodiversité (végétalisation, nichoirs, hôtels à insectes…) doivent être mis en relation les uns avec les autres, une stratégie de corridors biologiques au niveau globale doit être pensée. Ainsi un mur végétalisé n’aura qu’un aspect esthétique et quasiment aucun impact sur la biodiversité s’il est isolé. Tel est le cas par exemple du jardin vertical conçu par Patrick Blanc pour le CaixaForum à proximité du musée du Prado à Madrid. Selon Patrick Blanc les plantes peuvent se passer du sol, une combinaison d'eau et de minéraux peut parfaitement assurer leur croissance, et les racines n'endommagent pas les façades si les plantes reçoivent continuellement l'eau et les minéraux dont elles ont besoin. L'installation de Madrid mesure 24m de haut et contient 15000 plantes de 250 espèces différentes27. Pourtant, ce mur ne contribue que très faiblement 27 Structure du mur : cadres métalliques plus plaque de PVC et Feutrine. Amas de différentes chutes de tissus agglomérés agrafés, afin de créer des poches, a une plaque de PVC. Plantation sur site une fois la feutrine installée. Environnement technique : toute l’eau ruisselle le long du mur végétal et n’est pas retenue par la feutrine. Les apports sur mur extérieur sont de 8 à 10l/m²/jour et en intérieur de 2l/m²/jour. Le mur a une autonomie sans irrigation en plein été de 24 heures. Cout : aux alentours de 350-400 €/m². Le cout d’entretien est de 10 à 12% du prix du mur végétal/an. 32 à la biodiversité. La quantité d’espèces utilisées, le lieu d’installation, la philosophie de la conception même du mur, démontrent plus une réflexion en termes d’esthétique et de prouesse technique qu’une réflexion sur la biodiversité. En effet le mur ne fait partie d’aucun corridor écologique, installé à proximité du parc (mais séparé par la route) il est, comme on peut le voir sur l’image satellite, le dernier élément de verdure avant le bâti urbain. N’étant pas relayé par d’autres supports de connectivité (jardin, toits végétalisés, etc.) ce mur végétal n’a donc qu’une fonction d’agrément, de bien être, éventuellement de sensibilisation à la flore. Figure 29 Patrick Blanc, mur végétal, Caixaforum, Madrid De plus le système de Patrick Blanc nécessite une grande quantité d’eau dans un but d’irrigation permanente. Or en raison de cette totale dépendance en irrigation continue (la feutrine ne retient pas l’eau) les végétaux n’ont aucune autonomie, et lors de la moindre faille technique les plantes ne se conservent pas et le mur vient à mourir. Enfin les plantations sont réalisées in situ, ce qui procure un stress élevé pour les plantes et donc une obligation d’entretient fréquent après l’installation. Mais les murs de Patrick Blanc ne sont pas conçus pour durer dans le temps, et globalement le mode de conception ne prend pas en compte le développement durable (notamment en raison des forts besoins en eau). La végétalisation de quelques bâtiments épars est certes mieux que rien (et contribue notamment au bien-être), mais n’a au final aucun impact sur la biodiversité si aucun réseau ne relie ces habitats les uns aux autres. Ainsi au contraire on a pu observer la colonisation des espèces dans le cas de l'extension du Musée Horniman à Forest Hill au sud de Londres. L’extension incorpore un vaste toit végétalisé dont l’objectif était, dès sa conception, le développement de la biodiversité. Au bout de dix ans le toit s'est développé pour devenir riche 33 en espèces de plantes locales remarquables. Contrairement au mur de Patrick Blanc l’entretien de la toiture ne nécessite qu’une intervention minimale, n’ayant besoin que d'un arrosage occasionnel et un fauchage annuel. Par ailleurs on peut remarquer sur la vue satellite que ce toit se trouve au sein d’un vaste réseau écologique, il est donc incontestablement un lieu d’échanges biologiques. Figure 30 Musée Horniman, toit végétalisé Il est donc impossible de concevoir la ville comme la simple addition de bâtiments indépendants les uns des autres, d’une part car les bâtiments s’organisent autour d’un réseau d’infrastructures complexes, d’autre part car ils font partie d’un milieu originellement naturel qu’ils viennent perturber. Si à l’échelle architecturale les approches écologiques actuelles se fondent principalement sur la recherche de l’autonomie du bâtiment, si à l’échelle du quartier les flux matériels et humains sont pris en compte, en revanche une véritable réflexion sur la biodiversité se réfléchit au niveau du territoire. En effet le concept de biodiversité a subi une forme de banalisation, le végétal et l’animal sont considérés comme des éléments ornementaux, on se contente de remplacer une espèce par une autre lorsque l’une d’elles meurt, pourtant il ne suffit pas de rassembler trois espèces végétales (ou même 250 !) pour créer de la biodiversité. Pour qu’un système fonctionne, l’interactivité entre ses diverses composantes est nécessaire. Or la biodiversité est un processus qui comporte des trajectoires complexes et imprévisibles. La qualité de la biodiversité ne dépend pas tant du nombre d’espèces qui la compose que des fonctions écologiques, complémentaires ou communes, assumées par celles-ci. Il est donc important de pouvoir compter sur des espèces pour chaque fonction (par exemple, la décomposition de la matière organique). Or aujourd’hui 80% des Européens vivent dans les villes et ces 40 dernières années la population urbaine a augmenté deux fois plus que la population rurale. Plus encore que le nombre de citadins, c’est la surface accueillant villes et agglomérations qui s’est accrue. Entre 1980 et 2000, la population urbaine a progressé de 6% et la zone urbaine de 20% en raison de la progression des zones d’habitations. L’habitat périurbain devient une composante majeure du paysage des agglomérations et accompagne le développement des villes. Cette implantation s’est effectuée majoritairement sur les terres agricoles, avec une forte consommation d’espaces (parcelle environnant la maison, équipements à proximité, réseaux divers). Les espaces agro-naturels subissent ainsi une pression foncière, les parcelles agricoles sont convoitées par les promoteurs immobiliers, les élus désirant par ailleurs attirer de futurs habitants (ressource fiscale). En résulte une fragmentation croissante du paysage. Pourtant, même si les espaces périurbains occupent maintenant de larges surfaces, ils ne sont quasiment 34 pas étudiés du point de vue de la fragmentation du paysage. Or dans ces espaces les paysages sont utilisés de manière intensive et remplissent de nombreuses fonctions (loisirs, production agricole et forestière, etc.). En parallèle, une forte menace pèse sur la biodiversité car de nombreux habitats proches de l’état naturel sont désormais cantonnés à de petites surfaces. L’homme est donc à l’origine de nombreuses et nouvelles barrières écologiques qui sont soit des zones impropres à la vie de nombreuses espèces, soit des zones simplement défavorables à la circulation ou à la reproduction des espèces. Ces barrières peuvent être matérielles et visibles (murs, TGV, routes, autoroutes, lignes à haute tension, antennes et câbles, zones urbanisées, artificialisées et très dévégétalisées, zones d’agriculture et de sylviculture intensive contenant des pesticides, etc.), mais elles sont souvent invisibles, immatérielles (odeurs, microclimats, dérangement, perturbation, surfrécantation, pollution sonore, pollution lumineuse, pollution thermique de l’eau, voire de l'air ou du sol, pollution atmosphérique, pollution éléctromagnétique). L'homme contribue donc à l'altération des milieux naturels, et les principaux effets des activités humaines sur les milieux sont : la destruction des habitats naturels: défrichement, assèchement de mares et zones humides, etc., la dégradation des milieux naturels: pollution, aménagement des cours d'eau, barrages, etc., la fragmentation des habitats. Figure 31 Mouvement des espèces entre une forêt source et un bois proche et effet d'une barrière sur cette dispersion, tiré de Clergeau 2007 La persistance des populations animales et végétales dépend du maintien des conditions de leur environnement. Or la menace la plus sérieuse qui pèse sur la diversité biologique est la perte des habitats28. Les grandes formations végétales qui couvraient autrefois de vastes étendues sont aujourd'hui fragmentées, cette fragmentation menace la persistance des espèces associées et limite les capacités de dispersion et de colonisation des espèces. Dans un milieu non perturbé, les graines, les spores et les animaux se déplacent activement et passivement à travers tout le paysage. Quand ils arrivent à un endroit favorable et libre, de nouvelles populations s'y développent. Au cours du temps, des populations d'une espèce donnée 28 Dans de nombreuses régions, particulièrement sur les îles et partout où la densité humaine est élevée, la plus grande partie des habitats naturels a été détruite. Ainsi, dans les pays tropicaux, la destruction des milieux naturels s'échelonne entre 29% (Zambie) et 89% (Gambie) pour l'Afrique et entre 41% (Malaisie) et 97% (Hong Kong) pour l'Asie (avec la majorité des pays au dessus de 70%). La principale cause d'une telle destruction des forêts tropicales humides est la culture, quoique l'exploitation de la forêt pour le commerce du bois soit également une cause importante (45 000 km2 par an). On estime à 25 000 km2 l'étendue de forêt dégradée pour le bois de feu et à 20 000 km2 le défrichement pour l'installation de fermes d'élevage et de pâturage pour le bétail. 35 s'établissent puis disparaissent à l'échelle locale à mesure que l'espèce se déplace d'un site favorable à l'autre. A l'échelle du paysage, c'est une série de populations qui présente ce type d'extinction et de recolonisation (métapopulations). Quand la dispersion des mammifères est réduite par la fragmentation de leur habitat, certaines espèces de plantes qui en dépendent seront également affectées pour la dispersion de leurs graines. Des fragments d'habitats isolés ne seront donc pas colonisés par des espèces qui, potentiellement, pourraient y vivre. Tandis que des espèces s'éteignent par le jeu naturel des successions et que d'autres ne parviendront pas aisément à coloniser, le nombre d'espèces présentes dans les habitats fragmentés décline avec le temps. En divisant une population étalée dans l'espace en sous-populations restreintes à des zones limitées, la fragmentation du milieu peut en précipiter le déclin. Ces petites populations sont en effet plus vulnérables à la dépression de consanguinité, à la dérive génétique et à d'autres problèmes liés aux populations à effectifs réduits. Tandis qu'une grande superficie peut maintenir une seule grande population, il se peut qu'aucun de ces fragments ne puisse assurer le développement d'une population suffisamment nombreuse pour persister dans le temps. Et l’espace urbain gagne du terrain, faisant disparaître des habitats proches de l’état naturel. L’effet séparatif des habitations impacte la biodiversité, notamment en isolant des populations d’espèces animales qui nécessitent plusieurs types d’habitats et parcourent de ce fait de plus grandes distances (par exemple les grenouilles rousses et les crapauds communs), et l’échange de patrimoine génétique entre ces populations se trouve réduit29. Le réseau écologique vise à favoriser le déplacement des espèces entre des habitats favorables, dispersés sur leur aire de répartition. Pour une population ou métapopulation données, le territoire utilisé comporte des zones vitales (réservoirs de biodiversité) où les individus réalisent la plupart de leur cycle (site de reproduction, site d'alimentation). Ces zones vitales peuvent être proches ou éloignées. Ainsi pour les amphibiens, les mares de pontes sont éloignées de quelques centaines de mètres des sites d'hivernage ; pour les canards hivernant, les sites d'alimentation peuvent se trouver à plus d'une dizaine de kilomètres des zones de repos ; pour les grands migrateurs les haltes migratoires sont distantes de plusieurs centaines de kilomètres. La constitution d'un réseau écologique ne se traduit donc pas automatiquement par une continuité territoriale. Il existe donc autant de réseaux écologiques à proprement parler que d'espèces. Les corridors vont permettre les échanges entre les réservoirs de biodiversité au sein d’un réseau écologique. Eléments linéaires du paysage dont la physionomie diffère de l'environnement adjacent, ils peuvent être naturels (rivières, crêtes, passages d'animaux) ou créés par l'homme (routes, lignes à haute tension, fossés, haies). Ils sont pour la plupart organisés en réseaux et leur linéarité leur confère un rôle particulier dans la circulation des flux de matière ou d'organismes. Il est donc nécessaire de préserver les réservoirs de biodiversité afin, d'une part de conserver ou d’améliorer les types de gestion qui ont permis à cette zone d’être un réservoir biologique capable d’attirer des individus qui se nourrissent et se reproduisent dans ce réservoir de biodiversité, d'autre part d’éviter que cette zone soit de nouveau fragmentée par des infrastructures linéaires ou par l'urbanisation, et à améliorer la perméabilité des infrastructures existantes. 29 En revanche les petites espèces sédentaires sont moins gênées par les surfaces d’habitation. Ainsi, les populations de certains petits papillons qui vivent sur des chênes ne sont pas séparées par elles. 36 Figure 32 Corridors écologiques, tiré de Trame verte et bleue, 2009 Ainsi un réseau écologique peut aussi bien exister à une échelle continentale, qu'à une échelle nationale, régionale, intercommunale ou communale. Chaque échelle apporte une réponse aux enjeux de son territoire en matière de biodiversité et contribue à répondre aux enjeux des niveaux supérieurs. Figure 33 Schéma d'emboitement multi-échelles des réseaux écologiques liés aux différents niveaux territoriaux, tiré de Trame verte et bleue. 2009 Sur un territoire donné plusieurs échelles doivent donc être prises en compte pour maintenir ou rétablir un maillage écologique favorable au déplacement d'un maximum d'espèces. Ainsi, pour des espèces qui peuvent se déplacer sur de longues distances, l'échelle nationale ou régionale sera pertinente pour préciser spatialement les enjeux et les grands choix. Pour des espèces ayant des capacités moindres de déplacement comme les amphibiens, l'échelle communale ou intercommunale sera pertinente. Par ailleurs malgré la densité du milieu urbain, les espèces sauvages n'hésitent pas à s'approprier chaque espace naturel disponible, allant des berges d'une rivière aux friches d'une ancienne voie ferrée. Pour protéger la nature urbaine, il est donc primordial de renforcer la connexion des espaces verts urbains. D'où l'intérêt de développer des corridors écologiques augmentant les continuités biologiques. Cette problématique a été prise en compte avec la création des trames verte et bleue, modèle conceptuel de planification du territoire. Ces trames consistent en un maillage et une mise en réseau des espace non artificialisés irréversiblement (agricoles, bois, littoral) du milieu rural 37 jusqu’au milieu urbain. Ce concept est donc multi échelles (du local au national). La trame verte peut être considérée comme la continuité idéologique de la cité-jardin d’Howard30, une cité enclavée dans un écrin végétal qui apporterait bien-être physique et spirituel. En effet le concept de trame verte est né dans les villes à forte densité : afin d’éviter la saturation du territoire en terme d’urbanisation, certaines villes ont décidé de préserver des espaces naturels pour permettre l’alternance de zones urbaines et zones rurales. Quasiment systématiquement les agglomérations se sont développées sans mesurer l’impact de la fragmentation des espaces naturels voire de la nécessité de leur subsistance, tandis que le milieu rural a détendu son réseau écologique (bocager principalement) par souci de mécanisation (remembrement : la matrice agricole est moins propice au flux d’espèces qu’un bocage serré). Le concept de trame verte tend ainsi à réunir les contraintes de ces deux milieux et à reformer une continuité adaptée à leurs spécificités. Des années 60 jusqu’à la fin des années 90 les politiques de « trame verte »31 françaises ont été des stratégies pensées à l’échelle des agglomérations, sans concertation avec les autres métropoles. Ce n’est qu’en 2004 que la Stratégie Nationale pour la Biodiversité a proposé l’élaboration d’un Réseau Ecologique National s’inscrivant dans un Réseau Ecologique Paneuropéen. Puis, le Grenelle de l’environnement en octobre 2007 a présenté le projet d’une « trame verte et bleue nationale » reposant sur une cartographie au 1/5000ème des espaces naturels et des continuités écologiques reliant ces espaces. La trame verte en milieu périurbain prend forme à travers les parcelles agricoles, les coulées vertes et autre linéaires verts, et les espaces ouverts (bases de loisirs, forêts, prairie, etc.) qui participent à renforcer le cadre de vie. Les reconnections écologiques par l’intermédiaire de corridors visent à protéger la biodiversité de manière durable. L’aménagement urbain doit alors prendre en compte le fonctionnement biotique du territoire. En effet en milieu urbain, les espèces vivantes se concentrent sur les quelques espaces verts qui s’y trouvent (pars urbains, forêts périurbaines, agriculture périurbaines) et les aménagements paysagers (alignements d’arbres, bande enherbée, golf, etc.). Ainsi les espaces verts urbains peuvent offrir une diversité biologique riche. 30 Ebenezer Howard (1850-1928), urbaniste britannique. En 1898, il publie Tomorrow : A peaceful path to real reform dans lequel il milite pour la création d'un nouveau type de villes de banlieue, qu'il appelle les Citésjardins. Il les conçoit comme une communauté, limitée à 30 000 habitants, régie par une sorte de conseil d'administration, indépendantes, gérées et financées par les citoyens. Ces citées sont conçues sous une forme circulaire, avec un rayon d'un peu plus d'un kilomètre, une taille limitée (4 km2 au plus), au centre d'un territoire d'environ 20 km2 d'espaces agricoles. La partie urbanisée est divisée en six quartiers, chacun étant délimité par des boulevards pénétrants. Au cœur se trouve un parc entouré de services à la disposition de la population (hôtel de ville, théâtre, hôpital, etc.). Les commerces se trouvent dans le « Crystal Palace », sorte de galerie vitrée protégeant les habitants des intempéries. La cité est entourée d'une ligne de chemin de fer bordée de manufactures et de marchés. Les Cités-jardins représentent pour Howard le parfait exemple de la symbiose entre la ville et la nature : situées en périphérie des villes elles permettent de profiter des avantages de la ville (vie en société, travail), tout en habitant à la campagne et en ayant la possibilité de profiter de la nature et des bas loyers. 31 Il ne s’agissait pas de trames vertes au sens où on l’entend aujourd’hui mais de réflexions autour des espaces verts, des parcs urbains. 38 Figure 34 Les unités écologiques du paysage et le caractère nécessairement hétérogène de la zone de connexion biologique, tiré de Clergeau, 2007 Cette transparence écologique peut ainsi être assurée en zone urbaine par des liaisons vertes, mais également par les jardins privés, les toitures végétalisées, l’architecture si celle-ci est pensée au niveau global. Un bâtiment, même parfaitement conçu pour accueillir la biodiversité, n’aura qu’un impact minime voire nul sur la biodiversité s’il est isolé, entouré de béton. Il est donc nécessaire d’avoir une réflexion sur un nouvel urbanisme (nouvelles valeurs, nouvel esthétisme, nouvelles relations entre ville et campagne, etc.) On peut ainsi citer la création de la zone de biorétention sur Zhon-Xiao Boulevard à Taipei32, qui a permis de transformer des lieux inutilisés et mal entretenus en jardins écologiques productifs. La zone d'entrée du campus donnant sur le boulevard Zhong-Xiao, anciennement masquée par un grand mur, a été choisie pour créer le jardin et la zone de biorétention33. Des panneaux solaires, qui ont également une fonction d'écrans de protection solaire sur les bâtiments du campus, fournissent l'énergie aux pompes utilisées sur place. Les plantations ont été effectuées par les gens du quartier. Les étudiants ont mis en place des écrans en treillis métallique sur lesquels poussent des plantes grimpantes. 32 Maître d'ouvrage : National Taipei Unicersity of Technology, Taipei City Government. Architectes-paysagistes: Sergio Palleroni, Jen-Hui Tsai, James Adamson. Aire: 50 000 m2 (jardins et toits végétalisés). 33 Le jardin a été conçu par un groupe d'étudiants en architecture, urbanisme et ingénierie. 39 Figure 35 Zone de biorétention sur Zhon-Xiao Boulevard, Taipei Il est aujourd’hui primordial d’assurer la connectivité écologique au sein même de la ville, et donc de s’appuyer sur les trames vertes et bleues. Ces corridors écologiques sont des continuités permettant d’assurer les déplacements des espèces entre des espaces réservoirs de biodiversité. Ainsi la trame verte urbaine est composée : d’espaces publics, de cœurs d’îlots verts, des jardins privés34, des toits et murs végétalisés, des vergers, c’est-à-dire d’une multitude de secteurs à enjeux, de secteurs de réflexion. Des poches de biodiversité au sein même de la ville peuvent être préservés ou créés. Une gestion différenciée des espaces peut être développée afin d’accueillir la microfaune (diversification des plantations, fauche tardive, etc.), développer les usages sans pesticides, limiter l’imperméabilisation. L’éco-quartier du Raquet35 situé à Douai, à 40 kilomètres de Lille, a ainsi été pensé en ce sens. Sa vocation est de contribuer au rééquilibrage du territoire du Douaisis soumis à la forte attractivité de Lille. L’éco-quartier n’étant qu’un morceau de la ville, il était important de le reconnecter avec les autres quartiers périphériques, et plusieurs étapes sont donc prévues : identification de la biodiversité et de ses supports déjà présents ; consolidation de l’existant : grand paysage, trames vertes et bleues, corridors biologiques ; introduction des principes de gestion pour optimiser les espaces verts naturels et les espaces cultivés (agriculture biologique, jachères, biomasse, etc.) ; limitation de l’imperméabilisation des sols et gestion de l’eau en techniques alternatives sur l’espace public de voirie pour créer des îlots de fraîcheur (arbres d’alignement, valorisation des eaux pluviales) ; utilisation de la trame des lots privés pour installer un paysage bocager (préconisations paysagères, façades végétalisées, etc.) ; réflexion sur l’éclairage public afin de préserver la faune et la flore (éclairage non continu, par exemple). 34 Cependant le jardin privatif pose problème quant aux espèces introduites (espèces envahissantes par exemple), ce qui peut avoir pour conséquence de favoriser surtout certaines espèces (généralistes, forestières, de régime omnivore ou opportuniste, oiseaux sédentaires, nichent haut, cavernicoles). Un travail de sensibilisation doit donc être fait auprès des particuliers. 35 Un long processus de 16 ans de travaux vient de démarrer sur un terrain de 160 hectares pour atteindre une capacité de 4 000 logements. 40 Figure 36 Eco-quartier du Raquet, projet d’aménagement, tiré de http://www.scientipole.fr/fileadmin/user_upload/documents/Mini-site/Atelier_Urba/Synthese_eco-quartier__les_conditions_de_la_reussite.pdf C’est également sur ce modèle de trame verte que la reconstruction du centre commercial Beaugrenelle à Paris a été entreprise, notamment en y incorporant une surface importante de toitures et façades végétalisées, creuset propice au développement d’un écosystème local. Implantée à l’intersection de plusieurs corridors écologiques, entre autres la Seine, le Parc André-Citroën ou encore le champ de Mars, l’objectif est de faire de ces toiture et façades un complément d’habitat pour les nombreuses espèces tant animales (oiseaux, insectes) que végétales qui cohabitent dans le 15e arrondissement. 41 Figure 37 Projet d’aménagement du « nouveau Beaugrenelle », Paris 15 ème Enfin on peut citer le projet « Nature Active », lauréat du concours international d’idées Urbanisme et Développement Durable pour l’Opération d’Intérêt National du Plateau de Saclay36. Avec environ 650000 habitants et 350000 emplois, ce grand territoire rassemble des ressources exceptionnelles : concentration d’établissements supérieurs et de recherche, laboratoires et entreprises de haute technologie. L’extension de l’urbanisation de ce grand territoire soulève d’importants enjeux environnementaux, et notamment d’exploiter la capacité productive de la nature pour satisfaire les besoins de la ville : énergies, eaux, alimentation, recyclage. Dans le projet « Nature Active » la nature est considérée comme une « machine » qui produit une grande quantité d’énergie et transforme la matière. Elle est alors utilisée pour générer et gérer la ville : les dynamiques naturelles sont intégrées dans le fonctionnement urbain, ce qui implique de prendre en compte les processus écologiques. Le projet tend à atteindre un équilibre entre les besoins et les ressources d’un territoire, tout en créant un cadre de vie urbain, stimulant et accueillant pour l’homme. 36 Conçu par Babylone Paysagistes, SOA architectes, Alter Développement, Bio Diversité écologues. 42 Figure 38 Projet « Nature Active », tiré de http://www.soa-architectes.fr En opposition avec la simple recherche de l’autonomie des bâtiments (ex. HQE), les mêmes principes à l’échelle du quartier, mieux du territoire, introduisent l’idée d’une organisation locale visant à optimiser les échanges, au sein de microsystèmes totalement indépendants les uns des autres. 43 On le voit, les processus écologiques étant complexes, la question de l’implantation des bâtiments est donc cruciale. Il est nécessaire de travailler sur les continuités écologiques dans la ville, celles-ci permettant, de maintenir une biodiversité ordinaire indispensable, mais aussi d’augmenter la transparence écologique. De même il s’agit de développer des fonctions compensatoires et restauratoires, ce qui implique d'inscrire le bâti dans un réseau écologique fonctionnel (maillage de corridors biologiques à créer, restaurer, préserver, puis gérer (gestion écologique et restauratoire, et donc différentiée). Conclusion Au cours des dernières décennies, le développement des sciences de l’écologie a modifié de façon radicale les relations de la ville avec la nature : le besoin de nature chère aux citadins s’est transformé progressivement en services rendus par le vivant, et la notion de biodiversité a pris le dessus sur celle d’espace vert. Mais les relations ville/nature ne sont pas facilitées dans le contexte de métropolisation actuel : la densification des centres urbains tend à s’accentuer, tandis que l’étalement urbain reste une réalité et le mitage des zones rurales se poursuit à un rythme alarmant. La pression foncière qui s’accroit de façon régulière tend à amplifier ce double phénomène. La ville s’empare de tout ce qu’elle peut, qu’il s’agisse de sites naturels ou d’espaces agricoles. Les espaces dits naturels sont de plus en plus cernés, enclavés et morcelés. On observe toutefois une mobilisation grandissante des citadins en faveur d’un maintien de la nature en ville, une nature qui stimulerait l’imaginaire collectif et témoignerait de choix éthiques, esthétiques, sociaux, économiques et culturels. Jardins ouvriers et familiaux, jardins partagés, agriculture urbaine, mais aussi activités récréatives et sportives de plein air, squares de proximité et grands espaces verts constituent des réponses diverses au besoin grandissant de nature des populations urbaines. Les biotopes présents dans la ville constituent donc des écosystèmes diversifiés, mais à l’équilibre fragile du fait de leur fonctionnement, de leur organisation et de leur répartition. Il s’agit donc de les préserver, afin d’assurer la conservation et la restauration de la biodiversité, mais également dans une conception globale de développement durable : la nature contribue à l’attractivité de la ville, valorise son cadre de vie, met en valeur ses qualités touristiques et résidentielles. Elle remplit une fonction éducative auprès des jeunes populations, réduit les niveaux de certaines pollutions, contribue à dégager des surfaces de sol perméables aux eaux de pluie, participe à la prévention des risques naturels. Toute politique publique, et tout projet urbain, reflet de cette politique, doit trouver le juste équilibre entre cette valorisation environnementale et la pression foncière qui pèse sur la ville. Une architecture favorable à la biodiversité reste sans doute à inventer, l’architecture ne pouvant pas être une simple addition de prestations techniques. L’échelle à prendre en compte dépasse celle du bâtiment. De même que les infrastructures ont peu à peu intégré le concept de biodiversité, il faut aujourd’hui concevoir un urbanisme et une architecture qui la préserve voire la renforce : couloirs de connectivité, aires de déplacements, périodes annuelles sensibles pour le développement de la faune, services rendus par le bâtiment (ex. : nids pour les hirondelles). Toute cette organisation peut créer de la valeur biologique. Il est 44 indispensable de préserver et développer la biodiversité via une meilleure gestion des friches et des nombreux espaces interstitiels qu’offrent les tissus urbains de toutes les agglomérations. Le but est de créer des corridors écologiques et d’aménager les cours d’eau et leurs berges pour qu’ils jouent un rôle central dans la gestion et le maintien des biotopes et des écosystèmes en ville. Il est nécessaire également de réinventer un nouveau rapport à l’environnement, et développer des usages et des pratiques urbaines en lien avec la nature. Il faut ainsi envisager le retour à l’état naturel d’un site dès sa conception, retrouver la géographie, la mémoire, les traces de l’histoire d’un lieu, d’un quartier, d’un territoire en mettant en valeur son milieu vivant. L’organisation des villes s’avère fréquemment difficilement conciliable avec les impératifs de préservation des espaces verts et naturels, et l’intégration des cycles écologiques. Face à la pression foncière et à la hausse des prix qui en résulte, les zones naturelles et agricoles urbaines et périurbaines sont difficiles à protéger. Mais l’imperméabilisation des sols de la ville dense entraîne un cycle d’eau incomplet qui augmente les risques d’inondation, réduit l’alimentation des nappes souterraines, et accroit la pollution des milieux naturels. La minéralisation des surfaces absorbe la chaleur, contribuant à la formation d’ilots de chaleur qui ont des effets négatifs sur les plans écologiques et sanitaires. Face à ces problèmes le développement d’une nature hors-sol (toitures végétales, murs végétalisés) s’inscrit dans cette tendance dont émerge le concept de bâtiment à biodiversité positive. Aujourd’hui, depuis l’introduction des murs végétaux du biologiste Patrick Blanc, toute grande architecture se décore d’un mur végétal, tel un effet de mode, et les faux murs végétaux, sans aucune notion de biodiversité, prolifèrent. Ainsi Toronto généralise les toitures végétales, et Paris a introduit dans son PLU la notion de coefficient de biotope par surface. Figure 39 Vincent Callebaut, projet Anti-Smog, Canal de l'Ourcq, Paris 19ème. Les projets de l’architecte sont de manière générale plus des prouesses techniques et de design, et prétexte à la végétalisation, qu’une réflexion stricte sur la biodiversité et plus généralement sur l’environnement, tiré de http://vincent.callebaut.org . Les projets de jardins urbains et les approches paysagères dans la conception des espaces publics se multiplient, propageant l’image d’une ville dense mais néanmoins verte et bleue, dotée de pelouses soignées et de promenades fleuries et arborées le long d’avenues ou de quais accueillant une circulation multimodale. Ces interventions, quelque soit leur qualité patrimoniale et paysagère, restent néanmoins de l’ordre de ce que les anglo-saxons appellent du « greenwashing »37. Leur contribution à la mise en oeuvre d’une véritable approche éco37 En français « écoblanchiment » ou « blanchiment écologique ». Il s’agit d’un procédé marketing utilisé par une organisation dans le but de se donner une image écologique responsable. La plupart du temps, l'argent a davantage été investi en publicité que pour de réelles actions en faveur de l'environnement. 45 systémique de l’espace public urbain reste à évaluer en questionnant la gestion et l’entretien de ces espaces à moyen et à long terme. On voit même l’émergence de projets de fermes urbaines, fermes verticales emprisonnées dans des building afin d’installer de « vrais » espaces agricoles au cœur des villes : « Fermez les yeux et imaginez trente étages d’architecture contemporaine conçus pour montrer cette vertur authentique à travers des baies toute hauteur, des équipements spécialisés, y compris des panneaux solaires dans tous les sens. Placez le tout près d’une autoroute, faite qu’on le voit de jour comme de nuit, brillamment éclairé de l’intérieur. Un concentré spectaculaire de technologie verte ! Ce « gratte-vert » de haute technologie ne pourrait-il pas lancer un nouveau type d’agrotourisme ? »38. Il est évident que ce type de bâtiment, emprisonnant la nature, n’a aucun impact sur la biodiversité, pire il rejette toute réflexion globale sur l’urbanisme et l’environnement et apportant une (fausse) solution « clé en main » et artificielle au problème de la croissance urbaine. Figure 40 Chris Jacobs - Vertical Farms Les questions écologiques conduisent actuellement à produire de nouvelles utopies architecturales dont le formalisme fonctionnel direct rappelle souvent les tentatives du mouvement métaboliste39, dont le bâtiment-ville est censé répondre aux problèmes de densité et d’étalement urbain. La question essentielle reste de savoir si la ville peut être non seulement consommatrice mais aussi productrice de ressources, et notamment de ressources naturelles. Mais conservation et utilisation durable des ressources sont souvent des objectifs contradictoires. Un grand nombre de citadins n’acceptent que la seule une nature maîtrisée, aseptisée, sous forme végétale, qui est située dans des parcs et des jardins bien délimités. Quant aux animaux, à l’exception des animaux de compagnie, leur présence est encore plus problématique, souvent perçue comme une nuisance. Par conséquent on peut se demander si les corridors écologiques sont pertinents en milieu urbain. De fait, les coulées vertes urbaines actuellement mises en oeuvre ne sont pas forcément synonymes de continuité écologique, ce sont plutôt les voies ferrées, les berges des 38 Cité dans « Architecture Now! Green Architecture”, Philip Jodidio, Taschen France, 2009, p. 198. Créé en 1959 par un groupe d'urbanistes et d'architectes japonais. Leur vision de la ville du futur, habitée par une société de masse, offrait la particularité de s'étendre sur une large échelle, d'être flexible et d'avoir une structure extensible rendant possible un processus de croissance organique. Divers projets se sont rendus célèbres par leur côté spectaculaire comme la ville flottant sur la mer (le projet Unabara), la ville-tour de Kiyonori Kikutake, la ville-mur, la ville agricole et la ville en hélice (Helix City) de Kisho Kurokawa. 39 46 cours d’eau, la succession de jardins ou de toits végétalisés qui peuvent former autant de corridors pour la faune et la flore. Reste que l’on dispose de peu de données sur leur valeur écologique en milieu urbain. Quels animaux les utilisent-ils pour circuler ? Quelle est l’influence effective du bruit ou de l’éclairage public sur cette circulation ? Mais la question de l’acceptabilité de la biodiversité reste centrale et le travail de sensibilisation reste crucial, comme le montre l’exemple de la ville de Laconia dans le New Hampshire : « Voici il y a quelques années, Laconia a dépensé cinq millions de dollars pour créer des zones piétonnes offrant un environnement agréable aux commerces du centre-ville. Sur le plan esthétique, ce fut une réussite éclatante. Les urbanistes se sont précipités des quatre coins du pays pour s’extasier et prendre des photos. Mais commercialement ce fut un désastre. Contraints de parcourir une centaine de mètres à pied depuis les parkings les clients ont désertés le centreville au bénéfice des centres commerciaux de la périphérie. En 1994 Laconia a arraché tous ses jolis pavés de brique, démoli bancs et jardinières, coupé les massifs d’arbres, et remis les rues dans leur état initial. Maintenant on peut se garer juste devant les magasins et la petite cité connait de nouveau la prospérité »40. 40 Bill Bryson, « American rigolos », Payot, 2003, p. 154-155. 47 Table des illustrations Figure 1 Evolution des m2 certifiés et non certifiés HQE en Ile-de-France ............................................ 8 Figure 2 Les 14 cibles HQE .................................................................................................................... 9 Figure 3 Patrick Blanc, Rue Bélliard 14, Bruxelles, végétalisation de l’immeuble .............................. 12 Figure 4 Hundertwasser House, Vienne ................................................................................................ 13 Figure 5 Toiture végétalisée extensive (sédums), du centre d'interprétation de la Nature, Parc national du Biebosch, Pays-Bas .......................................................................................................................... 13 Figure 6 Toiture jardin dans une ville américaine, Alyson Hurt de Alexandria, Va. ............................ 13 Figure 7 Caractéristiques des toitures végétalisées .............................................................................. 14 Figure 8 Exemple sélection : Espèces de prairie sèche du Nord-Pas-de-Calais .................................. 15 Figure 9 Toit de la Jacob Burckhardt-house, Bâle................................................................................ 16 Figure 10 Balestrand, Norvège.............................................................................................................. 17 Figure 11 Avant/après rue traversière St-Josse, Bruxelles, utilisation de Sphaignes ........................... 17 Figure 12 Le milieu urbain peut être favorable à la biodiversité en reproduisant des milieux similaires ............................................................................................................................................................... 18 Figure 13 Agir sur et autour du bâtiment .............................................................................................. 19 Figure 14 Inclusion d’un arbre sur une promenade piétonne, Portofino, Italie ................................... 19 Figure 15 Tour d’hirondelles ................................................................................................................ 21 Figure 16 Mousses installées sur la cathédrale de Chartres................................................................. 22 Figure 17 Exemple de colonisation naturelle sur un toit (Chartres) ..................................................... 24 Figure 18 Exemple de colonisation naturelle sur un ancien lavoir et un mur, près de Sours ............... 24 Figure 19 Exemple de colonisation naturelle sur la roche et d’autoentretien, Portofino, Italie........... 25 Figure 20 David Chipperfield, extension pour le Museum Folkwang Essen, Allemagne ..................... 27 Figure 21 David Chipperfield, Turner Contemporary gallery, Margate .............................................. 28 Figure 22 Jean Nouvel, projet pour le musée de l’Evolution Humaine à Burgos en Espagne.............. 28 Figure 23 Worldwide fund, Zeist ........................................................................................................... 29 Figure 24 Fondazione Pietro Rossini Pavilion in Briosco .................................................................... 29 Figure 25 Projet Velum, Lyon ............................................................................................................... 30 Figure 26 Chichu Art Museum, Naoshima, Japon ................................................................................ 31 Figure 27 Mur végétalisé, près de Chartres ............................................................................................ 32 Figure 28 Mur végétalisé, Portofino, Italie ......................................................................................... 32 Figure 29 Patrick Blanc, mur végétal, Caixaforum, Madrid................................................................. 33 Figure 30 Musée Horniman, toit végétalisé .......................................................................................... 34 Figure 31 Mouvement des espèces entre une forêt source et un bois proche et effet d'une barrière sur cette dispersion ...................................................................................................................................... 35 Figure 32 Corridors écologiques .......................................................................................................... 37 Figure 33 Schéma d'emboitement multi-échelles des réseaux écologiques liés aux différents niveaux territoriaux ............................................................................................................................................ 37 Figure 34 Les unités écologiques du paysage et le caractère nécessairement hétérogène de la zone de connexion biologique ............................................................................................................................ 39 Figure 35 Zone de biorétention sur Zhon-Xiao Boulevard, Taipei ....................................................... 40 Figure 36 Eco-quartier du Raquet, projet d’aménagement ................................................................... 41 48 Figure 37 Projet d’aménagement du « nouveau Beaugrenelle », Paris 15ème....................................... 42 Figure 38 Projet « Nature Active »........................................................................................................ 43 Figure 39 Vincent Callebaut, projet Anti-Smog, Canal de l'Ourcq, Paris 19ème ................................... 45 Figure 40 Chris Jacobs - Vertical Farms .............................................................................................. 46 49 Bibliographie ALLAIN R., Morphologie urbaine. 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La biodiversité est ainsi devenue l’autre enjeu environnemental du 21ème siècle, avec le réchauffement climatique. En effet les activités de plus en plus intensives de l’homme perturbent l'équilibre écologique des écosystèmes, fragmentent de plus en plus les secteurs où existe encore une certaine biodiversité. Avec la croissance des villes et l’étalement urbain, il devient nécessaire de travailler sur les enjeux de la biodiversité au sein même de la ville. La biodiversité urbaine doit en effet devenir un objectif dans le développement des villes et de leurs périphéries : préservation, conservation, restauration de la biodiversité, liens avec le périurbain et la campagne. Il est alors nécessaire de réfléchir à l’architecture des bâtiments, ossature de la ville, de son organisation et de son fonctionnement, et qui peut également jouer le rôle de vecteur de la protection ou de la réintroduction de la biodiversité dans le paysage urbain. Mots clés : Architecture, biodiversité, végétalisation, façade, mur, territoire, trame verte, périphérie, HQE 53