l`évolution des conceptions du syndicalisme en Suisse - E

publicité
En marge du nouveau programme de l'USS :
l'évolution des conceptions du syndicalisme en
Suisse
Autor(en):
Frey, Constant
Objekttyp:
Article
Zeitschrift:
Revue syndicale suisse : organe de l'Union syndicale suisse
Band (Jahr): 53 (1961)
Heft 9
PDF erstellt am:
20.04.2017
Persistenter Link: http://doi.org/10.5169/seals-385206
Nutzungsbedingungen
Die ETH-Bibliothek ist Anbieterin der digitalisierten Zeitschriften. Sie besitzt keine Urheberrechte an
den Inhalten der Zeitschriften. Die Rechte liegen in der Regel bei den Herausgebern.
Die auf der Plattform e-periodica veröffentlichten Dokumente stehen für nicht-kommerzielle Zwecke in
Lehre und Forschung sowie für die private Nutzung frei zur Verfügung. Einzelne Dateien oder
Ausdrucke aus diesem Angebot können zusammen mit diesen Nutzungsbedingungen und den
korrekten Herkunftsbezeichnungen weitergegeben werden.
Das Veröffentlichen von Bildern in Print- und Online-Publikationen ist nur mit vorheriger Genehmigung
der Rechteinhaber erlaubt. Die systematische Speicherung von Teilen des elektronischen Angebots
auf anderen Servern bedarf ebenfalls des schriftlichen Einverständnisses der Rechteinhaber.
Haftungsausschluss
Alle Angaben erfolgen ohne Gewähr für Vollständigkeit oder Richtigkeit. Es wird keine Haftung
übernommen für Schäden durch die Verwendung von Informationen aus diesem Online-Angebot oder
durch das Fehlen von Informationen. Dies gilt auch für Inhalte Dritter, die über dieses Angebot
zugänglich sind.
Ein Dienst der ETH-Bibliothek
ETH Zürich, Rämistrasse 101, 8092 Zürich, Schweiz, www.library.ethz.ch
http://www.e-periodica.ch
REVUE SYNDICALE SUISSE
ORGANE MENSUEL DE L'UNION SYNDICALE SUISSE
Supplément trimestriel:
53eannée
«TRAVAIL ET SÉCURITÉ SOCIALE»
Septembre 1961
N°
9
En marge du nouveau programme de l'USS
L'évolution
des conceptions du syndicalisme en Suisse
Par Constant Frey
Dans son congrès de Lausanne, en octobre 1957, l'Union syndicale
suisse a procédé à une nouvelle revision de ses statuts. En même
temps, les délégués donnaient mandat à la Commission syndicale
d'élaborer un programme immédiat et un nouveau programme de
travail, à l'intention du prochain congrès ordinaire. Mais il est
apparu très vite que la multiplicité des tâches syndicales débor¬
dait le cadre d'un programme de réalisations immédiates. Ce dont
on avait besoin, c'était d'une charte qui trace « les grandes lignes
de l'action syndicale », sur le plan national, d'un document « qui
balise en quelque sorte la route à suivre ». Tels sont d'ailleurs les
termes dans lesquels notre président Hermann Leuenberger pré¬
senta le nouveau programme de l'Union syndicale au 36e congrès,
réuni à Bâle en octobre 1960.
D'aucuns ont voulu voir dans cette double revision — statuts et
programme de travail — coïncidant à peu près avec la refonte du
programme du Parti socialiste suisse, une intégration du mouve¬
ment ouvrier dans un réginte capitaliste en mal de dirigisme, un
renoncement désabusé aux réformes de structure si longtemps pro¬
clamées et réclamées.
Le porte-parole du Comité de l'Union syndicale suisse s'en est
catégoriquement défendu: « Ce qui est étonnant - a dit Hermann
Leuenberger dans son discours introductif - c'est le grand nombre
d'éléments que nous avons pu transvaser, si je puis dire, de l'an¬
cien dans le nouveau programme. Certes, les accents ont dû être
distribués différemment. La langue, les formules ont changé. Chaque
époque a son style, sa manière de s'exprimer. Mais, dans l'ensemble,
il y a solution de continuité entre l'ancien et le nouveau programme...
En l'élaborant, nous n'avons pas modifié le cours de notre chemi¬
nement; nous n'avons pas donné un coup de barre à gauche ni à
241
droite, parce que nous sommes persuadés qu'il n'y a aucune néces¬
sité d'abandonner la route suivie jusqu'à maintenant. »
Pour en juger, rien ne vaut la comparaison des textes, la con¬
frontation des documents. Avant donc que disparaisse complète¬
ment la génération de militants ayant vécu une bonne partie de
l'histoire contemporaine du mouvement syndical libre en Suisse,
nous allons tenter d'en retracer l'évolution à la lumière des statuts
et des programmes de notre centrale nationale.
Sans vouloir remonter dans la préhistoire, partons cependant du
précurseur de l'Union syndicale suisse, de cette
Union ouvrière
Olten dans les premiers jours d'octobre 1873. Son inspi¬
rateur, Herman Greulich, lui avait assigné ce but ambitieux:
fondée
à
Réunir toutes les sociétés ouvrières en une union générale permettant
de s'entendre au sujet de6 meilleurs moyens à employer en vue d'amélio¬
rer le sort des ouvriers et de remplacer finalement le salaire par le revenu
du travail au moyen de coopératives de production, pour arriver ainsi
à la suppression de la domination de classe.
Association d'éléments hétérogènes, soit de syndicats locaux, de
partis politiques et d'organisations culturelles
du Grutli avec ses sections de tir et de chant! - telle la Société
cette première centrale ouvrière ne vécut que dix-sept ans. Elle eut
du moins le mérite de contribuer efficacement à l'adoption, en 1877,
de la première loi fédérale sur le travail dans les fabriques. L'Union
ouvrière n'était pas viable, mais le jour même de sa dissolution,
le 7 novembre 1890, les délégués de douze sections, représentant
à peine 250 membres au total, restèrent en séance pour fonder
caisses de maladie, de
l'Union syndicale suisse.
Ses
premiers statuts lui fixaient pour buts:
L'élévation du niveau de la classe ouvrière et la protection de ses inté¬
rêts économiques, l'obtention de la jouissance universelle et égale pour
tous des produits du sol et du sous-sol.
Dans une autre disposition statutaire, les tâches de l'USS étaient
énumérées dans l'ordre suivant:
Développer le syndicalisme, défendre les intérêts économiques de la
classe ouvrière, libérer les travailleurs du salariat, œuvrer à la sociali¬
sation des moyens de production.
Tous les historiens seront d'accord pour constater que ces for¬
mules très générales s'inspirent aussi bien des idées des « socialistes
utopiques » français du XIXe siècle, de Saint-Simon en particulier,
que des principes énoncés par la Ire internationale ouvrière, fondée
242
Genève en 1864, sous le haut patronage de Karl Marx. En dépit
de l'adoption, par les congrès suisses de 1900 et de 1902, des thèses
de Greulich sur la « neutralité absolue des syndicats en matière
religieuse » et sur leur « indépendance politique », la phraséologie
marxiste s'accentua encore dans les statuts de l'Union syndicale
de 1906, dont l'article 2 reçut la teneur suivante :
à
L'Union syndicale suisse représente l'organisation collective de toutes
les organisations syndicales suisses qui se placent sur le terrain de la lutte
des classes
Nouvelle rédaction, tout aussi doctrinale - et tout aussi lourde¬
ment traduite en français - dans la revision des statuts adoptée par
le congrès de 1908:
L'Union syndicale suisse
l'organisation centrale des fédérations de
métiers et d'industries en Suisse, constituées sur le terrain de la lutte
prolétarienne des classes.
est
Ce texte fumeux est resté en vigueur jusqu'en 1920. On ne s'éton¬
nera pas qu'il ait constitué un obstacle à l'adhésion de certaines
fédérations chez les cheminots en particulier à l'Union syndicale
suisse. Mais au lendemain de la première guerre mondiale, l'atmo¬
sphère était révolutionnaire. Le congrès de Neuchâtel fut même
-
-
saisi d'une proposition du Cartel syndical de Bâle, fortement noyauté
par les communistes, visant à reconstituer une « Union ouvrière *
qui eut pratiquement mis l'USS sous la tutelle du PSS. Cette offen¬
sive fut repoussée à une majorité assez nette. Mais la déclaration
de principe de l'Union syndicale prit néanmoins le cachet de cette
période mouvementée par cette nouvelle teneur de deux articles
de ses statuts:
Les fédérations syndicales placées sur le terrain de la lutte de classes
forment l'Union syndicale suisse et la centrale syndicale.
L'Union syndicale suisse s'impose la tâche de sauvegarder les intérêts
touchant la généralité des fédérations syndicales et leurs membres; son
but est la socialisation des moyens de production et l'abolition de la
domination de classe.
Il fallut
attendre sept ans encore pour voir disparaître une termi¬
nologie qui contrastait depuis longtemps avec
le réalisme de l'action quotidienne
En 1927, par décision du congrès d'In¬
terlaken, les dispositions fondamentales des statuts de l'USS reçurent
la teneur suivante:
de nos fédérations syndicales.
Les fédérations syndicales basant leurs tâches et leur champ d'action
sur le programme minimum de l'USS et qui reconnaissent les statuts
ci-après forment l'Union syndicale.
243
L'Union syndicale suisse s'impose la tâche de sauvegarder les intérêts
touchant la généralité des fédérations syndicales et de leurs membres
en se donnant pour but la réalisation de l'économie collective.
Le programme de travail de 1933
vint préciser aussi bien le but que les tâches essentieUes de l'USS
et des fédérations qui la composent, comme aussi les moyens
qu'elles entendent mettre en œuvre pour les réahser. Son intro¬
duction - où l'on reconnaît le style sobre et direct de Max Weber était si claire que bien des termes ont pu en être repris, presque
trente ans après, dans le nouveau programme de, l'USS. En voici
les principales dispositions:
Le but: Le but des syndicats est d'obtenir un ordre économique et
social préconisant le bien-être de l'homme, lui assurant non seulement
l'égalité des droits politiques, mais encore l'égalité des droits économiques
et sociaux. Quelles que soient son origine et sa situation matérielle, chacun
doit avoir la possibilité de déployer toutes ses forces dans le cadre de
la communauté et de prendre part aux biens culturels suivant ses capa¬
cités
La tâche: La tâche des syndicats consiste à procurer au travail la plus
grande part possible du rendement de l'économie publique et de la répar¬
tir aussi équitablement que possible entre toutes les catégories de travail¬
leurs. Ce qui leur importe avant tout, c'est d'élever le niveau économique,
social et culturel de tous les salariés.
Le moyen: Afin de tenir tête à l'influence et à la pression exercées par
la puissance organisée du capital et du patronat, il faut que les travail¬
leurs de toutes les professions (ouvriers, employés, fonctionnaires) s'unis¬
sent pour conquérir les droits que le travail doit revendiquer. Les seuls
moyens de lutte économique que les travailleurs ont à leur disposition
pour la conquête des droits humains sont leur travail et leur capacité
de consommation. C'est pourquoi ils se réservent le droit de faire usage
de ces moyens de lutte en faveur des revendications des grandes masses
populaires, exactement comme le capital utilise son pouvoir économique
pour défendre les intérêts d'une petite minorité de possédants-
Ce programme était manifestement influencé par l'ampleur et
la durée d'une crise de chômage sans précédent dans l'histoire du
développement économique des pays industrialisés. Il plaide donc
avec insistance la cause d'une économie dirigée, réalisée « par la
concentration de toutes les forces de l'économie et avec la coopé¬
ration des producteurs comme des consommateurs ». Et quant à
l'économie collective, l'USS entend bien continuer à « encourager
son développement sous toutes ses formes: régies directes de l'Etat
et des communes et couverture des besoins sous la forme coopé¬
rative ».
Par une saine réaction contre l'étatisme autoritaire des dictatures
de diverses couleurs — la rouge, la noire et la brune - de cette sombre
244
période de l'histoire contemporaine, le programme syndical de 1933
ne fait pas la moindre allusion à la nationalisation des grandes
entreprises industrielles, alors très en vogue dans plusieurs pays
voisins; mais pour la première fois l'Union syndicale proclame for¬
mellement dans un document officiel son adhésion de principe à
la politique contractuelle
dans cette déclaration sans équivoque:
Il
faut encourager la conclusion de contrats collectifs entre syndicats
et organisations patronales en réglementant le plus possible les conditions
de travail. Pour atteindre ce but, les syndicats tendent à créer des com¬
munautés professionnelles sur le plan national.
On sent poindre déjà, dans ce bref alinéa, l'esprit communautaire
qui aboutira en 1937, dans l'industrie métallurgique à la célèbre
convention nationale dite de la « paix du travail ». On y décèle
aussi l'influence de la poignée de militants syndicalistes romands
qui, ayant pris conscience de l'interdépendance du juste prix et du
juste salaire, n'ont pas craint d'affirmer selon la courageuse expres¬
sion d'Emile Giroud
«qu'au-dessus de l'intérêt des parties en pré¬
sence, patrons et ouvriers, il y a ceux du métier, de la profession
qui, s'ils sont négligés, entraveront toute action progressiste ». Mais
la revision partielle des statuts votée en 1936 n'ayant
pourtant
rien changé aux objectifs fixés à l'USS — c'est seulement en mai 1941
que la Commission syndicale adopta une déclaration de principe
concernant la communauté professionnelle, considérée comme l'ins¬
trument contractuel possible pour « une collaboration des organi¬
sations syndicales et des associations patronales dans le domaine
des intérêts professionnels et économiques communs ».
Les bouleversements politiques et économiques causés par la
seconde guerre mondiale ne pouvaient manquer de bousculer aussi
bien des mythes dans les rangs du mouvement ouvrier demeuré
libre. Rien d'étonnant dès lors à ce que la revision des statuts adoptée
par le congrès extraordinaire de 1946 ait sensiblement modifié la
forme et le sens des dispositions fondamentales de notre charte
syndicale. On en peut juger par les deux articles suivants:
-
-
-
L'Union syndicale suisse (USS) est une association au sens des articles 60
et suivants du Code civil suisse. Son siège est à Berne. Elle groupe les
fédérations syndicales suisses qui reconnaissent les principes du syn¬
dicalisme libre.
L'USS a pour but de sauvegarder les intérêts de l'ensemble des fédé¬
rations affiliées et de leurs membres.
A cet effet, elle tend
à
développer:
a) les droits démocratiques et les libertés du peuple;
b) l'économie collective ;
245
c) la législation sociale et la protection des travailleurs;
d) le droit ouvrier en général et notamment la politique des contrats
collectifs ;
e) les relations internationales.
On se souvient peut-être des controverses qui s'engagèrent à cette
époque déjà au sujet de la contradiction — dénoncée avec une évi¬
dente mauvaise foi par certains organes patronaux
qu'il y aurait
à promouvoir parallèlement la législation ouvrière et l'extension
des conventions collectives. Alors président en charge de l'USS,
Robert Bratschi ne cessa de contester cette soi-disant duplicité. Dans
sa préface à un petit manuel paru en 1953 (cf. Le Syndicalisme libre
en Suisse, Editions Radar, Genève), il écrivait avee sa clarté cou-
-
tumière :
Certains astucieux, dans l'autre clan, s'efforcent de créer la confusion,
profitable aux intérêts égoïstes particuliers, en démonétisant la législation
sous prétexte de favoriser le développement des rapports du travail sur
la base de conventions collectives conclues librement entre associa¬
tions professionnelles. Ces essais sont voués à l'échec, car les travailleurs
savent pertinemment que, en définitive, ces gens sont en réalité contre
l'extension de l'un et de l'autre système, mais trouvent plus adroit d'es¬
sayer de les démolir l'un après l'autre.
Les syndicalistes éclairés continuent à penser que ces deux instruments
sont complémentaires, c'est-à-dire qu'ils considèrent comme absolument
indispensable une législation prescrivant les normes minima sous la
garantie du droit public, les contrats collectifs de travail pouvant aller
bien au-delà des normes légales par la seule volonté des parties contrac¬
tantes...
Par la dernière revision des statuts, celle de 1957, une seule modi¬
fication a été apportée à l'énumération des objectifs poursuivis par
l'Union syndicale suisse. Au lieu de s'occuper simplement de « déve¬
lopper l'économie collective », notre centrale suisse s'emploie à
« promouvoir l'expansion de l'économie nationale, particulièrement
de l'économie collective ».
La nomenclature des tâches assignées au mouvement syndical,
pris dans son ensemble, étant volontairement sommaire dans ses
statuts, il était temps que l'USS se donnât
un nouveau programme de travail
adapté aux circonstances et précisant aussi bien son but que ses
tâches essentielles. Ce document est maintenant en possession de
la plupart de nos lecteurs. Mais pour leur permettre la comparai¬
son immédiate entre sa déclaration de principe et les textes anciens
que nous avons cités dans cette compilation historique, nous repren¬
drons ici ses deux premiers alinéas :
246
Le but: L'Union syndicale vise à instaurer un ordre économique et
social qui doit assurer ù tous les mêmes droits - politiques, économiques
et sociaux. La société doit ouvrir à chacun, indépendamment de son ori¬
gine et de sa situation matérielle, la possibilité de donner le meilleur de
lui-même dans la communauté et de participer aux biens de la culture
dans la mesure de ses aptitudes et de son apport.
Les tâches: L'Union syndicale tend à réaliser et à maintenir le plein
emploi; à promouvoir l'utilisation la plus rationnelle de toutes les res¬
sources humaines et matérielles du pays; à assurer au travail une part
aussi grande que possible du produit social et à la répartir équitablement
entre les diverses catégories de travailleurs. L'Union syndicale a en par¬
ticulier pour mission d'améliorer la condition économique et sociale des
salariés; elle s'emploie à les faire accéder toujours plus largement aux
valeurs de la culture.
Voilà qui est clair et précis.
La loi et le contrat
Pour ce qui est des moyens propres à réaliser la promotion du
travail, le nouveau programme de l'USS n'est pas moins catégorique:
Dans le cadre de l'économie privée, l'Union syndicale préfère les régle¬
mentations contractuelles à la loi; elles ont l'avantage d'être plus souples;
elles peuvent être adaptées plus rapidement et mieux que les dispositions
légales aux réalités économiques. Pour le personnel occupé dans les admi¬
nistrations, entreprises et établissements publics, des réglementations de
droit public peuvent remplacer les réglementations contractuelles - à la
condition que le droit de discussion des associations du personnel demeure
garanti.
Lorsque les réglementations collectives ne sont pas suffisantes ou ne sont
pas possibles, les normes minimums en matière de protection des tra¬
vailleurs ou de politique sociale doivent être fixées ou garanties par la
loi. L'Union syndicale donne la préférence à des lois fédérales. Le législa¬
teur doit assimiler à des normes minimums celles que fixent les conven¬
tions et recommandations de l'Organisation internationale du travail.
Et les réformes de structure?
L'Union syndicale n'entend pas plus y renoncer que s'engager
dans de vaines controverses sur la nationalisation ou la socialisation
des grandes entreprises. Le chapitre de son programme consacré
au régime économique est aussi concis que réaliste :
L'Union syndicale déploie son action, défend les intérêts
des travail¬
leurs et s'emploie à encourager l'expansion économique du pays dans les
limites du régime économique présent. La situation et les structures des
divers secteurs étant différentes, le régime de l'économie privée est mieux
approprié dans certains cas et le régime de l'économie mixte ou de l'éco¬
nomie collective dans d'autres (gestion coopérative, régie communale
ou d'Etat). Ce sont le degré d'efficience et l'intérêt général - qui a le
pas sur les intérêts des particuliers et des groupes - crai déterminent le
choix du système de gestion.
247
"Z.
onciusions
Ces citations nous paraissent suffisantes pour juger à la fois l'évo¬
lution suivie, en l'espace de trois quarts de siècle, par les idées syn¬
dicalistes en Suisse et leur fidélité à un idéal de justice sociale basé
sur la liberté et sur la solidarité.
Le nouveau programme de travail de l'Union syndicale suisse
est un « programme pragmatique », a écrit Jean Mori dans son pre¬
mier commentaire. Par quoi il entend certainement que ce vade¬
mecum des dirigeants du syndicalisme libre prend pour critère la
valeur pratique des principes et des revendications, en opposition
à tout dogmatisme intransigeant.
Puisse ce document faciliter la tâche toujours plus ardue des
nouvelles générations de militants!
Impressions d'un voyage en URSS
Par Georges Hartmann,
politiques et économiques
Malgré la violation flagrante du droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes par les Russes à Berlin, malgré la reprise unilatérale
des expériences de la bombe atomique que leur propagande con¬
damnait hier encore, nous reproduisons le documentaire de notre
fidèle et précieux collaborateur. Comme il le dit lui-même dans son
introduction, il faut distinguer entre l'aspect politique, religieux ou
économico-social. Seul ce dernier aspect a retenu son attention. Nous
savons nos lecteurs assez sagaces pour placer ces observations dans
leur cadre général. Ce ne sont pas les réussites scientifiques ou
techniques que nous contestons, ce sont les exactions du régime
totalitaire avec ses visées impérialistes plus ou moins avouées. Réd.
docteur
es sciences
Examinez toutes choses et retenez ce qui est bon.
Paul aux Thessaloniciens.
1.
Vienne-Moscou en quarante-huit heures
On écrit beaucoup aujourd'hui sur l'Union soviétique. Des experts,
journalistes, des touristes en reviennent, les uns déçus, les autres
satisfaits, et d'autres encore plutôt critiques. D'autres enfin com¬
parent le niveau de vie occidental à celui de l'URSS et observent
que ce pays est encore inachevé.
Une dizaine de jours passés à Moscou en avril 1961 m'ont laissé
des impressions très variées. Je me suis décidé à publier mes notes
de voyage parce que j'éprouve le besoin de rapporter sans idée pré¬
conçue ce que j'ai vu et entendu. Si l'Intourist, agence de tourisme
de l'Etat russe, m'a fait voir officiellement bien des choses, je me
suis toutefois beaucoup promené seul, à pied, en métro, en autobus,
des
248
Téléchargement