Diagnostics Prévisions et Analyses Économiques

publicité
Diagnostics Prévisions
et Analyses Économiques
N° 71 – Mai 2005
Analyse économique de la prévention des risques pour la santé1
Qu'il s'agisse de la conception des programmes de prévention des risques pour la santé ou de leur
sélection, la contribution de l'analyse économique est essentielle. Son apport tient notamment au fait
qu'elle permet de mettre en avant des considérations d'efficacité et d'efficience. A ce titre, les enseignements que l'on peut en tirer contribuent à nourrir et éclairer le débat public, dans un domaine où les
décisions reflètent fortement des choix de société.
• La première justification du recours à l'analyse économique dans le champ de la prévention tient à la
compréhension et à la caractérisation des comportements qu'elle permet. Pendant longtemps, la
connaissance des comportements a été négligée et les politiques de prévention ont été définies sans
s'interroger sur la capacité réelle des programmes mis en place à infléchir ces comportements. Un
changement de paradigme peut toutefois être récemment noté (cf. la lutte contre les drogues ou les
programmes de réduction des facteurs d'obésité). L'analyse économique permet de conforter cette
évolution en contribuant à préciser les déterminants des comportements face aux risques. Elle aide
aussi à cerner les incitations que les individus peuvent avoir à adopter ou à valoriser des comportements préventifs. Une telle démarche permet de mieux comprendre la réactivité de la population aux
différents leviers mobilisables (informationnels, financiers, organisationnels), et sur cette base, de les
concevoir de façon à assurer leur plus grande efficacité sur les comportements et in fine leur plus
grand impact sanitaire.
• L'autre aspect sur lequel l'analyse économique se révèle essentielle est celui de l'évaluation et de la
sélection des programmes de prévention. Dans ce domaine, l'analyse économique offre plusieurs
outils (comme les analyses coût-efficacité et coût-bénéfices) permettant d'apprécier l'intérêt des programmes de prévention et de les classer en fonction de leurs retombées (immédiates et secondaires,
sanitaires - au sens d'amélioration de l'état de santé la population et/ou de son espérance de vie - et
économiques). Ces éléments constituent alors un fondement sur la base duquel il est possible d'alimenter le débat sur la définition de priorités en santé. Ils permettent en outre de renseigner sur un
usage optimal (en termes de bien-être) des ressources publiques allouées à la prévention. Le recours
à l'analyse économique, dont les fondements peuvent être contestés notamment sur un plan éthique,
permet d'enrichir le débat d'experts qui doit légitimement fonder la décision publique. En parallèle,
l'analyse économique permet d'éclairer une seconde problématique : celle du seuil de risque socialement acceptable par une collectivité et par suite du niveau d'investissement en prévention souhaitable. Ce point est essentiel pour la fixation d'objectifs dans la réduction des risques pour la santé.
1. Ce document a été élaboré sous la responsabilité de la Direction Générale du Trésor et de la Politique Économique et ne reflète pas nécessairement
la position du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie.
Sommaire
des derniers numéros parus
Avril 2005
n°70 • Quelle lecture faire de l’évolution récente des exportations françaises ? Antoine Deruennes
n°69 • Taux d’épargne : quel lien avec les indicateurs de confiance de l’Insee ? Abdenor Brahami
n°68 • Retour sur les évolutions récentes des dépenses en faveur du logement, Frédéric Gilli,
Bertrand Mourre
n°67 • Les anticipations des entrepreneurs industriels de la zone euro sont-elles «rationnelles» ?,
Emmanuel Michaux
Mars 2005
n°66 • La situation économique mondiale au printemps 2005, Pierre Beynet, Nathalie Fourcade
n°65 • Les déterminants des taux longs nominaux aux États-Unis et dans la zone euro,
Sébastien Hissler
n°64 • L'activité aux États-Unis est désormais aussi stable que dans la Zone Euro, CharlesAntoine Giuliani
n°63 • Les taux marginaux d'imposition : quelles évolutions depuis 1998 ? Ludivine Barnaud,
Layla Ricroch
Fév. 2005
n°62 • Effets macro-économiques à long terme d’un changement d’assiette de la taxe professionnelle, Emmanuel Bretin
n°61 • Les particularités de la reprise de 2003 en zone euro, Alexandre Espinoza,
Jean-Marie Fournier
Janv. 2005
n°60 • La conjoncture belge : révélatrice de la conjoncture de la zone euro ? Marceline Bodier,
Éric Dubois, Emmanuel Michaux
n°59 • Prix à la production et à la consommation dans le secteur agroalimentaire, Anna Lipschitz
n°58 • Affirmative action et discrimination positive, une synthèse des expériences américaine et
européennes, Denis Maguain
Déc. 2004
n°57 • L’existence d’un biais dans les anticipations de marché sur la politique monétaire en zone
euro, Sébastien Hissler
n°56 • Comment expliquer l’évolution récente du compte courant de la France, Élie Girard
Nov. 2004
n°55 • Les délocalisations d’activités tertiaires dans le monde et en France, Jérôme Letournel
n°54 • Les effets économiques du prix du pétrole sur les pays de l’OCDE, Nicolas Carnot, Caterine
Hagège
n°53 • Le marché pétrolier, Nicolas Carnot, Caterine Hagège
n°52 • Quelques données internationales sur le temps de travail, Jacques Delorme
2
La politique de prévention (des risques pour la santé)
a pour objectif d'améliorer l'état de santé de la population en
évitant l'apparition, le développement ou l'aggravation des maladies ou accidents (loi du 4 mars 2002 relative aux droits
des malades et à la qualité du système de santé). Elle
couvre un champ très large et mal délimité, allant de la
limitation des risques infectieux à la lutte contre les risques d'extension ou de complication d'une pathologie
(exemple des règles d'alimentation prescrites en cas
d'hypertension artérielle), en passant par la lutte contre les pratiques addictives (alcoolisme, tabagisme,
toxicomanie) et les conduites à risque (malnutrition,
insécurité routière) ou la réduction des risques liés au
développement urbain, technologique et industriel
(exemple des risques iatrogènes, alimentaires et de
pollution).
Les actions de prévention visent à modifier certains
comportements (individuels et collectifs) ou à améliorer l'environnement dans lequel vit la population.
Elles peuvent requérir un recours au système de santé
mais celui-ci n'est, en raison de la pluralité des déterminants de la santé, pas toujours nécessaire ni souhaitable. La lutte contre l'obésité en atteste : il est
aujourd'hui reconnu que les facteurs de malnutrition
sont avant tout d’origine comportementale et sociétale et qu’appréhender le problème sous son seul angle
médical est réducteur et inéfficace.
Sur ces différents types de prévention, l'analyse économique offre des outils opérationnels permettant
l'intégration de deux considérations importantes : la
recherche d'efficacité et d'efficience. Tout en reconnaissant les précautions et limites qu'elle impose, on
fait ici le point sur les principaux apports de l'analyse
économique. On traite d'abord de sa capacité à améliorer l'efficacité des programmes de prévention, sur la
base d'une meilleure compréhension des comportements individuels puis de son apport pour enrichir la
réflexion sur l'utilisation des ressources publiques
consacrées à la prévention : définition de priorités et
définition d'objectifs de santé publique.
1. Accroître l'efficacité des programmes de
prévention engagés : les enseignements
tirés de l'analyse des comportements
individuels
L'analyse économique a pour avantage de permettre
de caractériser les comportements individuels. Profitant des enseignements des autres sciences sociales
(comme la psychologie et la sociologie par exemple),
des évaluations, des retours d'expériences et des travaux de santé publique, elle permet de comprendre
quels sont les déterminants des comportements individuels face aux risques, quelles incitations permettent
de les modifier et de promouvoir des comportements
préventifs. Classiquement, on distingue trois leviers au
moyen desquels les individus peuvent être sensibilisés
aux questions de prévention : les leviers informationnels, financiers et organisationnels. A ceux-ci, il peut
être ajouté le levier réglementaire qui ne sera pas traité
ici.
1.1 L'efficacité des leviers informationnels
Le premier levier mobilisable par le décideur public
est la diffusion d'informations sur les risques que les
individus encourent ou font encourir aux autres.
L'analyse économique montre que pour être efficace,
il importe au préalable de comprendre les fondements
des comportements individuels et la façon dont
l'information fournie est susceptible de les affecter.
L'analyse économique met en évidence l'importance
des facteurs individuels et subjectifs dans la décision
d'adopter un comportement préventif ou risqué
[LOUBIERE et al. (2004)]. En particulier, elle montre
que la façon dont individus pondèrent les bénéfices et
risques peut rendre optimale, aux yeux de certains,
une prise de risque2. Plus précisément, elle rend
compte du poids prépondérant, dans la rationalité des
individus, des facteurs suivants : (i) le taux d'actualisation c'est-à-dire la préférence des individus pour le
présent, (ii) la perception qu'ils ont des risques encourus, de leurs conséquences sur leur "capital santé"
(perte d'état de santé, souffrance) et de leur caractère
de bien irrécupérable, (iii) l'idée qu'ils ont des effets
d'un comportement préventif et notamment du lien
entre effort de prévention et probabilité de survenance d'un risque. Ces éléments, à l'origine de comportements différenciés face aux risques, sont
influencés par les caractéristiques individuelles
comme l'âge, le niveau de connaissance ou d'éducation.
C'est cette compréhension des comportements face
aux risques qui donne aux campagnes de communication un sens et une raison d'être : modifier le calcul
individuel en faisant en sorte que l'information véhiculée soit suffisamment personnalisable pour agir sur
l'un de ces facteurs. De ce constat, il est possible de
tirer quatre enseignements importants.
• Le premier est que la compréhension comme la
modification des comportements individuels n'est
pas aisée. Une illustration en est la difficulté de
maîtriser l'étendue des éléments susceptibles d'agir
sur la perception des risques. Dans la lutte contre
le sida, GEOFFARD ET MECHOULAN (2004)
montrent, à partir d'une expérience naturelle en
Afrique, que le fait de proposer des tests de dépistage a entraîné une plus grande prise de risque de
la part de ceux qui y ont eu recours, attestant d'une
forme de substitution entre prévention primaire
(usage du préservatif) et prévention secondaire
(test de dépistage)3.
2. C'est typiquement le cas de la décision de fumer qui peut s'expliquer, en autres, par la sous-évaluation du coût de la dépendance et
des risques sanitaires encourus et la sur-pondération des plaisirs
présents.
3. Autre exemple : en matière de sécurité routière, il est parfois
avancé que les améliorations proposées par les constructeurs automobiles (airbag, ABS…) ont pu contribuer à renforcer le sentiment
de sécurité des conducteurs et induit une baisse du risque perçu.
3
• Le deuxième enseignement est qu'une meilleure
compréhension des comportements doit constituer un préalable à toute action de communication.
Cet aspect a longtemps été négligé (l'histoire de la
lutte contre la toxicomanie en atteste) et justifie le
changement de paradigme récemment observé
dans ce domaine, avec la révision du périmètre des
drogues notamment4.
• Le troisième enseignement est que l'efficacité des
signaux envoyés est conditionnée à la forme qu'ils
prennent. Aussi, pour atteindre les objectifs fixés, il
est indispensable de réfléchir :
– au type d'information véhiculée de façon à
cibler celle qui est la mieux à même d'influencer
les comportements du public visé (à titre
d'exemple, il est plus efficace de communiquer
auprès des jeunes sur l'impuissance sexuelle que
peut provoquer le tabagisme que sur les risques
de cancer du poumon),
– au degré de ciblage de la campagne (population
totale, frange ou sous-frange de la population),
au type d'acteurs-relais (secteur associatif, milieu
scolaire, professionnel, médical…) les mieux à
même de relayer la politique localement ou individuellement (la lutte contre l'obésité atteste par
exemple d'une récente remise en cause de la
nature des acteurs-relais mobilisés : alors que le
corps médical a longtemps été en première
ligne, la compréhension des comportements de
malnutrition et de leurs déterminants socio-culturels a conduit à valoriser le rôle de la famille,
des écoles, du milieu associatif et des collectivités territoriales ; cf. le Plan National Nutrition
Santé et l'expérience «Fleurbaix Laventie»),
– à l'inscription dans le temps de la prévention
menée (campagne ponctuelle ou discours récurrent et continu).
• Le quatrième enseignement est que l'hétérogénéité
des réactions implique, dans une logique d'efficacité, de combiner simultanément plusieurs types de
politiques informationnelles. ETILE (2004) montre par exemple que la lutte contre le tabagisme
auprès des adolescents gagne en efficacité dès lors
que l'on distingue deux publics : les fumeurs
"légers" et les fumeurs "plus endurcis". Les pre4. Dans la lutte contre la toxicomanie, les programmes ont longtemps
mis l'accent sur l'interdit et la loi et valorisé un discours unique,
négligeant de fait les déterminants du comportement d'addiction et
l'extrême diversité des situations. Depuis près de 10 ans, un changement de paradigme peut être observé. En attestent la récente révision du périmètre des drogues, incluant tabac et alcool, qui a permis
de placer le problème de la dépendance au cœur des dispositifs et
d'intégrer la question des polyconsommations, la diversification
des messages et le souci d'être le plus en conformité avec les expériences rencontrées ou encore, les programmes d'études engagés
dans le but de suivre au mieux les évolutions de consommation.
miers sont en effet davantage sensibles aux campagnes d'information médiatique alors que pour les
seconds, ce sont les discussions entre pairs (exemple des groupes de parole pour l'éducation à la
santé) qui se révèlent le plus efficace5.
1.2 L'efficacité des leviers financiers
Une autre façon d'amener un individu à modifier son
comportement consiste à accroître le coût budgétaire
que sa prise de risque lui fait individuellement supporter. Plusieurs moyens sont mobilisables, selon que l'on
cherche à rendre coûteux le comportement présent
(exemples des taxes sur le tabac ou l'alcool, des contraventions pour insécurité routière) ou les conséquences probables de celui-ci (conditionnement de la
prise en charge des soins au respect d'un comportement préventif). La démarche parallèle peut être
entreprise en associant à un comportement de prévention un gain monétaire (système de bonus), sa gratuité
(cas de vaccins, des programmes de prévention
bucco-dentaires chez l'enfant, des tests de dépistage),
ou la réduction de son coût immédiat (exemple de la
baisse du coût des produits de sevrage tabagique).
La littérature économique a largement étayé l'impact
des coûts directs sur les comportements, les études
précurseurs en ce domaine ayant été engagées dans le
domaine de la lutte contre le tabac. Il est couramment
avancé qu'une hausse de 1% du prix des cigarettes
entraîne une baisse de 0,4% de leur consommation
totale. Mais les hausses de prix du tabac ont également
un effet différencié sur les ménages selon leur niveau
de revenu et l'augmentation des taxes sur le tabac a des
conséquences redistributives non négligeables
[GEOFFARD (2003]. Parallèlement, son efficacité
varie selon les publics (elle semble sans effet sur le
tabagisme féminin et sur les adolescents les plus âgés)
et induit plus une réduction du nombre de fumeurs
que du nombre de cigarettes fumées par fumeur
[RECOURS (1999)]. Ce constat confirme la nécessité
d'associer à ce type de politique d'autres actions de
prévention.
L'impact des modalités de prise en charge est plus difficile à évaluer. D'un côté, on constate que la gratuité
des soins préventifs n'incite pas nécessairement à plus
de prévention (cf. l'étude du CREDES (2002) sur le
bilan bucco-dentaire mis en place par l'assurance
maladie à destination des adolescents). D'un autre
côté, les comportements semblent peu influencés par
les conditions de prise en charge des soins curatifs (la
consommation de tabac ne dépend pas au premier
chef du taux de prise en charge par l’assurance maladie
du cancer du poumon). Sur ce point, il semble toutefois qu'une couverture globale ait pour effet d'encourager les comportements de prévention primaire (de
type vaccination) et secondaire (de type dépistage) du
fait d'un plus grand recours au système de soins.
5. Pour le premier groupe, une campagne d'information médiatique
équivaut à une hausse de prix de 6% des cigarettes. Pour le second,
l'impact obtenu de discussions entre pairs est équivalent à une
hausse de prix de 25%.
4
La littérature met traditionnellement en avant le risque
moral ex ante induit par le fait de se savoir assuré et justifie, par ce biais, le recours à un mécanisme de franchise. Mais, BARDEY ET LESUR (2004) montrent
que ce risque est annihilé dès lors que les individus
accordent suffisamment d'importance à leur état de
santé et tiennent compte du caractère de bien irremplaçable du capital-santé et des coûts non monétaires
de la maladie. Lorsqu’aucune différentiation n'est faite
entre ce qui est de l'ordre du curatif et du préventif
(exemple d'une franchise par acte), l'impact d'un reste à
charge6 est en outre incertain. Il peut en effet tout
autant inciter à un comportement préventif (aller se
faire vacciner pour éviter de supporter les frais de
soins curatifs) que le limiter (éviter le coût des consultations nécessaires à la vaccination).
1.3 Les leviers organisationnels
L'efficacité d'une politique de prévention dépend,
souvent de façon fondamentale, de la capacité des
acteurs-relais à promouvoir les messages préventifs
véhiculés. De fait, les incitations mises en place pour
garantir l'implication et le professionnalisme de ces
acteurs sont essentielles7. Nous prenons l'exemple de
la sensibilisation des professionnels de santé aux questions de prévention pour rendre compte du type de
leviers organisationnels potentiellement mobilisables
et étudions l'influence des modalités d'exercice de la
médecine (mode de tarification et d'exercice, notamment) sur la façon dont les actes de prévention sont
valorisés auprès des patients. L'analyse économique
du comportement des offreurs de soins apporte plusieurs enseignements importants.
Le premier moyen d'action concerne les règles de responsabilité (civile ou pénale) imputables aux professionnels et établissements de santé. Parce qu'elles
modifient la prise de risque des professionnels, il est
possible, par leur intermédiaire, d'inciter ceux-ci à
davantage de prudence et donc de réduire les risques
d'accidents médicaux. Le degré de responsabilité fixé
doit être incitatif sans pour autant conduire à valoriser
une logique de médecine défensive qui conduirait les
professionnels à favoriser certaines pratiques uniquement pour échapper aux risques de poursuite.
Le deuxième levier concerne le mode de rémunération
des professionnels (paiement à l'acte versus capitation
ou salariat, budget global versus tarification à l'activité). Parce qu'elle influence l'allocation de leur temps
disponible entre soins curatifs et soins préventifs, la
tarification des médecins et des établissements doit
être considérée comme un élément essentiel des politiques de prévention dans lesquelles leur rôle est décisif. En médecine ambulatoire, FRANC ET LESUR
(2004) estiment que la capitation incite plus spontanément les professionnels à faire de la prévention. La rai6. remboursement partiel des actes.
7. Hormis la question de la mise en place d'incitations adéquates, se
pose aussi le problème de la coordination des acteurs-relais et de la
compatibilité de leurs incitations, notamment lorsque ceux-ci évoluent dans des sphères très différentes (cf. la pluralité des acteursrelais potentiellement mobilisables).
son tient au fait que les médecins internalisent les
effets à long terme des actes préventifs sur leur activité. En effet, s'ils anticipent qu'une attitude préventive peut conduire à réduire le nombre d'actes curatifs
par patient, promouvoir la prévention permet de
réduire le temps consacré à chaque patient, donc
d'augmenter le nombre de patients inscrits et par suite
leur revenu. Ce schéma peut toutefois être remis en
cause dans certains cas précis (exemple de pathologies
fortement consommatrices en temps de prévention).
Dans ces cas, les auteurs préconisent le versement
d'une rémunération spécifique à l'acte, à l'instar des
mesures entreprises au Royaume-Uni ou en Norvège.
Dans un système de paiement à l'acte, les actes curatifs
entrent en concurrence avec les actes préventifs.
Aussi, pour promouvoir la médecine préventive, il est
nécessaire de la rémunérer autant, sinon mieux, que la
médecine curative. Comme le Québec et le Danemark, la France s'est récemment dotée d'une "consultation médicale périodique de prévention" (loi de
santé publique).
Un autre moyen d'agir en faveur de la prévention consiste à façonner dans le sens voulu le contenu du contrat signé par les professionnels de santé avec
l'assureur (exemples de contrats reposant explicitement sur des contreparties en terme de qualité et de
respect de référentiels ou protocoles ou de la logique
de conventionnement sélectif). Le développement en
France des accords de bon usage des soins et des contrats de santé publique va dans ce sens.
Enfin, et de façon plus générale, la promotion de la
prévention passe par l'amélioration de la formation en
santé publique, par une meilleure répartition des compétences entre professionnels de santé, médecins et
infirmières notamment, à l'instar de ce qui s'est fait au
Royaume-Uni, au Québec ou en Finlande, et une prise
en charge et un suivi des patients rénovés dans le
cadre d'une médecine plus coordonnée où l'activité de
prévention est organisée ou dans le cadre de programmes de suivi spécifique des pathologies chroniques
dans lesquels le rôle du patient dans la gestion de sa
maladie est valorisé.
2. Garantir l'intégration des considérations
d'efficacité et d'efficience dans le choix
des programmes de prévention
L'autre champ sur lequel l'analyse économique se
révèle particulièrement utile est celui de l'évaluation et
de la sélection des programmes de prévention. Tant le
poids économique de ceux-ci que leurs enjeux sanitaires justifient que l'on cherche à comparer les retombées et que l'on s'intéresse à l'efficience avec laquelle
les ressources publiques sont utilisées dans ce
domaine.
Selon les comptes nationaux de la santé, les dépenses
de prévention s'élèvent en 2002 à 3,6Md€, soit 2,3%
de la dépense courante de santé. Cette estimation ne
recense toutefois qu'une partie des ressources consacrées à la prévention des risques pour la santé8. Cherchant à identifier au sein des consommations
5
répertoriées dans la Consommation de soins et biens
médicaux celles qui relèvent de la prévention, la
DREES et l'IRDES estiment à 7% de la dépense courante de santé soit 9 Mds€ en 1998 (11,8 Mds€ en
2003) les ressources publiques consacrées à la prévention [LE FUR et al. (2003)].
Face à ces montants, l'analyse économique permet de
clarifier des questions telles que : dans la sélection des
programmes de prévention, la priorité est-elle donnée
à ceux qui, à budget donné, sont les plus efficaces (au
sens où ils garantissent la plus grande amélioration de
l'état de santé de la population et/ou de son espérance
de vie) ? L'allocation des ressources entre les différents risques est-elle efficiente ou peut-on escompter
de plus grandes retombées en modifiant la répartition
du budget consacré à la prévention ? Le niveau
d'investissement consenti pour la prévention d'un risque correspond-il au seuil optimal que la collectivité
est prête à prendre à charge ?
2.1 Comparer l'efficacité des programmes de
prévention et réfléchir à l'allocation optimale des ressources consacrées à la prévention des risques pour la santé
Le principe de l'efficience allocative suppose de sélectionner les programmes de prévention qui, à coût
donné, garantissent la plus grande amélioration de
bien-être de la population. La démarche la plus courante consiste à raisonner en termes d'années de vie
sauvées. Parce que le bien-être retiré des années de vie
gagnées dépend de l'état de santé des patients concernés, on privilégie généralement un raisonnement en
terme d'années ajustées par la qualité ou QALYs (Quality
Adjusted Life Years)9. Les programmes concurrents
sont alors comparés sur la base de leur coût par année
de vie gagnée ajustée sur la qualité.
Un élément essentiel explique l'évolution des coûts
par QALY : la décroissance des rendements des innovations en santé (le ratio coût par QALY croît avec le
montant de ressources investies). Le coût d'une
démarche de prévention dépend en effet des mesures
qui ont été préalablement engagées pour prévenir un
risque. Lorsqu'aucune politique de prévention n'a été
menée, il peut être simple et peu coûteux de réduire
l'occurrence d'un risque. Mais, au fur et à mesure, la
8. Il s'agit des dépenses de prévention et de dépistage (médecine scolaire, du travail, vaccinations, dépistages, protection maternelle et
infantile), des programmes spécifiques de santé publique (pratiques
addictives, SIDA…) et des missions de santé publique (prévention
et veille sanitaire, campagnes d'information et d'éducation sanitaire…). En revanche, les dépenses annexes (de gestion, de recherche, de fonctionnement…), les actions de prévention financées par
d'autres ministères que celui de la santé et surtout, les dépenses
couvertes par l'assurance maladie et qui s'apparentent à des actes de
prévention (exemple des actes préventifs réalisés par les professionnels de santé, de la prise en charge des facteurs à risques…) ne
sont pas comptabilisées.
9. La démarche consiste à assigner à chaque année de vie gagnée un
coefficient qui reflète sa qualité. Ce coefficient est compris entre 0,
qui correspond à l'état «mort», et 1 qui correspond à un état de
bonne santé. La comparaison des projets se fait alors sur la base de
la somme des années de vie gagnées pondérées par ces coefficients.
réduction de ce risque nécessite le recours à des
méthodes de plus en plus coûteuses et de moins en
moins efficaces. C'est le principe de la loi des rendements décroissants que GOLLIER (2004) illustre à
partir de l'exemple du dépistage des virus du sida et de
l'hépatite C dans les lots de sang transfusionnels : c'est
parce que les tests déjà existants sont efficaces et permettent d'éliminer la plupart des lots contaminés qu'il
est si coûteux (cf. tableau précédent) de réduire encore
le risque résiduel.
Tableau 1 : exemples de coût par année de vie
gagnée ajustée sur la qualité (d'après études
anglaises et américaines)
Prévention du tabagisme par le généraliste
381 €
Stimulation cardiaque pour bloc auriculo-ventriculaire
1 524 €
Prothèse de la hanche
1 677 €
Pontage coronarien pour angine de poitrine sévère
2 287 €
Greffe du rein
6 708 €
Dépistage mammographique cancer du sein
(femme > 50 ans)
7 775 €
Transplantation cardiaque
11 129 €
Dialyse en centre
30 490 €
Test de dépistage génomique viral des lots de sang
60 000 €
Source : MOATTI (1996)
L'élaboration d'une table de QALYs permet de définir
des priorités en santé, sur la base d'un principe d'efficience allocative. Précisément, à budget donné, l'allocation optimale des ressources est telle qu'elle égalise
le coût marginal de l'année de vie gagnée ajustée par la
qualité de tous les programmes de prévention engagés, quel que soit le secteur considéré (santé, transports, environnement…). Si tel n'est pas le cas, il est
possible d'augmenter le nombre d'années de vie globalement sauvées en réallouant une partie du budget
vers les programmes qui enregistrent les coûts par
QALY les plus faibles.
La hiérarchisation des programmes qui en découle
n'est toutefois pas sans poser de problèmes. L'expérience de l'Oregon (Cf. encadré) témoigne des limites
d'une approche trop théorique de la question de la
fixation des priorités en santé. Parce que son objectif
de fournir les moyens de comprendre comment maximiser un nombre de vies ou d'années de vie, l'analyse
coût-efficacité induit un certain nombres de biais (en
favorisant, par exemple, les programmes à coût faible
et probabilité de succès élevée) et néglige de multiples
aspects (comme la dimension individuelle ou le caractère potentiellement redistributif des programmes de
prévention10).
10. Il est en effet implicitement supposé qu'une année de vie gagnée
ajustée par la qualité est la même pour tous, quelle que soit la personne qui en bénéficie.
6
Encadré : l'expérience de l'Oregon
A la fin des années 80, l'Etat de l'Oregon décide d'étendre au plus grand nombre son système d'assurance publique (programme Medicaid). Dans un contexte de contrainte budgétaire, le prix à payer pour cette extension est la redéfinition du
périmètre de soins pris en charge c'est-à-dire la limitation de la couverture offerte aux services jugés prioritaires. Dans cette
optique, une commission (Health Services Commission) est chargée de classer par ordre de priorité les actes médicaux susceptibles d'être pris en charge et de fixer ceux qu'il est légitime d'intégrer au panier offert, étant donnés le budget de l'année
et l'objectif d'extension fixé. L'établissement de cet ordre de priorité a soulevé de nombreuses difficultés. Initialement, la
rationalisation des choix s'est appuyée sur une logique de comparaison du ratio coût brut (c'est-à-dire qui ne tient pas
compte des coûts suscités par l'absence de traitement) sur résultat (amélioration de la qualité de vie permise par le traitement sur 5 ans). L'ordre de priorité obtenu a été fortement critiqué, notamment parce qu'il ne tenait absolument pas
compte de la gravité des affections (à titre d'exemple, le traitement de la migraine a été jugé prioritaire par rapport celui du
Sida). D'autres critères ont alors été valorisés, comme la capacité d'un traitement à éviter le décès ou les valeurs et choix de
la société, régulièrement consultée par voie d'enquêtes.
Ainsi, l'objectif d'efficience peut entrer en contradiction avec le principe de justice retenu. Le cas de la
sélection des patients susceptibles de bénéficier d'une
greffe atteste de ce conflit : faut-il donner la priorité
aux patients dont le pronostic de succès de la greffe
est le meilleur (logique de maximisation du ratio coûtefficacité) ou, comme c'est le cas en France, aux
patients qui en ont le plus besoin c'est-à-dire dont
l'état de santé est le plus dégradé (principe d'équité
égalitariste à la Rawls dont se rapproche l'éthique hippocratique11) ?
Raisonner sur le nombre d'années de vies sauvées
pour juger de l'opportunité d'un programme de prévention peut toutefois parfois se révéler insuffisant ou
inadapté (cas de la lutte contre la pollution où la définition de QALYs est difficile) pour juger de l'opportunité d'un programme de prévention. Dans ce cas, il
sera préférable de raisonner sur les coûts et bénéfices
monétaires induits par la prévention12.
Une telle démarche suppose de monétiser l'amélioration de l'espérance de vie permise par un programme
et de rompre avec le principe d'une valeur associée à
une année de vie supplémentaire identique pour tous.
Dit autrement, elle suppose de parvenir à allouer une
valeur monétaire à une année de vie supplémentaire
ou au fait d’éviter un décès et, dans cette perspective,
plusieurs méthodes sont mobilisables :
• la méthode des préférences révélées qui repose
sur l'observation (démarche ex post) des comportements des individus lorsqu'ils sont amenés à faire
des choix impliquant un risque de décès et une
somme monétaire (exemples du salaire accepté
pour exercer un métier dangereux ou de l'achat
d'un purificateur d'eau) ;
• la méthode des préférences déclarées qui consiste à interroger les individus (démarche ex ante)
11. Cf. MOATTI J.P. (1996), «Priorités de santé publique, les dangers
d'une dérive utilitariste», Actualité et dossier en santé publique, 17,
38-40.
12. En matière environnementale, parvenir à chiffrer les coûts et retombées d'un programme est essentiel. Généralement en effet, ne donner aucune valeur chiffrée à une politique revient à considérer
qu'elle n'est d'aucune utilité. De par les indicateurs qu'il offre, le
recours à l'analyse économique est donc important pour sensibiliser
décideur et opinion publique. Il permet en outre de traiter de la
question de l'évaluation des compensations financières.
sur leur propension à payer pour éviter ou obtenir
certaines conséquences sur leur bien-être. Le principe consiste à examiner la réaction d'un échantillon représentatif (variation de leur consentement
à payer qui reflète la variation de leur utilité) à
divers scenarii théoriques impliquant des risques
différents (principe d'évaluation contingente) ;
• le calcul actuariel de la perte de revenu occasionnée par un décès ou la réduction de l'espérance
de vie : la valeur des années de vie gagnées est
appréciée par la somme actualisée des revenus
qu'un individu aurait accumulés durant sa durée de
vie espérée.
L'analyse coût/bénéfices repose en outre sur l'idée
qu'il est nécessaire de tenir compte des externalités
induites par un programme pour juger de son opportunité. Cette démarche présente l'avantage de permettre l'intégration d'un plus grande nombre de
considérations dans la sélection des programmes de
prévention. Le débat sur la diffusion ou non des médicaments antirétroviraux en Afrique en est un exemple
emblématique. L’idée couramment véhiculée est que,
compte-tenu du coût des traitements, il est plus efficace de traiter les infections opportunistes13 que de
fournir des antirétroviraux à la population contaminée. MOATTI et al (2001)14 montrent au contraire à
l’aide d’une analyse coût-bénéfice qu’il peut être économiquement légitime de favoriser l’accès des pays du
Sud aux traitements antirétroviraux dès lors que l’on
tient compte de l'ensemble des bénéfices qui y sont
associés (comme les économies générées, pour ces
pays, par le retour à une activité professionnelle et
l'allongement de l'espérance de vie)15.
Le recensement des bénéfices induits par un programmes de prévention varie toutefois d'une étude à l'autre.
Certaines intègrent par exemple le manque à gagner
pour la prévention d'autres risques, d'autres les exter13. Il s'agit des infections auxquelles sont particulièrement sensibles
les personnes ayant un système immunitaire endommagé.
14. MOATTI J.P., LUCCHINI S. ET SOUBEYRAND Y. (2001),
«Quel est le prix d'une vie gagnée ?», Biofutur, 210, 34-39.
15. Un certain nombre de conditions sont toutefois nécessaires : la
diminution continue des prix des antirétroviraux via la mise en concurrence avec les génériques, la mise en place d'un usage contrôlé,
permettant d'éviter les inconvénients majeurs de ces traitements
(prescriptions inadéquates, risque de multirésistances, accès inégal…) et la réorganisation des filières de soins.
7
nalités négatives induites (risques de dommage occasionnés par la généralisation d'une vaccination,
dispositifs de compensation mis en place dans le cas
d'une politique environnementale). Ces différences
rendent les comparaisons difficiles, voire les conclusions de certaines analyses contestables. Un certain
nombre de difficultés, maintes fois soulignées dans la
littérature, sont en outre associés à l'analyse coûtbénéfices :
• premièrement, l'identification des bénéfices se
heurte à l'absence d'études ou de consensus scientifiques (incertitudes et controverses sur la probabilité de survenance d'un risque, sur ses
conséquences, sur les méthodes susceptibles de
l'enrayer et leurs effets…) ;
• deuxièmement, les résultats obtenus sont conditionnés à des choix méthodologiques tels que les
options choisies dans la prise en compte du long
terme (actualisation des bénéfices et coûts futurs,
anticipation des besoins, intégration de la durée de
vie des programmes, de leur temps de latence…) ;
• troisièmement, chacune des méthodes mobilisables pour caractériser la valeur d'une vie humaine
présente de fortes limites méthodologiques. Les
résultats de la méthode des préférences déclarées,
qui est le plus couramment utilisée, peuvent être
par exemple contestés en raison des multiples biais
qui lui sont systématiquement imputables16. Ces
limites sont aussi d’ordre éthique : la méthode
actuarielle conduit, par exemple, à allouer une
valeur différente à la vie d'un individu qu'à celle
d'un autre.
2.2 Définir le seuil optimal d'investissement en
prévention
La décroissance des rendements escomptés (cf. supra)
conduit à s'interroger sur les limites que l'on doit donner à l'investissement consenti. Même s'il est parfois
techniquement réalisable (exemple : faire boire de
l'eau minérale aux populations dont le système de distribution d'eau risque d'être polluée), le risque zéro
n'est en général pas économiquement désirable. Un
certain nombre de comportements individuels et de
mesures publiques le confirme (dans le traitement de
la listéria par exemple, il a été préféré un taux maximum sortie d'usine, avec obligation d'autocontrôle par
les opérateurs, plutôt que le retrait des produits poten16. Non représentativité de l'échantillon, mauvaise spécification des
scénarii et sensibilité des réponses à celle-ci, difficultés d'agrégation des consentements à payer, biais liés à la méthode de révélation (formulation des enquêteurs, influence de ceux-ci sur les
préférences énoncées…) etc. [GENIAUX ET LUCCHINI]. Plus
fondamentalement, se pose la question de la valeur qui peut être
accordée aux réponses quand il s'agit de donner une valeur monétaire à quelque chose de non marchand (cas d'un programme de
lutte contre la pollution).
tiellement dangereux, comme les rillettes ou les fromages au lait cru).
Dans ce cadre, il est essentiel de s'interroger sur le
niveau de risque acceptable (ou maximal) pour la collectivité. Ce niveau reflète nécessairement un choix de
société. Pour contribuer à sa définition, les économistes ont cherché à déterminer quel était le maximum de
ressources devant être mis en place pour sauver une
vie (ce maximum reflète la valeur que l'on octroie à
une vie humaine) et, dans cette optique, ils ont eu
recours aux méthodes précédemment présentées.
Dans ce domaine, le secteur de la sécurité routière est
précurseur. Ainsi, le rapport Boiteux évalue à un million et demi d'euros le coût maximum pour éviter une
mort supplémentaire, c'est-à-dire la somme jusqu'à
laquelle on peut aller pour sauver une personne de
plus sur la route [BOITEUX (2002)].
L'analyse économique permet donc de fixer une
valeur seuil au coût marginal d'un programme de prévention. Le niveau d'investissement optimal se déduit
de l'égalisation du coût marginal de ce programme à
son bénéfice marginal. L'enjeu d'une telle démarche
mérite d'être souligné : elle permet de mettre à plat la
question de la fixation d'objectifs dans la réduction
des risques pour la santé.
Dans le champ de la sélection des programmes de prévention, l'apport de l'analyse économique tient donc à
sa capacité à rendre plus exhaustive (cas de la définition de priorités) et plus transparente (cas de la fixation d'objectifs) la prise de décision publique.
Toutefois, les précautions, tant méthodologiques
qu'éthiques, qu'impose la mobilisation de ce type
d'étude, nécessitent de considérer le recours à l'expertise économique comme un élément important mais
qui ne peut en aucun cas supplanter un débat public
(confrontation d'experts et choix de société) sur ces
considérations. A ce titre, la règle de décision préconisée par MOATTI (2004)17 peut résumer la contribution de l'analyse économique : garantir la sélection des
programmes de prévention assurément efficaces et la
radiation de ceux assurément inefficaces.
Cécile MALGUID
Directeur de la Publication : Jean-Luc TAVERNIER
Rédacteur en chef : Philippe GUDIN DE VALLERIN
Mise en page : Maryse DOS SANTOS
(01.44.87.18.51)
17. Pour MOATTI (2004) les programmes pour lesquels le coût par
année de vie gagnée est inférieur à deux fois le PNB par tête (soit
50 000€ en France) devraient être systématiquement acceptés. A
l'inverse, ceux programmes pour lesquels il est supérieur de 6 à 8
fois le PNB par tête devraient être systématiquement refusés. Enfin,
les programmes pour lesquels il est compris entre ces deux bornes
méritent discussion.
8
Téléchargement