Manuel d’économie critique du Monde Diplomatique Compte rendu de lecture sur « la monnaie » A quoi sert la monnaie ? Un moyen de paiement (pour échanger des marchandises) Sert de réserve de valeur ( on la conserve et elle demeure immédiatement échangeable). Fonction sociale et politique c’est un bien public en facilitant les échanges elle rend des services à toute la communauté . Elle régule les relations sociales, permet d’acheter le temps des autres… La monnaie a un rôle économique et sociétale : Créer davantage de monnaie, peut réduire les taux d’intérêt et donc doper l’investissement, la croissance. C’est un outil. Elle rend des services collectifs qui profitent à tous les membres de la communauté. Ce qui implique qu’elle ne doit pas être régulée juste par les forces du marché et mais aussi par les autorités publiques représentant l’intérêt de la communauté. C’est un levier politique fondamental. Depuis la création de l’euro, la banque centrale pilote seule la politique monétaire et les Etats se sont privés de la possibilité de mener toute politique monétaire autonome. La BCE n’a qu’un objectif, assurer la stabilité des prix dans la zone euro, définie à partir du taux d’inflation. (Alors que d’autres banques centrales ont un double objectif : lutter contre l’inflation et le chômage ) Aux USA, il y a des mécanismes de redistribution budgétaire, permettant des transferts des régions riches vers les régions pauvres. La zone euro n’est pas une Zone Monétaire Optimale (pas d’union politique, pas de budget commun , pas de politique fiscale commune… ). Cela n’existe pas en Europe du coup l’euro impose des « dévaluations internes » c’est à dire l’austérité aux Etats en déficit. Une monnaie forte facilite les importations (on achète pas cher à l’étranger, ) une monnaie faible elle dope les exportations (c’est pas cher pour les étrangers d’acheter nos produits.). Les devises des pays en voie de développement se trouvent pénalisées par le fait que la majorité des capitaux privés étrangers proviennent des pays avancés. S’il y en a beaucoup, cela fait surévaluer la monnaie et donc les exportations du pays diminuent. Comme les investisseurs attendent un retour sur investissement, en cas de crise provoquée par la hausse de la devise ) ils peuvent retirer brutalement leur argent ce qui déstabilise durement le pays. Le paradoxe : la malédiction des ressources naturelles En 1959 on découvre au Pays Bas le plus grand gisement de gaz naturel du monde. 2 820 milliards de m³. Le gouvernement incite particuliers et entreprises à se tourner vers cette manne. Et ils exportent très vite 3 milliards de m3 par an (la consommation de la Suisse en 2010) . Les exportations se développent et les devises affluent ! Du coup le florin prend bcp de valeur. Donc logiquement, les autres secteurs perdent en compétitivité et le secteur industriel ne peut plus exporter et sa production diminue. Dans le même temps, tous les capitaux disponibles s’investissent dans le gaz( ça rapporte!) et pas dans le reste de l’économie. Donc le reste de l’économie ralentit et les importations augmentent avec une monnaie forte…) Rapidement les richesses dégagées par le gaz ne sont plus que consacrées à l’achat de ce que le pays consomme, mais ne produit plus. Et assez vite les Pays Bas connaissent d’importantes difficultés économiques alors que la production de gaz bat des records (81 milliards de m³ de gaz en 1976). On peut aussi penser au Vénézuela et à son pétrole en immense difficulté avec la baisse des cours… Quand la monnaie augmente, cela augmente le pouvoir d’achat des citoyens, ce qui incite à acheter à l’étranger, ce qui déséquilibre la balance commerciale. De la monnaie unique à la monnaie commune L’Euro n’a pas tenu ses promesses, mais le retour aux monnaies nationales les exposent à la spéculation… Pour que l’euro fonctionne il aurait fallu que les économies européennes convergent, c a d fonctionnent ensemble et de la même façon. Or il y a des pays à excédents (l’Allemagne ) et des pays à déficit (France). Les pays ne pouvant plus jouer sur le taux de leur monnaie on chercher à renouer avec la) compétitivité en baissant le coût du travail et avec l’austérité. En faisant payer la crise aux salariés. Une autre piste présenté par Keynes en 1944 (avec le bancor): une monnaie commune. Le mécanisme : comme dans le serpent monétaire, les monnaies nationales européennes seraient définies par rapport à l’euro par un taux de change fixe mais ajustable. La convertibilité de monnaies européennes entre elles ne s’effectuera pas sur le marché des changes mais au seul guichet de la BCE, au taux de change en vigueur. Pour convertir par ex le franc en dollar, il faudrait d’abord changer le franc en Euro puis l’euro en dollar. (via le marché des changes ) (ce qui protège les monnaies nationales de la spéculation qui touche moins l’euro ). Pour les variations entre monnaies européennes il peut y avoir des règles hors marché Un pays trop en déficit pourrait baisser sa monnaie mais un pays trop en excédent devrait réévaluer sa monnaie.(donc à soutenir les importations ). On garde une monnaie commune, mais on redonne aux Etats un pouvoir sur leur monnaie, sur une politique monétaire dont on s’est privé avec l’euro ! Article paru dans Libération mars 2017 Une autre piste : Sortir de l’austérité sans sortir de l’euro… grâce à la monnaie fiscale complémentaire. Par Thomas Coutrot , Dominique Plihon , Wojtek Kalinowski , Bruno Théret , Gaël Giraud , Vincent Gayon , JeanMichel Servet , Jérôme Blanc , Marie Fare et Benjamin Lemoine — Introduire des liquidités dans une économie en crise grâce à une monnaie complémentaire, adossée aux recettes fiscales à venir, permettrait d’imaginer d’autres politiques sans pour autant remettre en question la monnaie commune. Cela permettrait une stabilisation de la zone euro. Une autre stratégie qui, décidée par un Etat, lui permettrait de sortir d’une politique d’austérité sans remettre en cause l’unité de la zone euro : injecter de la liquidité par l’émission d’une monnaie fiscale complémentaire à l’euro. Dans cette stratégie, l’euro est conservé en tant que monnaie commune de cours légal dans tous les Etats membres, mais est complété par un moyen de paiement national constitué de bons du Trésor de faible dénomination de5 à 50 euros et de durée limitée mais renouvelable. Adossés comme toute dette publique aux recettes fiscales à venir, ces bons seraient libellés en eurofranc, et maintenus à parité avec l’euro sans pour autant être convertibles sur les marchés des changes. Il ne s’agit donc pas d’émettre une monnaie ayant cours légal, mais de proposer des titres de crédit destinés au règlement des salaires des fonctionnaires, des prestations sociales et des achats publics, dépenses qui sont de facto de la dette publique de court terme. Ils seraient réciproquement acceptés en paiement des impôts et, grâce à cette dernière garantie, pourraient circuler en tant que moyens de paiement au niveau national. Face aux politiques d’austérité prônées actuellement, il y a urgence à émettre ce type de monnaie partout où la monnaie unique conduit à la récession, au chômage de masse, à la montée de l’insécurité sociale et à l’abandon des investissements de long terme indispensables à la transition écologique. Mais le couple monnaie commune monnaie fiscale complémentaire n’est pas seulement une solution d’urgence ; c’est aussi potentiellement un outil durable de stabilisation monétaire de la zone euro. En effet, la réduction de la dette publique par autofinancement de la dette flottante et l’amélioration du solde des échanges extérieurs par réduction des importations (la circulation géographiquement limitée de l’eurofranc inciterait à relocaliser la production) réduisent la dépendance extérieure des Etats à l’égard tant de la finance internationale que des marchés extérieurs qui sont la source principale de son instabilité. Cette forme de liquidité émise par les Etats sans passer par les banques n’est pas nouvelle, et sa combinaison avec une monnaie commune dans un système politique de type fédéral a été expérimentée avec succès dans les années 30 aux EtatsUnis et, plus récemment, entre 1984 et 2003 en Argentine. Ces expériences montrent que, sous certaines conditions, un tel dispositif monétaire remplit son office de réduction de la dette publique et de redynamisation de l’économie locale, sans créer de tension inflationniste ni de décrochage entre la monnaie locale et la monnaie centrale .