Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Interruption des circuits alimentés en courant continu par Yves PELENC Directeur Scientifique honoraire Merlin Gerin Ancien Professeur à l’Institut National Polytechnique de Grenoble Réédition actualisée de l’article paru en 1988 1. Problématique de l’interruption des courants continus ............................................................................ 2. Modélisation du comportement dynamique de l’arc..................... — 3. Pointe d’extinction .................................................................................. — 9 4. Temps de coupure.................................................................................... — 11 5. Énergie de coupure.................................................................................. — 12 6. Utilisation d’un condensateur en parallèle sur l’arc...................... — 13 7. Avenir du transport en courant continu à haute tension............. — 16 D 4 700 - 2 6 ’utilisation du courant continu reste pour le moment peu répandue en haute tension. Toutefois, l’étude des phénomènes liés à son interruption constitue un préalable dont les vertus pédagogiques sont irremplaçables pour aborder, dans les meilleures conditions, la compréhension des problèmes de coupure en courant alternatif. L’appareillage électrique d’interruption à courant alternatif à haute tension est traité dans les fascicules [D 4 690] à [D 4 698]. L Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 1 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ 1. Problématique de l’interruption des courants continus R L ∞ + Interrupteur E 0 Énergie de coupure : 1.1 Interruption d’un courant continu tE ri 2 dt = 0 Examinons le cas, apparemment le plus simple, d’un circuit inductif (R, L) alimenté en courant continu (figure 1 a). Pour réaliser l’interruption du courant parcourant ce circuit, il faut et il suffit que la résistance r de l’interrupteur, supposée initialement nulle, croisse et devienne infinie (figure 1 b) ou, en d’autres termes, que sa conductance diminue, puis s’annule. Lorsque cette condition unique est réalisée, l’appareil, devenu isolant, n’est plus traversé par aucun courant. ■ La loi de variation de la résistance de l’interrupteur peut, à première vue, être quelconque. Toutefois, le raisonnement et le calcul montrent que l’énergie dépensée sous forme d’effet Joule dans l’interrupteur au cours de la coupure est d’autant plus faible que la variation de la résistance de ce dernier est plus rapide. On a donc intérêt à agir dans ce sens. tE (E – Ri ) i dt – 0 Li di I 0 - la première intégrale dépend du temps tE de coupure - la seconde intégrale représente l'énergie électromagnétique : 0 Li di = I 1 L I2 2 a circuit inductif : schéma i i I 0 t r r Cependant, même si cette variation est infiniment rapide, on constate qu’il faut néanmoins dépenser dans l’interrupteur la totalité de l’énergie électromagnétique emmagasinée initialement dans 1 l’inductance propre du circuit, soit --- LI 2 . 2 0 t Cette constatation logique est absolument essentielle dans les problèmes d’interruption des courants continus ; un critère minimal de bon fonctionnement est donc que l’interrupteur doit pouvoir absorber sans dommage cette énergie, qui est souvent considérable. ■ Ce critère, s’il est primordial, n’est pas le seul. Il en existe au moins un autre d’importance. Si, en effet, la variation de résistance est infiniment rapide, celle du courant l’est également et, en conséquence, la force électromotrice induite (L di/dt) dans l’inductance propre du circuit devient infiniment grande. Cette surtension illimitée est évidemment inadmissible. ■ Il faut évidemment se fixer une limite à ne pas dépasser pour la valeur de la surtension. Une fois cette limite définie, la loi de variation de la résistance se trouve imposée et le problème est théoriquement résolu. L’énergie dépensée au cours de la coupure est alors supérieure à l’énergie électromagnétique du circuit, sans dépasser généralement le double de cette valeur. Dans la pratique, la résistance variable r est constituée par un arc électrique. Les semi-conducteurs de puissance, de type transistor ou GTO, ne peuvent être utilisés actuellement, dans des conditions économiques raisonnables, que sur des circuits de faible puissance, n’excédant pas quelques centaines de kilowatts. Figure 1 – Interruption d’un courant continu u 3 2 1 0 i 3 > 2 > 1 Figure 2 – Caractéristiques statiques d’arc pour trois longueurs différentes d’arc — conditions de fonctionnement auxquelles est soumis cet arc (soufflage, turbulence, déplacement sous l’effet de champs magnétiques, etc.) ; — longueur de l’arc, etc. 1.2 Caractéristique d’arc Nous savons que, si l’on porte sur un diagramme la chute de tension u dans un arc en fonction du courant i qui le traverse (supposé stabilisé ou lentement variable), on obtient une caractéristique statique qui dépend de tous les paramètres déterminant le fonctionnement de l’arc en question : — nature et forme des électrodes ; — nature et pression du gaz plasmagène dans lequel l’arc se développe ; D 4 700 − 2 b variation des paramètres La caractéristique statique présente généralement une allure hyperbolique, la tension passant parfois par un minimum puis croissant ensuite légèrement en fonction du courant (figure 2). Si l’on ne fait varier que la longueur de l’arc, on obtient toute une famille de caractéristiques, chacune d’elles correspondant à une longueur donnée. Pour un arc libre brûlant dans l’air à la pression atmosphérique, Herta Ayrton a proposé, à la fin du XIXe siècle, une formule empiri- Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU que célèbre donnant grossièrement la chute de tension u en fonction du courant i et de la longueur de l’arc : P0 C + D u = A + B + ------------------ = U 0 + -----i i R i + Dans une représentation hyperbolique de la caractéristique, U0 constitue le seuil de tension d’arc et P0 la partie constante de la puissance de refroidissement. a schéma Exemple : si l’arc est amorcé horizontalement dans l’air entre deux électrodes en cuivre de 3 mm de diamètre, les paramètres de cette relation ont sensiblement pour valeurs : A = 30 V ; B = 10 V/cm ; C = 10 VA ; D = 30 VA/cm u Cette formule est acceptable dans une plage de courant limitée à quelques centaines d’ampères. E – B – ∆u + ∆u E– C’est le cas le plus général rencontré en courant continu, en particulier lors de l’apparition d’un court-circuit. di E – Ri – L ------ – u = 0 dt (2) di L ------ = ( E – Ri ) – u = ∆u dt (3) Ri IA 0 Durant l’interruption, la loi d’Ohm donne, à chaque instant, une relation entre les diverses grandeurs en présence (figure 3) : u E – Ri E (1) 1.3 Interruption d’un circuit résistant et inductif L ' A ∆u – E R i b caractéristique statique Figure 3 – Coupure d’un circuit résistant et inductif u d’où : E– On constate que le signe de la chute inductive ∆u définit le sens de variation du courant : si ∆u est positif, i augmente et inversement. Dans un plan (u, i ), la droite E − Ri est dénommée droite de charge. ■ Si nous supposons que la tension d’arc est donnée, pour chaque valeur de i, par la caractéristique statique, nous constatons que, tant que l’arc est suffisamment court (longueur ) pour que sa caractéristique présente des points d’intersection (A et B) avec la droite de charge, il existe un point de fonctionnement stable A et la coupure ne peut se réaliser. En effet, au point A, ∆u est négatif pour les valeurs de i supérieures à IA, mais il devient positif lorsque i est inférieur à IA. Le courant va donc se stabiliser à IA. On en conclut immédiatement que l’interruption ne peut pas s’achever tant que l’arc n’est pas suffisamment développé pour que sa caractéristique soit tout entière située au-dessus de la droite de charge E − Ri. Lorsque cette condition se trouve réalisée (longueur ′ ), ∆u est négatif pour toutes les valeurs du courant et ce dernier ne peut que décroître jusqu’à s’annuler. Il existe donc, en courant continu, une caractéristique minimale d’arc au-dessous de laquelle l’interruption ne peut pas être obtenue (si le circuit ou l’appareil ne comporte aucun artifice permettant de faciliter la coupure). Notons que cette caractéristique minimale ne dépend que de la force électromotrice E et de la résistance R, et non de l’inductance L, qui joue en revanche un rôle fondamental vis-à-vis du temps de coupure et de l’énergie dépensée dans l’arc. U0 E Ri I 0 Figure 4 – Caractéristique statique d’un arc de forte puissance ■ Dans la réalité, la forme hyperbolique de la caractéristique n’est véritablement significative qu’au-dessous d’une centaine d’ampères, pour un arc fonctionnant dans l’air atmosphérique. Il en résulte que, aux fortes intensités de courant, on observe plutôt une sorte de palier de tension. ● Si l’on suppose que la caractéristique se résume pour l’essentiel (cf. relation (1)) à : u = U0 le problème de la coupure d’un courant continu est relativement simple : le palier de tension d’arc U0 doit être égal ou supérieur à la tension E du générateur, sinon il n’y a pas coupure (figure 4). ● Si nous supposons, en revanche, que la caractéristique statique peut être assimilée à une simple hyperbole : ui = P0 nous constatons que la caractéristique minimale correspond à une puissance de refroidissement constante P0 égale au quart de la Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 i La puissance de refroidissement peut se représenter par : P – P 0 + U 0i D 4 700 − 3 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ u;i u PE U0 E E E– i E/2 0 u I Ri P0 = 0,25 EI I/2 I 0 i Figure 5 – Puissance minimale de coupure pour une caractéristique statique hyperbolique puissance apparente E I du circuit, c’est-à-dire au produit de la tension E du générateur par le courant établi I (figure 5) : t Temps d'allongement Au début de la coupure, on provoque un allongement rapide de l'arc jusqu'à une longueur telle que la tension d'arc atteigne un palier U0 légèrement supérieur à E. Cette longueur autorise la coupure sans entraîner de surtension excessive. Une légère surtension dite pointe d'extinction (PE) apparaît lorsque le courant approche de zéro. Figure 6 – Coupure avec allongement limité de l’arc P0 = 0,25 E I (4) En courant alternatif, les puissances de refroidissement nécessaires (et, par conséquent, les énergies de coupure) sont comparativement beaucoup plus faibles. u ui = P Au-delà de cette caractéristique minimale, l’interruption est d’autant plus rapide que l’écart ∆u entre la tension d’arc et la droite E − Ri est plus grand et que l’inductance propre L du circuit est plus faible, puisque : ● 2E E di ∆u ------ = ------dt L 1.4 Surtensions de coupure Ri I 0 Nous avons vu au paragraphe 1.1 qu’une coupure trop rapide entraînait automatiquement une surtension L di/dt, qui risquait d’être dangereuse pour le matériel et le personnel. Dans la pratique on s’efforce de provoquer, au début de la coupure, un allongement aussi rapide que possible de l’arc. Tant que cette longueur est insuffisante, la caractéristique statique coupe la droite E − Ri. Lorsque la longueur d’arc est devenue suffisante pour autoriser la coupure, on maintient constante cette longueur d’arc pour limiter la surtension (figure 6). On constate en effet que, pour une large plage de valeurs du courant et pour une longueur d’arc donnée, la tension d’arc (figure 4) reste sensiblement constante, sauf lorsque le courant devient très faible. Peu avant l’annulation du courant, on observe effectivement une surtension dénommée pointe d’extinction, dont la valeur est d’autant plus grande que l’allongement de l’arc est plus important (figure 7). On a donc intérêt à concevoir la chambre de coupure de l’appareil de telle sorte que la longueur maximale de l’arc soit imposée, autorisant la coupure mais limitant la surtension. C’est sur ces principes que sont réalisés les disjoncteurs BT ainsi que les disjoncteurs HT utilisés pour la traction électrique à courant continu en 1 500 V. D 4 700 − 4 E– Si l'arc ne possédait aucune inertie thermique, la caractéristique dynamique réelle, lors d'une coupure, serait confondue avec la caractéristique statique (en trait mixte) et, à l'approche du zéro de courant, on observerait une surtension infinie : u= P i Fort heureusement, l'inertie de l'arc empêche que sa résistance ne croisse infiniment vite : u = ri et la tension d'arc passe par un maximum dénommé pointe d'extinction ; dans cette exemple : u = 2E Figure 7 – Coupure dynamique en courant continu 1.5 Limitation de la valeur maximale du courant de court-circuit ■ Dans la plupart des circuits alimentés en courant continu, l’inductance est importante et la constante de temps du réseau L/R est souvent un multiple du temps d’ouverture du disjoncteur de protection (L/R représente couramment 10 à 15 ms). Si l’ouverture des contacts se produit très rapidement, dès que l’on détecte les premiers signes d’apparition d’un défaut, l’interruption peut avoir lieu avant que le courant de court-circuit ait atteint sa valeur maximale ; on dit que l’appareil se comporte en limiteur. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 i Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU 0,3 1 i limité 0,2 é 1,5 R ésu m i I ia i + u L i1 R1 E i pr u E u E a schéma du circuit i 0,1 0,5 u 0 0 0 5 10 15 20 u u E E R 1 i1 L'arc s'éteint J t ui = P i E –R R 1 i1 E θ 0,2 0,4 0,6 0,8 t L /R i Le courant présumé représente le courant de court-circuit qui s'établirait si l'appareil n'intervenait pas et qui atteindrait I = E /R –R 0 i1 = u R1 ia a évolution du courant et de la tension en fonction du temps E R + R1 I= E R i = i1 + i a b caractéristiques Loi d'Ohm : u E L 3 di = (E – Ri ) – u = ∆u dt Loi de Kirchhoff : i = i1 + ia = 2 u + ia R1 Figure 9 – Coupure d’un circuit inductif avec résistance en parallèle sur l’arc ui = P 1 E + Ri i limité 0 0 0,1 0,2 0,3 i I b représentation dans le plan (u, i ) P = P0 + U0i P0 = 0,1 E I U0 = E ■ Nous verrons par la suite (§ 1.6, § 6 et § 7.3) que, selon la nature des circuits à commander et la valeur des courants à interrompre, il est possible d’utiliser divers artifices pour faciliter la coupure et limiter les surtensions de manœuvre : — résistance en parallèle sur l’appareil ; — condensateur en parallèle sur l’arc ; — superposition d’un courant oscillatoire pour la coupure des lignes à courant continu THT. Nous allons commencer par l’examen, fort instructif, de la résistance en parallèle sur l’appareil. θ = 1 L /R 25 Figure 8 – Coupure en courant continu avec limitation de courant Pour obtenir ce résultat, il est nécessaire de développer rapidement une tension d’arc qui soit supérieure à la différence (E − Ri) entre la force électromotrice du générateur et la chute ohmique. Lors de l’apparition d’un court-circuit, on constate que, à partir du moment où la tension d’arc u dépasse (E − Ri), le courant ne peut que décroître. Si cette condition est obtenue assez rapidement, le courant n’a pas le temps d’atteindre sa pleine valeur et l’appareil fonctionne en limiteur (figure 8). Dans l’article [D 4 690] « Appareillage électrique d’interruption à courant alternatif à haute tension » nous verrons que, en courant alternatif, les fusibles ont souvent un comportement limiteur. Les fusibles HT ont la possibilité de développer rapidement des tensions d’arc suffisantes pour obtenir l’effet de limitation qui leur permet d’éliminer des défauts de valeurs présumées très supérieures à celles qu’ils ont effectivement à maîtriser. 1.6 Utilisation de résistances en parallèle sur l’appareil pour faciliter la coupure 1.6.1 Généralités Il est bien connu que la présence d’une résistance R1 en parallèle sur l’arc aide à la coupure. Les équations du circuit de la figure 9 sont la relation (2) : di E – Ri – L ------ – u = 0 dt et les équations : u = R 1 i1 (5) i = i1 + ia (6) On constate qu’un arc dont la longueur serait insuffisante pour lui permettre de réaliser seul la coupure (P0 = 0,2 E I) peut y parvenir Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 5 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ u =P PR 0,4 ui R 1 i 1 u 0,5 0,3 E L'arc s'éteint ? –1 –R i 0,2 0,1 PE P = E F ui ia ∆u 1 I= E R i/Î i L'existence d'une tangente verticale sur la caractéristique statique est incompatible avec la nécessaire décroissance du courant, imposée par ∆u négatif. Figure 10 – Coupure d’un circuit inductif avec une résistance de faible valeur en parallèle sur l’arc sans difficulté grâce à une résistance de shuntage représentant, dans cet exemple, sensiblement trois fois la valeur de la résistance R de la charge. L’explication est simple : une partie du courant total passe par la résistance R1 et le courant d’arc est donc réduit d’autant, permettant à ∆u d’être constamment négatif. Nous verrons au paragraphe 3.4 que la surtension de coupure se trouve aussi réduite grâce à la présence de la résistance R1, ce qui constitue un second avantage appréciable. Malheureusement, un interrupteur auxiliaire est nécessaire pour éliminer le courant résiduel dans la résistance R1. Cette sujétion, à laquelle s’ajoutent d’autres contraintes, fait que cette solution est peu utilisée dans la pratique. 1.6.2 Utilisation d’une résistance de faible valeur en parallèle sur l’arc Si la résistance R1 a une valeur comparable à celle de la résistance R du circuit d’utilisation, la droite représentant R1i1 est alors plus éloignée de la verticale et la caractéristique globale u = f (i) présente inévitablement une tangente verticale (figure 10), dont nous avions pu dissimuler la présence dans le diagramme de l’exemple précédent. Lorsque le point de fonctionnement, qui jusqu’alors est supposé décrire la caractéristique statique, atteint la région où celle-ci présente cette tangente verticale, il ne peut à l’évidence plus continuer à se déplacer sur cette courbe : en effet, s’il en était ainsi, on observerait un accroissement du courant total i alors que ∆u est négatif ; il y a incompatibilité. On peut essayer d’éluder cette contradiction en considérant que, lorsque la tangente verticale est atteinte (point F), l’arc s’éteint ! il faudrait donc que le point de fonctionnement se transfère instantanément sur la droite R1i1, tout le courant passant d’un seul coup dans la résistance R1. Cette présentation du problème ne peut évidemment pas se justifier physiquement. Si l’intensité du courant I à interrompre est par exemple de 200 A, on constate que le courant critique ia dans l’arc possède encore à cet instant une valeur de l’ordre de 50 A. Ce n’est pas parce que la tangente est verticale qu’un arc parcouru par un tel courant va subitement disparaître. Nous avons, en fait, atteint les limites de l’emploi possible des caractéristiques statiques d’arc pour décrire les phénomènes d’interruption qui sont, par nature, fondamentalement dynamiques. D 4 700 − 6 PE pointe d'extinction PR pointe de réallumage La boucle fermée décrite par le point de fonctionnement présente la forme d'un cycle d'hystérésis Figure 11 – Caractéristique dynamique d’un arc permanent : phénomène d’hystérésis 2. Modélisation du comportement dynamique de l’arc Si nous voulons continuer d’analyser les phénomènes d’interruption en respectant les règles essentielles de la physique, nous allons devoir tenir compte du comportement dynamique de l’arc qui présente une sorte d’hystérésis (figure 11) et introduire, au moins, son inertie thermique. Pour cela nous ferons appel au plus simple et au plus célèbre des modèles dynamiques d’arc, proposé, il y a plus d’un demi-siècle, par Otto Mayr [1]. 2.1 Hypothèses d’Otto Mayr Ce modèle repose sur un nombre limité d’hypothèses simples et physiquement acceptables. Il constitue le prototype de toute une famille de modèles dits de conductance parce qu’ils s’efforcent d’expliciter l’évolution de cette dernière en fonction des principaux paramètres qui définissent l’arc et le circuit. 2.1.1 Première hypothèse La conductance 1/r de l’arc est une fonction univoque de l’énergie w contenue dans cet arc : 1 --- = F ( w ) r Cela signifie que, à une valeur w de l’énergie, il ne correspond qu’une seule valeur de la résistance r. Ce n’est certainement pas tout à fait exact, mais il n’y a cependant pas de différence fondamentale entre la réalité et cette hypothèse nécessaire au traitement analytique du problème. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 (7) Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU Si l’on tient compte des relations (10) et (12), nous obtenons : La dérivation de la relation (7) nous donne : d ( 1 ⁄ r ) ⁄ dt F′ ( w ) dw ---------------------------- = --------------- --------1⁄r F ( w ) dt (8) Si nous désignons par P la puissance de refroidissement, la différence entre la puissance Joule fournie à l’arc et celle qu’il cède au milieu environnant est : 1 – dr ⁄ dt d ( 1 ⁄ r ) ⁄ dt ---------------------------- = ------- ( ri 2 – P 0 ) = -------------------w0 1⁄r r (14) Cette équation différentielle est sans solution analytique, r et i étant tous deux fonction du temps t, tout en dépendant l’un de l’autre. On sait en revanche la résoudre par des méthodes numériques pas à pas. ri 2 − P À chaque instant, l’une et l’autre peuvent varier, mais, pendant l’intervalle de temps dt, (ri 2 − P) dt correspond bien à la variation d’énergie dw, donc : dw --------- = ri 2 – P dt (9) ∫ ( ri 2 – P )dt ou compte tenu de la relation (8) : d ( 1 ⁄ r ) ⁄ dt F′ ( w ) ---------------------------- = --------------- ( ri 2 – P ) 1⁄r F(w) t r = r 0 exp --- θ (10) θ représente donc le temps minimal nécessaire pour que la résistance de l’arc soit multipliée par e. 2.1.2 Deuxième hypothèse La fonction univoque F (w), dont nous avons supposé l’existence, peut être considérée comme étant une fonction exponentielle : 1 w --- = F ( w ) = K exp ------- r w0 ■ La relation (14) peut se mettre sous la forme : P0 1 dr ⁄ dt ri 2 ri 2 (15) ---------------- = ------- 1 – ------- = --- 1 – ------- θ r P0 P0 w0 w0 avec θ = ------- constante de temps de désionisation de l’arc. P0 Lorsque ri 2 est négligeable devant P0, la relation (15) montre que r est sensiblement une fonction exponentielle du temps, soit : On en tire : w = 2.2 Constante de temps de désionisation (11) À l’aide d’hypothèses bien choisies concernant la section et la densité de conductance de l’arc, Otto Mayr est parvenu, en partant de la loi de Saha sur la thermo-ionisation des gaz, à justifier cette variation exponentielle ; celle-ci se révèle en fait assez proche de la réalité physique. ■ Une autre définition de θ, équivalente, peut être proposée (figure 12). Si, à un instant donné t0, on supprime l’apport à l’arc (u = 0) d’énergie par effet Joule, la constante de temps θ est le temps au bout duquel la résistance d’arc aurait doublé en admettant que sa vitesse de variation demeure constante (assimilation de la loi de variation à sa tangente). Elle caractérise donc la vitesse de désionisation maximale à un instant donné. Bien entendu, plus la constante de temps θ est faible, plus la vitesse de désionisation est élevée. B i=0 Le coefficient constant w0 représente la quantité d’énergie qu’il faut apporter à l’arc pour que sa conductance s’accroisse dans le rapport e = 2,718 28 (base des logarithmes népériens). À l’inverse, lorsqu’on retire une énergie w0 à l’arc, sa conductance se trouve divisée par e. K exprime la valeur absolue de la conductance et n’intervient pas dans les relations qui vont nous intéresser, car ce sont seulement les variations relatives de la conductance qui vont être exprimées. La dérivée logarithmique de la relation (11) donne en effet : F′ ( w ) 1 --------------- = ------F(w) w0 r r dr dt 2 r0 (12) r0 0 t0 2.1.3 Troisième hypothèse Nous n’avons fait jusqu’ici aucune hypothèse sur la puissance de refroidissement P ; nous précisons maintenant que P est supposée constante et égale à P0. Cette hypothèse, résolument simplificatrice, revient à ne garder, dans la relation (1) que le seul terme hyperbolique : lorsque est constant. (13) t θ i P0 C + D u = ------------------ = -----i i P u=0 i 0 B P r0 t0 t0 t barre de court-circuitage puissance de refroidissement de l'arc résistance d'arc à l'instant t0 instant du court-circuit Figure 12 – Constante de temps de désionisation Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 7 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ La constante de temps dépend fortement de la nature du gaz ionisé et est d’autant plus faible que les moyens de désionisation sont plus énergiques. Nous verrons au paragraphe 3.3, que cette constante de temps joue un rôle très important dans les phénomènes qui se produisent au voisinage du zéro de courant. Elle résulte en réalité d’un très grand nombre de phénomènes physiques concomitants. Cela correspond physiquement à l’hypothèse fictive d’un appareil s’ouvrant suffisamment vite pour que l’arc atteigne la longueur avant que le courant n’ait varié, et dont la tension d’arc s’établit instantanément à sa valeur d’équilibre statique. C’est certainement inexact, mais ce qui importe dans le choix des conditions initiales, c’est qu’elles ne s’écartent pas trop de la réalité, afin que le calcul numérique converge rapidement vers la caractéristique dynamique recherchée. Il est important aussi que les conditions initiales adoptées ne soient pas incompatibles avec le mode de calcul employé ; si l’on choisissait, par exemple, r0 = 0, la dérivée dr/dt resterait nulle : 2.3 Équation de Mayr r0 r 0 i 02 dr ------ = ----- 1 – ---------- θ dt P0 L’équation différentielle (15) peut s’écrire : dr r ri 2 ------ = --- 1 – ------- θ dt P0 (16) C’est l’équation de Mayr, qui exprime le comportement dynamique de l’arc. Elle peut être résolue numériquement (§ 2.4) si l’on précise complètement les conditions de fonctionnement auxquelles l’arc se trouve soumis : — ensemble des relations définissant le circuit dans lequel l’arc est inséré ; ces relations fournissent de nouvelles équations reliant les variations de r à celles de i ; — conditions initiales précisant toutes les grandeurs variables à l’instant t0, considéré comme origine des temps. Nous verrons au paragraphe 2.5 que l’on peut aussi la résoudre graphiquement. et r ne pourrait pas varier. Pour résoudre numériquement l’ensemble des trois équations, l’ordinateur va utiliser un pas de calcul élémentaire de durée τ. ■ Au bout d’un temps τ correspondant à un premier pas de calcul, la résistance de l’arc est passée de r0 à r1, dont la valeur d’après la relation (16) est : r 0 i 02 τ r 1 = r 0 1 + --- 1 – ---------- P0 θ La nouvelle valeur i1 du courant vérifie la relation (21) tirée de l’équation (3) : i1 – i0 L -------------- = E – Ri 0 – r 0 i 0 τ 2.4 Résolution numérique de l’équation de Mayr 2.4.1 Principe Nous allons reprendre, à titre d’exemple, le circuit très simple de la figure 1 a. Puisque nous sommes en présence de trois inconnues (u, i et r), nous aurons besoin de trois relations indépendantes, qui sont les équations (3) et (16) : di L ------ = ( E – Ri ) – u = ∆u dt ri 2 r dr ------ = --- 1 – ------- P0 θ dt et la relation : (17) ■ À l’instant initial, il faut partir d’un point de fonctionnement supposé connu, puisque c’est une nécessité commune à toutes les méthodes numériques d’avoir à préciser toutes les conditions initiales. Dans le cas présent, nous pourrons, par exemple, choisir de commencer le calcul à partir d’un point situé sur la caractéristique statique, pour une valeur du courant correspondant au courant établi lorsque l’appareil est fermé, soit : E i 0 = I = ---R (18) avec P0 r 0 = -----i 02 D 4 700 − 8 (21) La tension u1 s’en déduit immédiatement d’après la relation (17) : u 1 = r 1 i1 u = ri (20) (22) Nous sommes donc maintenant en possession d’un deuxième point de la caractéristique dynamique, correspondant au temps t0 + τ. L’ordinateur peut alors recommencer la même série d’opérations pour un deuxième pas de calcul, correspondant à un nouvel intervalle de temps τ, et ainsi de suite, jusqu’à obtention de la caractéristique dynamique complète de l’arc (figure 13). La troisième hypothèse de Mayr (P0 = Cte) peut aisément être remplacée par une proposition plus réaliste donnant une description aussi exacte que souhaitée de la caractéristique statique u = f (i). Il est même possible, si besoin est, d’introduire une évolution de cette caractéristique en fonction du temps P = g (i, t). La résolution numérique est alors à peine plus complexe. De la même manière, la constante de temps θ peut être supposée variable en fonction du courant et/ou du temps : θ = h (i, t) Dans un premier temps, et afin de conserver à ce modèle un caractère principalement pédagogique, nous continuerons généralement de supposer P0 et θ constants. Nous allons, en effet, utiliser ce modèle pour établir des raisonnements fondamentaux qui pourront servir à la compréhension des phénomènes de coupure des courants alternatifs en haute tension. 2.4.2 Choix du pas de calcul La valeur à donner au pas de calcul τ dépend d’abord de la précision souhaitée. (19) En outre, selon le type de circuit et la vitesse d’évolution des grandeurs en présence, le rapport τ/θ devra être suffisamment faible Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU u r croît Si la méthode graphique est moins précise et, en pratique, moins rapide que la méthode numérique, elle présente l’avantage de visualiser l’évolution du phénomène. r décroît En particulier, on voit que le courant décroît d’autant plus vite que ∆u est plus grand, ce que nous savions déjà, et que la résistance d’arc croît d’autant plus vite que λu est plus grand. En revanche, si λu est négatif, la résistance ne peut que décroître. M' M ' E Il en résulte que la caractéristique statique divise le plan en deux régions : — pour tous les points situés au-dessous de la courbe ui = P, la résistance de l’arc augmente ; — à l’inverse, pour tous les points situés au-dessus de ui = P, la résistance diminue, ce qui est logique puisque la puissance ui dépensée dans l’arc (effet Joule) dépasse la puissance de refroidissement et que l’arc se réchauffe (λu est alors négatif). λu ∆u ri r 'i ui = P0 i' i I i Figure 13 – Construction graphique d’une caractéristique dynamique d’un arc permanent, en courant continu pour qu’il n’apparaisse pas de phénomènes d’instabilités dans les opérations numériques. Il existe d’ailleurs des méthodes numériques permettant de réduire ces instabilités. Cette remarque nous aidera à percevoir le mécanisme des oscillations qui peuvent apparaître lorsqu’un arc est shunté par un condensateur et, surtout, à mieux comprendre les phénomènes d’échec thermique pouvant survenir lors d’une tentative de coupure en courant alternatif. Dans la plupart des cas, on constate qu’un pas de calcul égal au dixième de la constante de temps donne entière satisfaction. 3. Pointe d’extinction 2.5 Résolution graphique de l’équation de Mayr 3.1 Généralités Les diverses opérations numériques successives qui permettent d’obtenir pas à pas l’évolution dynamique du phénomène ont évidemment leur équivalent graphique. Examinons comment nous pouvons, dans le plan (u, i), passer d’un point M (supposé appartenir à la caractéristique dynamique) au point suivant M′ correspondant au temps t + τ (figure 13). On remarque immédiatement que ∆u va donner la nouvelle valeur i′ de i puisque, d’après la relation (3) : di i′ – i L ------ = L ----------- = ∆u τ dt (23) Par ailleurs, la relation (16) peut s’écrire en tenant compte de l’équation (17) : dr ⁄ dt 1 i ---------------- = --------- ( P 0 – ri 2 ) = --------r P0 θ P0 θ P -----0- – u i (24) ce qui donne : ri dr r′ – r ------ = ------------ = --------P0 θ τ dt P u -----0- – u = --------- λ u i P0 θ (25) Ainsi, λu, écart entre la caractéristique statique et la caractéristique dynamique, pour le courant instantané considéré, permet de déterminer la nouvelle valeur de la résistance d’arc. Le point recherché M′ se trouve à l’intersection de la droite u = r′i′ et de la verticale d’abscisse i′ . Il est ainsi possible de construire point par point la caractéristique dynamique recherchée, ce qui revient à réaliser graphiquement les opérations que l’ordinateur effectue numériquement. Si la caractéristique dynamique était confondue avec la caractéristique statique ui = P, comme nous l’avons supposé initialement, la tension d’arc atteindrait une valeur théoriquement infinie au moment où le courant s’annule. Fort heureusement, la réalité est différente. La caractéristique réelle passe par un maximum peu avant l’annulation du courant ; c’est la pointe d’extinction (§ 1.4). La valeur de cette surtension ne peut malheureusement pas être établie analytiquement. Le sommet de la pointe d’extinction correspond physiquement (à l’approche du zéro de courant) au moment où l’augmentation de la résistance r n’est plus suffisamment rapide pour compenser la réduction du courant i, de sorte que le produit ri cesse de croître. À partir du sommet de la pointe d’extinction, le produit ui décroît rapidement et devient très vite négligeable devant P ; par conséquent, r croît alors sensiblement de façon exponentielle avec une constante de temps voisine de θ (§ 2.2). Il en résulte que le courant devient pratiquement négligeable deux à trois constantes de temps θ après la pointe d’extinction. Il est ainsi possible d’évaluer la constante de temps θ d’un arc réel, à l’approche du zéro de courant, à partir d’un relevé oscillographique. Par ailleurs, lorsque l’arc n’est pas shunté, on peut démontrer que le sommet de la pointe d’extinction n’excède en aucun cas la moitié de la valeur de la tension correspondant alors à la caractéristique statique u = P/i. Cela permet d’évaluer la puissance de refroidissement minimale à laquelle l’arc se trouve soumis à cet instant. Il est malheureusement difficile d’être beaucoup plus précis au sujet de ce phénomène fort important sans faire appel à des modélisations numériques. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 9 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ 3.2 Influence de la puissance de refroidissement u E 3 En fonction de ce qui vient d’être énoncé, il est clair que la pointe d’extinction est d’autant plus importante que la puissance de refroidissement est elle-même plus grande, toutes choses égales par ailleurs (figure 14). 2 Théoriquement, si l’on pouvait ne faire varier que P, l’amplitude de la surtension (au-delà de E) croîtrait sensiblement comme P 01 / 2 . 1 Si la caractéristique statique possède un palier de tension U0 (figure 4), la remarque précédente s’applique, comme on l’a vu au paragraphe 1.4, au seul terme P0 : P0 = EI P0 = 0,5 EI P0 = 0,3 EI 0 0 P = P0 + U0 i 0,1 0,2 i I 0,3 θ = 1 L /R 3.3 Influence de la constante de temps d’arc Figure 14 – Influence de la puissance de refroidissement P0 sur la pointe d’extinction, pour une constante de temps d’arc invariable Avant d’examiner l’influence très importante de la constante de temps θ sur l’amplitude de la pointe d’extinction, il faut souligner que θ est, à l’inverse, sans grande action sur le temps et l’énergie de coupure ; cette dernière dépend en effet essentiellement de l’éner1 gie électromagnétique --- LI 2 . 2 Nous verrons, au paragraphe 4.1, que le temps de coupure est de l’ordre de grandeur de la constante de temps L/R du circuit et, en fait, pratiquement indépendant de θ. En conséquence, il en est évidemment de même pour la vitesse de variation de r. Il en résulte que λu est d’autant plus petit que la constante de temps est elle-même plus réduite, puisque, d’après la relation (25) : P 0 dr λ u = θ ------ -----u dt 25 (26) u E θ = 1 3 L /R 100 L /R 50 L /R 25 θ = 1 2 θ = 1 1 0 0 0,1 0,2 0,3 i I Il est logique qu’il en soit ainsi, car moins l’arc possède d’inertie thermique moins il a tendance à s’écarter de sa caractéristique statique lorsque le courant varie. Du même coup, l’amplitude de la pointe d’extinction augmente lorsque θ diminue. Figure 15 – Influence de la constante de temps θ sur la pointe d’extinction, pour une puissance de refroidissement constante Par ailleurs, nous savons que le sommet de cette pointe d’extinction se produit sensiblement à un instant précédant de deux à trois constantes de temps le zéro de courant (§ 3.1). Cette pointe se produit donc pour une valeur de courant qui décroît avec θ. matiquement la valeur absolue des surtensions de coupure à des niveaux acceptables. À ce courant correspond alors, sur la caractéristique statique, une tension d’autant plus grande que θ est petit : P0 u = -----i En réalité, à puissance de refroidissement : P = P0 = Cte Nous pouvons donc en déduire finalement que la pointe d’extinction possède une double raison de croître lorsque θ diminue (figure 15). C’est bien ce que l’on vérifie numériquement et ce que l’on observe dans la réalité. Cette constatation importante est tout à fait générale ; elle s’applique à tous les types de circuits, à toutes les natures de courant et à tous les modèles d’appareils. L’une des principales raisons du succès de la coupure dans l’air en basse tension tient justement au fait que l’air, à la pression atmosphérique, possède une constante de temps élevée qui limite auto- D 4 700 − 10 P0 = 0,5 EI l’amplitude de la pointe d’extinction dépend très précisément du rapport sans dimension θ/(L/R). Un accroissement de la constante de temps L/R du circuit a donc le même effet fâcheux, visà-vis de l’amplitude de la pointe d’extinction, qu’une diminution de la valeur de θ. 3.4 Influence d’une résistance en parallèle sur l’arc Si nous reprenons maintenant, à l’aide du modèle numérique, le cas d’un arc shunté par une résistance de faible valeur R1 (§ 1.6.2) nous constatons que le paradoxe rencontré précédemment n’existe plus (figure 16). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU 4. Temps de coupure u A P 4.1 Généralités ui = R 1 i 1 Umax Nous avons jusqu’alors représenté les problèmes de coupure en courant continu presque exclusivement dans la plan (u, i), intéressant pour la compréhension des phénomènes, mais dénué de l’échelle du temps. E E– Ri I Dès l’instant où l’on connaît ∆u pour chaque valeur de i, le temps de coupure s’en déduit aisément. Pour une évolution donnée de la tension d’arc en fonction du courant, le temps de coupure tC est directement proportionnel à l’inductance L du circuit, puisque, d’après la relation (3) : i a évolution dans le plan (u, i ) ∫ di ------∆u (27) E di ------- ----∆u I (28) 0 tC = L r E ou encore, puisque R = --- : I r L t C = ---R t u;i u i0 ∫ 0 i0 Cette forme d’expression est particulièrement intéressante car elle permet d’expliciter le temps de coupure en fonction de la constante de temps L/R du circuit et de deux autres variables réduites : ∆u — ------- , rapport entre la chute de tension inductive et la force élecE tromotrice du générateur ; i E — - , rapport entre le courant instantané et le courant établi ---- . I R ia i i1 t 4.2 Intérêt fondamental de l’emploi de variables réduites b évolution en fonction du temps Figure 16 – Coupure en courant continu avec une résistance de faible valeur en parallèle sur l’arc : évolution des variables La caractéristique dynamique ne présente à aucun moment une tangente verticale ; elle se raccorde asymptotiquement à la droite u = R1i1. Le courant d’arc diminue continûment jusqu’à s’annuler au point A de tangence à cette droite. On observe aussi que la tension passe par un maximum qui représente la pointe d’extinction. Cette pointe d’extinction augmente ici relativement peu lorsque θ diminue ; à la limite, même pour θ tendant vers zéro (courbe en tireté), elle ne pourrait en aucun cas dépasser la valeur Umax correspondant au transfert instantané du courant d’arc vers la résistance R1. On vérifie aisément que cette surtension est d’autant plus réduite que la résistance R1 est plus faible. L’intérêt fondamental de l’emploi de variables réduites réside dans le fait que les résultats obtenus, pour un ensemble de valeurs attribuées à ces variables, sont automatiquement applicables à tous les circuits présentant les mêmes caractéristiques réduites, quelles que soient les valeurs absolues des grandeurs en présence. Par exemple, tout circuit simple (L, R) a un comportement parfaitement homothétique, en courant continu comme en courant alternatif, à celui de n’importe quel circuit présentant la même constante de temps L/R. On peut dépasser cet exemple élémentaire et chercher à utiliser des variables réduites sans dimension. Le temps de coupure réduit du paragraphe 4.1 est alors rapporté à la constante de temps L/R et peut être repéré, comme les autres variables réduites, par un astérisque, soit : TC T C* = ----------- = L⁄R ∫ 0 i*0 di * ---------*∆u (29) avec : Cette constatation est générale ; elle s’applique aussi bien aux problèmes de coupure en courant continu qu’en courant alternatif. Toutefois, malgré les avantages indéniables qu’apporte la présence d’une résistance de shuntage d’arc, nous avons déjà souligné (§ 1.6) que le handicap d’avoir à éliminer le courant résiduel qui la parcourt est, tout compte fait, tellement pénalisant que cette solution est très peu utilisée dans la pratique. i i* = I et : ∆u ∆u * = ------E Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 11 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ Le fait que les variables réduites puissent s’exprimer par des rapports adimensionnels facilite grandement l’interprétation physique des résultats, en particulier en ce qui concerne l’influence des divers paramètres susceptibles de modifier les conditions de fonctionnement. soit encore (avec la relation (29)) : P0 TC W J* = 2 ------ ---------------- = 2P 0* T C* EI ( L ⁄ R ) (32) Dans la pratique, W J* est compris entre 1 et 2 et P 0* ne peut pas être inférieur à 0,25 (§ 1.3), se situant plutôt entre 0,5 et 1. Il en résulte que T C* est assez voisin de 1, c’est-à-dire que le 5. Énergie de coupure temps de coupure est généralement comparable à la constante de temps L/R (quand l’appareil ne fonctionne pas en limiteur). 5.1 Généralités L’énergie WJ dépensée dans la résistance d’arc variable de l’interrupteur est donnée par l’intégrale, durant le temps de coupure, de la puissance instantanée dissipée dans cette résistance : ∫ TC ri 2 dt = ∫ TC ∫ TC u2 ------ dt r 5.4 Influence de la puissance de refroidissement (30) L’expérience montre que l’énergie de coupure, sans pouvoir deve- Lorsque l’on utilise un modèle numérique, l’ordinateur permet de calculer cette énergie. 1 nir inférieure à --- LI 2 , est d’autant plus faible que la puissance de 2 refroidissement est plus grande (figure 17). On aurait donc intérêt à accroître cette dernière. WJ = 0 ui dt = 0 0 Avec le modèle de Mayr (§ 2.1), dans lequel la puissance de refroidissement P est supposée constante, on obtient très simplement une bonne évaluation de l’énergie de coupure en multipliant la puissance de refroidissement par le temps de coupure : W J = P0 TC (31) En effet, avant l’ouverture de l’appareil, l’énergie d’arc est évidemment nulle ; lorsque la coupure est achevée, l’énergie d’arc est à nouveau nulle et, alors, il y a bien égalité entre l’énergie apportée à l’arc sous forme d’effet Joule et l’énergie P0TC cédée par l’arc à l’environnement pendant la durée TC de la coupure. Nous savons que plus la puissance P0 est élevée, plus la surtension de coupure est elle-même importante. C’est un des dilemmes auxquels tout constructeur d’appareillage se trouve sans cesse confronté. W J* 4 3 5.2 Remarque au sujet du temps de coupure 2 25 L /R 50 θ 1 0 0 Sans entrer dans les détails, signalons qu’il est important, lorsque l’on utilise le modèle de Mayr, de ne pas surévaluer le temps TC , au risque de surévaluer d’autant l’énergie de coupure. Quand doit-on alors considérer que la coupure est terminée ? Nous avons vu (§ 3.1) que, à partir du sommet de la pointe d’extinction, la puissance Joule apportée à l’arc décroissait très rapidement, au point que, deux ou trois constantes de temps plus tard, elle est totalement négligeable. L’instant correspondant à la pointe d’extinction, majoré d’une ou deux constantes de temps θ, pourra donc valablement être considéré comme marquant la fin des phénomènes énergétiques liés à l’existence temporaire de l’arc. 0,5 1 1,5 P *0 a P *0 = Cte, U0 = 0 W J* 4 3 2 25 L /R 50 θ 1 0 5.3 Énergie de coupure réduite 0 0,5 1 1,5 U *0 b P *0 = 0,1 + U *0 i Revenons à l’expression (30) de l’énergie de coupure WJ, et cherchons-en la forme réduite : WJ P0 TC P 0 T C EI ( L ⁄ R ) P0 TC W J* = -------------- = -------------- = ------ ---------------- ---------------------- = ---------------------1 2 1 2 1 EI ( L ⁄ R ) EI ( L ⁄ R ) --- LI --- LI --- LI 2 2 2 2 D 4 700 − 12 LI 2 -------------1 2 --- LI 2 L'influence de θ est négligeable Les tiretés représentent les asymptotes verticales de l'énergie de coupure Figure 17 – Influence de la puissance de refroidissement et de la constante de temps sur l’énergie de coupure Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU L’étude de l’interruption des courants alternatifs en haute tension (cf. [D 4 690]) le montrera avec encore plus d’acuité. 6.2 Constante de temps RC grande devant θ 5.5 Influence de la constante de temps d’arc La figure 19 a donne l’évolution en fonction du temps des différentes variables intéressantes dans le cas où : RC = 20 θ L’influence de la constante de temps θ sur l’énergie de coupure (figure 17) est très faible du fait que θ est, en réalité, toujours négligeable devant le temps de coupure (ou la constante de temps L/R du circuit). Il est donc ici sans intérêt de chercher à réduire θ. En revanche, la surtension de coupure est d’autant plus grande que θ est plus faible. On comprend donc que, en courant continu, il n’est ni nécessaire, ni souhaitable de chercher à réduire la constante de temps de l’arc. Le milieu d’extinction universellement utilisé en courant continu est, de ce fait, l’air atmosphérique. En courant alternatif, et surtout en haute tension, le problème est très différent car il n’existe pas, comme en courant continu, de limite à la réduction de l’énergie de coupure : mais cette réduction passe nécessairement par celle de la constante de temps de l’arc, ce qui exige la résolution du difficile problème de la maîtrise des surtensions de manœuvre. (dans cet exemple, L/R est égal à 30 θ). On constate que, au début de l’interruption, supposée effectuée avec une puissance de refroidissement constante : P0 = 0,2 EI le courant d’arc ia et le courant total i sont initialement confondus, grâce à un choix judicieux de la valeur initiale u0 de u, afin de respecter la réalité. Dès que la tension d’arc u commence à croître, il apparaît un courant capacitif iC d’autant plus élevé que du/dt est plus grand, tandis que le courant d’arc ia se trouve réduit d’une quantité sensiblement égale. On assiste à un transfert du courant de l’arc vers le condensateur. Lorsque l’arc s’éteint, le courant total i se confond alors avec iC (figure 19 b). La coupure s’est produite très rapidement et le régime oscillatoire qui s’établit ensuite entre le condensateur et l’inductance du circuit s’amortit progressivement par dissipation d’énergie dans la résistance R du circuit (figure 18). u;i 6. Utilisation d’un condensateur en parallèle sur l’arc i0 i ia iC u 6.1 Généralités Dans le cas où un condensateur de capacité C se trouve placé en parallèle sur l’appareil (figure 18), nous ne pouvons plus bâtir un certain nombre de raisonnements à partir de caractéristiques tracées dans le seul plan (u, i). u0 0 1 2 t (ms) a évolution des variables en fonction du temps Contrairement à ce qui se produit lorsqu’une résistance est placée en parallèle sur l’interrupteur (§ 1.6), les courants dans l’appareil et dans la capacité ne se répartissent plus à chaque instant au simple prorata des conductances, puisque : du i C = C ------dt (33) C’est donc maintenant la vitesse de variation de la tension d’arc qui détermine le courant capacitif iC. u;i u E i0 iC u0 ia i t i = iC L, R i + E b coupure avec échelle des temps plus étendue iC C ia RC = 20 θ u Figure 18 – Circuit de coupure en courant continu avec condensateur en parallèle sur l’arc Après la coupure très rapide, facilitée par le transfert, le courant total i s'identifie au courant oscillatoire du circuit L, C Figure 19 – Coupure en courant continu avec condensateur en parallèle sur l’arc : transfert de courant Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 13 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ Nous avons vu au paragraphe 1.6.1 que, avec une puissance de refroidissement de 0,2 EI, l’appareil non shunté ne coupait pas le courant. On voit maintenant que, grâce à un condensateur correspondant à une valeur de RC égale à 20 θ, l’appareil coupe sensiblement le courant au bout d’un temps de 0,5 L/R, avec une dépense u;i i0 1 d’énergie voisine du cinquième de --- LI 2 , incomparablement plus 2 faible que celles observées précédemment. L’explication vient du fait que le courant a diminué de 10 % à peine dans l’inductance entre le début et la fin de la coupure ; il reste alors dans l’inductance encore près de 80 % de l’énergie emmagasinée initialement. i ia u iC u0 1 0 6.3 Apparition d’instabilités 2 3 t (ms) a évolution des variables en fonction du temps ■ Si l’on diminue la valeur de la capacité en la divisant par exemple par deux, de telle sorte que : RC = 10 θ u ui = P u0 – Ri ■ Pour RC = 5 θ, les oscillations deviennent franchement spectaculaires (figure 21). On observe une spirale divergente qui présente tous les aspects d’un phénomène résonnant [2]. E E on voit apparaître les premières manifestations d’un phénomène assez complexe : celui de l’oscillation entre le courant iC et le courant d’arc (figure 20 a). Dans le plan (u, i), on constate que le point de fonctionnement décrit une sorte de boucle avant que la coupure ait finalement lieu (figure 20 b). Ce mouvement de va-et-vient résulte de fluctuations de du/dt qui ne parvient plus à croître continûment, comme cela se produisait dans l’exemple du paragraphe 6.2. A R Ai 0 I i b représentation du phénomène dans le plan (u, i ) 6.4 Oscillations stables A point d'équilibre RC = 10 θ En réalité, ce n’est pas la résistance R du circuit qui conditionne l’obtention d’oscillations stables, mais plus précisément la résistance RA que possède l’arc au point d’équilibre A. On démontre que, lorsque le produit de la résistance RA par la capacité C se rapproche de la valeur de θ, il apparaît un mécanisme intéressant mais assez complexe d’interaction et d’échange d’énergie entre les trois réservoirs que constituent l’arc, le condensateur et l’inductance. E ui = P – Ri On démontre que la pulsation de l’oscillation entre l’arc et la capacité est alors telle que : u E Lorsque le produit RAC est voisin de θ, il n’y a plus coupure et l’on assiste à un phénomène d’oscillations stables, le point de fonctionnement décrivant dans le plan (u, i) une boucle fermée autour de A (figure 22). C’est l’arc chantant, bien connu des expérimentateurs du début du XXe siècle. Figure 20 – Coupure en courant continu avec condensateur en parallèle sur l’arc : apparitions d’instabilités A ωaθ = 1 i Dans l’air, à la pression atmosphérique, si la constante de temps d’un arc donné est voisine de 50 µs, cette oscillation présente une fréquence fa de l’ordre de : ωa 1 f a = ------- = ---------- = 3 200 Hz 2π 2π θ Notons bien que la pulsation ωa est tout à fait indépendante de celle relative à la fréquence propre f du circuit principal L, C : RC = 5 θ Figure 21 – Coupure en courant continu avec condensateur en parallèle sur l’arc : oscillations résonnantes Lorsque les conditions d’oscillations stables sont remplies, cette fréquence propre f est généralement bien plus basse (250 Hz dans l’exemple de ce paragraphe). 1 f = ------------------2π LC D 4 700 − 14 On observe un phénomène résonnant entre l'arc et le condensateur placé en parallèle Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU u u Signe de λu + – R croît R décroît λu – iC I i Ri ia ui = P i RA i α R –R i R min M1 i 1 ui = P M E 0 A M4 M3 E i RA u2 u1 A 2i ax Rm III II λu M 2 R i I 0 L'oscillation est stable et le point de fonctionnement décrit une boucle fermée ; la résistance d'arc RA varie entre deux valeurs limites Rmin et Rmax R AC = θ IA iC ia i i Pour RAC = θ, les oscillations sont stables et le point de fonctionnement décrit une courbe fermée (courbe I) Pour RAC = 2 θ, le phénomène est divergent (courbe II) Figure 22 – Coupure en courant continu avec condensateur en parallèle sur l’arc : mécanismes des oscillations stables Pour RAC = 0,5 θ, le phénomène est amorti, le point de fonctionnement converge en A (courbe III) Figure 23 – Construction graphique de la caractéristique dynamique d’un arc shunté par un condensateur 6.5 Oscillations amorties Pour toute valeur de C telle que RAC est inférieur à θ, les oscillations sont amorties et le phénomène converge au point d’équilibre stable A, comme dans le cas d’un arc non shunté. 300 i (A) 200 i 100 6.6 Étude graphique simplifiée du phénomène d’oscillation u (V) 80 50 ■ Supposons que nous partions d’un point M1 situé à proximité du point d’équilibre A (figure 23). Au bout d’un intervalle de temps τ, la résistance d’arc est passée de r1 à r2 donné par la relation (25) : u 40 20 0 0 r2 – r1 u ---------------- = --------- λ u P0 θ τ On peut alors tracer une droite issue de l’origine et de pente égale à r2. ● Pendant le même intervalle de temps, la tension d’arc est passée de u1 à u2 avec, d’après la relation (32) : u2 – u1 iC ------------------ = ---τ C 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 t (en 10–3 s) Oscillogramme d'un phénomène d'oscillations obtenu dans un arc shunté par un condensateur et alimenté à travers une inductance par une batterie de condensateurs faisant office de source. Durant la décharge de la batterie, les conditions d'oscillations stables se trouvent vérifiées au bout de quelques millisecondes. Figure 24 – Oscillations stables arc-capacité (cf. figure 18) (34) Si l’inductance L du circuit est suffisamment importante pour que L/R soit grand devant la période 2 πθ de l’oscillation arc-capacité (ce qui est pratiquement toujours vérifié), on peut admettre que le courant total i n’a pas le temps de varier (figure 24) et reste voisin du courant au point A, soit IA. Le courant capacitif iC se lit alors directement sur le diagramme de la figure 23 et nous permet de déterminer u2, par la relation (34). ● On peut donc tracer l’horizontale d’ordonnée u2. Son intersection avec la droite de pente r2 donne le nouveau point de fonctionnement M2. ■ Il est donc possible de tracer point par point la caractéristique dynamique recherchée. ● On peut vérifier ainsi que, pour RAC = θ, cette caractéristique décrit une boucle fermée (figure 22) et courbe I de la figure 23. ● Si la capacité est deux fois plus importante (RAC = 2 θ), au bout du temps τ la résistance d’arc sera la même que précédemment ; en revanche, u2 − u1 sera deux fois plus faible et le nouveau point de fonctionnement sera M3. En continuant de tracer cette nouvelle caractéristique, on obtient rapidement une spirale divergente (courbe II de la figure 23). ● À l’inverse, avec une capacité deux fois plus faible (RAC = 0,5 θ), u2 − u1 sera deux fois plus grand ; le nouveau point sera en M4 et décrira une spirale convergeant au point A (courbe III de la figure 23). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 15 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ 6.7 Conclusions concernant l’utilisation d’un condensateur en parallèle sur l’arc Cette solution paraît extrêmement séduisante par les gains qu’elle permet de réaliser en manière d’énergie de coupure. Elle fut, en fait, universellement utilisée sur les systèmes d’allumage de moteurs à explosion afin d’assurer la protection des contacts, plus connus sous le nom de vis platinées. De plus, l’oscillation du circuit L, C consécutive à la coupure était tout à fait favorable à la génération d’une tension élevée au secondaire de la bobine d’allumage et d’une énergie d’étincelle importante et bien contrôlée. Lorsqu’il s’agit de circuits de puissances industrielles, l’existence habituelle d’un palier de tension d’arc sur la caractéristique statique fait que le mécanisme de transfert se manifeste malheureusement trop tardivement pour présenter un réel intérêt. En courant alternatif, la situation est différente ; le condensateur placé en parallèle sur l’arc joue un rôle fondamental jusqu’aux plus fortes valeurs des courants à interrompre. 7. Avenir du transport en courant continu à haute tension Rappel historique Il est intéressant de rappeler que les premières lignes de transport d’énergie étaient alimentées en courant continu à haute tension. Les toutes premières expériences de transport sur quelques dizaines de kilomètres furent réalisées par Marcel Deprez entre 1881 et 1883 d’abord à l’exposition internationale de Munich, puis au Bourget et ensuite entre Vizille et Grenoble. À cette époque, le courant continu était fourni par des génératrices dans lesquelles il était difficile d’élever la tension entre balais sans aboutir rapidement à un flash au collecteur. Conscients du fait que le rendement d’une ligne de transport est d’autant plus élevé que la tension est elle-même plus importante, les pionniers de l’électrotechnique ont d’abord tourné la difficulté en disposant plusieurs génératrices en série ; du même coup, les divers appareils d’utilisation étaient eux aussi montés en série dans le circuit, qui fonctionnait à courant constant. Pour arrêter un appareil, il suffisait de le court-circuiter. L’un des plus célèbres de ces systèmes de transport de type série fut le système Thury qui fut utilisé entre les usines hydroélectriques de Savoie et Lyon jusqu’en 1936 (courant constant 150 A, tension variable jusqu’à 100 kV). L’avènement du transformateur et la découverte de l’intérêt du courant alternatif, dont il n’est pas de notre propos de rappeler les nombreux avantages, entraînèrent le développement rapide de ce dernier et firent disparaître pour un temps les réseaux à courant continu. Il n’empêche que, depuis fort longtemps, l’idée de convertir le courant alternatif en courant continu pour le transporter à longue distance revient régulièrement au rang des préoccupations des concepteurs et des exploitants de réseaux. Nota : le lecteur pourra utilement se reporter, dans ce traité, à l’article [D 4 760] Transport d’énergie en courant continu à haute tension. D 4 700 − 16 7.1 Intérêt du transport en courant continu ■ L’utilisation du courant continu pour le transport de l’énergie électrique à longue distance présente un certain nombre d’avantages théoriques : — suppression de la chute de tension inductive ; — disparition des problèmes de stabilité et de saturation en courant que l’on rencontre en courant alternatif avec les lignes très longues du fait de leur capacité ; — réduction des pertes grâce à un facteur de puissance égal à 1 ; — diminution du nombre de conducteurs ; — réduction des perturbations créées par les phénomènes d’induction. ■ Malheureusement, le développement des réseaux de transport à courant continu de grande puissance se heurte à deux difficultés sérieuses : — la réalisation de convertisseurs continu–alternatif (ou onduleurs) de tension élevée (plusieurs centaines de kilovolts) et de forte puissance (plusieurs milliers de mégawatts) ; — à un degré moindre, la réalisation d’interrupteurs pour courant continu capables de fonctionner sous ces tensions élevées. 7.2 Réalisations actuelles La réalisation d’onduleurs à haute tension a d’abord fait appel à des valves à vapeur de mercure puis, à partir de 1970, à des valves à thyristors (article Transport d’énergie en courant continu à haute tension [D 4 760]). Les puissances et les tensions sont allées en s’élevant progressivement jusqu’à atteindre des valeurs très significatives puisque l’interconnexion France-Angleterre (IFA 2000) est capable de transiter 2 000 MW sous des tensions de ± 270 kV par rapport au potentiel de terre. Toutefois, la complexité, le coût et la fragilité relative des stations de conversion ont fait que de telles installations ont été utilisées essentiellement pour des liaisons aériennes sur de très longues distances ou pour assurer la connexion entre deux réseaux alternatifs non synchronisables afin de permettre des échanges d’énergie entre pays voisins. Enfin, le transport d’énergie à courant continu est utilisé pour certaines liaisons sous-marines. Dans ce dernier cas, la raison fondamentale réside dans le fait que les câbles à haute tension dont la longueur dépasse quelques dizaines de kilomètres posent, en courant alternatif, des problèmes difficilement solubles, liés à l’importance du courant capacitif qui sature le câble. La même difficulté existe pour les lignes aériennes très longues, mais il est alors plus aisé de disposer de loin en loin des stations de compensation. En fait, le transport à courant continu n’a surtout été utilisé jusqu’à maintenant, malgré ses avantages, que lorsqu’il était techniquement difficile de résoudre le problème autrement. Les liaisons en service consistent donc à relier point à point une station à une autre. Dans ce cas, il n’est pas nécessaire de disposer d’interrupteur à courant continu car, s’il se produit un incident, il suffit de bloquer le fonctionnement des deux convertisseurs situés aux extrémités de la liaison pour éliminer les courants de défaut. Dans le cas où le transport à courant continu serait utilisé pour réaliser de véritables réseaux d’interconnexion, il serait nécessaire, comme en courant alternatif, de disposer d’interrupteurs pour isoler les éléments du réseau qui se trouvent en défaut, sans que l’ensemble en subisse les répercussions. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 ______________________________________________________________________________ INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU 7.3 Réalisation des grands interrupteurs V iV L’absence de nécessité a fait que, jusqu’à une époque récente, les interrupteurs à courant continu à haute tension étaient restés à l’état d’études et n’avaient donné lieu qu’à quelques réalisations de prototypes aux performances limitées. Un grand nombre de principes ont été avancés pour résoudre ce difficile problème. Nous citerons, à titre d’exemple, celui qui paraît être le plus rapidement accessible à partir de constituants actuellement disponibles : le principe de superposition. ■ Principe de superposition Ce principe consiste à superposer, dans l’appareil de coupure, au courant continu à interrompre, un courant oscillatoire d’amplitude au moins égale, de telle sorte que le courant total puisse présenter des passages à zéro. i D u ia D disjoncteur à courant alternatif L'annulation du courant dans l'appareil est obtenue par un mécanisme de résonance entrel'arc et la capacité C. Une inducatnce l facilite cette résonance. 1 L'énergie électromagnétique LI 2 est absorbée dans une varistance 2 V à oxyde de zinc qui agit comme limiteur de surtension. Figure 26 – Circuit passif : principe de superposition i ■ Circuit actif Ce dispositif actif nécessite que les condensateurs soient préalablement chargés et exige la présence d’un interrupteur auxiliaire, ou d’un éclateur commandé, pour déclencher la décharge des condensateurs dans le circuit. En outre, il ne faut pas oublier que, une fois l’interruption réalisée, il faudra absorber l’énergie électromagnéti1 que --- LI 2 de la liaison interrompue, sous peine de voir apparaître 2 une surtension inadmissible. iC L Dans ces conditions, un disjoncteur à courant alternatif peut réaliser l’interruption du courant total comme il le fait au passage à zéro d’un courant sinusoïdal. Le courant oscillatoire est ici obtenu par la décharge d’une batterie de condensateurs dans un circuit oscillant à l’intérieur duquel se trouve placé le disjoncteur (figure 25). C iC ia u C Extinction UA Si ce principe est relativement intéressant, puisqu’il permet d’utiliser un disjoncteur de type connu, sa mise en œuvre est assez complexe et soulève de nombreux problèmes. A IA i Figure 27 – Description de l’instabilité d’un circuit d’arc Disjoncteur à courant alternatif ■ Circuit passif Un principe plus séduisant consiste à engendrer une résonance dans un circuit oscillant ( , C ) grâce à un phénomène assez semblable à celui de l’oscillation arc-capacité. Le schéma est celui de la figure 26. V V Enclencheur L V C R1 Interrupteur de court-circuit R2 C L R1 , R2 V condensateur de communication inductance de commutation résistance de charge varistances (en ZnO) de dissipation d'énergie Figure 25 – Circuit actif : principe de superposition Le disjoncteur doit posséder une tension d’arc non négligeable et présenter, dans la plage de courants à interrompre, une caractéristique d’arc à pente suffisamment négative pour parvenir à exciter un phénomène de résonance dans le circuit ( , C ) placé en parallèle. Le courant dans ce circuit allant alors en s’amplifiant, il arrive un moment où il devient assez important pour provoquer une annulation du courant total dans le disjoncteur, annulation que ce dernier met à profit pour réaliser l’interruption (figures 27 et 28). L’énergie électromagnétique, très importante, de la ligne doit toujours être absorbée dans un système parasurtenseur placé en parallèle sur le disjoncteur. À la suite d’essais effectués en laboratoire et sur une liaison existante de la Bonneville Power Authority aux États-Unis, il semble qu’il soit possible d’interrompre des courants de l’ordre de 2 000 à 3 000 A sous 500 kV, en utilisant des disjoncteurs à air comprimé classiques prévus pour des tensions similaires. Le difficile problème de l’interruption des courants continus à haute tension paraît en voie de recevoir des solutions industriellement réalisables, même si le système disjoncteur – circuit oscillant – absorbeur constitue un ensemble de taille assez impressionnante. De toute façon, il n’est guère envisageable qu’il puisse en être autrement, ne serait-ce que du fait de l’importance de l’énergie à dissiper. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 D 4 700 − 17 Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008 INTERRUPTION DES CIRCUITS ALIMENTÉS EN COURANT CONTINU ______________________________________________________________________________ ia I t0 uC t1 t tC E t i I t iV t ia iV t0 t1 tC E uC courant dans l'arc courant dans la varistance instant de séparation des contacts du disjoncteur instant de coupure du courant dans l'interrupteur durée de la coupure tension du réseau tension aux bornes de l'absorbeur d'énergie Figure 28 – Coupure engendrée par résonance dans un circuit passif Références bibliographiques De façon générale, on se reportera utilement aux travaux du Groupe 13 Appareillage de coupure de la Conférence Internationale des Grands Réseaux Électriques (CIGRE), publiés dans la revue Electra et dans les comptes rendus des sessions qui se tiennent à Paris les années paires. Pour la moyenne tension, on se référera aux travaux des Congrès Internationaux des Réseaux Électriques de Distribution (CIRED) qui se tiennent à Liège ou Brighton les années impaires. [1] MAYR (O.). – Beiträge zur Theorie des statistischen und des dynamischen Lichtbogens (Contribution à la théorie du comportement D 4 700 − 18 statistique et dynamique des arcs électriques). Archiv für Elektrotechnik (D), vol. 37, p. 588-608 (1943). [2] PELENC (Y.). – Le mécanisme de la résonance entre un arc et une capacité. Colloque Ionisation et plasma en haute tension. Liège, Institut Montefiore, nov. 1974 ; CT (F), 53, oct. 1974. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie électrique Dossier délivré pour Madame, Monsieur 17/09/2008