UNE REVUE MENSUELLE DU GROUPE IMPACT MEDICOM N°7 SEPTEMBRE 2015 ISSN 2425-7249 Congrès ESC 2015 LONDRES LE POINT SUR... L'IMAGE DU MOIS Place du défibrillateur implantable sous-cutané par rapport au DAI classique Un panier de poulpes peut en cacher un autre Christelle MARQUIÉ Quel traitement de contrôle du diabète de type 2 à la sortie de l'USIC ? Bruno VERGÈS Traitement médical du rétrécissement aortique : quelles perspectives? Jean-Luc MONIN Bénéfice cardio-vasculaire du contrôle glycémique dans le diabète de type2 : VADT à 10 ans change la donne Jean-Baptiste JULLA heART La palpation du pouls dans les miniatures persanes Pascal GUERET Bernard CHARBONNEL CORDIAM w w w. e - c o r d i a m . f r SEPTEMBRE 2015 LA BIOTHERAPIE CONTRE LES MALADIES CARDIOVASCULAIRES wORKINg FROM ThE hEART NP-A-EN 14 0694/ AMG 145-FRA-AMG-717-2014-Novembre 2014 FOR ThE hEART* Pour en savoir plus : www.amgen.fr DEREK P, M.S. RESPONSABLE SCIENTIFIQUE STRUCTURE ET CARACTERISATION MOLECULAIRE * Je travaille au cœur de la recherche pour le cœur. D es questions résolues, des questions sans réponses? Le congrès de l’ESC 2015, qui vient de se tenir à Londres, a apporté son lot d’études cliniques importantes, parmi lesquelles plusieurs études françaises. Certaines paraissent apporter une réponse quasi-définitive à une question clinique jusque-là non résolue : ainsi, l’étude CIRCUS (Michel OVIZE, Lyon), qui testait l’intérêt d’un traitement par ciclosporine (molécule expérimentalement efficace comme agent de post-conditionnement ischémique) en phase aiguë d’infarctus devrait sonner le glas de ce concept pourtant très attractif, du moins pour ce qui est de son intérêt en clinique. Après les résultats décevants de l’étude MITOCARE, l’année dernière, CIRCUS ne montre aucun bénéfice pour le traitement par ciclosporine. De même, l’étude SERVE-HF (Martin COWIE, Londres) ne montre pas de bénéfice pour la ventilation assistée asservie chez des patients insuffisants cardiaques ayant une apnée du sommeil d’origine centrale ; pire, la ventilation assistée s’accompagne d’une augmentation de la mortalité dont le mécanisme reste putatif ; elle condamne donc la technique et invite également à plus de recherche dans le traitement de l’apnée obstructive, chez les patients en insuffisance cardiaque. D’autres laissent encore la porte entrouverte : l’étude ALBATROSS (Gilles MONTALESCOT, Paris) n’a pas montré de bénéfice avec le blocage de l’aldostérone en phase aiguë d’infarctus sur la population globale, mais les résultats semblent intéressants dans la population des infarctus avec sus-décalage de ST, ouvrant la voie à de nouvelles recherches centrées sur ces patients. Enfin, d’autres essais laissent le clinicien sur sa faim. C'est le cas d'OPTIDUAL (Gérard HELFT, Paris), qui a comparé un traitement antiagrégant double à une monothérapie, au-delà d’un an après la pose d’un stent actif, avec une étude formellement négative, mais une tendance en faveur de la prolongation du traitement, qui ne permet pas de trancher définitivement après les résultats intrigants de l’étude DAPT (moins d’accidents ischémiques, plus d’accidents hémorragiques, plus de morts quand le traitement est prolongé). En dehors de l’ESC, cet été nous a apporté une information intéressante : le retrait, par l’agence européenne du médicament (EMA) de 700 médicaments génériques à la suite d’irrégularités dans la conduite des essais de bioéquivalence (notamment concernant les ECG réalisés pendant les études). C’est l’occasion de réfléchir à nouveau sur une autre question toujours non tranchée : les génériques sont-ils toujours aussi efficaces que les médicaments princeps ? La question est complexe, et la réponse pas forcément univoque selon le type de médicaments étudié (pendant le congrès de l’ESC, un collègue israélien me disait qu’il avait de gros soucis avec les génériques de l’atorvastatine, alors que les génériques de la rosuvastatine ne lui semblaient poser aucun problème…). Au-delà de la bioéquivalence pharmacologique, il faut aussi tenir compte des aspects tels que la constitution de l’excipient, la présentation du médicament (qui peut varier fortement entre les différents génériques et avoir, de fait, un impact potentiel sur l’observance) etc… En réalité, seule une véritable étude clinique pourrait trancher vraiment, au moins pour la classe de médicaments étudiée. Le problème est que ni les industriels (craignant un résultat qui montrerait l’équivalence avec le traitement princeps), ni les autorités de santé (craignant au contraire que le princeps puisse être supérieur) ne sont prêts à financer de tels essais. Pour des motifs d’intérêt financier contradictoire entre les laboratoires pharmaceutiques et les payeurs, nous allons donc rester dans le flou sur la question des génériques, alors que des millions de patients reçoivent ces médicaments quotidiennement. Les considérations financières sont malheureusement partout présentes, y compris au niveau de la puissance publique, et il s’agit là d’une problématique pas seulement française, mais bel et bien mondiale … Nicolas Danchin Rédacteur en chef Rédacteur en chef Nicolas Danchin Rédacteurs en chef adjoints Michel Farnier Paul Valensi Comité éditorial Nadia Aissaoui Eric Bonnefoy Cudraz Serge Boveda Bertrand Cariou François Carré Bernard Charbonnel Yves Cottin Sébastien Czernichow Erwan Donal Laurent Fauchier Bruno Guerci Pascal Gueret Yves Juillière Jean-Yves Le Heuzey Jean-François Leclercq Pascal Leprince Eloi Marijon Nicolas Meneveau Jean-Luc Monin Pascal Poncelet Etienne Puymirat Alban Redheuil Philippe Romejko David Rosenbaum Coordination médicale Sarah Cohen Paule Guimbail Responsable numérique Stéphanie Lécolier Contact commercial Suzanne Ricard Tél. : +33 (0)1 40 88 94 48 Direction artistique Françoise Genton Imprimerie : Passion Graphic 11 rue Denis Papin Z.A des 50 Arpents 77680 Roissy en Brie Tél : 01 64 05 46 88 Cordiam est une publication d’Impact Médicom N° ISSN 2425 - 7249 Abonnement : 1 an : 49€ www.e-cordiam.fr N° de Commission Paritaire : 1116 T 92545 N°ISSN 2425-7249 Dépôt Légal : à parution [email protected] 3 boulevard Paul-Emile Victor 92200 Neuilly-sur-Seine Tél. : +33 (0)1 47 22 52 20 Fax : +33 (0)1 46 41 05 21 SAS au capital de 30 000€ Directeur de la publication Patricia Lhote SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 3 SOMMAIRE ÉDITORIAL 03 ................................................................................................. Nicolas Danchin LE POINT SUR... 05 Place du défibrillateur implantable sous cutané .............................. Christelle Marquié 10 Traitement du diabète de type 2 post USIC ..................................... Bruno Vergès 13 Traitement médical du rétrécissement aortique : quelles perspectives ? ... Jean-Luc Monin 18 Bénéfice cardiovasculaire d’un bon contrôle glycémique du diabète de type2 : l’étude VADT change la donne ............................................. Bernard Charbonnel POINT DE VUE ? 21 Les dosages inutiles en cardiologie : ‘’le cardio et le labo ‘’ ? ..................... Simon Weber heART 25 La palpation du pouls dans les miniatures persanns ....................... Pascal Gueret COMMENT FAIT-ON ? 26 Comment fait-on une ablation d’un flutter commun ? ......................... Frédéric Treguer IMAGE DU MOIS 30 Un panier de poulpes peut en cacher un autre ......................... Jean-Baptiste Julla COMPTE-RENDU DE CONGRÈS 33 OPTIDUAL .............................................................................................. Nicolas Danchin 35 CIRCUS .................................................................................... Jean-Louis Gayet 37 LEADLESSII ................................................................................ Jean-Louis Gayet 38 BABSORB STEMI TROFI II ....................................................... Jean-Louis Gayet 41/42 ACTUALITÉ THÉRAPEUTIQUE SEPTEMBRE 2015 4 CORDIAM LE POINT SUR... Place du défibrillateur implantable sous-cutané par rapport au défibrillateur implantable classique ? Christelle Marquié, CHRU Lille christelle.marquié@chru-lille.fr En 2014, 13640 patients en France ont bénéficié de la mise en place d’un DAI (Défibrillateur Automatique Implantable), 300 000 sont implantés par an dans le monde. Depuis le premier appareil implanté chez l’homme en 1980, la technique s’est développée pour devenir aujourd’hui une technique de routine. Les appareils d’aujourd’hui pèsent 80 grammes, peuvent réduire les arythmies ventriculaires, ont également une fonction pacemaker et une fonction de resynchronisation si nécessaire. Le DAI « classique » : points forts/points faibles Le DAI « classique » se compose d’une, deux ou trois sondes endocavitaires (oreillette droite, ventricule droit, sinus coronaire) et d’un boitier placé en région pectorale gauche ou droite (Fig 1). SYSTÈME DE DÉFIBRILLATION ENDOCAVITAIRE « CLASSIQUE »La sonde du sinus coronaire sert à stimuler la face épicardique du ventricule gauche dans un système de resynchronisation • Les sondes sont implantées par voie veineuse, sous contrôle de scopie. La sonde de DAI est positionnée dans le ventricule droit et s’insère dans l’endocarde grâce à une micro vis. Cette intervention peut être réalisée sous anesthésie locale et dure entre 30 minutes et 3 heures selon le nombre de sondes nécessaires. La sonde de DAI comporte un dipôle distal de détection et de stimulation, semblable à une sonde de pacemaker et un ou 2 coïls servant à la défibrillation (Fig 2). FONCTIONNEMENT DU DAI « CLASSIQUE » Figure 2 La détection du trouble du rythme se fait par ce dipôle distal. Le choc électrique est délivré entre le boitier et le coïl. (Fig 2) Le DAI a montré son efficacité concernant la diminution de la mortalité en prévention secondaire et primaire. 1 Pour réduire une tachycardie ventriculaire le DAI a la possibilité de produire soit une salve de stimulation plus rapide qui va réduire la tachycardie de manière tout a fait indolore pour le patient (SAT : stimulation antitachycardique) soit un choc électrique (35 à 40 Joules, douloureux pour le patient) (Fig 3). Dans le cas d’une fibrillation ventriculaire, un choc sera délivré. Tous les appareils ont une fonction pacemaker, peuvent être associés à un système de télésurveillance, ont un volume d’environ 45 cm3 et une durée de vie de 5 à 10 ans. L’implantation de ce type d’appareil nécessite un abord vasculaire, l’usage de la scopie et expose le patient à des complications liées essentiellement aux sondes. En effet, le matériel implanté subit l’usure du temps. Pour le boitier cela se manifeste par une usure de la pile et la nécessité de le changer après 4 à 10 ans selon l’usage que le patient va en faire. Le changement de boitier est un geste techniquement simple. L’autre matériel est la sonde. La technologie de la sonde est beaucoup plus complexe. Elle doit allier la résistance nécessaire aux contraintes mécaniques (au niveau du boitier et dans les cavités cardiaques) et la souplesse puisque elle se trouve dans les cavités cardiaques. On peut être amené à proposer une SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 5 A D LE POINT SUR... B C Figure 3A : Tracé de réduction d’une tachy ventriculaire par SAT A : piste atriale B : piste ventriculaire tachycardie ventricul C : SAT D : retour en rythme EXEMPLES DE THÉRAPIES DÉLIVRÉES PAR UN DAI ENDOCAVITAIRE. TRACÉ DE DÉFIBRILLATEUR SAT : stimulation antitachycard 3 d’une : Exemples deventriculaire thérapies par un DAI endocavitaire ▼Figure Réduction tachycardie pardélivrés SAT ▼ Réduction d’une fibrillation ventriculaire par choc interne Figure 3A : Tracé de défibrillateur: A d’une tachycardie réduction A D C • B ventriculaire par SAT A : piste atriale B : piste ventriculaire, rythme en tachycardie B ventriculaire C C : SAT D : retour en rythme sinusal D SAT : stimulation antitachycardique A Figure 3A et 3B extraction de sonde dans 2 circonstances principales : l’usure de la sonde (naturelle ou prématurée, extracB tion se discutant au cas par cas) et l’infectionCdu matériel (extraction obligatoire dans cette situation). Pourquoi cette différence ? En fait l’extraction de sonde est un exercice difficile. En vieillissant la sonde devient adhérente aux structures qu’elle rencontre : système veineux, valve tricuspide, paroi cardiaque. Le geste d’extraction consiste à retirer cette sonde en totalité sans altérer les tissus voisins. Deux techniques sont possibles : l’extraction percutanée (la plus fréquente), l’extraction chirurgicale (très invasive). L’extraction percutanée consiste à extraire la sonde en tirant dessus par son point d’insertion vasculaire (on a la possibilité d’utiliser des outils spécifiques d’extraction comme des gaines mécaniques ou des gaines laser) ou en utilisant des lassos par voie fémorale. L’extraction percutanée expose à un risque de plaie vasculaire ou cardiaque. Le taux de complication grave des extractions percutanées est de 1 à 2% avec un taux de décès de 0,1%. 2-3 L’extraction chirurgicale se fait par sternotomie, et nécessite parfois la circulation extracorporelle. Elle est réservée aux cas les plus complexes. Le point faible de la défibrillation endocavitaire est donc lié aujourd’hui aux problématiques de gestion de sonde et au risque d’infection. Le taux de fracture de sonde de DAI avoisine les 20% à 10 ans et le taux d’infection 2 à 5%, il est plus important en cas de reprise ou de geste complexe (changement de boitier, nouvelle sonde, upgrade en biventriculaire). 4-5 Un patient implanté jeune sera donc confronté à un moment ou un autre à un problème de sonde avec les risques inhérents à l’extraction ou à l’ajout d’une sonde supplémentaire. La multiplication des gestes l’expose à plus d’infections. C : SAT : stimulation antitachycardique D : retour en rythme sinusal • A : piste atriale B : piste ventriculaire, rythme en tachycardie ventriculaire Figure 3B défibrillate Réduction ventricula A : piste a B : piste v en tachyc C : SAT D : retour Figure 3B: Tracé de défibrillateur Réduction d’un fibrillation ventriculaire par choc interne A : piste atriale LeDmatériel actuellement commercialisé est entièrement B : piste ventriculaire, rythme sous cutané, composé d’un boitier et d’une sonde de en tachycardie ventriculaire défibrillation. Le boitier est positionné dans la région C : SAT basithoracique ligne axillaire moyenne, en D :gauche, retoursur enlarythme sinusal Le DAI sous-cutané : quel apport ? position pré ou rétromusculaire (Fig 4). DAI SOUS-CUTANÉ - Boitier : Volume 59,5 cc, dimensions 83,1 × 69,1 × 12,7 mm, 130 grammes Sonde : longueur totale 45 cm, longueur du coïl 8 cm, diamètre maximale 3 mm Coïl de défibrillation Sonde de défibrillation Boitier Figure 4 La différence fondamentale avec le DAI « classique » est que la sonde a un trajet uniquement sous cutané. Il n’y a plus aucun matériel intravasculaire ou intracardiaque. L’appareil délivre un choc entre le boitier en position basithoracique gauche et le coïl sous-cutané parasternal droit ou gauche. La détection du trouble du rythme se fait de manière bipolaire selon 3 possibilités (Fig 5). Il est possible de programmer une ou deux zones de thérapies (programmables entre 170 et 250 bpm). Le traitement est le même dans les deux zones, à savoir des chocs de 80 joules (Fig 6). L’idéal serait donc de se passer de la sonde !!! SEPTEMBRE 2015 6 CORDIAM SCHÉMA ILLUSTRANT LE POSITIONNEMENT SOUS CUTANÉ DU BOITIER ET DE LA SONDE QUI EST PLACÉE DANS CET EXEMPLE EN PARASTERNAL GAUCHE. Electrode distale de détection Electrode proximale de détection Boitier Les trois flèches de couleur représentent les 3 vecteurs possibles pour la détection Flèche jaune « vecteur primaire » entre l’électrode proximale et le boitier Flèche rouge « vecteur secondaire » entre l’électrode distale et le boitier Flèche bleue « vecteur supplémentaire » entre les électrodes proximale et distale Figure 5 Dans la zone la plus basse, il est possible de programmer un algorithme de discrimination basé sur la morphologie. La durée de vie de l’appareil est estimée à 7 ans, en utilisation classique avec une capacité d’environ 100 chocs. Il n’y a pas de fonction pacemaker hormis une RÉGULARISATION D’UNE TACHYCARDIE VENTRICULAIRE PAR UN CHOC INTERNE PAR UN DAI SOUS-CUTANÉ A : rythme sinusal B : Tachycardie ventriculaire C : Choc D : retour au rythme sinusal Figure 6 CORDIAM stimulation post choc optionnel de 30 secondes au maximum à 50 bpm. LES PLUS DU DAI SOUS CUTANE L’avantage majeur est l’absence de matériel intravasculaire et intracardiaque. La sonde est différente technologiquement puisque en position sous-cutanée : elle est plus grosse 12 french versus 7 à 8 french en moyenne pour les endocavitaires, elle est pleine et non creuse. Cette différence technologique rendue possible par la position sous-cutanée en fait un matériel beaucoup plus robuste. A ce jour aucune rupture de sonde n’a été décrite. En ce qui concerne le risque d’infection du matériel, celui-ci existe toujours mais il n’y a aucun risque d’endocardite et le risque de bactériémie est beaucoup plus faible. Si infection il y a, elle est donc moins dangereuse pour le patient. Enfin l’extraction de la sonde, obligatoire pour traiter l’infection, et nécessaire en cas de rupture de sonde est simple puisque le matériel est sous cutané. L’expérience d’extraction de cette sonde est limitée aux cas d’infection survenue dans les mois suivant l’implantation. La sonde a été très simple à extraire dans ces situations puisqu’implantée de manière très récente. Cependant en se projetant dans 5 ou 10 ans sa position sous-cutanée exclut tout risque de plaie vasculaire ou cardiaque et donc simplifiera grandement le geste de l’extraction. Petit plus : la technique d’implantation en 2 incisions A B C D SEPTEMBRE 2015 7 LE POINT SUR... (une incision en regard du boitier, une incision au niveau de l’électrode proximale de détection, partie basse du sternum) permet l’absence de cicatrice visible avec un teeshirt très échancré ! Il n’y a quasiment pas besoin de scopie pour implanter cet appareil. Il est utile de s’en servir quelques secondes avant l’intervention pour être certain que les positions de la sonde et du boitier sont correctes par rapport au ventricule gauche. LES MOINS DU DAI SOUS-CUTANÉ Cet appareil ne possède qu’un type de thérapie, les chocs internes. Il n’y a à ce jour pas de possibilité de faire de la stimulation antitachycardique. De même il n’y a pas de fonction pacemaker sur cet appareil. En effet stimuler nécessite la délivrance d’un courant de 200 milliampères entre une électrode de la sonde et le boitier et ceci est faisable mais douloureux pour le patient. Ce qui explique qu’il n’y a pas de fonction pacemaker hormis une fonction post choc de 30 secondes et pas de SAT. Cette technologie est donc exclue pour les patients ayant besoin de la fonction pacemaker et pour les patients qui ont une indication de resynchronisation (40% des patients implantés en France en 2014). Ce défibrillateur n’est pas recommandé chez des patients faisant de la tachycardie ventriculaire fréquente accessible à la stimulation antitachycardique. Le boitier délivre 80 joules contre 40 pour les boitiers classiques. Cette différence s’explique par la nécessité d’un choc de plus haute énergie car la dispersion de l’énergie est plus grande quand elle est délivrée en sous-cutané et non dans la cavité cardiaque. La différence en terme de ressenti par le patient ne semble pas importante, les deux étant très douloureux (ressenti comme un violent coup de poing). Par ailleurs ce boitier sous-cutané est plus gros (59,5 cm3 contre 45 cm3 pour les endocavitaires classiques), ce qui aujourd’hui présente un frein pour certains cardiologues dans son utilisation. Précisons que nous implantons depuis 2015, la génération 2 de ce boitier, qui est 20% moins volumineux que la première génération, implanté avant 2015. Par ailleurs sa position basithoracique gauche le rend moins gênant pour le patient.. La durée de vie du boîtier sous-cutané est actuellement de 7 ans, contre environ 10 ans pour un boitier endocavitaire. Un des points important concernant cet appareil est la détection. La détection d’un défibrillateur est sa capacité à écouter le rythme cardiaque sans interférences (myopotentiels, onde T ….). Cette détection se fait sur un appareil classique par un dipôle situé sur la sonde du DAI, très proche du myocarde, limitant ainsi les interférences (Fig 2). Dans le cas du défibrillateur sous-cutané, la détection se fait à partir d’un des trois dipôles sous-cutanés, beaucoup plus large et donc soumis éventuellement aux inter- férences. Le travail fait sur ce signal montre que la détection est tout à fait correcte avec un taux initialement élevé de thérapie inappropriée dans les premières études (10 à 15%) avoisinant maintenant un taux acceptable de 7%. 6 Le défibrillateur sous-cutané : les études cliniques Le premier défibrillateur sous-cutané a été implanté chez l’homme en juillet 2008 en Nouvelle Zélande. La première implantation en France a été réalisée en 2012. A ce jour, plus de 10000 S-ICD (défibrillateur sous-cutané) ont été implantés dans le monde, 500 en France et plus de 1500 patients ont été inclus dans des études cliniques ou des registres. Le taux de réduction d’une TV ou d’une FV spontanées est de 95,5 à 100% selon les études.7 Dans le registre EFFORTLESS, le taux d’efficacité du premier choc est de 88%, 100% au terme des 5 chocs. On note également un taux de complication tout confondu (implantation et suivi) de 6,4% au terme d’un suivi d’un peu plus de 18 mois. 6 Les résultats de suivi à 2 ans pour 882 patients (plus grande cohorte publiée à ce jour, issus du pooling des patients des études IDE et EFFORTLESS) confirment l’efficacité de cet appareil : 90,9 % de succès du premier choc et 98,2 % au terme des 5 chocs. On note également une tendance à la diminution des chocs inappropriés avec l’expérience et les évolutions technologiques, 4,5% de thérapies inappropriées dans le 4ème quartile des patients inclus dans ce travail. 8 Le défibrillateur sous-cutané : pour quels patients ? Nous avons aujourd’hui un recul suffisant pour affirmer que ce défibrillateur est efficace pour réduire les troubles du rythme ventriculaires. Par contre, comme nous l’avons vu il ne possède pas toutes les fonctionnalités d’un appareil classique endocavitaire, il est donc réservé uniquement à certains patients et non indiqué chez d’autres. Le profil du patient idéal pour ce type de défibrillateur est le patient jeune ou relativement jeune avec une espérance de vie supérieure à 10 ans et à risque de fibrillation ventriculaire ou tachycardie ventriculaire rapide ou avec un taux d’événements rythmiques pas trop fréquent. Les patients idéaux sont les patients ayant une canalopathie (QT long et court, Brugada, tachycardie ventriculaire catécholergique), une fibrillation ventriculaire idiopathique, une cardiomyopathie hypertrophique, les patients ayant des accès veineux complexes (cardiopathies congénitales), les patients ayant présenté une complication infectieuse ou à haut SEPTEMBRE 2015 8 CORDIAM risque infectieux (dialyse, KT centraux…). Les patients pour lesquels, le choix entre le DAI endocavitaire et le DAI sous-cutané est plus difficile sont les patients implantés en prévention primaire d’une cardiopathie à fraction d’éjection basse, en particulier les patients de moins de 50 ans. Pour ceux-là la question est : vaut-il mieux un appareil sous-cutané qui ne délivre que des chocs (en acceptant de se passer de la fonction SAT) ou un endocavitaire avec fonction pacemaker et SAT mais nous exposant à des complications de sondes ? (Tableau) La réponse viendra peut-être naturellement avec l’évolution technologique de ces appareils sous-cutanés. Simplifier les appareils et les techniques d’implantation est toujours un progrès, alors ce défibrillateur sous-cutané constitue un vrai progrès aujourd’hui pour les patients et leurs cardiologues. Certains points ne sont pas totalement éclairés à ce jour, en particulier sur la robustesse de la sonde à long terme du fait du caractère récent de son utilisation. Cette technologie émergente manque également à ce jour d’une étude randomisée comparant le S-ICD et le défibrillateur avec sonde endocavitaire : l’étude PRAETORIAN devrait répondre à cette attente. 8 Conclusion Le défibrillateur sous-cutané, implanté depuis 2008, est une nouvelle technologie. Cet appareil est entièrement sous-cutané sans matériel intravasculaire ou cardiaque, simplifiant son implantation et son explantation si nécessaire. Aujourd’hui il ne possède pas toutes les fonctionnalités d’un défibrillateur classique. Nous implantons actuellement la seconde génération, de ces boitiers déjà moins gros que le boitier précédent, avec une longévité plus importante et avec la télésurveillance pour cette fin d'année 2015. Gageons que les générations futures vont progressivement intégrer les fonctionnalités qui nous manquent aujourd’hui. Cet appareil en l’état est la solution idéale pour protéger de la mort subite un patient jeune ayant une indication de défibrillateur sans indication de stimulation cardiaque. Le défibrillateur sous-cutané a fait son entrée dans les recommandations de l'ESC 2015 comme une alternative au défibrillateur endocavitaire.10 L'auteur déclare les liens d'intérêts suivants : consultant et études cliniques avec la société Boston. TABLEAU COMPARATIF ENTRE LE DAI CLASSIQUE ET DAI SOUS-CUTANÉ - SAT : stimulation antitachycardique DAI CLASSIQUE DAI SOUS-CUTANÉ Taille Plus petit (45 cm ) Plus gros (60 cm3) SAT OUI NON Fonction pacemaker OUI NON (juste stimulation post choc) Matériel intravasculaire OUI NON 8 à 10 ANS 7 ans Plus fine (7 à 8 french) Intravasculaire Plus grosse (12 french) Sous-cutanée 40 Joules 80 Joules OUI pour certaines marques NON OUI NON disponible fin 2015 Longévité boitier Sonde Choc max IRM compatible Télécardiolgie 3 Références 1. Epstein AE, DiMarco J, Ellenbogen K, Estes III M, et al. 2012 ACCF/AHA/HRS Focused Update Incorporated Into the ACCF/AHA/HRS 2008 Guidelines for Device-Based Therapy of Cardiac Rhythm Abnormalities. Journal of the American College of Cardiology 2013;61:e6-75 2. Bracke FA, Meijer A, Van Gelder LM. Lead extraction for device related infections: a single-center experience. Europace 2004;6:243-7 3. Brunner MP, Cronin EM, Duarte VE, et al. Clinical predictors of adverse patient outcomes in an experience of more than 5000 chronic endovascular pacemaker and defibrillator lead extractions. Heart Rhythm 2014;11:799-805 4. Kleemann T, Becker T, Doenges K, et al. Annual rate of transvenous defibrillation lead defect in implantable cardioverter-defibrillators over a period of > 10 years. Circulation 2007;115:2474-80 5. Bongiorni MG, Marinskis G, Lip GY, Svendsen JH, Dobreanu D, Blomström-Lundqvist C; Scientific Initiative Committee, European Heart Rhythm Association. How European centres diagnose, treat, and prevent CIED infections: results of an European Heart Rhythm Association survey. Europace 2012;14:1666-69 6. P. Lambiase. Worldwide experience with a totally subcutaneous implantable defibrillator: early results from the EFFORTLESS S-ICD Registry. European Heart Journal2014; 35:1657-65. 7. A Majithia, Advances in Sudden Death Prevention: the Emerging Role of a Fully Subcutaneous Defibrillator. The American Journal of Medicine 2014;127:188-94. 8. Martin C. Burke, DO, Michael R. Gold, MD PHD, Bradley P. Knight, MD. Safety and Efficacy of the Totally Subcutaneous Implantable Defibrillator. 2-Year Results From a Pooled Analysis of the IDE Study and EFFORTLESS Registry. JACC 2015 ;28:1605–15. 9. L Nordkamp. Rationale and design of the PRAETORIAN trail: a Prospective RAndomized comparaison of subcuTaneOus and tRansvenous implantable cardioverter-defibrillator therapy. Am Heart J 2012;163:753-60. 10 . S.-G. Priori, C. Blomström-Lundqvist, A. Mazzanti. 2015 ESC Guidelines for the management of patients with ventricular arrhythmias and the prevention of sudden cardiac death. The Task Force for the Management of Patients with Ventricular Arrhythmias and the Prevention of Sudden Cardiac Death of the European Society of Cardiology (ESC). European Heart Journal 2015. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 9 LE POINT SUR... Quel traitement de contrôle du diabète de type 2 à la sortie de l’USIC ? Bruno Vergès, Service Endocrinologie, Diabétologie et Maladies Métaboliques CHU de Dijon [email protected] e risque cardiovasculaire significativement élevé des patients diabétiques de type 2 fait qu’environ un tiers des patients hospitalisés pour syndrome coronaire aigu sont diabétiques. La question de la prise en charge du diabète chez les patients hospitalisés pour syndrome coronaire aigu est donc importante.. Lors de la première phase d’hospitalisation en Unité de Soins Intensifs Cardiologiques (USIC), la thérapeutique repose sur l’insuline administrée en perfusion continue systématiquement lorsque la glycémie à l’admission est supérieure ou égale à 1,80 g/l (10 mmol/L) (1). L’utilisation du protocole d’insulinothérapie proposé par le consensus conjoint de la SFD/SFC permet en règle de contrôler sans trop de difficultés la glycémie chez le patient diabétique lors de son passage en USIC (1). En revanche, la prise en charge du diabète à la sortie de l’USIC est nettement plus complexe car elle pose la question, souvent difficile, du traitement du diabète de type 2 et du choix des thérapies les plus adaptées en fonction du profil physiopathologique du diabète du patient. Par ailleurs, l’effet potentiellement délétère sur le système cardio-vasculaire de certains agents hypoglycémiants devra aussi être pris en compte. Principes généraux du traitement du diabète de type 2 Le diabète de type 2 comprend deux composantes physiopathologiques, l'insulino-résistance et le déficit sécrétoire en insuline, dont les rôles respectifs sont variables chez chaque patient. L'arsenal thérapeutique à notre disposition comprend des "armes" efficaces pour lutter contre l'insulino-résistance et d'autres destinées à traiter le déficit sécrétoire en insuline. La réduction pondérale, l’activité physique et la metformine sont des moyens efficients pour réduire l’insulino-résistance. Les glinides, les sulfamides hypoglycémiants et l’insuline représentent des traitements du déficit sécrétoire en insuline. Les incrétines, représentés par les inhibiteurs DPP-4 et les agonistes GLP-1, favorisent la sécrétion d’insuline mais réduisent aussi la sécrétion de glucagon et les agonistes GLP-1 ont de plus un effet réducteur de l’insulinorésistance. D'une façon générale, dans le diabète de type 2 la stratégie thérapeutique sera dictée par le profil physiopathologique du patient. Il est important, chez chaque patient, d'authentifier et de préciser l'importance de chaque cible thérapeutique: l'insulino-résistance et le déficit sécrétoire en insuline, afin de conduire un traitement optimal. Traitement du diabète à la sortie de l’USIC Après la période d’hospitalisation en USIC, le traitement par insuline n’est plus obligatoire et l’utilisation de plusieurs autres traitements hypoglycémiants peut être considérée. Le choix du traitement hypoglycémiant sera dicté par le profil physiopathologique du patient. Le choix du traitement optimal n’est pas toujours aisé et il ne faudra pas hésiter à prendre un avis spécialisé auprès d’un diabétologue et plus particulièrement en cas de diabète mal contrôlé (HbA1c ≥ 8%). METFORMINE La metformine est un traitement hypoglycémiant efficace chez les patients insulino-résistants. Certaines études ont montré un effet cardiovasculaire favorable de la metformine. Ainsi, dans l’étude UKPDS, le traitement par metformine en monothérapie était associé à une réduction significative de la mortalité (-36%), et du risque d’infarctus du myocarde (-39%) (2). Une méta-analyse a montré que le traitement par metformine était associé à une réduction de la morbidité et mortalité cardiovasculaire comparé aux autres traitements hypoglycémiants et le registre REACH a mis en évidence sous metformine une réduction de la mortalité, chez les patients diabétiques de type 2 avec antécédents cardiovasculaires même chez ceux atteints d’insuffisance cardiaque (1). Ainsi la metformine n’est pas contre-indiquée en post-syndrome coronaire aigu. En revanche elle reste contre-indiquée en cas d’insuffisance rénale (DFG < 30 ml/mn). Par ailleurs, bien que les données de plusieurs études rétrospectives SEPTEMBRE 2015 10 CORDIAM suggèrent des effets plutôt bénéfiques en cas d’insuffisance cardiaque (1), son utilisation demeure déconseillée en cas d’insuffisance cardiaque sévère. sous acarbose est rapportée dans une méta-analyse (6) . Ainsi, l’acarbose peut être utilisé en post syndrome coronaire aigu immédiat (1). SULFAMIDES HYPOGLYCÉMIANTS INHIBITEURS DPP-4 (DIPEPTIDYL PEPTIDASE-4) Comme les sulfamides hypoglycémiants se fixent sur les canaux potassiques ATP-dépendants, il a été suggéré qu’ils pourraient avoir un effet défavorable en réduisant le précondionnement ischémique. Les données de la littérature sur l’effet potentiellement délétère des sulfamides hypoglycémiants sur le myocarde ne sont pas convergentes(1). Les résultats divergents des différentes études sont peut-être liés au fait que les effets cardiovasculaires des sulfamides hypoglycémiants ne sont pas identiques entre les différentes molécules de la classe. Ainsi, dans le registre danois, le risque cardiovasculaire des patients traités par sulfamides était plus élevé sauf pour les patients sous gliclazide pour lesquels le risque cardiovasculaire n’était pas augmenté (3). Dans le registre FAST-MI les patients recevant des sulfamides à action spécifique sur le pancréas, gliclazide ou glimépiride ont une mortalité hospitalière moins élevée que ceux traités par glibenclamide(4). Ainsi, en post syndrome coronaire aigu immédiat, le consensus recommande de ne pas utiliser les sulfamides de première génération et le glibenclamide (1). Les inhibiteurs DPP-4 réduisent la dégradation du GLP-1 endogène permettant ainsi une augmentation de son taux plasmatique. Toutes les données sur l’innocuité des inhibiteurs DPP-4 sur le système cardiovasculaire sont rassurantes. Les études prospectives SAVOR avec la saxagliptine, EXAMINE avec l’alogliptine et TECOS avec la sitagliptine n’ont pas objectivé d’augmentation du risque cardiovasculaire avec cette classe thérapeutique. Ainsi les inhibiteurs DPP-4 peuvent être prescrits en post syndrome coronaire aigu immédiat (1). GLINIDES Les glinides sont des agents insulino-sécréteurs d’action courte se fixant sur le même récepteur que les sulfamides hypoglycémiants. Les données sur les effets cardiovasculaires des glinides sont limitées mais laissent penser que cette classe thérapeutique n’a pas d’effet délétère sur le cœur. En effet, les analyses réalisées à partir du registre Danois, n’objectivent pas d’augmentation significative du risque d’évènements cardiovasculaires sous glinides (1). Par ailleurs, l’étude prospective NAVIGATOR, n’a pas objectivé d’augmentation de la morbidité ou mortalité cardiovasculaire sous nateglinide comparé au placebo. Ainsi, l’utilisation des glinides est possible en post syndrome coronaire aigu immédiat (1). ACARBOSE L’acarbose est un inhibiteur de l’alpha-glucosidase qui ralentit l’absorption du glucose et qui, de ce fait, est efficace pour réduire la glycémie post-prandiale. Dans l’étude STOP-NIDDM, le traitement par acarbose était associé à une réduction significative du risque d’évènements cardiovasculaires(5). Par ailleurs, une diminution significative du risque d’infarctus du myocarde AGONISTES GLP-1 (GLUCAGON-LIKE PEPTIDE-1) Les agonistes GLP-1 réduisent l’hyperglycémie en favorisant la sécrétion d’insuline de façon glucose-dépendante et en diminuant la production de glucagon. Par ailleurs, ils entrainent une réduction pondérale significative et réduisent la résistance à l’insuline. Certaines études cliniques suggèrent un effet favorable des agonistes GLP-1 sur le système cardio-vasculaire (réduction de lésions de nécrose myocardique, amélioration de la contractilité du ventricule gauche et de la fonction endothéliale). Lorsque les données des études cliniques avec les 2 principaux agonistes GLP-1, exenatide et liraglutide, sont combinées, il apparait une réduction significative des évènements cardiovasculaires majeurs sous agonistes GLP-1 (7). Il faudra cependant attendre les résultats des études prospectives cardiovasculaires en cours afin de préciser si les agonistes GLP-1 possèdent un réel effet cardio-protecteur. Ainsi les agonistes peuvent être utilisés sans problème en post syndrome coronaire aigu immédiat (1). INSULINE Dans certains cas, le traitement par insuline sera nécessaire chez le patient diabétique de type 2, en particulier en cas de déficit sécrétoire en insuline. Les données de l’étude prospective ORIGIN sont rassurantes, car il n’a pas été observé d’augmentation du risque d’évènements cardiovasculaires majeurs ou de décès sous insuline glargine sur un suivi médian de plus de 6 ans. Ainsi, quand l’indication d’une insulinothérapie est retenue, celle-ci pourra être initiée sans crainte d’effet délétère propre sur le myocarde. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 11 Attention aux hypoglycémies Chez le patient diabétique coronarien, le risque d’hypoglycémies doit être au centre des préoccupations. En effet, les hypoglycémies, chez le patient diabétique de type 2 sont associées à un risque accru d’accidents cardiovasculaires et de mortalité. Ainsi, il a été montré, chez les patients diabétiques de type 2 traités par insuline, que la survenue d’hypoglycémies augmentait significativement le risque d’évènements cardiovasculaires de 60% chez ceux avec antécédents cardiovasculaires et de 49% chez les autres. Par ailleurs, il a été rapporté, dans cette étude, en cas d’hypoglycémies, une augmentation significative de la mortalité globale de 74% chez les patients avec antécédents cardiovasculaires. Ainsi, il est recommandé, chez les sujets coronariens de limiter, autant que possible, les traitements hypoglycémiants pourvoyeurs d’hypoglycémies (sulfamides, glinides, insuline), et s'ils sont nécessaires d’être particulièrement vigilant et de rechercher au moyen d’un interrogatoire approprié et de l’auto-surveillance glycémique la survenue d’éventuelles hypoglycémies. Quand demander un avis diabétologique ? Plusieurs consensus ont souligné l’intérêt d’adresser un patient diabétique à un diabétologue au cours d’une hospitalisation non directement reliée à son diabète (8). Solliciter une consultation auprès d’un diabétologue chez un patient diabétique hospitalisé pour un syndrome coronaire aigu offre l’occasion d’optimiser le traitement anti-diabétique ainsi que d’initier ou de compléter une prise en charge éducative au bénéfice du patient. En cas de diabète nouvellement découvert ou de diabète mal contrôlé, la prise en charge éducative apparait très importante. En effet, plusieurs études ont clairement montré que de nombreuses erreurs de prise médicamenteuse et de nombreux effets secondaires, et plus particulièrement les hypoglycémies, étaient liés à une absence d’éducation efficace au cours d’une hospitalisation (9). Plusieurs études ont montré qu’une éducation adaptée sur le diabète, au cours d’une hospitalisation entrainait un meilleur contrôle glycémique, moins d’hospitalisations ultérieures, moins d’acido-cétoses et une réduction de la durée d’hospitalisation (1). A côté de la prise en charge éducative, la prise en charge thérapeutique par un diabétologue apparaît aussi bénéfique. Il a, ainsi, été montré qu’une prise en charge thérapeutique par un diabétologue au cours d’une hospita lisation, non directement liée au diabète, entrainait un meilleur contrôle glycémique, moins d’hospitalisations pour diabète, une réduction de la durée d’hospitalisation et des couts de santé (1,10). Pour ces différentes raisons, le consensus de la Société Française de Cardiologie (SFC) et de la Société Francophone du Diabète (SFD) recommande de prendre systématiquement l’avis d’un diabétologue, pour tout patient diabétique hospitalisé pour un syndrome coronaire aigu dans les situations suivantes : • Diabète jusqu’à présent méconnu, découvert lors de l’hospitalisation pour syndrome coronaire aigu • Diabète mal contrôlé (HbA1c ≥ 8,0%) • Introduction d’une insulinothérapie lors de l’hospitalisation en cardiologie • Hypoglycémies sévères ou répétées Correspondance : Pr. Bruno Vergès Service Endocrinologie, Diabétologie et Maladies Métaboliques Hôpital du Bocage 2Bd Maréchal de Lattre de Tassigny F-21000 Dijon Tel : 03 80 29 34 53 Fax : 03 80 29 35 19 E-mail : [email protected] L'auteur déclare les liens d'intérêts suivants : consultant et études cliniques avec la société Boston. Références 1.Vergès B, Avignon A, Bonnet F, Catargi B, Cattan S, Cosson E, et al. Consensus statement on the care of the hyperglycaemic/diabetic patient during and in the immediate follow-up of acute coronary syndrome. Diabetes Metab. 2012 Apr;38(2):113–27. 2.Effect of intensive blood-glucose control with metformin on complications in overweight patients with type 2 diabetes (UKPDS 34). UK Prospective Diabetes Study (UKPDS) Group. Lancet Lond Engl. 1998 Sep 12;352(9131):854–65. 3.Horsdal HT, Johnsen SP, Søndergaard F, Jacobsen J, Thomsen RW, Schmitz O, et al. Sulfonylureas and prognosis after myocardial infarction in patients with diabetes: a population-based follow-up study. Diabetes Metab Res Rev. 2009 Sep;25(6):515–22. 4.Zeller M, Danchin N, Simon D, Vahanian A, Lorgis L, Cottin Y, et al. Impact of Type of Preadmission Sulfonylureas on Mortality and Cardiovascular Outcomes in Diabetic Patients with Acute Myocardial Infarction. J Clin Endocrinol Metab. 2010 Nov 1;95(11):4993–5002. 5.Chiasson J-L, Josse RG, Gomis R, Hanefeld M, Karasik A, Laakso M, et al. Acarbose treatment and the risk of cardiovascular disease and hypertension in patients with impaired glucose tolerance: the STOP-NIDDM trial. JAMA. 2003 Jul 23;290(4):486–94. 6. Hanefeld M, Cagatay M, Petrowitsch T, Neuser D, Petzinna D, Rupp M. Acarbose reduces the risk for myocardial infarction in type 2 diabetic patients: meta-analysis of seven long-term studies. Eur Heart J. 2004 Jan;25(1):10–6. 7.Monami M, Cremasco F, Lamanna C, Colombi C, Desideri CM, Iacomelli I, et al. Glucagon-Like Peptide-1 Receptor Agonists and Cardiovascular Events: A Meta-Analysis of Randomized Clinical Trials. Exp Diabetes Res [Internet]. 2011 [cited 2012 Oct 6];2011. Available from: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/ articles/PMC3092497/ 8. American Diabetes Assocaition. American Diabetes Association Recommenda tions. 2011;34(Suppl 1):S45–6. 9.Forster AJ, Murff HJ, Peterson JF, Gandhi TK, Bates DW. The incidence and severity of adverse events affecting patients after discharge from the hospital. Ann Intern Med. 2003 Feb 4;138(3):161–7. 10.Levetan CS, Passaro MD, Jablonski KA, Ratner RE. Effect of physician specialty on outcomes in diabetic ketoacidosis. Diabetes Care. 1999 Nov;22(11):1790–5. SEPTEMBRE 2015 12 CORDIAM LE POINT SUR... Traitement médical du rétrécissement aortique : quelles perspectives ? Jean-Luc MONIN, CHU Henri Mondor, Créteil [email protected] e rétrécissement aortique calcifié (RAC) est actuellement la première valvulopathie native dans les pays industrialisés et l’indication la plus fréquente de remplacement valvulaire chirurgical. Malgré les excellents résultats de la chirurgie et le développement rapide des prothèses transcatheter, le RAC reste associé à une morbidité et une mortalité non négligeables. De ce fait la perspective d’un traitement médical efficace pouvant retarder l’évolution, voire éviter l’intervention dans certains cas, est une hypothèse séduisante. Le RAC n’est pas un phénomène inéluctable lié au vieillissement : Il est maintenant reconnu que les calcifications valvulaires sont l’étape ultime d’un processus inflammatoire et sclérosant, déclenché par l’oxydation d’infiltrats lipidiques dans les sigmoïdes. Compte tenu des similitudes histologiques entre la sclérose valvulaire aortique et la plaque d’athérosclérose, il était logique de miser sur un effet bénéfique des statines dans le RAC. Après 5 études rétrospectives dont les résultats étaient positifs, 4 études randomisées n’ont retrouvé aucun bénéfice des statines sur la progression du RAC ni sur les évènements cardiovasculaires indésirables. En pratique, la prescription d’une statine n’est pas justifiée à l’heure actuelle dans le RAC, en dehors des indications habituelles en prévention primaire ou secondaire des accidents cardiovasculaires. L’échec des statines est probablement lié à la physiopathologie complexe du RAC, aboutissant au processus de calcification valvulaire et à l’hypertrophie ventriculaire gauche (HVG), qui sont 2 acteurs majeurs sur lesquels les statines n’ont pas d’effet. Il serait donc logique de tester l’efficacité de certains médicaments régulant l’HVG (bloqueurs du système Rénine-Angiotensine) ou d’autres médicaments efficaces sur l’ostéoporose (Biphosphonates) dans le RAC. Introduction Le rétrécissement aortique calcifié (RAC) est actuellement la valvulopathie n°1 dans les pays industrialisés, compte tenu du vieillissement de la population et de la quasi disparition des valvulopathies rhumatismales. D’après les données de la Cardiovascular Health Study, les prévalences respectives de la sclérose valvulaire aortique et du RAC sont de 25% et 2% chez les sujets âgé de plus de 65 ans 1. En cas de RAC CORDIAM serré symptomatique, le remplacement valvulaire donne d’excellents résultats à long terme au prix d’une mortalité opératoire globale de 3 à 4% 2. Cependant, la mortalité périopératoire peut atteindre 15 à 20% chez les patients les plus fragiles : sujets âgés, dysfonction ventriculaire gauche, lésions coronaires associées ou présence d’une insuffisance rénale 2. Par ailleurs, la morbidité liée au RAC (avant ou après chirurgie) n’est pas négligeable, notamment liée à l’hypertrophie concentrique du ventricule gauche et à la fibrose myocardique qui l’accompagne 3-5. De ce fait, la perspective d’un traitement médical efficace pouvant retarder l’évolution du RAC voire éviter la chirurgie dans certains cas, est une hypothèse séduisante, qui n’est pas totalement abandonnée malgré l’échec des statines. Facteurs de risque du rétrécissement aortique. La Cardiovascular Health Study est une étude longitudinale prospective portant sur 5201 sujets d’âge ≥ 65 ans, répartis dans 4 régions des Etats-Unis d’Amérique 1. Pour l’ensemble de la cohorte, une sclérose valvulaire aortique (sigmoïdes modérément épaissies et peu calcifiées sans obstacle hémodynamique) ou un RAC significatif (pic de vitesse trans-valvulaire (Vmax) > 2,5 m/s) étaient présents dans respectivement 26% et 2% des cas. Pour les sujets de plus de 85 ans, la prévalence d’une sclérose valvulaire ou d’un RAC était respectivement de 48% et 4% 1. Il est intéressant de noter qu’après 85 ans, plus de la moitié des sujets n’ont aucun épaississement ni calcification valvulaire, ce qui va fortement à l’encontre d’un processus dégénératif 1. Dans la Cardiovascular Health Study, les facteurs de risque indépendants de sclérose valvulaire ou de RAC étaient essentiellement : l’âge (Odds ratio par décade = 2,18, intervalle de confiance à 95% : 2,15-2,21), le sexe masculin (risque doublé par rapport aux femmes), le tabagisme, l’hypercholestérolémie et l’hypertension artérielle. Le diabète était également retrouvé comme facteur de risque pour le RAC dans une autre étude plus récente6. Il est donc intéressant de constater que la plupart des facteurs de risque d’athérosclérose sont présents en cas de sclérose valvulaire SEPTEMBRE 2015 13 LE POINT SUR... aortique. Cependant, d’autres facteurs différencient le RAC de l’athérosclérose, notamment le processus de calcification valvulaire. De la sclérose au rétrécissement valvulaire aortique. L’hypothèse initiale d’une maladie dégénérative liée à l’âge a été abandonnée depuis la mise en évidence des facteurs de risque communs avec l’athérosclérose et de similitudes histologiques entre la sclérose valvulaire aortique et la plaque d’athérosclérose. Le stade précoce de sclérose valvulaire est caractérisé par des brèches de l’endothélium et de la membrane basale des sigmoïdes avec épaississement sous endothélial sur le versant aortique des valves (Figure 1). Ces brèches sont la porte d’entrée pour les infiltrats lipidiques, essentiellement LDL cholestérol et Lipoprotéine - a. L’oxydation des lipides stimule l’activation des cellules inflammatoires, notamment les macrophages (dont certains sont saturés de lipides) et lymphocytes T 7. La sclérose valvulaire qui s’ensuit débute sur les zones de forte contrainte mécanique, et de faibles flux de cisaillement. Sur une valve à 3 sigmoïdes, la sclérose débute le long de la ligne d’insertion des valves (contrainte mécanique liée à la zone de plicature) et prédomine sur la sigmoïde non coronaire, privée de l’effet protecteur du flux coronaire 7. A l’opposé, les lésions débutent et prédominent sur le bord libre des valves et les éventuels raphés en cas de bicuspidie, zones de forte contrainte mécanique8. La sécrétion de cytokines pro inflammatoires (Tumor Necrosis Factor alpha, Interleukine-1) par les macrophages et lymphocytes T stimule HISTOLOGIE DE LA VALVE AORTIQUE DE LA MALADIE Histologie de la valve aortique montrant laMONTRANT progressionLA dePROGRESSION la maladie Histologie de la valve aortique montrant la progression de la maladie Facteurs déclenchants : Bicuspidie, facteurs génétiques, Facteurs déclenchants : Contraintes mécaniques Bicuspidie, facteurs génétiques, Contraintes mécaniques Lésion initiale lymphocyte Lésion T initiale lymphocyte T Aorte Maladie évoluée Progression de la maladie: Âge, sexe, tabac Progression de la maladie: augmentation des lipides sanguins Âge, sexe, tabac élévation de la PA augmentation des lipides sanguins diabète et syndrome métabolique élévation de la PA diabète et syndrome métabolique LDL Monocyte LDL Monocyte Maladie évoluée Aorte Endothelium Endothelium Transformation phénotypique Ca2 Ca2 Fibrosa Fibrosa Ventricularis Ventricularis Ventricule gauche LDL oxydé Macrophage LDL oxydé Macrophage Angiotensine II TGF - β Interleukine 1 β TGF - β TNF - alpha Interleukine 1 β TNF - alpha Angiotensine II Ostéopontine Ostéopontine Transformation phénotypique Wnt3, Lrp5 et β catenine Wnt3, Lrp5 et β catenine Fibroblaste Ostéoblaste Fibroblaste Ostéoblaste Calcification des phosphatases alcalines Calcification augmentation de l'ostéocalcine des phosphatases alcalines augmentation de l'ostéocalcine Ventricule gauche Anatomie de la valve aortique ANATOMIE DE LA VALVE AORTIQUE Anatomie de la valve aortique Normal Sclérose aortique Sténose aortique modérée Sténose aortique sévère Normal Sclérose aortique Sténose aortique modérée Sténose aortique sévère Figure 1 SEPTEMBRE 2015 14 CORDIAM la constitution d’une fibrose collagène par les fibroblastes. La dernière étape du processus consiste en une différenciation de certain fibroblastes en ostéoblastes qui fabriquent une matrice osseuse selon un processus activement régulé, comme l’atteste la présence d’Ostéopontine (protéine régulant l’ossification) dans les zones de calcification 9. A ce propos la disposition d’ensemble montre que les zones de calcification sont situées en profondeur et l’infiltrat cellulaire plus proche de l’endothélium ; ceci suggère un processus actif évoluant par strates successives d’inflammation suivies de fibrose avec calcification 7. Effet bénéfique des statines : l’espoir déçu Après 5 études rétrospectives 10-14 dont les résultats étaient en faveur d’un ralentissement de la progression du RAC sous statines (Tableau 1), 4 études randomisées ont toutes donné un résultat négatif 15-18 (Tableau 2). L’étude SALTIRE (Scottish Aortic Stenosis and Lipid Lowering Trial, Impact on Regression) a testé une forte dose d’Atorvastatine (80 mg/jour) versus placebo sur un groupe de 155 patients ayant un RAC modéré à sévère. Les critères de jugement étaient la progression de la Vmax (Doppler continu) et des calcifications valvulaires (Scanner IMATRON) 16. Après 2 ans de suivi en moyenne, malgré des taux de LDL-cholestérol nettement abaissés sous statine (63±23 mg/dl vs. 130±30 mg/ dl dans le groupe placebo, p<0,001), la progression annuelle de la Vmax (0.199±0.210 m/s vs. 0.203±0.208 m/s, p=0,95) et des calcifications valvulaires (22.3±21.0% vs. 21.7±19.8%, p=0,93) étaient strictement comparables dans les 2 groupes. Une analyse en sous-groupes selon le degré de sévérité initiale ne montrait aucun effet bénéfique, que le RAC soit modéré ou sévère au départ 16. Passons rapidement sur l’étude TASS (Tyrolean Aortic Stenosis Study) dont l’effectif était seulement de 47 patients, pour lesquels l’Atorvastatine (20 mg/j) n’a pas eu plus d’effet que le placebo sur la progression hémodynamique du RAC, ni sur les événement cliniques 17. A l’opposé, tous les espoirs étaient permis avec l’ambitieuse étude SEAS (Simvastatin and Ezetimibe in Aortic Stenosis) : l’association Simvastatine (40 mg/jour) plus Ezetimibe (10 mg/jour) était testée en double aveugle versus placebo chez 1 873 patients asymptomatiques ayant un RAC modéré 18. Le critère d’évaluation principal était un composite d’évènements cardiovasculaires assez large incluant notamment : décès d’origine cardiovasculaire, remplacement valvulaire aortique, infarctus non fatal et accident vasculaire cérébral. Une fois encore, malgré une baisse spectaculaire des taux de LDL-cholestérol dans le groupe traité et après un suivi moyen de plus de 4 ans, le taux d’évènements du critère principal était de 35,3% dans le groupe traité vs. 38,2% dans le groupe placebo (p= 0,59). Les taux de remplacement valvulaire aortique étaient également comparables dans les 2 groupes (28,3% vs. 29,9% , p= 0,97). Maigre consolation : le taux de pontages coronaires associés au remplacement ETUDES RÉTROSPECTIVES (OBSERVATIONNELLES) SUR L’EFFET DES STATINES DANS LE RAC. ND : non disponible. Autres abréviations idem texte. N patients Durée moyenne de suivi (mois) Aronow et al. 10 Novaro et al. 12 Shavelle et al. 14 Bellamy et al. 11 Rosenhek et al. 13 180 174 65 156 211 33 21 30 44 24 Caractéristiques en début d’étude 82±5 68±12 67±10 77±12 70±10 Femmes (%) 69 56 ND 42 49 Vmax (m/s) ND 2,65 ND 2,95 3,96 Evaluation Echo Echo Scanner Echo Echo Effet des statines sur la progression du RAC Positif Positif Positif Positif Positif Age moyen (ans) Tableau 1 SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 15 LE POINT SUR... ETUDES RANDOMISÉES PROSPECTIVES (DOUBLE AVEUGLE, VERSUS PLACEBO) SUR L’EFFET DES STATINES DANS LE RAC. (Abréviations idem texte). N patients Traitement actif Durée moyenne de suivi (mois) SALTIRE 16 TASS 17 SEAS 18 ASTRONOMER 15 155 47 1873 269 Atorvastatine 80 mg/j Atorvastatine 20 mg/j Simvastatine 40 mg/j + Ezetimibe 10 mg/j Rosuvastatine 40 mg/j 27 52 42 25 Caractéristiques en début d’étude Age moyen (ans) 68±10 67±11 68±10 58±14 Hommes (%) 70 60 61 61 Vmax (m/s) 3,4±0,6 3,3±0,2 3,1±0,5 3,2±0,4 Echo Echo Echo Echo Négatif Négatif Négatif Négatif Evaluation Effet des statines sur la progression du RAC Tableau 2 valvulaire était significativement plus faible dans le groupe Sinvastatine + Ezetimibe (p= 0,02). A croire que le sort s’acharne sur ces études RAC et statines : le taux de cancer était significativement plus élevé dans le groupe traité de SEAS par rapport au groupe placebo ; résultat heureusement démenti par une vaste méta analyse regroupant plus de 90.000 patients traités par statines 19 puis par les données de SEAS après une extension de suivi de 2 ans supplémentaires 20. Dernière étude randomisée, ASTRONOMER avait certains atouts dans sa manche : la plus puissante des Statines (Rosuvastatine, 40 mg/jour vs. placebo) était testée sur une cohorte de 269 patients dont la moyenne d’âge était plus jeune de 10 ans par rapport aux autres études (Tableau 2) ; donc à priori des RAC modérés à un stade relativement précoce dont la moitié de bicuspidies 15. Le critère principal d’évaluation était la progression hémodynamique, qui une fois de plus était rigoureusement comparable dans les 2 groupes après 3 ans et demi de suivi : progression annuelle du gradient moyen : 6,3±6,9 mmHg vs. 6,1±8,2 mmHg, p= 0,83. Les analyses de sousgroupes n’ont montré aucun bénéfice de la Rosuvastatine chez les patients les plus jeunes, ni en cas de bicuspidie 15. Enfin pour clouer définitivement le cercueil des statines dans le RAC : une analyse post hoc regroupant plus de 23 000 patients inclus dans 3 études randomisées (TNT, IDEAL et SPARCL) a également montré que la prescription d’une statine à forte dose n’empêchait pas la survenue d’un RAC chez des patients coronariens ou traités après un accident vasculaire cérébral 6. Inutile de préciser qu’à l’heure actuelle, les statines ne sont pas indiquées dans le but de ralentir la progression d’un RAC, en dehors des indications reconnues en prévention primaire ou secondaire des évènements cardiovasculaires. Après l’échec des statines : quelles perspectives ? D'après 4 études randomisées dont une vaste étude ayant inclus plus de 1 800 patients suivis pendant 4 ans, il n'existe aucun effet bénéfique des statines sur la progression d’un RAC, ni sur la survenue d’évènements cardiovasculaires adverses, mis à part un plus faible taux de pontages coronaires dans l’étude SEAS 15-18. Une des raisons probables de cet échec réside dans la physiopathologie complexe du RAC, plus complexe que celle de la plaque d’athérosclérose. L’effet protecteur des statines en prévention secondaire de l’infarctus du myocarde s’explique par leur action de stabilisation des plaques d’athérome, qui empêche la fissuration à l’origine de la thrombose coronaire. L’infiltration lipidique associée à une inflammation locale est bien la première étape d’une sclérose valvulaire aortique, mais elle est suivie du processus de calcification valvulaire, sur lequel les statines n’ont à priori pas d’effet 21. Il est intéressant de noter que les patients atteints d’ostéoporose ont une prévalence accrue de RAC, dont la progression semble plus rapide que chez les sujets contrôle 22. Des anomalies de la régulation du métabolisme calcique communes à l’ostéoporose et au RAC ont été démontrées, concernant notamment l’axe OPG/ RANKL, molécules régulant l’activité des SEPTEMBRE 2015 16 CORDIAM ostéoblastes/ ostéoclastes21. Il existe actuellement un anticorps monoclonal anti-RANKL (Denosumab) dont l’efficacité a été démontrée sur les fractures ostéoporotiques chez les femmes ménopausées23. Il serait donc logique de tester l’effet du Denosumab sur la progression des calcifications valvulaires aortiques. De même, d’autres médicaments plus classiques de l’ostéoporose comme les biphosphonates mériteraient également d’être testés dans le RAC21. Par ailleurs, l’hypertrophie ventriculaire gauche secondaire au RAC et la fibrose myocardique qu’elle induit sont des facteurs majeurs de morbidité et de mortalité, y compris après remplacement valvulaire 4. Au vu de l’effet protecteur des bloqueurs du système Rénine-Angiotensine dans l’HTA, ces molécules mériteraient également d’être évaluées dans le RAC21. En effet, une étude observationnelle récente est en faveur d’une réduction de mortalité et des évènements cardiovasculaires adverses chez les patients ayant un RAC et traités par les inhibiteurs de l’enzyme de conversion 24. Conclusions Première valvulopathie native dans les pays industrialisés, touchant entre 2 et 4% de la population âgée de plus de 75 ans, le RAC est une source majeure de morbidité et mortalité. A côté du remplacement valvulaire chirurgical qui reste le traitement curatif de référence, il y a certainement une place pour des traitements médicamenteux qui permettraient de ralentir la progression hémodynamique du RAC et/ ou prévenir la survenue de certaines complications cardiovasculaires. L’échec des statines dans ce domaine est probablement lié au fait que ces molécules n’ont que peu ou pas d’effet sur le processus de calcification valvulaire ni sur l’HVG, qui sont 2 facteurs majeurs de morbidité et de mortalité. Il est donc raisonnable de placer un certain espoir dans des molécules actives sur l’HVG et la fibrose myocardiques (bloqueurs du système RénineAngiotensine) ou sur la régulation du processus d’ossification (Biphosphonates, Denosumab). Reste à convaincre les chercheurs et l’industrie du bien fondé d’entreprendre (et de financer) ces études. Références 1. Stewart BF, Siscovick D, Lind BK, et al. Clinical factors associated with calcific aortic valve disease. Cardiovascular Health Study. Journal of the American College of Cardiology 1997;29:630-4. 2. Brennan JM, Edwards FH, Zhao Y, et al. Long-term survival after aortic valve replacement among high-risk elderly patients in the United States: insights from the Society of Thoracic Surgeons Adult Cardiac Surgery Database, 1991 to 2007. Circulation 2012;126:1621-9. 3. Azevedo CF, Nigri M, Higuchi ML, et al. Prognostic significance of myocardial fibrosis quantification by histopathology and magnetic resonance imaging in patients with severe aortic valve disease. Journal of the American College of Cardiology 2010;56:278-87. 4. Dweck MR, Joshi S, Murigu T, et al. Midwall fibrosis is an independent predictor of mortality in patients with aortic stenosis. Journal of the American College of Cardiology 2011;58:1271-9. 5. Herrmann S, Stork S, Niemann M, et al. Low-gradient aortic valve stenosis myocardial fibrosis and its influence on function and outcome. Journal of the American College of Cardiology 2011;58:402-12. 6. Arsenault BJ, Boekholdt SM, Mora S, et al. Impact of high-dose atorvastatin therapy and clinical risk factors on incident aortic valve stenosis in patients with cardiovascular disease (from TNT, IDEAL, and SPARCL). The American journal of cardiology 2014;113:1378-82. 7. Otto CM, Kuusisto J, Reichenbach DD, Gown AM, O'Brien KD. Characterization of the early lesion of 'degenerative' valvular aortic stenosis. Histological and immunohistochemical studies. Circulation 1994;90:844-53. 8. Pachulski RT, Chan KL. Progression of aortic valve dysfunction in 51 adult patients with congenital bicuspid aortic valve: assessment and follow up by Doppler echocardiography. Br Heart J 1993;69:237-40. 9. O'Brien KD, Kuusisto J, Reichenbach DD, et al. Osteopontin is expressed in human aortic valvular lesions. Circulation 1995;92:2163-8. 10. Aronow WS, Ahn C, Kronzon I, Goldman ME. Association of coronary risk factors and use of statins with progression of mild valvular aortic stenosis in older persons. The American journal of cardiology 2001;88:693-5. 11. Bellamy MF, Pellikka PA, Klarich KW, Tajik AJ, Enriquez-Sarano M. Association of cholesterol levels, hydroxymethylglutaryl coenzyme-A reductase inhibitor treatment, and progression of aortic stenosis in the community. Journal of the American College of Cardiology 2002;40:1723-30. 12. Novaro GM, Tiong IY, Pearce GL, Lauer MS, Sprecher DL, Griffin BP. Effect of hydroxymethylglutaryl coenzyme a reductase inhibitors on the progression of calcific aortic stenosis. Circulation 2001;104:2205-9. 13. Rosenhek R, Rader F, Loho N, et al. Statins but not angiotensin-converting enzyme inhibitors delay progression of aortic stenosis. Circulation 2004;110:1291-5. 14. Shavelle DM, Takasu J, Budoff MJ, Mao S, Zhao XQ, O'Brien KD. HMG CoA reductase inhibitor (statin) and aortic valve calcium. Lancet 2002;359:1125-6. 15. Chan KL, Teo K, Dumesnil JG, Ni A, Tam J. Effect of Lipid lowering with rosuvastatin on progression of aortic stenosis: results of the aortic stenosis progression observation: measuring effects of rosuvastatin (ASTRONOMER) trial. Circulation 2010;121:306-14. 16. Cowell SJ, Newby DE, Prescott RJ, et al. A randomized trial of intensive lipid-lowering therapy in calcific aortic stenosis. The New England journal of medicine 2005;352:2389-97. 17. Dichtl W, Alber HF, Feuchtner GM, et al. Prognosis and risk factors in patients with asymptomatic aortic stenosis and their modulation by atorvastatin (20 mg). The American journal of cardiology 2008;102:743-8. 18. Rossebo AB, Pedersen TR, Boman K, et al. Intensive lipid lowering with simvastatin and ezetimibe in aortic stenosis. The New England journal of medicine 2008;359:1343-56. 19. Baigent C, Keech A, Kearney PM, et al. Efficacy and safety of cholesterol-lowering treatment: prospective meta-analysis of data from 90,056 participants in 14 randomised trials of statins. 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Calcific aortic stenosis--time to look more closely at the valve. The New England journal of medicine 2008;359:1395-8. CORDIAM SEPTEMBRE 2015 17 LE POINT SUR... Bénéfice cardio-vasculaire d’un bon contrôle glycémique du diabète de type 2 l’étude VADT à 10 ans change la donne Bernard Charbonnel, Université de [email protected] l est habituel de dire qu’un contrôle glycémique strict n’a finalement pas grand intérêt pour prévenir ou stabiliser les complications cardiovasculaires du diabète de type 2, sur le vu des résultats des 4 grandes études d’événements qui posaient précisément cette question, UKPDS, ACCORD, ADVANCE et VADT. Dans ces 4 études, qui comparaient un contrôle glycémique dit standard à un contrôle glycémique strict, le critère primaire de morbi-mortalité cardio-vasculaire ne montrait pas de différence significative entre les 2 niveaux de contrôle glycémique. D’où la conclusion, à vrai dire un peu rapide : un bon contrôle glycémique du diabète de type 2 prévient les complications microvasculaires de la maladie (rétinopathie – néphropathie…) mais n’est pas bien important pour ce qui représente pourtant la principale cause de morbi-mortalité de la maladie, à savoir le risque cardiovasculaire. À cet égard, c’est contrôler les autres facteurs de risque (lipides – hypertension artérielle…), à vrai dire presque constamment associés dans ce qu’il est convenu d’appeler le syndrome métabolique, qui importe. VADT Veterans Affair Diabetes Trial L’étude VADT vient de publier ses résultats après 10 ans de suivi et, très clairement, même si le débat reste ouvert, ces résultats permettent de « revisiter » les conclusions un peu hâtives qu’on avait jusqu’alors proposées. L’étude VADT, publiée en 2009 (1), avait recruté 1791 vétérans américains, de 60 ans de moyenne d’âge, avec 11.5 années de recul de la maladie diabétique, un très mauvais contrôle glycémique lors du recrutement (HbA1c à 9,4 %) et, dans plus de 40 % des cas, des complications cardio-vasculaires constituées. Ces patients ont été randomisés vers une stratégie hypoglycémiante intensive (n=892) ou conventionnelle (n=899). Assez logiquement, pour ce niveau de déséquilibre initial et pour cette durée de diabète, la plupart des patients étaient ou ont dû être mis sous insuline, en particulier dans le bras intensif : 95 % des patients (70 % dans le bras conventionnel). L’insuline était associée à différents traitement par voie orale, en premier lieu la rosiglitazone, suivie de la metformine et du glimépiride, bref un traitement lourd, logiquement plus lourd dans le bras intensif que dans le bras conventionnel. Moyennant quoi, l’HbA1c a été bien réduite, de façon stable pendant toute la durée de l’étude, à 6,9 % dans le bras intensif vs 8,4 % dans le bras conventionnel, différence importante de 1,5 %. La quasi-totalité des patients était sous antiagrégants,et sous statines et avait une pression artérielle bien contrôlée. Le critère primaire était un composite associant mortalité cardio-vasculaire, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, insuffisance cardiaque et différents gestes de revascularisation. Au terme de l’étude, d’une durée moyenne de 5,5 ans, ce critère primaire était réduit de 12 %, mais cette réduction n’était pas significative (à noter le nombre des patients <2000, ce qui limitait la puissance de l’étude…). La mortalité toutes causes était similaire dans les deux bras. Après la fin de l’essai clinique proprement dit, comme dans UKPDS et ADVANCE, les patients ont été suivis, en utilisant une base de données centralisée pour les événements « durs » (92,4 % des patients) et en collectant d’autres données par des questionnaires annuels (77,7 % des patients). Les résultats de ce suivi, au total sur à peu près 10 ans (en tenant compte des années de l’essai clinique), viennent d’être publiés (2). A la fin des 5.5 années de l’essai clinique, la différence HbA1c entre les deux bras initiaux de l’étude s’est ensuite réduite, avec une remontée de l’HbA1c dans le bras initialement intensif, à 7,8 % au terme de la première année de suivi, tandis que l’HbA1c restait à peu près stable dans le bras initialement conventionnel, à 8,3 %. Il n’en reste pas moins qu’a persisté une différence entre les deux bras, de 0,5 % la première année du suivi puis de 0,2 à 0,3 % pendant les 3 ans après la fin de l’essai, différence de contrôle glycémique qui n’a réellement disparu qu’à la fin du suivi. SEPTEMBRE 2015 18 CORDIAM Le critère primaire, un composite d’événements cardiovasculaires « durs », infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, insuffisance cardiaque, amputation pour gangrène ischémique, mort cardio-vasculaire, a été significativement réduit au terme des 10 ans de suivi de 17 % (HR : 0.83 ; 0.70 à 0.99). Cela représente 8,6 événements cardio-vasculaires majeurs prévenus pour 1000 patient-années, ou encore un événement prévenu pour 116 patient-années. La mortalité cardio-vasculaire a été réduite, mais de manière non significative, de 12 %. La mortalité toutes causes a été identique dans les deux groupes. (Tableau 1) Ce résultat permet sans doute, ce que font d’ailleurs les auteurs dans leur discussion, de « revisiter » les résultats des quatre grandes études d’événements (UKPDS – ACCORD – ADVANCE – VADT) ayant évalué si une diminution glycémique présentait ou non un bénéfice cardio-vasculaire. Tel était en effet la question posée par ces quatre études, au dessin très similaire, à savoir comparer 2 niveaux d’HbA1c quels que soient les moyens thérapeutiques utilisés, généralement l’addition de nombreux antidiabétiques et d’insuline, surtout dans le bras intensif. Autrement dit, ces études n’évaluent pas l’efficacité ou la sécurité de chacune des médications antidiabétiques utilisées. Rappelons qu’il ne faut donc pas confondre ces quatre études avec celles qui posent une question toute différente : une médication antidiabétique donnée présente-t-elle une bonne sécurité, comparée à un placebo, sans différence ou mineure d’HbA1c entre les deux bras, c’est le cas de ProActive pour la Pioglitazone, ORIGIN pour l’insuline Glargine, SAVOR, EXAMINE et TECOS pour les DPP4-inhibiteurs, ELIXA pour le Lixisenatide (un analogue du récepteur du GLP1 de courte durée d’action)… On voit que, finalement, les quatre études sont bien concordantes en faveur du traitement intensif. UKPDS UK Prospectiv Diabetes Study L’étude UKPDS (environ 4000 patients nouvellement diagnostiqués) a montré une réduction du risque d’infarctus du myocarde de 16%, à la limite négative de la significativité à 10 ans, puis significative durant le suivi, suivi qui a été très long et a également objectivé une réduction de la mortalité. Dans l’UKPDS, la différence d’HbA1c entre les deux bras a été modérée, de 0,9 %, différence qui a imdisparu à la fin de l’étude, raison pour laquelle on a invoqué, pour expliquer le bon résultat au-delà de 10 ans, « une mémoire glycémique »… Cela dit, pour une étude sur un nombre relativement limité de patients et avec une différence modérée d’HbA1c, ce bon résultat se dessinait nettement en fin d’essai, autrement dit sans qu’il soit nécessairement besoin de faire appel à ce concept de mémoire glycémique. ACCORD Action to Control CardiOvascular Risk in Diabetes ACCORD (plus de 10 000 patients, avec plus de 10 ans de durée moyenne de diabète et souvent des complications déjà constituées) : avec une différence d’HbA1c entre les deux bras relativement importante de 1,1 %, a été observée une réduction significative du risque d’infarctus du myocarde de 24 % après les 3.5 années de l’étude, étude interrompue à ce moment-là du fait d’un excès de mortalité. Cette surmortalité vient bien sûr, et légitimement, occulter le possible bénéfice coronarien. Cet excès de mortalité n’a été observé que dans ACCORD, pas dans les 3 autres études, et a été mis sur le compte d’une thérapeutique trop agressive (3), additionnant en excès les médications antidiabétiques chez des patients « non répondeurs » à des combinaisons thérapeutiques habituelles. Le sur-risque d’hypoglycémies sévères dans le bras intensif a peut-être aussi joué un rôle dans la surmortalité. EFFETS DU CONTROLE INTENSIF DE LA GLYCEMIE SUR LE TAUX D'EVENEMENTS CARDIOVASCULAIRES MAJEURS ET LA MORTALITE - Le critère primaire était le délai de survenue du 1er évènement cardiovasculaire majeur, critère composite associant infarctus, AVC, insuffisance cardiaque congestive nouvelle ou aggravée, amputation d'un membre pour gangrène, ou décès de cause cardiovasculaire Critères Traitement standardCritères Critères HR P 0,04 Evènements Taux Evènements Taux nombre de patients total pour 1000 personnes-année nombre de patients total pour 1000 personnes-année Critère primaire d'évènement cardiovasculairer majeur Critères secondaires Décès d'origine cardiovasculaire Décès toutes causes 288/688 52,7 253/703 44,1 0,83(0,70-0,99) 83/818 11,3 74/837 10,0 0,88(0,64-1,20) 0,42 258/818 30,3 275/837 32,0 1,05(0,89-1,25) 0,54 Tableau 1 - Étude VADT CORDIAM SEPTEMBRE 2015 19 LE POINT SUR... ADVANCE Action in Diabetes and Vascular Disease ADVANCE (plus de 10 000 patients, avec plus de 10 ans de durée moyenne de diabète et souvent des complications déjà constituées, mais avec un diabète au départ peu déséquilibré à 7.5% d’HbA1c ce qui explique qu’il n’a pas fallu de thérapeutiques aussi agressives que dans ACCORD pour obtenir un contrôle strict) : aucune différence de morbimortalité cardio-vasculaire entre les deux bras, ni à la fin de l’étude, ni après 10 ans de suivi. Il y a une grosse différence entre ADVANCE et les trois autres études, la faible différence d’HbA1c entre les deux bras. À la fin de l’étude, cette différence était de 0,67 % (6,5 vs 7,3%) mais l’intensification thérapeutique a été très progressive dans ADVANCE et la différence d’HbA1c a finalement été minime pendant les premières années de l’étude, pour n’être supérieure à 0,4 % que pendant environ deux ans… Pendant le suivi, cette différence a immédiatement disparu. Autrement dit, résultat négatif, mais pour une bien faible différence d’HbA1c sur le temps entre les deux bras, ce qui limite évidemment les conclusions puisque la question même posée par ces études repose sur une différence suffisante d’HbA1c. VADT ressemble à ACCORD, même type de population, même type de thérapeutique, mais avec une différence plus importante d’HbA1c, de 1,5 % pendant l’étude et qui s’est maintenue, même si à un moindre degré et en s’atténuant progressivement, pendant au moins 3 à 4 années du suivi. Un bénéfice cardio-vasculaire a été observé, sans surmortalité. Conclusions Dès lors, les conclusions provisoires qu’on peut proposer en 2015 sur cette question centrale du bénéfice cardio-vasculaire de la réduction glycémique dans le diabète de type 2, sont les suivantes : • la réduction glycémique prévient les complications cardio-vasculaires du diabète de type 2, à condition qu’il s’agisse d’une réduction glycémique suffisante, de l’ordre de 1 % ou plus de baisse d’HbA1c; • ce bénéfice prend un peu de temps, mais moins que ce qu’on avait tendance à dire, de l’ordre de 5 ans, ce qui correspond bien à ce que l’on connaît de la physiopathologie des complications du diabète (entre autres, le rôle de la glycation des protéines…), • sans qu’il soit besoin de faire appel au concept vague de « mémoire glycémique », sauf dire que ce bénéfice se maintient dans le temps; • contrairement à ce qui était suggéré jusqu’alors, ce bénéfice ne se limite pas aux patients nouvellement diagnostiqués et sans complications mais s’observe chez tous les patients, y compris les patients avec une durée de diabète importante et des complications déjà constituées; • la leçon de ACCORD est de dire qu’il ne faut pas additionner inconsidérément toutes les thérapeutiques disponibles lorsqu’un patient répond mal au traitement, mais plutôt analyser au cas par cas les raisons de cette résistance au traitement. Une approche cardiologique du diabète de type 2 ne doit donc pas se limiter, comme on l’entend parfois à tort, à prescrire une statine et à contrôler l’hypertension artérielle, elle doit également comporter le contrôle glycémique strict et donc avoir pour objectif, du moins pour une majorité des patients et avec si possible des stratégies thérapeutiques limitant le risque hypoglycémique, une HbA1c ≤ 7%. Conflits d’intérêts : Bernard Charbonnel has received fees for consultancy, speaking, travel or accommodation from: AstraZeneca, Bristol-Myers-Squibb, Boehringer-Ingelheim, Janssen, Lilly, Merck-Sharpe & Dohme, Novartis, Novo-Nordisk, Sanofi, Takeda. Références 1: Glucose Control and Vascular Complicationsin Veterans with Type 2 Diabetes William Duckworth, M.D., Carlos Abraira, M.D., Thomas Moritz, M.S.,Domenic Reda, Ph.D., Nicholas Emanuele, M.D., Peter D. Reaven, M.D.,Franklin J. Zieve, M.D., Ph.D., Jennifer Marks, M.D., Stephen N. Davis, M.D.,Rodney Hayward, M.D., Stuart R. Warren, J.D., Pharm.D., Steven Goldman, M.D.,Madeline McCarren, Ph.D., M.P.H., Mary Ellen Vitek, William G. Henderson, Ph.D., and Grant D. Huang, M.P.H., Ph.D., for the VADT Investigators N Engl J Med 2009;360 - 71 2: Follow-up of Glycemic Control and Cardiovascular Outcomes in Type 2 Diabetes Rodney A. Hayward, M.D., Peter D. Reaven, M.D., Wyndy L. Wiitala, Ph.D.,Gideon D. Bahn, Ph.D., Domenic J. Reda, Ph.D., Ling Ge, M.S.,Madeline McCarren, Ph.D., William C. Duckworth, M.D.,and Nicholas V. Emanuele, M.D., for the VADT Investigators N Engl J Med 2015;372:2197-206. 3:Epidemiologic Relationships Between A1C and All-Cause Mortality During a Median 3.4-Year Follow-up of Glycemic Treatment in the ACCORD Trial MATTHEW C. RIDDLE, MD, WALTER T. AMBROSIUS, PHD, DAVID J. BRILLON, MD, JOHN B. BUSE, MD, PHD, ROBERT P. BYINGTON, MPH, PHD, ROBERT M. COHEN, MD, DAVID C. GOFF, JR., MD, PHD, SAUL MALOZOWSKI, MD, PHD, KAREN L. MARGOLIS, MD, MPH, JEFFREY L. PROBSTFIELD, MD, ADRIAN SCHNALL, MD, ELIZABETH R. SEAQUIST, MD,FOR THE ACTION TO CONTROL CARDIOVASCULAR RISK IN DIABETES (ACCORD) INVESTIGATORS Diabetes Care 33:983–990, 2010 SEPTEMBRE 2015 20 CORDIAM LE POINT DE VUE... Les dosages inutiles en cardiologie Simon Weber Hôpital Cochin, Paris [email protected] l est clair que les dosages biologiques ont acquis, depuis maintenant une bonne décennie, une grande « autorité » dans le domaine de la cardiologie occupant notamment une position centrale dans les arbres décisionnels de la prise en charge des douleurs thoraciques, des dyspnées aiguës et de la gestion de l’insuffisance cardiaque chronique. A l’instar du ramage et du plumage chers à Jean De La Fontaine, cette autorité, parfois un peu tonitruante et intransigeante est indiscutablement basée sur une réelle utilité. Nul n’en doute. Cette utilité n’a-t-elle cependant pas, comme toute médaille, un revers ? N’a-t-on pas poussé trop loin la dictature du chiffre ? Telles sont les questions. La Cardiologie a longtemps été l’une des disciplines médicales les moins tributaires des dosages biologiques. A l’époque solennelle des « grandes questions » de l’internat ancienne formule, que certains d’entre nous ont encore pratiqué dans leur fringante jeunesse, au chapitre « signes biologiques » de la question insuffisance cardiaque chronique, figurait la sentence : « la diminution du contenu en oxygène du sang veineux prélevé au niveau de l’artère pulmonaire est le seul signe biologique de l’insuffisance cardiaque ». Le dosage de la CPK et ses divers avatars isoenzymatiques a participé dès la fin des années 60 au diagnostic de l’infarctus du myocarde mais sa place était plutôt confirmative que réellement décisionnelle et sa sensibilité était faible. L’impressionnante série de tests d’hémostase qui se sont succédés entre le milieu des années 50 et l’universalisation, un peu avant la fin du 20ème siècle de l’INR, était volontiers laissée au bon soin du généraliste et reconnaissons le, les cardiologues ne s’intéressaient pas suffisamment aux facteurs de risque métabolique, glucidiques ou lipidiques. Ceux d’entre nous qui souhaitaient, dans un espoir de carrière universitaire, associer une discipline fondamentale à la Cardiologie clinique choisissaient volontiers la physiologie, la pharmacologie voire l’histo-embryologie mais jamais (ou presque), la biochimie ! Le Cardio et le Labo (de dosage biologique) Maitre Labo sur un arbre* perché Tenait dans son bec un dosage Maitre cardio par les chiffres alléché Lui tint à peu près ce langage Et bonjour Monsieur du Labo Que vous êtes flashy, que vous me semblez beau Sans mentir si votre utilité Se rapportait à votre autorité, Vous seriez la clé de tous nos arbitrages *il s'agit bien d'un arbre décisionnel Le paysage a assez brutalement changé dans les années 85-90 avec la possibilité de modifier les facteurs de risque métabolique de l’athérome puis la mise au point indiscutablement décisive, des premiers marqueurs Troponine et BNP. Ces dosages ont représenté une avancée majeure qui a permis d’améliorer la prise en charge de nos patients. Il serait bien entendu totalement absurde, de chercher à minimiser l’importance de ces outils biologiques. Mon propos est plutôt de constater que présenté à un public, les cardiologues, n’ayant qu’une faible culture biochimique, et manquant donc d’esprit critique, les limites d’utilisation de ces résultats biologiques n’ont peut être, pas été suffisamment prises en compte ce qui peut aboutir parfois à des prises de décisions cliniques imparfaites voire quelques fois contre productives. A tout seigneur tout honneur ! Quelles sont les limites d’utilisation de sa majesté la Troponine ? La mise au point du dosage de la troponine a représenté un bond en avant des possibilités de détection de la souffrance cellulaire myocardique ou plutôt de la nécrose myocardique permettant de détecter des dégâts musculaires 10, 100 voire même peut être 1000 fois plus petits que ce que pouvaient détecter de façon fiable les dosages de CPK. Dans un premier temps, cette extrême sensibilité était censée s’accompagner d’un gain quasi parallèle en spécificité. Seul le myocarde nécrosé du coronarien pouvait générer une élévation de Troponine. Il est devenu rapidement évident que cela n’était pas vrai ; que toutes les souffrances myocardiques suffisamment intenses pour pouvoir entrainer des lésions cellulaires irréversibles pouvaient être à l’origine d’une SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 21 LE POINT DE VUE... élévation de la Troponine. Il est même devenu apparent, un peu plus tard, même si certains « marqueurologues » ne l’admettent que du bout des lèvres, qu’il peut y avoir des limites biochimiques de dosages liées au choix du réactif et que la troponine dosée dans le sang circulant peut parfois, dans ses diverses iso formes, ne pas être originaire du myocarde !!! Ces limites sont finalement modestes en rapport avec l’étendue des services rendus par les dosages de troponine mais n’ont pas été prises en compte de façon rationnelle. Par deux points il passe un cercle ! Le fameux « cycle de troponine » qui ne comporte que deux dosages illustre bien le rapport irrationnel avec la troponine… Euclide a postulé que par deux points il ne passait qu’une droite et non pas un cercle ! Il ne s’agit que d’un postulat mais c’est en application de ce postulat que nous construisons depuis plusieurs millénaires, des maisons qui tiennent debout et des ponts qui ne s’effondrent pas. Pourquoi donc continuer à appeler un cycle les résultats de deux dosages effectués à quelques heures d’intervalle ? Un deuxième exemple d’irrationalité est la gestion des dosages de Troponine effectués en dehors du milieu hospitalier. Il n’est pas rare, lorsqu’un dosage de troponine est effectué en ville et qu’en pratique, le résultat « positif », ne parvient au médecin prescripteur que plusieurs heures après (voire le lendemain matin) de voir s’organiser une prise en charge urgentissime, parfois médicalisée, parfois directement en salle de coronarographie alors que la période de risque rythmique maximale d’une part et celle de possibilité de sauvegarde myocardique par reperfusion d’autre part ne dure que quelques heures après le début du tableau clinique, tout du moins lorsqu’il s’agit d’un authentique infarctus du myocarde. Pour finir, quelques mots sur la course à l’hyper extra maxi sensibilité des dosages biologiques. La course au grossissement, la puissance du zoom, parait sans limite. Cette course est menée tambour battant par les fabricants de réactif et de matériel de dosage qui n’ont peut être pas pris le temps d’interroger les utilisateurs, urgentistes et cardiologues, sur l’arbitrage optimal entre sensibilité et spécificité. En pratique, nous sommes presque dans la situation d’un observateur qui n’aurait droit qu’au zoom hyperpuissant sans avoir la possibilité de regarder d’abord le paysage à l’œil nu. La pratique sécuritaire de la médecine amenant en pratique souvent à demander un dosage de troponine pour tout symptôme +/- douloureux localisé entre la pointe du menton et l’ombilic, il n’est pas étonnant d’avoir à gérer au quotidien, un flux important de symptômes bâtards à troponine positive ! L’obsession de ne pas méconnaitre, devant une douleur parfois atypique, un syndrome coronaire aigu est légitime. Le dosage des taux sanguins de Troponine contribue pleinement à cette démarche à condition d’être raisonné, d’être étayé par une ébauche de raisonnement médical logique et de s’intégrer aux données de l’interrogatoire de l’examen et à la lecture de l’ECG. Les résultats d’un dosage de Troponine « positif » prescrit sans aucune justification clinique peuvent avoir des conséquences graves, voire aussi dévastatrices que les conséquences de la méconnaissance d’un authentique syndrome coronaire aigu. Par exemple, si le symptôme a été mal analysé, l’examen clinique imparfait, la prise en compte d’un résultat d’un dosage de Troponine qui n’aurait jamais du être demandé, peut amener assez rapidement, le malade sur la table de coronarographie. S’il est âgé, éventualité de plus en plus fréquente, la probabilité de trouver une lésion coronaire de rencontre est importante, la tentation de la stenter parfois très, trop, beaucoup trop présente. Il n’est pas rare de se trouver ainsi tributaire d’une bithérapie antiplaquettaire alors même que le symptôme initial, qui n’aura bien sûr pas été amélioré par le stenting d’une sténose coronaire innocente, nécessitera quelques heures plus tard une intervention chirurgicale !!! De façon peut être un peu moins spectaculaire, l’angioplastie et le stenting d’une lésion coronaire «de rencontre » déclenche la prescription inutilement dangereuse d’antiplaquettaires parfois puissants (donc à risque hémorragique) et transforme pour le restant de ses jours, un patient, qui n’avait qu’une banale douleur pariétale, en coronarien avec toutes les implications psychologiques, sociales, familiales, que cela peut représenter. Bref, une vraie détérioration de la qualité de vie ! N’oublions donc pas que le dosage de la Troponine peut représenter une excellente réponse -à une question pertinente (lorsqu’il y a eu raisonnement clinique) mais aussi la réponse trompeuse à une question mal formulée voire même non formulée. Il est vrai qu’une réflexion statistique performante (l’implacable logique du 99ème percentile) associée à une analyse fine des différences entre le 1er et le 2ème dosage, permet de limiter les inconvénients de l’hypersensibilité. Dans la vraie vie, ces subtiles nuances ne sont pas toujours appliquées et à vouloir faire à tout prix le mieux… Le dosage du BNP La mise au point du dosage du BNP représente également une grande avancée dans la détection et la gestion de l’insuffisance cardiaque. Contrairement à la troponine, il n’y a pas de surutilisation de ce dosage lors de la prise en charge initiale d’une dyspnée, qu’elle soit aiguë ou chronique. Les problèmes de variation des normes en fonction de l’âge, de l’existence d’une zone d’incertitude entre les valeurs basses permettant d’exclure raisonnablement le diagnostic d’insuf- SEPTEMBRE 2015 22 CORDIAM fisance cardiaque et les valeurs très hautes permettant solidement de l’établir, ont été bien enseignés et sont en pratique bien pris en compte. L’usage itératif du dosage du BNP, raisonnablement espacé dans le temps, peut contribuer utilement à l’optimisation du traitement médicamenteux et non médicamenteux de l’insuffisance cardiaque. Le bilan est donc globalement positif ; la médaille l’emporte très largement sur le revers. La seule réserve serait la tentation de résumer le traitement d’un insuffisant cardiaque au suivi biologique de « son » BNP. Il peut être tentant de gérer une insuffisance cardiaque comme on pilote un Airbus en ayant les yeux rivés sur les nombreuses aiguilles, ou plutôt maintenant, affichages digitaux, du tableau de bord. Cette tentation a été le péché mignon des cardiologues à l’époque, somme toute éphémère de l’hémodynamique triomphante où la valeur de la pression capillaire était censée être le saint Graal de l’insuffisance cardiaque. Le relai est parfois pris maintenant par les taux sanguins de BNP dont les résultats sont attendus avec anxiété, chaque mois voire chaque quinzaine par le patient et discutés téléphoniquement avec le médecin, tel un résultat d’INR, sans prendre en compte les nombreux autres paramètres cliniques, biologiques, échographiques et surtout, symptomatiques du tableau, souventcomplexe et multifactoriel de l’insuffisance cardiaque. Il y a d’autres dosages que nous répétons un peu trop souvent tel le classique bilan lipidique renouvelé tous les ans voire tous les 6 mois voire même encore plus fréquemment, chez les patients recevant un traitement au long cours par statines. Le débat entre partisan et adversaire du « lower is better » est loin d’être clos comme en témoigne la diversité, parfois contradictoire, des préconisations des sociétés savantes. Surtout, on peut s’interroger sur l’intérêt d’un monitorage itératif du LDL cholestérol lorsque la posologie maximale de statines est atteinte ou chez les patients âgés voire très âgés ? Lorsque le LDL est inférieur à 1g/l chez un octogénaire tolérant bien sa dose de statines, n’est il pas plus raisonnable de cesser la surveillance biologique plutôt que d’être amené à envisager l’adjonction d’un deuxième hypolipidémiant à l’efficacité et à la tolérance incertaine ou d’envisager à cet âge, un régime alimentaire restrictif alors que la principale préoccupation est souvent la dénutrition ? Là aussi, ne nous laissons pas hypnotiser par la dictature du chiffre au détriment de la réflexion pratique de bon sens. Il y aussi des dosages encore inexistants dont nous aimerions bien disposer. Nous avons jusqu’à présent envisagé les écueils de la surutilisation, de la surexploitation des instruments biologiques performants dont nous disposons. Il y a d’autres domaines de notre pratique où nous aimerions par contre, disposer de dosages qui nous rendraient, et à nos patients, grand service ! Cela fait plusieurs décennies maintenant que nous avons compris, qu’en pathologie coronaire, le grand ennemi est la plaque instable, en imminence de rupture. Cette avancée physiopathologique décisive ne s’est malheureusement pas accompagnée de la mise au point d’un instrument diagnostique performant et utilisable en pratique clinique. .L’imagerie endocoronaire apporte quelques réponses mais encore faut il que le malade soit déjà sur la table de coronarographie ! La souffrance myocardique étant maintenant détectable à l’échelon de quelques dizaines de milligramme de tissu agressé, il est tentant de rêver à la mise au point d’un marqueur biologique, de la plaque coronaire, ou tout du moins de la plaque artérielle instable. Nous ne pouvons qu’espérer le succès de l’une des pistes de recherche sur ce sujet. De façon plus immédiate, nous sommes en demande, en vrai besoin, d’un test biologique facilement disponible et validé de l’efficacité des nouveaux anticoagulants oraux (NACO). Je rappellerai qu’il a fallu plusieurs décennies entre la première utilisation des AVK et la mise au point et l’acceptation universelle d’un test biologique standardisé : l’INR. L’un des grands arguments utilisés à l’appui de la prescription des NACO est l’absence de nécessité d’un contrôle biologique individuel. Malgré les soigneuses modulations de posologie effectuées en fonction de la créatinémie, de l’âge, etc… il n’échappe à aucun cardiologue qu’il est possible d’observer un accident thrombotique en cours de traitement par NACO et de déplorer une complication hémorragique grave voire gravissime sous ce même traitement. Cette nouvelle classe, au demeurant hétérogène, d’antithrombotiques, représente un progrès appréciable chez certains patients, notamment ceux dont l’INR était très difficiles à équilibrer. Le risque thérapeutique reste néanmoins élevé et l’efficacité incomplète. Il y a donc une place pour améliorer l’efficacité et/ou diminuer le risque par des dosages utilisables facilement en pratique quotidienne et dont la pertinence aura bien sûr été validée par des essais cliniques adaptés c'est-à-dire en pratique, concernant de vaste population de patients suivis pendant plusieurs années. Il existe actuellement quelques tests biologiques dont l’utilisation reste cependant confidentielle et surtout limitée aux suspicions de surdosage lors de la survenue des complications hémorragiques. J’aimerais être certain que de tels efforts de mise au point de tests de coagulation pertinents sont réellement en cours et à une échelle suffisante. L’histoire d’amour entre le cardio et le labo (de dosage biologique) est relativement jeune, nous ne sommes pas encore un vieux couple comme nos collègues endocrinologues, diabétologues, néphrologues ou internistes. Pour que le couple dure, il conviendrait de maintenir la passion mais d’y ajouter la raison. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 23 ELIQUIS® CRÉE LE LIEN ÉVÉNEMENTS THROMBOEMBOLIQUES 1 HÉMORRAGIES MAJEURES1 Prévention de l’accident vasculaire cérébral (AVC) et de l’embolie systémique chez les patients adultes atteints de fibrillation atriale non valvulaire (FANV) et présentant un ou plusieurs facteur(s) de risque tels que : antécédent d’AVC ou d’accident ischémique transitoire (AIT) ; âge ≥ 75 ans ; hypertension artérielle ; diabète ; insuffisance cardiaque symptomatique (classe NYHA ≥ II).2 Traitement de la thrombose veineuse profonde (TVP) et de l’embolie pulmonaire (EP), et prévention de la récidive de TVP et d’EP chez l’adulte (voir rubrique Mises en garde spéciales et précautions d’emploi pour les patients ayant une EP hémodynamiquement instable).2 Non remboursable et non agréé aux collectivités dans cette indication à la date du 21/10/2014. Demande d’admission à l’étude. Ce médicament fait l’objet d’une surveillance supplémentaire qui permettra l’identification rapide de nouvelles informations relatives à la sécurité. Avant de prescrire, consulter la place dans la stratégie thérapeutique sur www.has-sante.fr. Pour accéder aux mentions légales du médicaments, suivez ce lien http://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/ ou flashez ce code. 1. Granger CB et al. Apixaban versus Warfarin in Patients with Atrial Fibrillation. N Engl J Med 2011; 365: 981-992 : Etude ARISTOTLE retenue lors de l’évaluation de l’AMM. 2. Résumé des Caractéristiques du Produit ELIQUIS® (apixaban). SEPTEMBRE 2015 24 CORDIAM 292432FR15PR01984-01 - ELY325 - 10/2014 - N° visa 14/10/61902218/PM/007 Pfizer SAS au capital de 38.200 euros - 433 623 550 RCS Paris – Locataire gérant de Pfizer Holding France. Bristol-Myers Squibb SARL au capital de 33 724 848 euros - RCS 562 011 742 Nanterre ELIQUIS® fait l’objet d’un plan de minimisation des risques relatifs aux hémorragies comprenant un Guide destiné aux professionnels de santé que nous recommandons de consulter avant prescription, ainsi qu’une Carte de surveillance destinée à être remise au patient. heART La palpation du pouls dans les miniatures persanes. Pascal Gueret, CHU Henri Mondor, Créteil - [email protected] es plus grands médecins de la civilisation islamique médiévale, comme Hunayn, Ibn Ridwân, Rhazès et plus tard Avicenne, ont consacré à la palpation du pouls des ouvrages entiers. Elles avaient pour fonction d’illustrer des textes littéraires afin d’en agrémenter la lecture. Initialement simples modes d’ornement de manuscrits dépourvus d’image, elles sont devenues plus poétiques, caractérisées par l’absence de toute ombre ou perspective, réalisant ainsi l’union de l’ornementation abstraite caractéristique de l’art islamique et de la diffusion de la lumière propre à l’ancienne Perse. Ainsi dans son traité de Médecine écrit au IXe siècle, Rhazès, célèbre médecin persan reconnu pour ses talents d’observation et sa grande rigueur scientifique, affirme que la palpaDans cette miniature de l’école de Chiraz (1410), la tion du pouls est complémentaire palette est composée de coude l’analyse des urines car « de même leurs vives, d’origine minérale ou que l’urine indique l’état du foie… le pouls organique et appliquées sur le paindique l’état du cœur quand à la chapier à l’aide de poils d’animaux, le leur et la froideur » (Aphorisme 208). plus souvent d’écureuil ou de chat. Pour Hunayn, « le pouls est un mesLa scène centrée sur les personsager qui ne ment pas et un annonceur nages est entourée d’inscriptions muet qui informe des choses cachées ». rédigées non pas en persan mais Il explique qu’il faut prendre le en arabe, qui était la langue de pouls aux 2 poignets car l’artère diffusion des connaissances scienradiale est aisément palpable et tifiques. Assis sur un tapis, un compressible sur l’os sous jacent médecin coiffé d’un turban prend et cette partie du corps est facilele pouls d’une patiente dont le ment accessible sans que le patient visage est souriant. Les portraits, ait besoin d’exposer son corps. l’intérieur de la maison et le jardin Près de 2 siècles plus tard, dans « en arrière plan sont habilement l’Epître sur le pouls » rédigée vers représentés et rendus de manière 1020, Avicenne détaille son rôle naturelle et vivante. Remarquons fondamental dans la démarche un détail amusant : la servante diagnostique. Dans une analyse très représentée sur la gauche de la complète et subtile, il en dénombre scène a un visage asiatique assez 60 variantes simples et 30 variantes typé avec les yeux en amande. plus complexes. Ces miniatures sont en effet Les observations de ces grands contemporaines de la longue médecins les ont conduits à période d’invasion de la Perse par réfuter les théories de Galien (IIe Médecin prenant le pouls d’une patiente. les Mongols qui avaient amenés Ecole de Chiraz, 1410. (Londres, British Library) siècle) qui pensait qu’il y avait avec eux des artistes chinois dont un type unique de rythme cardiaque l'influence s'est longtemps fait sentir reflétant l’état de chaque organe du corps et chaque dans les œuvres des artistes persans. maladie. En dépit du caractère de plus en plus technique de la mée Mais ce n’est que beaucoup plus tard,à partir du XII decine actuelle, la prise du pouls continue à être enseignée siècle avec leur apogée au XVIe, que ces miniatures ont aux étudiants en médecine.Souhaitons qu’elle le reste car été peintes par les artistes des écoles de Tabriz et de les anciens, en particulier en Perse, en avaient compris Chiraz, qui allaient influencer toute la Perse. toute la richesse sémiologique. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 25 COMMENT FAIT-ON... ? Comment fait-on… Une ablation d’un flutter commun ? d’activation entre la partie caudale de la paroi latérale de l’OD et l’ostium du SC devra être plus long que celui entre la partie craniale de la paroi latérale de l’OD et l’ostium du sinus coronaire. En stimulant l’ostium du sinus coronaire, l’enregistrement de double potentiels, sur la ligne dTreguer, ’ablation, distant d’au mAngers oins 100 ms est également corrélé, avec Frédéric Clinique St Joseph, une bonne spécificité, à l’existence d’un bloc bidirectionnel. Parfois l’ablation peut être [email protected] plus difficile liée le plus souvent à une anatomie atypique de l’isthme cavo tricuspidien(ICT) ou à la difficulté d’obtenir une puissance suffisante dans une zone où Le flutter atrial typique ou commun est un trouble du bien reconnaissable sur l’électrocardiogramme (figure 1). le flux sanguin est diminué. L’emploi d’une gaine permettant une meilleure stabilité ou rythme atrial fréquent, et dontla l’aspect généralement d’activation partie estcaudale de la paroi latérale de l’OD et l’ostium du SC devra d’un cathéter de rentre adiofréquence irrigué est alors souvent utile. être plus long que celui entre la partie craniale de la paroi latérale de l’OD et l’ostium du L’ablation est aujourd’hui le traitement ddu e référence du flutter commun avec double des taux de sinus coronaire. En stimulant l’ostium sinus coronaire, Electrocardiogramme montrant un flutter atrial commun avecl’enregistrement un aspect en toit de d’usine récidive à long terme <5%) einférieures, t de complications tpositive rès 1f00 aibles (et <3%). potentiels, l(igne d’ablation, distant ’au mFoins ms V1 est également avec danssur lesla dérivations unedonde en négative encorrélé, V6 une bonne spécificité, à l’existence d’un bloc bidirectionnel. Parfois l’ablation peut être plus difficile liée le plus souvent à une anatomie atypique de l’isthme cavo tricuspidien(ICT) ou à la difficulté d’obtenir une puissance suffisante dans une zone où le flux sanguin est diminué. L’emploi d’une gaine permettant une meilleure stabilité ou d’un cathéter de radiofréquence irrigué est alors souvent utile. L’ablation est aujourd’hui le traitement de référence du flutter commun avec des taux de récidive à long terme (<5%) et de complications très faibles (<3%). Figure 1a : Electrocardiogramme montrant un flutter atrial commun avec un aspect en toit d’usine dans les dérivations inférieures, une onde F positive en V1 et négative en V6 Figure 1a Il s’agit d’une tachycardie atriale régulière dont la Zoom sur la dérivation DII avec une onde F fréquence varie entre 200commun et 300 paravec minute. Figure 1a : Electrocardiogramme montrant un flutter atrial un caractéristique en trois temps (descente lente Le mécanisme est une macroréentrée tournant dans aspect en toit d’usine dans les dérivations inférieures, une onde F positive en V1 puis descente rapide puis remontée rapide) l’oreillette droite dans le sens antihoraire et empruntant et négative en V6 l’isthme cavotricuspidien (ICT) (figure 2) Une ablation de ce trouble du rythme est préconisée dès lors que celui-ci est récidivant ou persistant, qu’il soit ou non symptomatique*. Cette intervention simple dont les complications sont rares, est réalisée à l’aide d’un cathéter d’ablation par Figure 1b : Zoom sur la dérivation DII avec une onde F caractéristique en trois radiofréquence. temps (descente lente puis descente rapide puis remontée rapide) Figure 1 bFigure 1b : Zoom sur la dérivation DII avec une onde F caractéristique en trois temps (descente lente puis descente rapide puis remontée rapide) SEPTEMBRE 2015 26 CORDIAM Schéma anatomique du cœur de face. Le flutter atrial commun est une macro réentrée tournant dans le sens anti horaire dans l’oreillette droite et empruntant l’isthme cavotricuspidien (zone hachurée) La procédure comporte deux phases. Une exploration électrophysiologique qui est réalisée sous anesthésie locale classiquement par voie d’abord veineuse fémorale droite. Son but est de démontrer que cette macro réentrée dépend de l’ICT, c’est à dire de la bandelette myocardique entre l’anneau tricuspide en avant et la veine cave inférieure en arrière. Pour cela on stimule, à l’aide d’un cathéter diagnostique, au niveau de l’ICT, afin d’analyser comment se fait le retour au cycle du flutter. Ce principe d’électrophysiologie repose sur le fait que lorsque l’on stimule l’isthme d’un circuit (macro réentrée), l’arrêt de la stimulation ne provoque pas de pause particulière (étant dans le circuit même). Ainsi si après avoir stimulé l’ICT à un cycle légèrement plus court que le cycle du flutter, le cycle de retour est égal au cycle de la tachycardie +/- 30ms, le flutter est alors dit isthmo dépendant (figure 3). Figure Figure 22 : Schéma anatomique du cœur de face. Le flutter atrial commun est une macroréentrée tournant dans le sens anti horaire dans l’oreillette droite et empruntant l’isthme cavotricuspidien (zone hachurée) Comme la cardioversion elle nécessite une anticoagulation efficace les 3 semaines précédentes pour s’assurer de l’absence de thrombus dans les cavités cardiaques. Si de plus sa séquence d’activation le long de la paroi latérale de l’oreillette droite se fait dans le sens cranio-caudal, on parle de flutter isthmique anti horaire ou flutter typique ou flutter commun. Puis l’ablation peut être réalisée après avoir administré un antalgique de niveau 3 et une éventuelle sédation. Elle consiste à réaliser une ligne d’ablation au niveau de l’ICT entre la valve tricuspide en avant et la veine cave inférieure en arrière. Le cycle de retour est mesuré à 255ms au niveau de l’ICT après stimulation à 230ms chez ce patient dont le flutter atrial a un cycle de 240ms Figure 3 SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 27 COMMENT FAIT-ON... ? Le cathéter d’ablation est ainsi positionné à « 6 heures » sur une vue radioscopique en oblique antérieure gauche (OAG 45°), d’abord sur le versant ventriculaire de cet isthme juste derrière la valve tricuspide puis retiré progressivement jusqu’à la berge antéro supérieure de la veine cave inférieure (figure 4). La disparition du signal électrique bipolaire enregistré par la sonde d’ablation témoigne de l’efficacité du tir et autorise le déplacement du cathéter. Le rythme sinusal est ainsi obtenu dans la grande majorité des cas mais l’ablation doit être complétée jusqu’à validation d’un bloc bidirectionnel au niveau de cet isthme, avec documentation des blocs horaires et antihoraires. Pour valider le bloc horaire, une stimulation réalisée à un cycle conventionnellement de 600ms au niveau de l’ostium du sinus coronaire devra entrainer une activation cranio caudale de la paroi latérale de l’OD (figure 5). Pour valider le bloc antihoraire, le délai d’activation entre la partie caudale de la paroi latérale de l’OD et l’ostium du SC devra être plus long que celui entre la partie craniale de la paroi latérale de l’OD et l’ostium du sinus coronaire. En stimulant l’ostium du sinus coronaire, l’enregistrement de double potentiels, sur la ligne d’ablation, distant d’au moins 100 ms est également corrélé, avec une bonne spécificité, à l’existence d’un bloc bidirectionnel. Parfois l’ablation peut être plus difficile liée le plus souvent à une anatomie atypique de l’isthme cavo tricuspidien (ICT) ou à la difficulté d’obtenir une puissance suffisante dans une zone où le flux sanguin est diminué. L’emploi d’une gaine permettant une meilleure stabilité ou d’un cathéter de radiofréquence irrigué est alors souvent utile. L’ablation est aujourd’hui le traitement de référence du flutter commun avec des taux de récidive à long terme (<5%) et de complications très faibles (<3%). Vue radioscopique oblique antérieure gauche 0AG 45° (correspondant à une vue de face du cœur, avec les anneaux tricuspide et mitral formant « une paire de lunette ») montrant le positionnement des différents cathéters d’ablation pendant l’exploration électrophysiologique et l’ablation de l’isthme cavotricuspidien. Noter la position à « 6 heures » du cathéter d’ablation. OD oreillette droite, SC sinus coronaire Cathéter OD Paroi latérale OD Anneau tricuspidien Cathéter SC Ostium SC Cathéter d’ablation Figure 4 Figure : Vue radioscopique oblique antérieure gauche 0AG 45° (correspondant à SEPTEMBRE42015 une vue de face du cœur, avec les anneaux tricuspide et mitral formant « uCORDIAM ne paire 28 de lunette ») montrant le positionnement des différents cathéters d’ablation En stimulant l’ostium du SC à 600ms, le cathéter positionné sur la paroi latérale de l’OD enregistre une activation cranio caudale. De plus la sonde d’ablation positionnée sur l’ICT enregistre des double potentiels distant de 160ms Figure 5 Références Potentiel de la berge septale du SC Potentiel de la berge latérale du SC Figure 5 : En stimulant l’ostium du SC à 600ms, le cathéter positionné sur la paroi latérale de l’OD enregistre une activation cranio caudale. De plus la sonde d’ablation positionnée sur l’ICT enregistre des double potentiels distant de 160ms • ACC/AHA/ESC guidelines for the management of patients with supraventricular arrhythmias, J Am Coll Cardiol. 2003 Oct 15;42(8):1493-531. � Références : ACC/AHA/ESC guidelines for the management of patients with supraventricular arrhythmias, J Am Coll Cardiol. 2003 Oct 15;42(8):1493-­‐531. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 29 IMAGE DU MOIS Un panier de poulpes peut en cacher un autre Jean-Baptiste JULLA, Endocrinologie, Hôpital Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt, [email protected] [email protected] Mme N 56 ans consulte pour obésité sévère avec désir de chirurgie bariatrique. Dans ses antécédents, on note un diabète de type 1 lent, une HTA, un SAS appareillé, une dyslipidémie et une thyroïdite d’Hashimoto. La patiente est extubée en post opératoire immédiat mais une désaturation est constatée par l’anesthésiste dès l'extubation. A l'arrivée en salle de réveil : SpO2 : 87% sous 15 l/min d’O2 au masque à haute concentration avec FR 21/min. De plus, elle présente une hypertension artérielle entre 190-210 mmHg de systolique et 90-100mmHg de diastolique. Elle reçoit du loxen® en IV ainsi que 40 mg de lasilix®. Devant la désaturation persistante, elle est mise sous VNI durant 1h30 en salle de réveil sans amélioration. Elle est donc transférée en réanimation pour la suite de la prise en charge. Elle vous montre le compte-rendu d’une hospitalisation récente en cardiologie pour palpitations, céphalées et douleur thoracique sans facteur déclenchant. L’ECG montrait un susdécalage ST en D1-AVL et un discret sous décalage en inférieur. Troponine positive et D-dimères négatifs. La coronarographie retrouvait des artères coronaires normales mais une dyskinésie antéro-septo-apicale du VG avec FEVG mesurée à 34%. L’ETT de contrôle à J3 montrait une nette amélioration de la cinétique avec une hypokinésie limitée à l’apex et une FEVG à 46%. La radiographie de thorax est la suivante (Figure 1). LA RADIOGRAPHIE DE THORAX Les symptômes ont par ailleurs régressé. Vous réalisez une ETT de contrôle à un mois montrant un VG non dilaté, une FEVG à 69% et une cinétique segmentaire homogène. Vous évoquez un syndrome de Tako-Tsubo sans facteur déclenchant clairement identifié (stress, traumatisme non retrouvés à l’interrogatoire). Au terme de la consultation, vous concluez que la chirurgie peut être envisagée chez cette patiente. Après avis de la réunion de concertation pluri-disciplinaire de nutrition et de chirurgie bariatrique, la patiente est opérée d’un by-pass gastrique Roux en Y deux mois plus tard. Figure 1 Un ECG est réalisé (Figure 2). ECG Figure 2 SEPTEMBRE 2015 30 CORDIAM L’ETT montre une dysfonction myocardique sévère avec hypokinésie antérieure et apicale. La veine cave inférieure est visualisée pendant cette ETT (Figure 3). gauche concentrique, homogène, avec accélération sous aortique et médioventriculaire sans SAM, une FEVG à 65%, aucun signe d’oedème myocardique ou de rehaussement tardif et l’absence d’infarctus. Vous concluez à une récidive de Tako-Tsubo. ÉCHOGRAPHIE TRANSTHORACIQUE Son mari vous apporte le dossier médical de son épouse et vous êtes interpellés par les résultats du scanner abdominal (Figure 5). SCANNER ABDOMINAL Figure 3 L’évaluation des pressions de remplissage est réalisée (Figure 4). PROFIL DOPPLER MITRAL E Figure 5 F . Que suspectez vous ? Phéochromocytome surrénalien gauche. . Quels sont les éléments de caractérisation du nodule à redemander au radiologue Sur les coupes non injectées : taille et densité spontanée du nodule Sur les coupes injectées : wash-out Figure 4 . enQuelurgence examen complémentaire faites-vous ? Oedème aigu pulmonaire cardiogénique Dosage des dérivés méthoxylés sur les urines de 24h avec la créatininurie pour valider le bon recueil sur 24H . Quel est votre diagnostic ? La patiente récupère progressivement grâce à vos bons soins. L’ETT de contrôle à J7 montre une récupération quasi totale de la dysfonction VG. Une IRM cardiaque est réalisée et montre une hypertrophie ventriculaire Dosage des métanéphrines libres plasmatiques si disponibles dans votre hôpital La patiente est stabilisée et votre diagnostic se confirme. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 31 IMAGE DU MOIS . Quelle est la prise en charge ? 1. Alpha bloquant 2. Scintigraphie au MIBG pour recherche de localisations multiples et recherche de métastases 3. Consultation de génétique et recherche de pathologie associée : maladie de von Hippel-Lindau, neurofibromatose, néoplasie endocrinienne multiple type 2 4. Recherche d’argument pour une atteinte chez les apparentés. Vous avez fait réaliser la scintigraphie au MIBG qui montre une fixation en regard de la masse surrénale gauche sans autre fixation pathologique (Figure 6). Son époux très inquiet vous demande s’il s’agit d’un cancer. . Quel est le pourcentage de forme maligne ? 10% 5. Chirurgie d’exérèse une fois la localisation unique confirmée 6. Surveillance à vie des marqueurs hormonaux et de l’imagerie (IRM et scintigraphie au MIBG) SCINTIGRAPHIE AU MIBG Figure 2 SEPTEMBRE 2015 32 CORDIAM CONGRÈS ESC OPTIDUAL OPTImal DUAL antiplatelet therapy Population Contexte et hypothèse La durée optimale de la double antiagrégation plaquettaire après pose de stents actifs reste l’objet de discussions que les derniers essais randomisés n’ont pas réglées. Le but d’OPTIDUAL a été de comparer l’efficacité et la sécurité d’un traitement prolongé (48 mois) par rapport à un traitement classique de 12 mois par une double antiagrégation plaquettaire après angioplastie avec pose de stent. Traitement prolongé (n=695) Aspirine seule (n=690) Age moyen (années) 64 ± 11 64 ± 11.5 18 21 Diabète 31 32 Hypertension 57 60 Tabagisme actif ou récent 61 58 Antécédents familiaux 28 32.5 Statine 94 93 IEC 75 74 Bêta-bloquant 78 82 100 79 21 99,6 78 22 Antagoniste calcique 31 29 IPP 50 47 AVC/AIT 4 4 Critère principal: critère composite associant décès toute cause, infarctus du myocarde non fatal, accident vasculaire cérébral, ou saignement majeur. Infarctus 17 18 PCI 26 27 Pontage coronaire 5 5 Critères secondaires : éléments individuels du critère principal ; thrombose de stent ; nouvelle revascularisation de la lésion traitée initialement ; saignements selon différentes classifications (ISTH, BARC, GUSTO, TIMI) Artériopathie périphérique 5 6.5 STEMI 11 12 SCA sans sus-décalage de ST 24 26 Maladie stable 65 62 43.5 47 Bitronculaire 34 34 Tritronculaire 23 19 IVA 58 64 Traitement d’une seule artère 61 60.5 Patients angineux stables, avec ischémie silencieuse, ou ayant eu un syndrome coronaire aigu (tout type), avec au moins une sténose ≥ 50 % dans une artère de 2,25 mm de diamètre ou plus, traitée par implantation d’un stent actif et sans complication ischémique cardiaque ou cérébrale ni complication hémorragique pendant la première année. Plan d'étude et traitements étudiés Etude randomisée ouverte : arrêt de la double antiagrégation (poursuite de l’aspirine seule) versus poursuite du double traitement par aspirine et clopidogrel pendant 36 Esupplémentaires après l’année initiale de traitement. mois . Principales caractéristiques cliniques. Caractéristiques Critères d'inclusion et exclusion . Recrutement initial de 1799 patients dans 58 centres français entre janvier 2009 et janvier 2013, avec 1385 patients randomisés après une année sans complications. Critères de jugement Taille de l'échantillon et hypothèses statistiques Réduction attendue du critère principal de 7 % à 4 % ; 983 patients par bras nécessaires pour avoir une puissance de 80 %. Etude terminée prématurément en juillet 2014 en raison de difficultés de recrutement. Femmes (%) Facteurs de risque Traitement lors de la randomisation Aspirine ≤ 100 mg 101-300 mg F Antécédents médicaux Indication de l’angioplastie Atteinte coronaire Monotronculaire SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 33 . Résultats Critère de jugement principal : décès, infarctus, AVC ou hémorragie sévère 5,8 % vs 7,5 % ; HR 0,75 (0,50-1,28) P=0.17 . Critères secondaires ci-dessous Critères scondaires Traitement prolongé Arrêt du traitement Mortalité toutes causes 16 (2.3) 24 (3.5) 0.65 (0.34-1.22) 0.18 Mortalité cardiovasculaire 10 (1.4) 14 (2.0) 0.69 (0.31-1.56) 0.37 Mortalité non cardiovasculaire 6 (0.9) 10 (1.4) 0.58 (0.21-1.61) 0.30 11 (1.6) 16 (2.3) 0.67 (0.31-1.44) 0.31 5 (0.7) 4 (0.6) 1 (0.1) 7 (1.0) 4 (0.6) 2 (0.3) 0.69 (0.22-2.18) 0.53 Indéterminé 0 (0.0) 1 (0.1) Décès/ IDM/ AVC 29 (4.2) 44 (6.4) 0.64 (0.40-1.02) 0.06 Thrombose de stent (certaine) 3 (0.4) 1 (0.1) Revascularisation de l'artère cible 35 (5.0) 35 (5.1) 0.97 (0.61-1.55) 0.90 Saignements sévères 14 (2.0) 14 (2.0) 0.98 (0.47-2.05) 0.95 Caractéristiques Infarctus du myocarde non mortel AVC non mortel Ischémie Hémorragies 0.35 Conclusion Le taux d’événements ischémiques après la première année suivant l’implantation du stent est bas (environ 2 % par an). La prolongation du double traitement antiagré- gant jusqu’à 4 ans après l’angioplastie initiale ne réduit pas de façon significative le critère principal (bénéfice clinique net : décès, infarctus AVC + saignement sévère). RÉACTION Nicolas Danchin, HEGP, Paris La durée optimale du double traitement antiagrégant, tant après pose d’un stent qu’après un syndrome coronaire aigu reste l’objet d’interrogations et les résultats disponibles jusqu’ici ont souvent été contradictoires. L’étude OPTIDUAL a été menée dans 58 centres français selon un dessin pragmatique : randomisation ouverte,un an après l’implantation d’un stent actif, entre arrêt ou poursuite du traitement double (clopidogrel + aspirine) pendant 3 années supplémentaires. Sur le plan statistique, il n’y a pas de différence significative entre les deux stratégies ; numériquement, les événements sont moins nombreux avec la stratégie de traitement prolongé. Ces résultats marquent des similitudes et des discordances par rapport aux études précédentes : similitudes car les méta-analyses des essais de traitement prolongé après pose de stent actif constatent une réduction franche des événements ischémiques ; discordances, en revanche, car on ne retrouve aucun surcroît d’événements hémorragiques. Les décès sont moins nombreux dans le groupe ayant prolongé le traitement, à l’inverse de la métaanalyse qui observe une augmentation significative de la mortalité lorsque le traitement est poursuivi plus d’un an. D’une façon générale, cette nouvelle étude est une pierre de plus dans l’édifice, mais elle ne bouleverse pas nos connaissances : compte tenu des effectifs, elle ne paraît pas susceptible de renverser les tendances observées dans les précédentes méta-analyses sur le sujet. En fin de compte, pour le clinicien, la question du rapport bénéfice/risque de la double antiagrégation prolongée après pose d’un stent actif n’est toujours pas résolue. SEPTEMBRE 2015 34 CORDIAM CONGRÈS ESC CIRCUS : Cyclosporine to ImpRoveClinical oUtcome in ST-elevation myocardial infarction patients. L’aptitude de la cyclosporine pour limiter les conséquences de la reperfusion à la phase aiguë de l’IDM n’a pas pu être démontrée. Contexte et hypothèse La revascularisation précoce en phase aiguë est le facteur essentiel de l’amélioration du pronostic de l’infarctus du myocarde. Toutefois, la reperfusion a elle-même des effets délétères qui pourraient expliquer à eux seuls plus de 40% de la taille finale de l’IDM. Un des mécanismes physiopathologiques invoqué est l’ouverture massive de certains canaux potassiques (mitochondrial Permeability Transition Pores ou PTP) qui aboutit à un blocage de la chaine respiratoire avec déplétion en ATP et libération de facteurs proapoptotiques. Des travaux expérimentaux ont montré que la cyclosporine est un important inhibiteur de ces canaux potassiques et, qu’administrée immédiatement avant la reperfusion, elle réduit de façon significative la taille ultérieure de l’IDM.Les résultats d’un essai clinique monocentrique de petite taille avaient semblé le confirmer. L’étude multicentrique CIRCUS avait pour objectif de démontrer formellement l’intérêt de la cyclosporine pour réduire les effets délétères de la reperfusion à la phase aiguë de l’IDM. Méthodologie Dans cette étude randomisée en double aveugle, des patients victimes d’un IDM antérieur étendu de moins E heures, avec obstruction de l’artère responsable de 12 (TIMI 0 ou 1), recevaient en IV, immédiatement avant reperfusion par angioplastie percutanée, 2,5 mg/kg de cyclosporine ou un placebo. Le critère composite principal d’évaluation associait au terme d’un an de suivi : décès de toute cause, aggravation d’insuffisance cardiaque en cours d’hospitalisation,réhospitalis ation pour insuffisance cardiaque ou remodelage excessif (défini comme une augmentation ≥ 15% du volume télédiastolique VG entre les échographies initiale et de contrôle à un an). Population Le profil des patients correspondait à un âge moyen de 60 ans avec plus de 80% du sexe masculin et un index de masse corporelle moyen voisin de 27. La plupart étaient en Killip 1. Il y avait significativement moins de fumeurs et plus de tritronculaires dans le groupe cyclosporine. En dehors des fumeurs les 2 groupes ne différaient pas sur d’autres caractéristiques suscep- tibles d’influencer la thrombogénèse et la reperfusion comme les taux de diabétiques ou les traitements antithrombotiques. Très peu avaient des antécédents d’IDM (<6%) ou d’antécédent de cardiopathie ischémique (6,5%) moins de 1% avaient des antécédents d’insuffisance cardiaque. Résultats Sur la base des patients ayant reçu le traitement assigné et ayant pu être évalués correctement pour le critère principal, ce dernier a été observé chez 233/396(59,0%) sous cyclosporine et230/395 (58,1%)sous placebo, soit un odds ratio de 1,04 avec ic à 95% entre 0,78 et 1,39 ; p = 0,77. Aucune différence significative n’a non plus été observée sur chacune des composantes du critère principal composite, ni pour d’autres critères d’évaluation comme récidive d’IDM, angor instable ou AVC.Aucune différence n’a été trouvée en analyse de sous-groupes, mais il y avait une interaction avec la classe Killip à l’admission. La tolérance de la cyclosporine a été comparable dans les 2 groupes. Le critère échocardiographique n’a pas pu être évalué chez 17,4% des patients, ce qui est un point faible de l’étude. Il avait été ajouté, comme F l’aggravation de l’insuffisance cardiaque initiale,avant toute inclusion, au critère composite pour augmenter la puissance de l’étude et la rendre faisable avec moins de patients. Conclusion et discussion Dans cet essai multicentrique il n’a pas été possible de montrer, en dépit d’une méthodologie rigoureuse, que la cyclosporine peut, malgré des bases pharmacologiques solides, réduire le risque de complications cardiaques secondaires à la reperfusion à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde. Dans leur discussion, les auteurs soulignent que dans cette étude, presque 1 patient sur 4 est décédé ou a été hospitalisé pour insuffisance cardiaque dans l’année suivant l’IDM, en dépit d’un traitement considéré aujourd’hui comme optimal pour des IDM à haut risque. Ces données confortent donc les travaux de recherche encore en cours sur le post conditionnement ischémique ou pharmacologique. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 35 RÉACTION Retrouvez l'intégralité des interviews de D. Angoulvant et de P. Defaye sur www.e-cordiam.fr Denis Angoulvant, CHU Trousseau, Tours Les résultats neutres de l’étude CIRCUS pourront susciter des questions, non seulement sur le bien fondé de sa méthodologie mais aussi sur le concept même d’ischémie-reperfusion et une mise au point sur ces deux aspects est importante. En ce qui concerne la méthodologie de l’étude, on ne manquera pas de se demander pourquoi les résultats de CIRCUS ne confirment pas ceux de la première étude du groupe de Michel Ovize. Elle avait montré l’efficacité de la cyclosporine sur un effectif plus petit, d’une cinquantaine de patients, et sur la base d’une évaluation de l’aire sous la courbe des marqueurs de nécrose. Une première explication vient peut-être de la forme galénique de la cyclosporine utilisée dans CIRCUS qui n’était pas la même que la première fois. Pour CIRCUS une préparation spécifique avait été développée pour rendre le produit actif absolument indiscernable du placebo. Il est possible que ces différences galéniques aient été responsables de différences d’efficacité entre les deux préparations. Il faut voir aussi que les inclusions dans la première étude ont eu lieu entre 2005 et 2007 contre 2011-2014 pour CIRCUS avec des différences sur le recrutement et les modalités de prise en charge des patients. Dans la première, les lésions pouvaient toucher indifféremment les trois troncs alors que celles de CIRCUS étaient limitées à des occlusions totales de l’IVA proximale ou moyenne. De plus les modalités de prise en charge de l’IDM en phase aiguë ont aussi évolué (plus de thrombo-aspirations, autres stents avec des modalités de mise en place un peu différentes etc.) Mais une des forces de CIRCUS, contrairement à beaucoup d’études contemporaines, a été d’inclure des patients réellement à haut risque puisqu’environ un quart d’entre eux a été victime, au cours du suivi, d’au moins un des événements du critère principal composite. Cette étude avait donc la puissance nécessaire pour atteindre l’objectif qui lui avait été fixé. CIRCUS n’a aucune raison de faire remettre en cause le concept d’ischémie reperfusion car il y a énormément de preuves de l’effet délétère des lésions de reperfusion avec notamment le no-reflow. Aujourd’hui l’IRM nous a permis de bien voir que même après reperfusion, le myocarde n’est pas correctement revascularisé avec, notamment, mise en évidence, à l’échelon microvasculaire, de zones hémorragiques. A ce jour, la recherche n’a pas permis de réduire ces lésions de façon significative mais elle continuera bien entendu, sur d’autres pistes, après l’échec de CIRCUS car il y a d’autres concepts aussi prometteurs que celui du blocage des Permeability Transition Pores. Une approche prometteuse est celle de l’inflammation mais dans la perspective d’une modulation et plus, comme on a pu le faire par le passé d’un blocage total qui avait des effets délétères. Nous n’avons aucune raison de penser que Michel Ovize ne restera pas en première ligne pour de nouveaux travaux en ce sens, même après les résultats décevants de CIRCUS. LEADLESS II* Dans l’étude LEADLESS II, le stimulateur sans sonde satisfait les critères d’efficacité prédéfinis chez une large majorité de patients avec une excellente tolérance. Contexte et hypothèse L’étude européenne LEADLESS I, suspendue provisoirement pour lever un doute de sécurité d’emploi, avait démontré, avec un nombre limité de patients (une trentaine) l’efficacité d’un nouveau type de stimulateur cardiaque (NanostimLeadless Pacemaker) caractérisé par l’absence de sonde. complète par FA ou en rythme sinusal avaient une indication de stimulation en raison d’un BAV du 2ème ou 3ème degré ou bifasciculaire. Ils pouvaient aussi présenter une bradycardie sinusale avec pauses peu fréquentes ou, après une exploration électrophysiologique, avec des syncopes inexpliquées. L’étude américaine LEADLESS II restait centrée sur la sécurité d’emploi (efficacité de la stimulation et tolérance de l’appareil) et visait, avec un plus grand effectif, à compléter ces données. ll y avait 3 critères principaux d’évaluation : 1 - Maintien dans les valeurs requises des seuils de stimulation (≤ 2,0 mV à 0,4 msec) et de l’amplitude des ondes R (≥ 5,0 mV ou ≥ à la valeur d’implantation) à 6 mois (co-critère principal d’efficacité). 2 - Absence de complications sévères à 6 mois (cocritère principal de sécurité). 3 - Réponse appropriée et proportionnelle au cours d’une épreuve d’effort progressive réalisée entre le 3ème et le 6ème mois (critère secondaire), résultats non présentés ici. Méthodologie. 526 patients ont été inclus dans 56 centres par 100 opérateurs. Les résultats présentés ici concernent, comme prévu a priori, les 300 premiers patients ayant eu au moins 6 mois de suivi. Les patients inclus, en arythmie SEPTEMBRE 2015 36 CORDIAM CONGRÈS ESC Résultats Sur l’ensemble des 526 patients de la cohorte entière, 504 (95,8%) avaient été implantés avec succès. Leur âge moyen était de 75,8 ans dont deux tiers d’hommes. Le temps de procédure a été en moyenne de 28,6± 17,8 min, le temps moyen de scopie de 13,9 ± 9,1 min et la plupart des patients (70,2%) n’ont pas justifié de repositionnement après le déploiement initial. Vingt-deux patients (4,4%) ont justifié un repositionnement à deux reprises. La durée du séjour hospitalier après implantation a été en moyenne de 1,1 ± 1,7 jours (de 0 à 33). Les résultats présentés ici concernent, comme prévu a priori, les 300 premiers patients ayant eu au moins 6 mois de suivi. Le critère principal d’évaluation de l’efficacité a été satisfait chez 270/300 patients (90% avec ic à 95% entre 86,0 et 93,2 ; p = 0,007) ; la limite inférieure de cet intervalle de confiance est au-dessus du minimum préspécifié de 85%. Le critère principal de sécurité d’emploi a été observé chez 280/300 patients (93,3% avec ic à 95% entre 89,9 to 95,9; p = 0,001). Des événements indésirables sérieux, liés au traitement, ont été observés chez 20 patients (6,7%) et consistaient pour l’essentiel en déplacement de pace-maker récupéré par voie percutanée (1,7%), perforation cardiaque (1,3%), élévation anormale du seuil de stimulation justifiant un remplacement du dispositif (1,3%). Conclusion Les résultats de cette étude confirment l’efficacité et la bonne tolérance de ce nouveau type de pace-maker. Ils ne satisfont toutefois que les besoin d’une stimulation monoventriculairequin’estpaslamodalitélaplusfréquente. *Reddy VY for the LEADLESS II StudyInvestigators.Percutaneous Implantation of an Entirely IntracardiacLeadless Pacemaker.Lancet 30 août 2015. RÉACTION Pascal Defaye, CHU, Grenoble LEADLESS II est un peu à l’Amérique du Nord ce que LEADLESS I est à l’Europe. Il s’agit de deux études au protocole très voisin destinées à évaluer la sécurité d’emploi et l’efficacité du stimulateur sans sonde (Nanostim) afin de permettre son enregistrement. Mais alors que l’étude Européenne a commencé la première, elle a pris du retard car l’Agence Européenne a demandé un point d’étape E en raison de la survenue de 2 cas de péricardite avec tamponnade. Il est d’autant plus dommage que ces deux cas aient retardé l’étude européenne car ils correspondent à l’inclusion, un peu hâtive, de 2 patients qui n’auraient, de toute façon pas relevé de la stimulation conventionnelle. Ce taux de 2 accidents graves sur 270 inclus à ce jour n’est de toute façon pas très éloigné de celui des registres de la stimulation conventionnelle. Je trouve que les résultats présentés ici sont très séduisants et marquent le début d’une nouvelle étape en stimulation cardiaque avec déjà plus de 500 patients inclus. L’objectif de sécurité a été atteint avec peu de complications (quelques épanchements péricardiques et tamponnades drainées, sans décès), mais il y en a aussi en stimulation conventionnelle. L’efficacité est parfaite (avec dans l’étude au moins 6 mois de recul et jusqu’à 2 ans pour certains patients alors que les projections laissent espérer que la longévité de ces systèmes sera de l’ordre de 15 à 17 ans). L’originalité du système repose aussi sur le concept de « retrievability », autrement dit de « récupérabilité » car lorsque les batteries seront usées, il faudra ôter et rempla- cer cet appareil. Il y a pour l’instant une quinzaine patients chez lesquels on a pu récupérer le matériel sans aucun problème avec un recul allant jusqu’à 18 mois. L’importance de la fibrose qui va se développer à plus long terme autour de l’appareil reste tout de même une inconnue. On a plus de recul chez l’animal avec maintien de la possibilité de « dévisser » l’appareil par le petit crochet qui se trouve à F son extrémité. Nous sommes au début et il y a encore beaucoup d’étapes à franchir pour égaler la maturité de la stimulation conventionnelle entrée depuis plus de 55 ans dans la pratique clinique. Plusieurs évolutions technologiques sont déjà envisageables. Déjà, on peut dire que les ingénieurs qui ont développé cet appareil ont fait des prouesses, notamment grâce à l’électronique qui consomme très peu d’énergie (comme la connectique ou la télémétrie) alors que la source est, comme dans un stimulateur conventionnel, une batterie lithium-ion. Nous sommes pour l’instant en stimulation simple chambre avec ses indications classiques mais les ingénieurs travaillent sur des systèmes double chambre qui commencent à être implantés chez l’animal et qu’on pourrait voir testés en clinique dans les 2 ou 3 ans. Le défi technique est notamment que la communication entre les capsules des différentes chambres ne consomme pas trop d’énergie. Nous n’en sommes pas encore là mais les résultats de LEADLESS II laissent penser que ces évolutions vont se faire assez rapidement. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 37 CONGRÈS ESC ABSORB STEMI TROFI II trial Avec un recul de 6 mois, le stent Absorb®, à trame résorbable, tient ses promesses à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde. Contexte et hypothèse Plusieurs études ont déjà montré la bonne tolérance des stents résorbables mais l’environnement athérothrombotique de la phase aiguë de l’infarctus du myocarde justifiait en elle-même une évaluation spécifique, c’est ce qui a été fait dans l’étude ABSORB-STEMI dans laquelle un stent biorésorbable (Absorb ®) dispensateur d’évérolimus était comparé à un stent actif de référence (Xience ®, stent actif lui aussi dispensateurd’évérolimus), La comparaison, à court terme, portait essentiellement sur la cicatrisation évaluée par imagerie de cohérence optique (OCT). Méthode Il s’agit d’une étude multicentrique (8 sites européens) de non-infériorité, prospective, randomisée, en simple aveugle. Pour être objective, la comparaison reposait sur l’utilisation d’un score de cicatrisation vasculaire développé pour l’étude ROFI-I et revalidé depuis. Les patients pouvaient être inclus dans les 24 premières heures d’un infarctus du myocarde et à condition que l’artère responsable ait un calibre de 2,5 à 3,8 mm. Les patients en choc cardiogénique ou avec des artères très tortueuses et/ou calcifiées ne devaient pas être inclus. La randomisation était faite après vérification du rétablissement d’un flux au minimum TIMI2 après thromboaspiration ou prédilatation. La randomisation d’au moins 190 patients était nécessaire pour une puissance statistique significative. Une double antiagrégation était prescrite pour une durée d’au moins un an. Résultats Les caractéristiques basales des patients du groupe Absorb® (n = 95) et du groupe Xsience® (n = 96) étaient comparables avec un âge moyen de 59 ans, près de la moitié de fumeurs actuels, 15 à 20% de diabétiques et très peu d’antécédents d’IDM (2 à 3%) ou d’angioplastie (3 à 4%). Le délai entre les premiers symptômes et la prédilatation était comparable, sinon à peine un peu plus grand dans le groupe Xience®. La distribution des lésions était aussi comparable avec respectivement 46,3% vs 44,9% de lésions de l’IVA, de même que ladistribution des flux dans la classification TIMI (2/3 des patients en flux TIMI 0/1).Tous les patients ont reçu de l’aspirine avec administration comme second antiagrégant de ticagrélor (44,2% vs 42,7%) et un peu plus souvent de clopidogrel dans le groupe Absorb® (37,9%) et de prasugrel dans le groupe Xience® (27,1%). Les caractéristiques procédurales étaient comparables à l’exception de 3 paramètres présentés dans le tableau I. En angiographie quantitative, les caractéristiques préet post procédurales ont été identiques dans les deux groupes. Paramètre Diamètre nominal de la trame ou du stent (mm) Post-dilatation Pression maximale en post-dilatation (atm) Absorb n = 95 Xience n = 96 p 3,25±0,30 3,12±0,37 0,005 50,5% 25,5% <0,001 15,8±3,4 18,6±3,9 0,002 Tableau I, Etude ABSORB MI / TROFI-II. Caractéristiques procédurales différenciant les 2 groupes. Le critère principal d’évaluation était le score de cicatrisation en OCT à 6 mois ; la comparaison des fréquences cumulées de ce score pour les deux groupes est présentée figure 1. On y voit en particulier que la condition de non infériorité du stentAbsorb® résorbable par rapport au stent actif Xience® est vérifiée statistiquement alors que la condition de supériorité ne l’est pas (même si elle y tend tout de même). Dans ce même délai l’angiographie quantitative a permis d’observer quelques différences (tableau II) mais d’ampleur limitée. Il n’y a pas eu suffisamment d’événements cliniques dans l’un ou l’autre groupe pour tirer des conclusions comparatives au-delà des analyses procédurales avec seulement un cas de thrombose subaiguë de la trame résorbable dans le groupe Absorb® (avec infarctus et nécessité de revasculariser la lésion cible). SEPTEMBRE 2015 38 CORDIAM RÉACTION Antoine Lafont, HEGP, Paris Figure 1. Etude ABSORB MI / TROFI-II. Fréquence cumulée des scores de cicatrisation en OCT. Absorb n =85 Xience n =89 p Diamètre luminal moyen, mm 2,26±0,44 2,38±0,41 0,07 Diamètre intradispositif de référence, mm 2,76±0,37 2,79±0,44 0,68 Degré de sténose à l’intérieur du dispositif,% 18,3±11,6 14,5±9,3 0,02 Perte tardive à l’intérieur du dispositif, mm 0,20±0,31 0,08±0,28 0,01 Perte tardive intrasegmentaire, mm 0,16±0,34 0,06±0,29 0,049 Resténose binaire intrasegmentaire 1 (1,2 %) 1 (1,1%) 1,00 Paramètre Tableau II. Etude ABSORB MI / TROFI-II. Données de l’angiographie quantitative. Les données sont exprimées en moyenne ± écart-type ou en pourcentages Les six mois de recul sont insuffisants pour tirer des conclusions mais le bon comportement de la trame E résorbable du stentAbsorb® permet d’attendre avec sérénité le suivi à long terme prévu jusqu’à 5 ans. Les résultats d’ABSORB IDM ont une importance capitale ! Le résultat positif, très attendu, de cette première évaluation d’un stent (ou scaffold au sens d’étai ou d’échafaudage) complètement résorbable (BVF, Absorb®) à la phase aiguë de l’IDM marque une très grande avancée. C’est celui qui pour l’instant a été le plus étudié et pour lequel on a le plus d’antériorité. Ce contexte clinique des syndromes coronaires aigus, et en particulier l’IDM, situations hautement thrombogènes, représente en effet tout ce qu’il y a de plus défavorable pour la cicatrisation pariétale qui était ici le critère principal d’évaluation. La démonstration, en OCT, de l’atteinte de l’objectif de non infériorité par rapport au stent métallique actif de référence, pour ce qui est de la cicatrisation, ne doit pas être mise en balance avec une perte tardive (segment et lésion) significativement supérieure en angiographie quantitative à 6 mois. D’abord parce que la valeur absolue de cette perte, totalement infraclinique, n’est pas considérable. Ensuite, parce que l’expérience acquise nous a montré qu’au fil du temps, ces scaffolds laissent le remodelage pariétal aller dans le sens d’un élargissement de l’artère, là où la rigidité des stents traditionnels empêche ce même phénomène. On peut observer à ce stade qu’un seul patient de chacun des 2 groupes avait une resténose au sens de la définition binaire Un suivi et un contrôle sont prévus à 5 ans et il ne serait donc pas du tout surprenant que d’ici là le scaffoldAbsorb® se montre supérieur au stent métallique de dernière génération avec lequel il vient de faire jeu égal en phase aiguë. F Conclusion Le stent Absorb® a donc démontré dans cette étude qu’il n’était pas inférieur au stent métallique de référence Xience® pour le traitement des obstructions coronaires à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 39 ABONNEMENT À LA REVUE CORDIAM OUI, je m’abonne Bulletin à découper et à renvoyer complété accompagné du règlement à : IMPACT MEDICOM 3-5, Bd Paul Émile Victor – 92200 Neuilly-sur-Seine Contactez-nous : www.e-cordiam.fr - Tél. : 01 47 22 52 20 - FAX : 01 46 41 05 21 - [email protected] RAISON SOCIALE : ______________________________ CIVILITE : ____________________________________ OFFRE EXCEPTIONNELLE NOM : ______________________________________ VOTRE TARIF POUR 1 AN D’ABONNEMENT EN VERSION PAPIER + NUMÉRIQUE PRENOM : ___________________________________ SPÉCIALITÉ : _________________________________ PRATIQUE : HOSPITALIÈRE LIBÉRALE EMAIL : _____________________________________ MÉDECIN : 49€ ÉTUDIANT : 30€ HORS France MÉTROPOLITAINE : 70€ N°RPPS : __________________________________ VOTRE RÈGLEMENT PAR : N°ADELI : __________________________________ Chèque à l’ordre d’Impact Medicom ÉTUDIANT : joindre une copie de la carte étudiant Carte bancaire Visa ADRESSE : ___________________________________ Nom du titulaire de la carte : ___________________________ CP : ________________________________________ N° : ___________________________________________ VILLE : ______________________________________ Date d’expiration : _________________________________ TÉL. : _______________________________________ N° Cryptogramme : ____ (3 derniers chiffres au dos de votre carte bancaire) Je souhaite recevoir la newsletter numérique OUI, je m’abonne avec un abonnement à _____________€ Votre abonnement prendra effet dans un délai de 3 semaines à réception de votre règlement. Une facture acquittée vous sera adressée. Conformément à la loi informatique et Libertés du 6 janvier 1978, vous disposez d’un droit d’accès et de rectification des données que vous avez transmises, en adressant un courrier à Impact Medicom. ACTUALITÉ THÉRAPEUTIQUE De nouvelles données issues des études de phase III du développement d’alirocumab (Praluent®) présentées dans le cadre du Congrès 2015 de l’ESC de Londres. L’alirocumab, hypocholestérolémiant inhibiteur de PCSK9, vient d’obtenir son enregistrement FDA (juillet 2015) et devrait l’obtenir fin septembre en Europe. L’analyse poolée de données portant sur 1 257 patients avec hypercholestérolémie familiale essentielle (HF) a été présentée au cours du congrès de l’ESC. Elle repose sur 4 essais de phase III du programme ODYSSEY : LONG TERM, HIGH, FH I et FH II. Tous les patients avaient à l’inclusion, des taux de LDLcholestérol élevés en dépit d’un traitement par statine à la dose maximale tolérée, et pour certains, déjà en association avec un autre hypocholestérolémiant. Dans les deux premières de ces études, la dose était d’emblée de 150 mg en administration sous-cutanée toutes les 2 semaines et dans FH I et II de 75 mg mais avec la possibilité de passer à 150 mg si l’objectif prédéfini n’était pas atteint à 8 semaines. ANALYSE POOLÉE DES RÉSULTATS DE 4 ÉTUDES DU PROGRAMME ODYSSEY CHEZ 1257 PATIENTS AVEC HYPERCHOLESTÉROLÉMIE ESSENTIELLE. Etudes du programme ODYSSEY LDL-cholestérol à l’inclusion Variation (%) du LDLchol à 24 semaines) (crit. princip. d’évaluation) % de patients à l’objectif (*) FH I et FH II alirocumab placebo 1,41 g/L 1,41 g/L - 49% +7% 75% 5% LONG TERM et HIGH FH alirocumab placebo 1,68 g/L 1,62 g/L -55% +1% 64,5% 4% p < 0,0001 vs placebo pour tous les paramètres. (*) L’objectif de LDL-cholestérol était à 0,70 g/L ou 1,00 g/L en fonction du niveau de risque cardiovasculaire En présentant ce travail, JJP Kastelein (Amsterdam) a souligné que cet effet remarquable concerne des patients avec un profil particulier, caractérisés par un âgeE relativement bas (environ 53 ans), une distribution à peu près égale des deux sexes et des taux de LDLcholestérol particulièrement élevés. 2. Patients avec hypercholestérolémie familiale essentielle dont des études récentes montrent bien que la prévalence est sous-estimée. Elle pourrait représenter F de 89% des victimes d’un syndrome coronaire plus aigu et on estime que c’est aussi le cas d’un coronarien de moins de 50 ans sur 5. L’efficacité du traitement est particulièrement intéressante puisque ces études montrent bien qu’elle se maintient parfaitement à long terme. 3. Patients qui ne tolèrent pas les statines, cette notion d’intolérance étant très difficile à définir car il est très fréquent qu’elle ne s’accompagne pas de signes objectifs (enzymes). Enfin la tolérance du traitement est excellente sans aucun effet indésirable avec une incidence significativement supérieure à celle observée sous placebo. E Les indications actuelles concernent essentiellement 3 catégories de patients, elles ont été détaillées par M. Farnier (Dijon): 1. Patients à haut risque cardiovasculaire pour lesquels l’objectif de LDL-cholestérol est généralement difficile à atteindre. Il l’est d’autant plus que les recommandations européennes de 2012 ont mis la barre très bas en adoptant l’objectif de 0,70 g/L pour les patients à très haut risque. En dehors de son efficacité, l’alirocumab, qui sera commercialisé sous le nom de Praluent® est caractérisé F par une modalité d’administration originale sous la forme d’une injection toutes les 2 semaines. Le dispositif d’injection est particulièrement simple d’emploi puisque chaque stylo injecteur permet d’administrer la dose préconisée (75 ou 150 mg/L) dans un même volume de 1 mL sans qu’aucun ajustement ne soit nécessaire. Il s’agit indiscutablement d’un progrès très attendu par tous. SEPTEMBRE 2015 CORDIAM 41 ACTUALITÉ THÉRAPEUTIQUE Améliorer la fonction cardiaque afin de réduire les évènements chez le patient insuffisant cardiaque Symposium accrédité EBAC, dans le cadre du congrès 2015 de l’ESC (Londres) Vingt à 30% des insuffisants cardiaques (IC) sont réhospitalisés pour décompensation dans les 6 mois suivant une hospitalisation. Comme l’a souligné A Voors (Groningen), la prévention des réadmissions est aujourd’hui un enjeu majeur de la prise en charge des IC avec plusieurs approches : traitement de sortie optimal, éducation thérapeutique, durée optimale de l’hospitalisation, décongestionnement optimal (diurétiques), programmes personnalisés de prise en charge de la maladie. Chez des insuffisants cardiaques au stade NYHA III, De Ferrari et coll. ont montré que sous ivabradine le contrôle de la FC autour de 70 bpm permet, en quelques heures, d’améliorer le volume d’éjection systolique. Les résistances vasculaires systémiques diminuent de façon modérée sans variation notable des pressions artérielles. L’amélioration de l’éjection ventriculaire pourrait s’expliquer par une réduction de la post-charge via une augmentation de la distensibilité de l’aorte. La titration des βbéta-bloquants est une étape difficile. Dans une étude testant l’adjonction d’ivrabradine (5 puis 7,5 mg x 2 /jour) chez 69 patients en insuffisance cardiaque NYHA II/III, ceux recevant le traitement combiné ont pu atteindre des posologies plus élevées de carvédilol et leur fréquence cardiaque est restée plus basse. Ces différences se sont traduites par une amélioration plus importante de la fonction VG et de la performance au test de marche de 6 minutes Dans l’IC, et en particulier à son stade le plus avancé, l’augmentation de la FC va de pair avec une diminution de la contractilité et de la relaxation myocardique. L’augmentation de la FC permet d’augmenter la capture d’oxygène mais dans des proportions insuffisantes par rapport au sujet normal. M Böhm (Hambourg) a expliqué comment maintenir la FC à des taux optimaux, pour optimiser la fonction myocardique, est essentiel. AMÉLIORATION DES PARAMÈTRES ÉCHOCARDIOGRAPHIQUES ET DE LA PERFORMANCE AU TEST DE MARCHE DE 6 MINUTES AVEC L’UTILISATION D’IVABRADINE LORS DE LA TITRATION INITIALE DU CARVÉDILOL CHEZ DES INSUFFISANTS CARDIAQUES STADE NYHA II/III. ADAPTÉ D’APRÈS BAGRIY AE ET COLL. ADV THER 2015;32 :108-119. carvédilol (n = 36) carvédilol + ivabradine (n = 33) Base 5 mois Base 5 mois Fraction d’éjection VG (%) 36,9 ± 6,1 38,7 ± 6,8 37,4 ± 6,3 41,3 ± 6,9 Diamètre télédiastolique VG (cm) 6,8 ± 0,4 6,7 ± 0,3 6,8 ± 0,3 6,5 ± 0,3 Diamètre télédiastolique VG (cm) 4,7 ± 0,3 4,6 ± 0,3 4,6 ± 0,3 4,4 ± 0,2* Dimension OG (cm) 4,2 ± 0,2 4,0 ± 0,3 4,1 ± 0,3 3,8 ± 0,2* 465,3 ± 87,6 527,2 ± 90,6 458,4 ± 93,2 574,4 ± 102,3* Test de marche de 6’ (m) Valeurs = moyennes ± écarts-types ; * p < 0,05 versus carvédilol seul Dans l’étude SHIfT les patients recevant l’ivabradine (vs placebo), ont eu une amélioration du remodelage ventriculaire gauche (diminution de IVTDVG). D’autres effets, conséquences possibles de la réduction de FC, ont aussi été démontrés cliniquement comme une amélioration de la compliance artérielle ou la restauration d’une circulation collatérale y compris chez des coronariens stables. Dans une analyse en cours de publication (Rogers et coll.) des données de l’étude SHIfT, il a été démontré, sous ivabradine, une diminution du nombre des hospitalisations : le nombre de patients à traiter pour éviter une hospitalisation était de 27 pour une première hospitalisation, 14 pour une récidive d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque et 10 pour récidive d’hospitalisation toutes causes confondues (p <0,0001 pour chaque critère). Ainsi, l’adjonction d’ivabradine au traitement de fond de l’insuffisance cardiaque a des effets cliniques significatifs et avec un support physiopathologique bien identifié, au-delà de la simple réduction de la fréquence cardiaque. SEPTEMBRE 2015 42 CORDIAM [ ] JE LA PORTE PARCE QUE... ma petite fille m’a permis de redécouvrir l’insouciance des enfants. Vous la prescrivez afin de la protéger d’un arrêt cardiaque soudain. Elle aura beaucoup d’autres raisons de la porter. • 3 patients sur 4 prennent mieux soin d’euxmêmes depuis que la LifeVest1 leur a été prescrite1 • La LifeVest met vos patients en confiance pour faire de l’exercice ou de la réadaptation cardiaque1 www.zoll.com © 2012, 2015 ZOLL Medical Corporation. ZOLL et LifeVest sont des marques deposées de ZOLL Medical Corporation aux Etats-Unis et/ou autres pays. Whiting J, Simon M. Health and Lifestyle Benefits Resulting from Wearable Cardioverter Defibrillator Use. The Journal of Innovations in Cardiac Rhythm Management, Mars 2012: 1-2. 1 LifeVest® est un défibrillateur portatif, dispositif médical de classe IIb, (CE0297), fabriqué par ZOLL Manufacturing Corp., indiqué pour le traitement des patients à risque d’attaque cardiaque subite, et couvert par la sécurité sociale si prescrit par des centres autorisés dans les conditions et pour les indications médicales détaillées sous le code LPPR 1112161. Veuillez lire attentivement les indications, contrindications, avertissements et instructions d’usage disponibles sur demande adressée à ZOLL ([email protected]). 24 Août 2015. 20C0436-FRE Rev A SEPTEMBRE 2015 CORDIAM EN FRANCE / 1er INVESTISSEUR PRIVÉ en recherche et développement (r&d), avec 2,2 milliards investis en 2014, soit 45 % des investissements du Groupe en r&d 6 600 COLLABORATEURS EN R&D se mobilisent pour trouver les réponses aux besoins de santé de demain 8 SITES DE RECHERCHE travaillent en étroite collaboration avec leur écosystème local (Île-deFrance, Rhône-Alpes, Strasbourg, Montpellier et Toulouse) INNOVER AUJOURD’HUI POUR LA SANTÉ DE DEMAIN Les besoins d’innovations en santé restent considérables, notamment dans le domaine des maladies chroniques et des maladies rares. Sanofi a donc fait évoluer sa recherche vers une approche collaborative avec les acteurs des sciences de la vie, en mettant l’accent sur les biotechnologies. Cette démarche, centrée sur des écosystèmes ouverts et propices à l’innovation, accélère la mise à disposition de traitements ciblés plus efficaces. 70000011202-06/2015 www.sanofi.fr