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ESPACE NATUREL SENSIBLE :
LE MARAIS DU RABUAIS
ALEXIS BORGES & BRUNO MERIGUET
Inventaire Entomologique : Coléoptères
2005
Résumé :
L'objectif de cette étude était de mettre en évidence la présence de Coléoptères
remarquables en relation avec le patrimoine naturel présent sur le site dénommé Le marais
du Rabuais (95).
L'étude a révélé la présence de 48 espèces. Parmi celles-ci, 5 sont des
déterminantes au titre des ZNIEFF en Île-de-France et 2 d'entre elles sont également des
espèces indicatrices de la qualité du milieu forestier (Référentiel BRUSTEL).
Le site est un marais ancien en tête de bassin où la colonisation par les ligneux est
très avancée. Des mesures de réouverture ont été conduites par le gestionnaire.
Les recommandations établies en vue de maintenir et de favoriser la biodiversité
locale concernent la préservation des échanges entre les populations d'insectes au niveau
régional ; la surveillance de l'alimentation en eau du site tant au point de vue de sa qualité
que de la quantité ; la conservation des milieux ouverts tout en permettant à certains arbres
de vieillir pour pouvoir accueillir les espèces saproxyliques.
Avant-Propos
Le travail exposé dans ce rapport a été effectué au cours des mois de juin et juillet
2005 par l'Office pour les Insectes et leur Environnement, sur commande du Parc naturel
régional du Vexin français.
L'inventaire a été réalisé sous la responsabilité scientifique de Pierre Zagatti.
Il nous est agréable de remercier ici tous ceux qui ont permis et facilité la réalisation
de ce travail notamment Serge Gadoum, Catherine Balleux et le personnel présent à la
maison du Parc de Théméricourt.
1
Sommaire
1) Présentation du site ..................................................................................................... 3
2) Présentation de l’étude et de ses objectifs ................................................................... 3
3 Pratiques entomologiques.............................................................................................. 6
A) Méthodes d’échantillonnage utilisées................................................................. 6
B) Identifications et nomenclature utilisée .............................................................. 8
4) Coléoptères d’intérêt patrimonial observés sur le site du Marais du Rabuais .............. 8
A) Espèces déterminantes de ZNIEFF ................................................................... 8
B) Coléoptères saproxyliques bio-indicateurs....................................................... 10
C) Espèces protégées au niveau régional ........................................................... 13
D) Autres espèces remarquables ........................................................................ 13
E) Liste des espèces observées sur le site du marais du Rabuais ...................... 15
F) Cortèges d’espèces ......................................................................................... 17
5) Propositions et mesures en faveur de la diversité entomologique ............................. 18
A) Considérations générales................................................................................. 18
B) Considérations particulières ............................................................................ 22
6) Conclusions................................................................................................................. 26
7) Bibliographie ............................................................................................................... 28
2
1) Présentation du site
Le site « Marais du Rabuais » est situé sur les communes du Val d’Oise d’Arronville et de
Berville limitrophes avec le département de l’Oise (commune d’Amblainville). Au nord ouest
de Paris, à 7 km de la ville de Méru (60) et à 21 km de l’agglomération de Cergy-Pontoise
(95), ce marais tourbeux est situé dans la vallée du Sausseron et occupe une vaste
dépression de 63 hectares.
Ce marais est déclaré Zone Naturelle d'Intérêt Écologique Faunistique et Floristique
(ZNIEFF) de type 1 Intitulé « marais du Rabuais » (n° DIREN 95023001). Il est enregistré
comme Espace Naturel Sensible (E.N.S).
Il s’agit d’un site prioritaire d'action du "Parc Naturel Régional du Vexin français", sur lequel
il est indiqué au public qu’ont été recensées pas moins de 200 espèces végétales et de
nombreuses espèces d'oiseaux nicheurs rares ou de passages (le nombre d’espèces
d’insectes recensé n’étant pas indiqué).
Cependant, ce site subit une fermeture spontanée due à l'avancée de la forêt et un
assèchement suite à la modification de son système d’alimentation en eau et à l’abandon du
pâturage.
Ainsi, des travaux expérimentaux de débroussaillage et d’étrepage (mise à nu) de la tourbe
ont eu lieu sur les secteurs communaux du marais afin de rajeunir le site et de retrouver sa
diversité faunistique et floristique.
2) Présentation de l’étude et de ses objectifs :
L'objectif de cette étude est de mettre en évidence la présence d'espèces de
Coléoptères remarquables (légalement protégées, déterminantes de ZNIEFF, indicatrices
de la qualité du milieu forestier (Référentiel BRUSTEL) et/ou rares) liées au patrimoine
écologique du site. Cette étude tient d'avantage d'un relevé de faune, que d'un véritable
inventaire; inventaire qui nécessiterait plusieurs années de prospections régulières, afin
d'établir la liste quasi exhaustive des espèces liées au fonctionnement écologique du site.
L'échantillonnage a été réalisé au moyen de pièges à interception et de pots pièges
(Barber) ainsi que par une prospection (fauchage, battage, à vue) lors des visites, en
complément des prélèvements.
Les résultats des recensements font l’objet d’une analyse destinée à définir les
enjeux
patrimoniaux
et
à
les
hiérarchiser.
Des
préconisations
de
gestion
et
d’aménagements sont donc proposées au regard de ces enjeux.
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Figure 1 : Situation en vue aérienne du site du marais du Rabuais
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Figure 2 : Parcellaire du marais du Rabuais
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
3) Pratiques entomologiques
Les dispositifs d’échantillonnage ont été placés sur les secteurs qui nous ont paru les plus
pertinents lors de la première visite. Les pièges au sol ont été disposés en transects dans les milieux
les plus variés et les plus propices.
Les relevés ont eu lieu tous les 15 jours après la première journée sur le site.
Dans la plupart des cas, il est indispensable de sacrifier et de conserver des individus afin de
les identifier correctement et surtout pour conserver une trace des échantillons observés, dont
l'identification pourra toujours être vérifiée a posteriori par un spécialiste. L'identification est une
étape parfois réalisable sur le terrain, mais nécessitant presque systématiquement l'utilisation d'une
loupe binoculaire et les d’ouvrages de détermination spécifiques. La qualité des identifications
assure la qualité de l'étude. Il est souvent indispensable de faire appel à des spécialistes pour des
groupes particulièrement difficiles. Seules quelques grosses espèces de Coléoptères emblématiques
(Carabes, Lucanides, Scarabéoides, Cerambycides) peuvent être identifiées directement sur le
terrain et relâchées.
A) Méthodes d’échantillonnage utilisées (Colas, 1974)
Chasse à vue : Les insectes sont échantillonnés à vue, le long de transects sur des éléments
linéaires du paysage au moyen d'un filet à papillons. Si le temps est ensoleillé, c'est la méthode
efficace pour les Coléoptères floricoles, mais aussi pour beaucoup d'espèces héliophiles vivant au
niveau du sol comme les Cicindèles.
Fauchage : Le filet fauchoir est utilisé dans la végétation basse et permet de collecter une
faune extrêmement abondante d'insectes. On essaiera dans la mesure du possible de faucher une
espèce végétale à la fois.
Parapluie japonais (nappe montée) : Une toile carrée de couleur claire de 120 x 120 cm est
tendue sur un cadre pliant en bois. La nappe est maintenue d'une main sous le feuillage des arbres
et arbustes pendant que l'on secoue brutalement les végétaux avec l'autre main (battage). Les
insectes se laissent tomber sur la nappe où ils sont facilement collectés. Cette méthode capture tous
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
les insectes présents sur les branches des arbres et des arbustes comme les Coléoptères
Elateridae, Buprestidae, Chrysomelidae et Curculionidae
Piège à interception : Deux pièges à interception ont été utilisés sur ce site. En partie boisée
l'un sur un grand saule présentant un branche charpentière brisée, le second a été placé en milieu
ouvert sur un trépied.
Ces pièges d'utilisation récente sont constitués d'un croisillon en Plexiglas transparent placé
au-dessus d'un entonnoir lui-même muni d'un flacon collecteur (liquide conservateur). Les insectes
volants sur le site peuvent ainsi être prélevés. En milieu boisé cet ensemble est disposé en hauteur,
dans les arbres, parmi les branches charpentières, éventuellement à proximité de branches mortes
et/ou de cavités visibles. Ainsi disposé, il permet de capturer des espèces principalement des
Coléoptères saproxyliques, mais également d'autres espèces qui se déplacement en vol lors des
épisodes chauds. De cette façon on trouve des espèces qui pourraient rester cryptiques par d'autres
méthodes.
Ce piège lourd et coûteux est assez voyant et sujet au vandalisme comme aux fortes
intempéries.
Pièges Barber :
Les pièges sont constitués de gobelets en polystyrène (20 cl) enterrés jusqu'au bord supérieur
de façon à créer un puits dans lequel les insectes marcheurs vont choir. Une plaque (pierre, tuile ou
écorce), disposée un centimètre au-dessus du bord supérieur du piège, protège de l'eau de pluie.
Ces pièges ont été rendus attractifs par l'addition de 4 cl de vin additionné de sel (conservateur). Les
pièges Barber ainsi appâtés sont très efficaces pour échantillonner la faune des Carabidae et des
Silphidae. Ces pièges sont facilement localisés et détruits par les mammifères ongulés, sauvages et
domestiques.
Les pièges au sol ont été répartis de manière à couvrir les différents milieux présents : une
zone ouverte, une zone très humide avec des touradons en bordure d'un ru, une zone de sous bois
de saule et un secteur de phragmitaie ré ouvert récemment .
Ils ont été placés par groupe de 5 pots.
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
B) Identification et nomenclature utilisées
La grande majorité des Coléoptères ont été conservés en couche. Les spécimens les plus
remarquables ou ceux qui ont demandé une préparation avant identification ont été mis en collection
pour vérifications éventuelles.
Les insectes ont été observés et collectés par A. BORGES. & B. MERIGUET.
Les Coléoptères ont été identifiés B. MERIGUET, P. ZAGATTI et A. BORGES.
La liste des espèces présentée au chapitre suivant suit la nomenclature la plus récente qui
nous soit accessible, en fonction des personnes-ressources qui ont pris la responsabilité des
identifications. Les sources bibliographiques pour la nomenclature et les identifications, sont
rassemblées en fin de document.
L'inventaire de ce site a fait l’objet de 3 visites sur le site entre le 1er juin et le 11 juillet 2005 :
-1 journée de reconnaissances du site, installation des pièges le 1er juin .
-2 journées dédiées au relevé du contenu des pièges, les 21 juin et 11 juillet 2005.
Parmi le matériel collecté, 224 spécimens ont été identifiés, parfois préparés et conservés ce
qui correspond à 101 observations pour un total de 48 espèces différentes.
4) Coléoptères d’intérêt patrimonial observés sur le site du Marais du Rabuais.
A) Espèces déterminantes de ZNIEFF
Les ZNIEFF (Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique) sont des zones
du territoire national où des éléments remarquables du patrimoine naturel ont été identifiés. Les
ZNIEFF de type I sont de petites surfaces caractérisées par leur richesse écologique, celles de type
II correspondent à de grands ensembles naturels homogènes.
Ces ZNIEFF ont été établies sur la base de relevés naturalistes, en fonction de la présence
d'espèces remarquables et caractéristiques de milieux remarquables : les espèces déterminantes de
ZNIEFF. Les listes sont établies au niveau régional.
Ces zones n'ont que très exceptionnellement été établies sur la base de données
entomologiques, mais plutôt à partir de données botaniques ou ornithologiques.
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Pour le site du marais du Rabuais, 5 espèces déterminantes de ZNIEFF ont été observées
lors de notre inventaire entomologique
Panagaeus cruxmajor
Oeceoptoma thoracica
Onthophagus coenobita
Eucnemis capucina
Lamia textor
Ces espèces appartiennent à 5 groupes systématiques bien distinct tant par leur morphologie
que par leur biologie ce qui nous indique une multiplicité des micro habitats favorables aux insectes ;
Panagaeus cruxmajor : Carabidae ; Espèce déterminante de ZNIEFF, également inscrite sur
la listes des espèces protégées au niveau régional. Elle montre une préférence pour les milieux
humides et marécageux. Le régime alimentaire de l’adulte n’est pas bien connu. Il hiverne et se
cache souvent sous les écorces des arbres. Il existe une autre espèce du genre Panagaeus, (P.
bipustulatus) moins fréquente et que l’on peut rencontrer dans les mêmes conditions.
Oeceoptoma thoracica, Silphe à l'aspect très caractéristique, est classé parmi les espèces
déterminantes pour l'Ile-de-France. Encore commun dans l'ouest de la région, il semble bien se
raréfié en Seine et Marne. O. thoracica est nécrophage comme les autres Silphes.
Onthophagus coenobita : Les Onthophages sont des coprophages qui se nourrissent et
pondent leurs œufs dans les excréments des grands herbivores. Ils souffrent énormément des
traitements vétérinaires administrés aux ongulés domestiques. Toutes les espèces du genre (sauf
une) ont été classées en espèces déterminantes. Il est vraisemblable que les spécimens capturés
dans le cadre de cette étude se sont développés grâce à la présence des sangliers sur le site.
Eucnemis capucina : Cet Eucnémide est très rarement observé car, de part sa biologie,. il est
lié aux vieux arbres. Habituellement connu des vieilles futaies de Fontainebleau et de Rambouillet,
E. capucina a été observé dans des haies agricoles pourvues de vieux arbres. Elle est inscrite sur la
liste des Coléoptères bio indicateurs de la qualité des milieux forestiers (liste BRUSTEL).
Lamia textor : Contrairement aux informations rapportées dans le guide méthodologique pour
la création des ZNIEFF en Ile-de-France, cette espèce a été observée récemment sur plusieurs sites
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
en Ile-de-France (hormis les forêt de Fontainebleau et de Rambouillet). Elle a été observée dans les
environ de Champigny sur Marne et à Nesles la Vallée (site très proche du marais du Rabuais). L
textor est lié aux milieux marécageux sur lesquels sont implantés de vieux boisements de saules ou
de peupliers. De part ses exigences, L textor est inscrite sur la liste des Coléoptères bio indicateurs
de la qualité des milieux forestiers (liste BRUSTEL).
L'insecte est actif de jour comme de nuit. L’adulte bien qu’ailé ne fait jamais usage de ses
ailes et se déplace uniquement au sol. Les adultes se nourrissent de l’écorce de jeunes tiges de
saule. Les œufs sont pondus de préférence dans des troncs de saule de gros diamètre. La femelle
entame l’écorce. La micro-lésion ainsi crée est en forme de navette. Au centre de cette blessure elle
dépose un seul œuf. Elle répétera l’opération plusieurs dizaines de fois.
Au début de sa croissance la larve se développe entre l’écorce et l’aubier, mais elle pénètre
ensuite dans le cœur du bois. La croissance se fait pendant près de 3 ans dans le même tronc avant
d’atteindre l’état adulte.
L’adulte est capable d’émerger de façon précoce dès les premiers jours du printemps et peut vivre
au moins un an. Cette durée de vie compense en partie seulement sa faible capacité de dispersion.
La liste de Coléoptères déterminants de ZNIEFF, ne compte que 245 espèces pour l'Île-deFrance, tous milieux confondus sur près de 6000 espèces recensées. Nous avons observé cinq
espèces déterminantes de ZNIEFF, mais notre échantillonnage nous a permis de dresser une liste
de 48 espèces des coléoptères. Pour affiner notre analyse, nous nous sommes penchés sur une
autre référentiel : les espèces bio indicatrices de la qualité du milieu forestier.
B) Espèces saproxyliques bio-indicatrices
Déterminer la valeur patrimoniale des milieux naturels est un des objectifs prioritaires des
gestionnaires d'espaces et des naturalistes. En fonction de la nature des milieux étudiés, certaines
espèces animales ou végétales pourront être sélectionnées comme bio-indicatrices, dès lors que
leurs exigences écologiques étroites (espèces sténoèces) les cantonnent à des milieux de qualités.
La qualité recherchée dans un milieu peut être un faible état de pollution, un faible taux
d'intensification des activités agricoles ou bien un fort taux de naturalité d'un espace peu anthropisé.
Pour les milieux forestiers, la qualité du milieu s'exprime par l'hétérogénéité spécifique et
paysagère des peuplements, la présence simultanée d'arbres appartenant à toutes les classes
d'âge, l'abondance des "accidents sylvicoles" (arbres dépérissant, arbres à cavités, arbres attaqués
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
par des champignons etc.…) et enfin par l'abondance de bois mort à terre (chablis) et sur pied
(chandelles).
Les coléoptères saproxyliques sont des espèces liées au cycle du bois, qu'il s'agisse de
xylophages, de saprophages, de mycétophages ou de prédateurs des précédents. Certains de ces
saproxyliques ont des exigences extrêmement strictes et ne se rencontrent que dans les rares
secteurs forestiers européens qui n'ont pas connu d'interventions sylvicoles notables depuis des
siècles. D'autres espèces, moins rares, peuvent se trouver dans des peuplements où est pratiquée
une sylviculture de production respectueuse de la biodiversité.
Ces insectes constituent donc d'excellents bio indicateurs de la qualité des milieux forestiers
et BRUSTEL a proposé un référentiel de 300 espèces utilisables pour caractériser une forêt française
(BRUSTEL 2001). Pour chaque espèce est défini un indice de patrimonialité (Ip) qui tient compte de la
rareté de l'espèce dans les échantillonnages (en fonction de leur origine géographique), et un indice
fonctionnel de saproxylation (If) qui exprime les exigences écologiques de l'espèce au stade larvaire,
stade le moins mobile et donc le plus exigent..
Ipn = indice de patrimonialité pour les espèces de la moitié nord de la France.
- “1” Espèces communes et largement distribuées (faciles à observer).
- “2” Espèces peu abondantes ou localisées (difficiles à observer).
- “3” Espèces jamais abondantes ou très localisées (demandant en général des efforts
d’échantillonnage spécifiques).
- “4” Espèces très rares, connues de moins de 5 localités actuelles ou contenues dans un seul
département en France.
If = indice fonctionnel de saproxylation (habitat larvaire) :
- “1” Espèces pionnières dans la dégradation du bois, et/ou peu exigeantes en terme
d’habitat.
- “2” Espèces exigeantes en terme d’habitat : liées aux gros bois, à des essences peu
abondantes, demandant une modification particulière et préalable du matériau par d’autres
organismes et/ou prédatrices peu spécialisées.
- “3” Espèces très exigeantes dépendantes le plus souvent des espèces précédentes
(prédateurs de proies exclusives ou d’espèces elles-mêmes exigeantes) ou d’habitats étroits et rares
(champignons lignicoles, cavités, très gros bois en fin de dégradation, gros bois d’essences rares …)
Notre inventaire en 2005 a révélé la présence de seulement 2 espèces de Coléoptères de ce
référentiel sur le marais du Rabuais. (commentaires CF supra)
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Tableau 1 : liste des espèces observées, bio-indicatrices de la qualité du milieu forestier.
genre
Eucnemis
Lamia
espece
capucina
textor
If
2
1
Ipn
3
2
biologie larvaire
xylophile II
xylophile I
Pour synthétiser ce résultat sur le site nous avons observé :
- en terme de rareté :Ipn
0 espèce commune et largement distribuée
1 espèce peu abondante et localisée
1 espèce jamais abondante ou très localisée
0 espèce très rare et très localisée
- en terme d’habitat : If
1 espèce pionnière dans la dégradation du bois, et/ou peu exigeantes.
1 espèce exigeante.
0 espèce très exigeante.
L'utilisation d'un référentiel comme celui-ci pour caractériser objectivement une forêt nécessite
la prise en compte de protocoles d'échantillonnage standardisés pour pouvoir comparer des sites
entre eux. De telles grilles d'évaluation n'existent pas encore (un groupe de travail coordonné par
l'OPIE et le Ministère de l'Agriculture doit proposer prochainement des protocoles standardisés),
aussi, la caractérisation des forêts françaises au moyen du référentiel de BRUSTEL, utilise beaucoup
de données de la littérature, privilégiant les sites les plus fréquentés par les naturalistes.
La découverte sur le site de seulement 2 espèces indicatrices de la qualité du milieu forestier
est d’une part lié à la démarche de prospection (type et nombre de pièges qui ne sont pas
entièrement dédié à cette faune) et d’autre part à la nature du peuplement ligneux, homogène par
essence et relativement jeunes qui ne présente quasiment pas de spécimens âgés. Cela met en
évidence l’existence d’un écosystème forestier digne d’intérêt mais qui n’en est qu’au début de son
évolution.
Notre inventaire révèle peu d’espèces liées au cycle de dégradation du bois mais ce sont des
espèces remarquables qui laissent présager la présence d’espèces plus discrètes. Ces dernières
pourraient être mises en évidence dans le cadre d’une prospection appropriée.
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
C) Espèces protégées au niveau régional
Les deux espèces observées sur le site et bénéficiant d’une protection au niveau régional sont
L. textor et P. bipustulatus. Leur biologie et les informations concernant leur biologie sont présentées
dans le paragraphe A).
En dehors des espèces intégrées dans les différents référentiels que nous venons de passer
en revue, il nous parait pertinent de passer en revue l'ensemble des espèces observées.
D) Autres espèces remarquables
Oodes helopioides
Ce Carabidae est inféodé à un milieu marécageux, il est un très bon indicateur de la stabilité
d’un tel milieu. Une autre espèce Oodes gracilis, protégée au niveau régional, serait à rechercher sur
le marais du Rabuais (elle n’existe apparemment plus qu’en un seul site en Ile-de-France).
Anogcodes ustulatus
Cet Oedemeridae est caractéristique dans les zones marécageuses. La larve se développe
dans le bois mort humide. Les adultes sont polyphages, ils fréquentent les fleurs. Ils sont actifs entre
juin et août. Les mâles semblent plus précoces ou plus actifs que les femelles. Les autres éléments
de sa biologie restent fort mal connus.
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
1 Elaphrus
riparius
2. Panageus
cruxmajor
3. Oodes
helopioides
4. Eucnemis
capucina
5.
Thanatophilus
Sinuatus
6. Oeceoptoma
thoracica
7. Onthophagus
coenobita
8. Phyllobrotica
quadrimaculata
9. Endomychus
coccineus
10. Lamia textor
11.
Xyltrotrechus
rusticus
12. Anogcodes
ustultatus
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Endomychus coccineus
Ce petit coléoptère ressemble étrangement à une Coccinelle, mais sa biologie l’en éloigne
particulièrement. Il vit au dépend de mycélium de champignons se développant principalement sur
des souches ou des grumes de bois très dégradées.
Parmi les 48 espèces observées, il y a 16 espèces de Carabidae et 7 de Silphidae: Le rapport
particulièrement élevé de ces espèces par rapport à l’ensemble montre clairement la présence de
nombreux micro habitats et la présence d’un potentiel important en terme de biodiversité des milieux
humides.
La méthode d'échantillonnage (piège à fosse) est particulièrement efficace pour cette faune.
La démarche d'identification sur laquelle nous nous sommes concentrés, est celle portant sur les
espèces dont l’interprétation de présence était simple et facilement lisible par le gestionnaire (cf.
objectifs de l’étude). Cette démarche n’a pas été poussée en direction des espèces dont
l’identification était délicate ou longue.
E) Liste des espèces observées sur le site du marais du Rabuais
Légende :
PR : Protection Régionale
DET : Espèce déterminante de ZNIEFF (Ile-de-France 2001)
FOR : Coléoptère saproxylique bio indicateur (Brustel 2001) chapitre 5 B
* Espèce faisant l’objet d’un commentaire particulier
Toutes les données associées à cette liste ont été saisies dans une base de données.
COLEOPTERES
Carabidae
Nebria brevicollis Fabricius
Elaphrus riparius Linné
Elaphrus cupreus Duftschmid
Clivina fossor Linné
Anisodactylus binotatus Fabricius
Pseudoophonus rufipes Degeer
Stomis pumicatus Panzer
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Poecilus cupreus Linné
Pterostichus strenuus Panzer
Pterostichus minor Gyllenhal
Pterostichus madidus Fabricius
Abax parallelepipedus Piller et Mitterpacher
Abax parallelus Duftschmid
Oxypselaphus obscurus Herbst
Oodes helopioides Fabricius
Panagaeus cruxmajor Linné
DET. *
DET. PR.*
Silphidae
Nicrophorus humator Olivier
Nicrophorus vespilloides Herbst
Nicrophorus vespillo Linné
Thanatophilus sinuatus Fabricius
Oeceoptoma thoracica Linné
Silpha granulata Thünberg
Phosphuga atrata Linné
DET. .*
Lucanidae
Dorcus parallelipipedus Linné
Geotrupidae
Onthophagus ovatus Linné
Onthophagus coenobita Herbst
DET. *
Cetoniidae
Valgus hemipterus Linné
Hoplia farinosa Linné
Lampyridae
Phosphaenus hemipterus Geoffroy
Tenebrionidae
Gonodera luperus Herbst
Oedemeridae
Anogcodes ustulatus Scopoli
*
Elateridae
Agrypnus murinus Linné
Denticollis linearis Linné
Eucnemidae
Eucnemis capucina Ahrens
DET.
FOR.*
Byrrhidae
Byrrhus pilula Linné
Nitidulidae
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Glischrochilus quadriguttatus Fabricius
Glischrochilus hortensis Fourcroy
Endomychidae
Endomychus coccineus Linné
.*
Cerambycidae
Grammoptera ruficornis Fabricius
Xylotrechus rusticus Linné
Lamia textor Linné
Leiopus femoratus Fairmaire
Agapanthia villosoviridescens Degeer
DET.
FOR. PR*
Chrysomelidae
Clytra laeviuscula Ratzeburg
Chrysolina polita Linné
Phyllobrotica quadrimaculata Linné
. .*
Curculionidae
Barypeithes pellucidus Boheman
Barypeithes araneiformis Schrank
F) Cortèges d’espèces
Au travers de la liste des espèces observées nous pouvons former des cohortes en fonction
des milieux de prédilection de ces espèces.
Coléoptères de milieux ouverts :
Poecilus
cupreus,
Onthophagus
ovatus,
Onthophagus
coenobita,
Hoplia
farinosa,
Phosphaenus hemipterus, Gonodera luperus, Anogcodes ustulatus, Grammoptera ruficornis,
Agapanthia villosoviridescens, Chrysolina polita, Phyllobrotica quadrimaculata.
L'intérêt de cette cohorte réside dans la diversité écologique des espèces présentes. C'est un
milieu complexe avec de nombreuses interactions avec les milieux limitrophes. L’entretient du milieu
ouvert est inféodé à l’action de l’homme.
Coléoptères de milieux humides :
Elaphrus riparius, Elaphrus cupreus, Clivina fossor, Anisodactylus binotatus, Stomis
pumicatus, Pterostichus strenuus, Pterostichus minor, Oxypselaphus obscurus, Oodes helopioides,
Panagaeus crux-major, Anogcodes ustulatus, Lamia textor.
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
Cette cohorte est aussi importante et caractéristique du site que la précédente, mais elle est
fragile et ne doit pas éclipser les cohortes liées aux autres milieux avec lesquels les relations sont
vitales. Par exemple A. ustulatus (la larve se dévellope dans le bois humide, l’adulte est floricole).
Coléoptères forestiers :
Pterostichus madidus, Abax parallelepipedus, Abax parallelus, Oeceoptoma thoracica, Silpha
granulata, Dorcus parallelipipedus, Valgus hemipterus, Anogcodes ustulatus, Agrypnus murinus,
Denticollis
linearis, Eucnemis
capucina,
Endomychus
coccineus,
Grammoptera
ruficornis,
Xylotrechus rusticus, Lamia textor, Leiopus femoratus, Clytra laeviuscula.
Cette faune est aussi bien représentée par des espèces courantes que par des espèces plus
exigeantes.
Coléoptères ubiquistes :
Nebria brevicollis, Pseudoophonus rufipes, Poecilus cupreus, Nicrophorus humator,
Nicrophorus vespilloides, Nicrophorus vespillo, Thanatophilus sinuatus, Silpha granulata, Phosphuga
atrata,
Phosphaenus
Glischrochilus
hemipterus,
Agrypnus
quadriguttatus, Glischrochilus
murinus,
Denticollis
hortensis, Barypeithes
linearis,
Byrrhus
pilula,
pellucidus, Barypeithes
araneiformis.
Ces espèces sont celles qui peuvent être rencontrée à priori en tout lieu.
5) Propositions et mesures en faveur de la diversité entomologique
A) Considérations générales
Le patrimoine observé résulte des gestions passées et des exigences écologiques de
l’entomofaune. Il convient donc, dans un premier lieu, de préserver les milieux et les habitats déjà
présents. Ensuite, il sera possible d’améliorer la diversité biologique en orientant l’évolution du site
vers des habitats peu fréquents ou en régression, mais aussi en permettant des échanges entre les
différentes populations présentes au niveau régional.
Préserver les habitats existants : Les insectes peuvent réaliser leurs cycles de
développement dans des environnements aux dimensions bien plus restreintes que les vertébrés.
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Ces micro habitats entomologiques sont à peu près aussi variés qu’il y a d’espèces d’insectes,
d'autant plus qu'un grand nombre d’espèces occupent à l’état larvaire et à l’état adulte des habitats
différents, ce qui augmente les contraintes.
Le maintien d’une espèce sur le site est soumis à la présence de micro habitats favorables en
quantité suffisante et à la perpétuation de ceux ci. La brièveté des cycles de développement des
insectes leur impose de se reproduire chaque année, et de trouver à chaque fois les conditions
trophiques indispensables à la croissance de leurs larves.
Dans la plupart des cas, la présence d'une population viable sur un site implique que les
modes de gestion de l'espace, mis en œuvre dans un passé proche, étaient favorables au maintien
de l'espèce. Tout changement de mode de gestion doit donc être abordé avec une grande prudence,
et éventuellement n'impliquer qu'une fraction de la surface. En cas d'erreur stratégique, le temps
nécessaire à la reconstitution du milieu peut être suffisamment long pour que les effectifs de
certaines populations s’effondrent définitivement et qu'une ou plusieurs espèces disparaissent.
Dans cette recommandation nous incluons également la protection de la faune contre les traitements
phytosanitaires qui pourraient être appliqués sur les milieux agricoles environnants.
La lutte contre la chrysomèle du maïs a amené les autorités de Picardie et d’Île-de-France à
répandre un traitement sur les cultures de maïs. Cette année 2005 les champs de maïs des
communes situées dans une « zone focus » (5 km autour de la commune de Monts (60), lieu où les
insectes ont été piégés) et de « sécurité » (10 km) ont été traités contre un insecte déclaré de
quarantaine sur le territoire, Diabrotica virgifera virgifera (Coléoptère). Ainsi, les champs de maïs des
communes d’Arronville, de Berville et d’Amblainville, qui font partie de ces zones, ont subi, comme le
stipule l’arrêté préfectoral du 22 août 2002, 2 traitements aériens insecticides obligatoires. Ces
traitements, ont eu lieu dès la mi-septembre, puis à 15 jours d'intervalle. De plus, l’année suivante,
dans ces mêmes zones, un larvicide sera appliqué.
Le produit utilisé en 2005 est la deltaméthrine, insecticide généraliste (d’écotoxicité de classe A =
toxique pour l’environnement), anti-adultes pour réduire au maximum les pontes.
De ce fait, il conviendrait de surveiller très attentivement à ce que le marais n’ait pas subi les«
débordements » dus aux traitements, que ce soit de façon directe (traitement des abords du marais
limitrophes avec les champs cultivés) ou indirectement (dégradation de la qualité des cours d’eaux
par accumulation des produits de traitements) (se reporter à l’arrêté du 25 février 1975 concernant
les dispositions relatives à l’application des produits phytosanitaires à usages agricoles : « aucun
entraînement de produits ne doit (notamment) avoir lieu vers les parcs et jardins, rivières, points
d’eau…»)
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Il va sans dire que ces zones seront désormais fortement surveillées et que ce genre de traitement
pourrait être renouvelé l’an prochain. Une concertation et une sensibilisation des intervenants nous
paraît indispensable au moins pour prévenir et réduire les épandages mal contrôlés (conditions
météorologiques défavorables : vent, méconnaissance de l’intérêt du site voisin). Il pourrait
également être très judicieux d’essayer d’obtenir des agriculteurs limitrophes du site qu’ils ne
plantent pas de maïs dans les prochaines années.
Nonobstant l’impact du traitement réalisé dans des conditions normales, une fausse manœuvre dans
le traitement pourrait avoir des conséquences catastrophiques sur l’entomofaune du site. Toutes les
mesures qui viseront à éloigner le traitement du site, à restreindre l’impact du traitement, à prévenir,
et à sensibiliser l’ensemble des acteurs ne pourront que participer à la limitation du risque.
s
Favoriser les déplacements de la faune par des corridors naturels : La gestion du
patrimoine naturel doit s’envisager au niveau global. Le site et sa faune s'intègrent dans un
ensemble au moins aussi vaste que celui que constitue Parc naturel régional. La création d'espaces
naturels protégés se fait bien trop souvent au détriment des zones interstitielles, sacrifiées sur l'autel
de l'urbanisation. Dès lors, les habitats favorables aux espèces sont de plus en plus fragmentés et
les noyaux de populations de plus en plus isolés. Pour les insectes, qui ont des potentialités de
déplacement et de colonisation généralement bien plus faibles que celles des vertébrés, cette
situation aboutit à un isolement génétique complet des populations, et bien souvent à leur disparition
à plus ou moins brève échéance. Cette fragmentation des habitats est probablement aujourd'hui un
des facteurs principaux de la diminution des populations d'insectes constatée en Ile-de-France. Elle
n’est pas irrémédiable dans le cas du marais du Rabuais. Le potentiel en zone humide, en particulier
en aval en direction de Nesle la vallée, le long du Sausseron, parait important. La vallée de l’Esche
entre Méru et Chambly présente des zones de fort ralentissement et donc de milieux d’intérêt, Il faut
également aller chercher à l’ouest pour trouver des sites favorables entre Hénonville et Chaumont en
Vexin. Le marais de Lavilletertre (Oise) qui ne se situe qu’à une dizaine de kilomètres de là, pourrait
constituer un autre élément de l’ensemble des zones forestières humides.
Il existe un nombre non négligeable de secteurs qui doivent pouvoir constituer un maillage de
sites permettant la conservation des espèces et de leur patrimoine génétique.
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Figure 4 : Localisation du marais du Rabuais et les milieux susceptibles de former un continuum écologique au niveau local
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Les responsables régionaux devraient assurer par la constitution et la reconstitution de
corridors, de haies et de bosquets, la continuité entre ces différents éléments forestiers.
Les haies sont des refuges de première importance pour la faune. Elles sont susceptibles
d’héberger une faune remarquable si elles sont inscrites dans une politique de gestion cohérente.
Prise en compte des milieux à contraintes multiples : les milieux les plus remarquables
sont ceux qui allient sur un même espace plusieurs formations écologiques elles-mêmes peu
fréquentes et donc prioritaires du point de vue de la conservation.
La gestion doit donc se faire en prenant en compte cette multiple spécificité.
B) Considérations particulières
Les milieux prioritaires pour la conservation de la biodiversité en Ile-de-France sont les zones
humides, les milieux ouverts : landes et pelouses, et les zones forestières.
Le marais du Rabuais présente ces différentes formations sous la forme d’un marais, où les ligneux
occupent la plus grande surface, à l’exception de plusieurs parcelles qui ont été ré ouvertes avant
1999.
Les milieux marécageux
Les milieux ouverts et leur association avec d’autres formations.
D’une dynamique très différente de celle des milieux boisés, les milieux ouverts réagissent et
se modifient d’année en année. Cet état est transitoire et ne se maintient naturellement que dans
des conditions très particulières. La gestion est d’autant plus difficile que ces milieux sont très variés.
Ils se caractérisent par la disparition de la strate des végétaux arborescents et sont occupés par une
flore basse ou buissonnante, ou même des sols nus. Sur le site du Rabuais, tous les milieux ouverts
résultent directement de l’activité humaine. Sans un entretien régulier, ces milieux retourneraient
vers un peuplement de type forestier. Le choix de la méthode pour maintenir le milieu ouvert est
déterminant pour les populations d'insectes.
Le maintient de l’ouverture de grandes parcelles est un élément indispensable, il permet d’une
part à une faune de milieu ouvert de s’implanter, et d’autre part il est indispensable à la création des
zones intermédiaires : les écotones.
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Dans la mesure où il s’agit de lutter contre le développement des ligneux, l’évolution des
parcelles ré ouvertes doit faire l’objet d’une évaluation qui définira les outils les plus adaptés en
fonction de la tâche et de la nature du sol. Du point de vue théorique, la mise en pâturage de
moutons ou de vaches pourrait être très favorable à la biodiversité comme c’est le cas sur le site du
marais de Frocourt. L’implantation devrait cependant être menée avec beaucoup de soins, pour
veiller à ne pas dégrader des formations végétales remarquables comme les touradons, et de ne pas
entraîner de détérioration du sol ni de la qualité de l’eau.
Lisières et ourlets, les écotones : L’entretien des milieux ouverts doit se faire en relation avec
les milieux limitrophes. Les zones de transition entre les milieux ouverts et les parcelles à dominance
ligneuses sont le lieu de prédilection de nombreuses plantes buissonnantes (aubépines, prunelliers
…) dont la floraison est mise à profit par de nombreuses espèces d’insectes pour s'abriter ou
s'alimenter. Ces transitions doivent être progressives, tant au niveau de la couverture du sol que de
la hauteur des buissons.
L’enjeu majeur du point de vue des espaces ouverts est la gestion de la dynamique végétale
Gestion de l’irrigation de la circulation des eaux et de l’approvisionnement
Le Marais du Rabuais est situé en tête de bassin versant. Deux ruisseaux : le Sausseron et la
Soissonne, deux rus : le ru du Provendier et le ru du Rabuais, parcourent le site. Des sources sont
présentes mais le débit global du site était particulièrement faible cette année. Les affleurements
sont présents sous de nombreuses formes, mares, fossés.
L’eau est l’élément clef du site. La connaissance du fonctionnement du réseau
hydrographique semble indispensable pour mettre le site à l’abri d’interventions humaines qui
pourraient conduire à l’assèchement du site. Le choix des cultures sur les parcelles limitrophes n’est
probablement pas sans conséquence sur le débit et la qualité de l’eau du marais.
La zone forestière,
Le potentiel entomologique en terme d’espèces forestières peut être maintenu et enrichi par
un certain nombre de dispositions.
Diversité spécifique des essences : Les insectes saproxyliques présentent une sélectivité
quant à l’essence qu’ils peuvent exploiter. Les peuplements de résineux sont des écosystèmes
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importés et présentent un intérêt limité pour la faune de notre Région. Les essences feuillues, qui
permettent le développement de très nombreuses espèces doivent être favorisées. La diversité des
essences doit être maintenue en fonction des possibilités de croissance et de la qualité géologique
des sols. Le peuplement du marais du Rabuais est relativement homogène et résulte de la
transformation d’une zone pâturée laissée d’une part à l’abandon et d’autre part convertie en
peupleraie. Cette évolution et la nature du sol limite la diversité d’essences. Certaines comme le
frêne et les saules présentent un fort potentiel entomologique mais ils ne sauraient à eux seuls
générer la diversité des espèces observées. L'entretient du site devra prendre en compte cet
élément pour éviter l'évolution vers un peuplement mono spécifique.
Hétérogénéité des classes d’âge et discontinuités paysagères : Les micro habitats
spécifiques aux insectes n'apparaissent que progressivement et souvent sur des arbres âgés qui
atteignent ou dépassent l'âge optimal de rentabilité sylvicole. A l'inverse, toute une cohorte
d'insectes se développe préférentiellement sur des sujets jeunes, comme certains xylophages
(Buprestes) et surtout les phyllophages frondicoles. Dans certains cas, l'adulte ne pondra ses œufs
que dans des gros bois cariés mais ne s'alimentera que sur des arbres jeunes, ou sur les fleurs des
clairières (Longicornes). Pour une gestion raisonnée de la diversité entomologique il est donc
indispensable de préserver des arbres de toutes les classes d'âges dans un peuplement, de même il
est indispensable de ménager des discontinuités et des ouvertures dans le paysage forestier. Les
espèces d'insectes les plus remarquables sont liées à un ou plusieurs stades bien précis de
l'évolution de l'arbre, l'absence de ce stade dans un peuplement en évolution se traduira
immanquablement par la disparition de l'insecte. A ce titre l’abandon de la sylviculture à des fins de
production semble indispensable.
Au cas où les terres viendraient à être rachetées par le Conseil Général au moment où le
propriétaire envisage d’exploiter ses peupliers, il serait bon d’obtenir la préservation d’un îlot de
peupliers en bon état, ainsi que la conservation sur pied de tous les arbres de moindre intérêt
économique.
Le bois mort : Ce qui est valable pour les arbres vivants est également valable pour le bois
mort. La tempête de 1999 a eu un effet pervers même chez les gestionnaires soucieux de préserver
la biodiversité. La quantité importante de bois mort à terre a pu donner l'illusion que toute une faune
de décomposeurs allait s'installer durablement. Or la très grande majorité de la nécromasse
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disponible a été "figée" dans le temps le 26 décembre 1999, les organismes impliqués dans les
processus initiaux de la décomposition du bois n'ont plus de matériel frais pour s'installer et il faut
s'attendre à une diminution importante des populations d'insectes saproxyliques dans les prochaines
années. Pour préserver le potentiel de recyclage il faut donc que les peuplements forestiers
présentent des bois morts d’âges différents, mais il faut également prêter une attention particulière
aux bois morts sur pied (chandelles). Pour des raisons évidentes de sécurité les gestionnaires
préfèrent le bois mort à terre (chablis) à celui resté sur pied. Il s'agit cependant de deux systèmes
très distincts, les gradients de température et d'hygrométrie sont différents et les espèces qui les
habitent ne sont pas les mêmes, qu'il s'agisse des vertébrés (oiseaux et chiroptères contre
amphibiens et reptiles) des champignons ou des insectes saproxyliques. Au cours de l’entretien, les
arbres qui viendraient à être abattus doivent être laissés sur place et non brûlés. Il est même
préférable que ces mêmes arbres soient étêtés plutôt qu’abattus afin de laisser en place une
chandelle à défaut d’un arbre mort sur pied. Ces habitats seront rapidement colonisés par des
insectes qui réalisent leur cycle en un ou deux ans.
Préserver les arbres remarquables : Cette proposition s’applique non seulement aux arbres
remarquables par leur aspect ou leur âge, mais aussi aux arbres vieillissants qui présentent un état
avancé d’évolution. Ces arbres sont remarquables par la fonge et la faune qu'ils abritent et doivent
être préservés en priorité, au détriment des chemins existant et des lieux de passage du grand
public. Ces arbres sont les seuls dans lesquels se forment des cavités à même d’accueillir une
avifaune (pics et rapaces nocturnes) et une entomofaune particulière (grandes Cétoines, grands
Buprestes et grands Capricornes, Trogidae…) qui leur confèrent une très forte valeur patrimoniale.
L'abattage systématique des vieux arbres sans valeur sylvicole ne peut avoir notre assentiment.
Les trognes et têtards sont des arbres remarquable du point de vue de leur histoire et de
l’entomofaune les accompagnants. Bien qu’absent sur le site, la constitution d’un ensemble de cette
nature pourrait apporter un complément indéniable tant du point de vue paysager que de la
biodiversité. Il doit être possible pour cela de démarrer à partir d’arbres existant sur le site, le long
des rus ou des chemins.
Les Ilots de sénescence : Les îlots de sénescence sont des ensembles d’arbres d’une
classe d’âge souvent homogène, répartis sur une surface suffisamment restreinte pour être
entretenue de façon raisonnable par le gestionnaire mais suffisamment importante pour constituer
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Inventaire Entomologique – Marais du Rabuais – 2005
une réserve de micro habitats conséquente pour la faune. Ces îlots peuvent être créés à partir des
peuplements déjà existants. Dans le cadre d’une gestion logique, une fois mis en place, ces îlots ne
devraient pas pouvoir être réintégrés dans un mode de gestion conventionnelle avant la disparition
des derniers arbres.
Ces mesures de gestion et en particulier celles qui seront retenues dans la gestion de la zone
patrimoniale du site du marais du Rabuais, pourront faire l’objet d’une politique d’information
destinée aux chasseurs et au public amené à fréquenter le site.
Ce site présente une valeur écologique indéniable tant dans le rôle de tête de bassin que par
la faune qui y réside.
6) Conclusions
Le site du marais du Rabuais est un « vieux marais » en cours de fermeture. L’absence
d’entretient va le conduire vers un milieu de plus en plus forestier, ce qui est très favorable à une
catégorie de faune : les insectes saproxyliques. Cependant cette fermeture condamnera à court
terme tout un pan important de l’entomofaune liée aux milieux ouverts. Une fois cette faune
disparue, il faudra plusieurs dizaines d’années pour la reconstituer si les populations sont présentes
au niveau régional.
Si l'absence de vieilles écorces est un manque notable sur le site, il faut trouver un juste
milieu avec les différentes formations végétales.
Le maillage des milieux humides autour du marais du Rabuais permet d’envisager un
ensemble écologique de nature similaire qui assurerait aux espèces présentes sur ces sites un
havre de tout premier ordre.
Ces milieux ne présentent pas encore tout l’intérêt d’un site comme celui du marais du
Rabuais mais ils doivent être inclus dans une gestion à long terme, (10, 20 ou 50 ans) dans la
préservation des milieux humides du nord de l’Île-de-France.
La préservation de la biodiversité ne peut se satisfaire d’une vision à court terme.
A ce titre, la sensibilisation des autorités, des communes et de la région Picardie proche du
site pourrait éviter la prise de décisions qui pourrait remettre en cause le patrimoine entomologique
du site.
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Le cortège entomologique mis en évidence sur le marais du Rabuais justifie l'intérêt du site,
sa protection et celle des domaines afférents.
L'OPIE lutte depuis des années contre les idées reçues et le désintérêt envers les insectes. Il nous
paraît particulièrement judicieux à travers les infrastructures en cours de réalisation, de renforcer
cette démarche pédagogique. Seule une prise de conscience et une évolution profonde de la
mentalité du citoyen peut assurer un avenir au patrimoine biologique de notre nature francilienne.
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7) Bibliographie
Source d’information générale sur le site :
Notes d’informations du Service régional de la protection des végétaux de Picardie et de la
préfecture de la région de Picardie.
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www.inra.fr/content/download/5214/51262/file/Questions+reponses+Diabrotica.pdf
http://draf.ile-de-france.agriculture.gouv.fr/phytopropre/phytopropres_agriculteur.htm
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Sources cartographie :
IGN RANDO® : Île-de-France 2002 CD-ROM, IGN Loxane
BD ORTHO®IGN-2003 1M_25_05; 1M_26_05.
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SYNDICAT MIXTE D'AMENAGEMENT ET DE GESTION DU PARC
NATUREL REGIONAL DU VEXIN FRANÇAIS
Maison du Parc naturel régional du Vexin français
95450 Théméricourt.
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En couverture : Lamia textor Coleoptère Cerambycidae photo : Bruno
Mériguet
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