On ne nait pas parent, on le devient… - chu

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IFPS - Unité de Formation Infirmière Puéricultrice
« On ne nait pas parent, on le devient… »
L’accompagnement des primipares par la
puéricultrice de maternité :
accès à la parentalité, apprentissage des soins, soutien…
Projet Professionnel réalisé en vue de l’obtention du diplôme d’état
d’infirmière puéricultrice par
SEGUIN Gabrielle
Infirmière étudiante puéricultrice, promotion 2014
I.F.P.S. – Ecole de puériculture – CHU Besançon
Remerciements :
Madame Stéphanie KLEIN, infirmière puéricultrice, référente du service de nutrition infantile du
CHRU de BESANCON, guidante de ce Projet Professionnel, pour son investissement, son
encadrement, ses conseils et son soutien,
Madame Marie-Agnès DODANE, Cadre de santé infirmière puéricultrice, Formatrice à l’IFPS –
Ecole de puériculture de BESANCON, pour sa formation, ses conseils et ses encouragements,
Mesdames FAIVRE, MEYER-BISCH et MOUILLET, infirmières puéricultrices, qui ont répondu à
mes entretiens exploratoires, pour leur transmission de savoirs et l’intérêt qu’elles ont porté à
mon travail,
Les quatre professionnelles de maternité et les trois mamans qui ont répondu à mes entretiens
lors de la phase de recherche, pour leur accueil, leur sincérité et l’intérêt qu’elles ont porté à
mon travail,
Mes collègues de promotion, qui m’ont été d’un grand soutien durant la rédaction de ce
mémoire, mais aussi durant les périodes d’examens et de stages, et plus particulièrement
Marion, mon binôme dans ce travail,
Les membres de ma famille, pour leur compréhension, notamment mon petit frère Léo pour
qui j’ai été peu présente durant la rédaction de ce travail,
Ainsi que tous les professionnels qui m’ont formée durant les périodes scolaires et de stages,
pour leur encadrement et leur professionnalisme qui m’ont permis d’acquérir l’expérience et
les connaissances nécessaires à la concrétisation de ce projet professionnel.
SOMMAIRE
Introduction…………………………………………………………………………………………………………………………..6
Première partie : phase exploratoire et conceptuelle………..………………………………………7
1. Situation de départ…………………….……………………………………………………………………………7
1.1.
1.2.
1.3.
Situation interpellante……………………………………………………………………………………………..7
Questionnement personnel……………………………………………………………………………………..9
Question de départ……………………………..……………………………………………….………………….9
2. Phase exploratoire………………………..……………….……………………………………………….…….10
2.1.
2.2.
2.3.
Analyse des entretiens exploratoires……………………………………………………………….…….10
Question de recherche……………………………………………………………………………………….….14
Hypothèses…………………………………………………………………………………………….………………14
3. Cadre conceptuel………..……………………………………………………………..…….…………………….15
3.1. Puéricultrice en maternité………………………………………………..……………………………15
3.1.1.
3.1.2.
3.1.3.


3.1.4.
Législation………………………………………………………………………………………………………………15
Rôle de l’infirmière puéricultrice en maternité………………………..…………………………….16
Compétences…………………………………………………………………………………….…………………..17
Remise en question et évolution des pratiques……………………….…….…………..…………17
Positionnement professionnel et valeurs personnelles………………………..……………….18
Perception du professionnel par les parents…………………………………………………………..18
3.2.
Grossesse et accouchement………………………………………………………………..…………19
3.2.1.


3.2.2.
Modifications corporelles et psychologiques de la grossesse…………………………….…..19
Modifications corporelles……………………………………………………………………………………..19
Modifications psychologiques……………………………………………………………………………….20
Accouchement et premiers jours après la naissance………………………………………………21
3.3.
Premier bébé, parentalité, attachement………………………………..…………………22
3.3.1.




Premier bébé/primiparité……………………………………………………………………………………..22
Bouleversement……………………………………………………………………………..…………………….22
Idées reçues……………………………………………………………………………………..……………………23
Soins au nouveau-né……………………………………………………………………….……………………24
Compétences du nouveau-né………………………………………………………….……………………24
3.3.2. Devenir parent et naissance de la parentalité………………………………………………….…….25
 Evolution de la famille…………………………………………………………………..………..…………….25
 Impact culturel……………………………………………………………………………………….……………..26
 Parentalité…………………………………………………………………………………………….……………….27
o Définitions………………………………………………………………..………………………………..27
o Se construire en tant que parent………………………………………………………………..27
 Attachement/lien mère-enfant………………………………………..…………………………………..28
3.4.
Accompagnement…………………………………………………………………………………………….29
3.4.1. Accompagnement personnalisé, compétences parentales et confiance en soi……….29
3.4.2. Relation d’aide et communication………………………………………..………………………………..31
Deuxième partie : l’enquête……………………………………………………………………………………………34
4. Méthodologie et objectifs de l’enquête………………………………………………..…………34
5. Réalisation des entretiens……………………….…………………………………………………..………34
5.1.
5.2.
Déroulement des entretiens……………………………………………………………..…….……………..34
Présentation des personnes interrogées…………………………………………………..……………35
6. Analyse des résultats de l’enquête………….…………………………………………………………36
6.1.
6.2.
6.3.
6.4.
6.5.
6.6.
Accueil et personnel de la maternité………………………………………………………………………36
L’arrivée d’un premier bébé……………………………………………………………………………………38
Autonomie et confiance en soi……………………………………………………………………….………45
Soutien moral…………………………………………………………………………………………………..…….45
Lien mère-enfant………………………………………………..…………………………………………….……49
Sortie et retour à domicile……………………………………………………………………………………..53
7. Résumé des résultats de l’enquête……………………….…….……………………………………..56
8. Analyse critique de l’outil d’enquête………………………………….……………………………..60
Troisième partie : le projet d’action………………………………………………………………………………61
9. Objectifs de l’action………………………………….…..…..…………………………………..……………..61
10. Contenu de l’action………………………………………………..……………………………………………..61
Conclusion…………………………………………………………………………………...………………………………..…….62
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
Introduction :
Actuellement infirmière en formation pour une spécialisation de puéricultrice, je dois réaliser
un projet professionnel dans le cadre de l’obtention du diplôme d’état. M’intéressant depuis
longtemps au domaine de la maternité et de l’accompagnement de professionnels qui en
découle, j’ai choisi d’étudier ce sujet.
Ce projet ce compose de 3 parties. Tout d’abord la phase exploratoire et conceptuelle faisant
suite à un étonnement lors d’une situation rencontrée en stage. En ressort une question de
départ qui va être affinée par une phase exploratoire afin d’établir une question de recherche
et des hypothèses plus précises, constituant la base de mon travail. Une phase de recherches
documentaires vient ensuite éclaircir les différents concepts prédominants de la question de
recherche (apport théorique du travail).
Ensuite, la phase d’enquête et d’analyse auprès des professionnels et des parents, afin de
confronter théorie et pratique sur le terrain, et de vérifier la véracité des hypothèses établies
au début du projet.
Et enfin, une dernière partie contient l’ébauche d’un projet d’action en regard des données
théoriques du cadre conceptuel et des résultats recueillis lors de l’analyse de l’enquête, dans le
but d’améliorer la pratique de la puéricultrice sur son lieu de travail.
Ce travail a pour objectif de « Rechercher, traiter et produire des données professionnelles et
scientifiques », faisant référence à la compétence n°8 du référentiel de formation.
6
Première partie : phase exploratoire et conceptuelle :
1. Situation de départ :
1.1.
Situation interpellante :
Durant mon stage à la maternité de la Polyclinique de Franche-Comté, j’ai été amenée à
prendre en charge et accompagner des parents dans la réalisation des soins quotidiens de leur
enfant. Je me souviens particulièrement de madame D, jeune femme seule, et de son fils, Willy,
2300g, né prématurément et placé en couveuse dans la chambre. J’ai rencontré des difficultés à
accompagner cette jeune maman lors du bain de son premier bébé.
Madame D a déjà vu le bain la veille mais a besoin d’un soutien pour réaliser le soin seule la
première fois. A sa demande, je la rejoins donc en chambre et lui explique que je viens pour le
bain de Willy, que c’est elle qui va le faire aujourd’hui mais que je vais rester avec elle pour la
guider. Madame D a déjà préparé tout le matériel nécessaire au soin et semble assez sure d’elle
dans ces gestes et dans l’enchainement des différents temps du bain. Elle sort son bébé de la
couveuse, le déshabille et commence le savonnage pendant que je m’occupe de l’eau du bain
tout en lui parlant de sujets divers pour la mettre en confiance. Au moment de prendre son
bébé pour le rincer, je lui conseille de s’essuyer les mains pour éviter que son bébé lui glisse des
mains. Une fois ses mains essuyées, madame D prend Willy sous la tête et sous le bassin pour le
soulever et le plonger dans l’eau. Je la reprends sur la manière de tenir son bébé en toute
sécurité : « alors pour le tenir en toute sécurité, il faudrait que vous passiez votre main derrière
sa tête pour que sa nuque repose sur votre poignet, et que vous attrapiez son épaule en
formant une pince avec votre pouce et votre index », tout en la guidant : « voila, comme ça…
vous êtes sure qu’il ne glissera pas comme ça même s’il bouge ». Je remarque que la maman
devient alors moins sûre dans ses mouvements, plus hésitante. C’est à ce moment que je me
sens en échec dans ma prise en charge, ayant l’impression d’avoir « cassé » la confiance que
madame D avait en elle au début du soin. Cependant, il me semble important de transmettre
aux mères comment bien tenir leur bébé lors du bain afin de prévenir la survenue d’accident,
sujet étant devenu prioritaire pour moi depuis la réalisation de mon mémoire sur le thème des
accidents domestiques en école d’infirmière. La toilette du bébé se termine par les soins du
visage, que la maman exécute de manière hésitante et en me demandant régulièrement si
« c’est comme ça qu’il faut faire », ce à quoi je réponds que c’est très bien. A plusieurs reprises,
je remarque une différence entre la manière dont elle réalise les soins, et la manière dont on
7
m’a appris à les effectuer à l’école et en stage. Je mesure alors l’intérêt d’une éventuelle
remarque et l’impact que ça pourrait avoir sur la confiance de la maman. Je décide donc de
préserver celle-ci, d’autant plus que cela ne représente pas un danger pour Willy. En la laissant
faire à sa manière, je cherche à lui donner le sentiment qu’elle s’occupe bien de son enfant
pour lui redonner la confiance qu’elle semble avoir perdu. A la sortie de la chambre, je ne me
sens pas satisfaite de ma prise en charge et me demande comment j’aurais pu mieux encadrer
cette maman déjà fragile et peu confiante en ses capacités.
J’ai donc réalisé durant ce stage qu’il n’est pas si évident d’accompagner les parents dans les
soins de leur bébé, et cette situation m’a amenée à me questionner sur la protocolisation des
soins en maternité, encore fréquente et rencontrée lors de mes différents stages en maternité,
ainsi que sur l’intérêt de montrer le premier jour aux mamans « comment faire » pour « bien
s’occuper » de leur bébé.
De manière générale, je trouve qu’il n’est pas évident d’accompagner les jeunes mères dans
l’accueil de leur premier enfant. La récurrence des difficultés d’accompagnement des parents
que j’ai rencontrées, mais aussi celles rencontrées par les équipes de maternité, m’a fait
prendre conscience de la complexité de la prise en charge des parents lors de l’accueil d’un
nouveau-né. L’importance de la communication et l’impact qu’à celle-ci sur le besoin de soutien
et de valorisation des parents, est incontestable. Ceci est d’autant plus vrai lors de l’accueil d’un
premier enfant, l’estime des parents étant souvent moindre de part leur manque d’expérience
et de part leur inquiétude devant un bébé dont il n’est pas si évident de s’occuper et de
décrypter les besoins. L’apprentissage des soins aux parents et leur accompagnement dans
l’accès à la parentalité représente une part importante du travail de la puéricultrice en
maternité, mais aussi après le retour à domicile par le service de Protection Maternelle et
Infantile (PMI).
8
1.2.
Questionnement personnel :
Suite à l’écriture de cette situation interpellante, plusieurs questions me sont venues à l’esprit :
-
Quel est l’impact de notre prise en charge sur l’accès à la parentalité ? Comment la
puéricultrice peut-elle en favoriser l’accès ?
-
Quels sont les facteurs favorisants et les facteurs limitants l’autonomie et la confiance
en soi des parents lors de l’apprentissage des soins ?
-
Comment agissent les caractéristiques personnelles de la puéricultrice sur sa prise en
charge des familles ? (pratiques personnelles, valeurs…) Sur quels points cruciaux la
puéricultrice doit-elle est intransigeante dans l’éducation aux soins du nouveau-né ?
(sécurité) Et quels sont ceux, où au contraire, nous pouvons laisser libre choix aux
parents ? A quel moment le soignant devient-il intrusif et restrictif ?
-
Comment faire ressortir le caractère dangereux d’une pratique sans altérer la confiance
en soi du parent ? Comment adapter notre éducation à la personne que l’on a en face
de soi ? (communication)
-
Quel est l’impact de notre éducation sur les parents à moyen et long terme ? Et
comment faire en sorte qu’elle soit efficace tout en respectant les souhaits des
parents ?
-
Quel est vraiment le rôle de la puéricultrice en maternité ?
1.3.
Question de départ :
Au vu des différentes questions précédentes, j’ai ainsi élaboré une question de départ qui sera
étayée par une phase exploratoire :
Comment la puéricultrice peut-elle favoriser la mise en place de la parentalité lors de la
naissance d’un premier bébé ?
9
2. Phase exploratoire
2.1.
Analyse des entretiens exploratoires :
Suite à l’élaboration de ma question de départ, et dans le but d’affiner le champ de mes
recherches, j’ai rencontré 3 personnes ressources : Marie-Ange FAIVRE, infirmière puéricultrice
et formatrice à l’école de puériculture de BESANCON (MAF), Agnès MEYER-BISCH, infirmière
puéricultrice à la PMI d’Epinal (AMB), et Laurence MOUILLET, infirmière puéricultrice à « La
Courte Echelle » (LM). En parallèle à ces entretiens exploratoires, j’ai également participé à 3
conférences : la « 41ème Journée de Médecine Périnatale de Franche-Comté » le 6 mai 2014, la
conférence sur la « Communication Non-violente » par l’association « Comm’Unique » le 14
avril 2014, la conférence « Le bébé est-il bien une personne ? » par l’Association Pikler-Loczy le
24 mai 2014, ainsi qu’à une table ronde sur la périnatalité et la parentalité qui a eu lieu à l’école
de puériculture le 14 avril 2014.
A travers ces rencontres, différents thèmes sont ressortis. Tout d’abord l’accompagnement des
parents lors de l’accueil d’un premier bébé et la naissance de la parentalité. Tous les
professionnels s’accordent à dire que l’arrivée d’un enfant, « ce n’est pas si facile ». « Toute
femme a rêvé ce moment là, et quand elle mesure la différence entre ce qu’elle a espéré et la
réalité, il peut parfois y avoir une déception »1. Lors de la table ronde sur la périnatalité et la
parentalité, il a été dit que « la naissance d’un enfant est un grand bouleversement, un moment
fort en émotions ; il faut du temps pour rééquilibrer ». Chaque personne a un « projet de parent
qu’il est important de respecter » (LM), et « il est important de demander les attentes du
parent » (MAF). C’est de cette manière que la puéricultrice va pouvoir s’adapter à chaque
situation, dans le but d’être au plus proche des besoins de chaque famille. « Il faut faire de
l’individuel dans le collectif »2.
L’accompagnement par les professionnels de santé, et notamment par la puéricultrice, devient
alors primordial pour favoriser l’attachement entre les parents et leur enfant, le sentiment
« d’être un bon parent », et doit leur permettre de répondre aux besoins de leur bébé en toute
sécurité. « L’important pour la puéricultrice, c’est de ne pas prendre la place du parent » (AMB).
Pour Bernard MARTINO, « il ne faut pas dire "je vais vous expliquer ce qu’il faut faire", mais
"faite comme vous le sentez", cela donne une liberté mais aussi une responsabilité. […] On
1
2
Maurice TITRAN dans le film « Le bébé est une personne » de Bernard MARTINO
Myriam RASSE, psychologue et intervenante à la conférence « Le bébé est-il bien une personne ? »
10
supprime aux parents leur sentiment de capacité à s’occuper de leur enfant si on les guide »3, ce
qui revient à dire que la puéricultrice « n’est pas là pour montrer comment faire, mais pour les
accompagner, pour que leur parentalité naisse » (LM). Laisser les parents s’approprier les gestes
semble important pour tous les professionnels interrogés car c’est ressorti dans tous les
entretiens, ainsi que la notion de compétences des parents, qui suppose que chaque parent a
des capacités que le professionnel doit repérer et utiliser. Laisser les parents réaliser les soins
de leur enfant dès le début va « leur donner confiance en eux, valoriser leurs compétences et
celles de leur enfant, les encourager dans leur démarche et leur donner également une certaine
fierté » (MAF), importants dans la naissance de la parentalité.
« On adhère si on a le choix »4. Le professionnel se doit donc de « ne pas être trop normatif, ni
trop intrusif » afin de laisser cette liberté de choix aux parents. Pour Agnès MEYER-BISCH le
soutien des parents est primordial car « la puéricultrice est celle qui soutient ceux qui
soutiennent, à savoir les parents ». En effet, lors de l‘arrivée d’un enfant qui bouleverse le
quotidien, les parents, souvent un peu perdus, se posent beaucoup de questions. Il a d’ailleurs
été soulevé lors de la table ronde sur la périnatalité et la parentalité que « pour bien materner,
il faut aussi être materné ». Ressort alors le fait qu’il faut prendre soin de ces mamans qui
viennent juste d’accoucher. On sait également qu’il « est important, après avoir dialogué avec
les parents, de leur demander s’ils ont des questions, des remarques, des ressentis… »5, et « ce
n’est pas parce qu’un bébé va bien que les parents n’ont pas de questions »6. L’écoute des
questions et des besoins des parents a donc une part importante dans la prise en charge des
parents d’un nouveau-né. De plus, « le fait qu’un besoin soit entendu et reconnu, calme,
procure un apaisement »7, et va donc agir sur le stress qu’un parent peut ressentir après la
naissance de son enfant. Marie-Ange FAIVRE résume ce qui a été dit plus haut par le fait qu’un
accompagnement réussi, c’est lorsque qu’il y a de la part de la puéricultrice : disponibilité,
écoute, échanges, valorisation et une adaptation aux parents ; « il ne faut pas essayer de les
faire rentrer dans un moule, le principal est qu’ils soient biens ». « La confiance qui s’est
installée entre le professionnel et le parent est pour moi un gage de réussite » (AMB).
Accompagner les parents dans leur nouveau rôle, c’est aussi leur faire découvrir les
compétences de leur bébé, « c’est la mise en place avec les mères de la découverte de leur
3
Bernard MARTINO, réalisateur et intervenant lors de la conférence « Le bébé est-il bien une personne ? »
Véronique GASPARD lors de la conférence sur la communication non-violente
5
Anne EVRARD, représentante du CIANE, lors de la Journée Périnatalité
6
Docteur Béatrice GRIMON, pédiatre au CAMPS du Doubs, lors de la Journée périnatalité
7
Véronique GASPARD lors de la conférence sur la communication non-violente
4
11
bébé, regarder ensemble pour découvrir les capacités de CE bébé »8. L’échelle de BRAZELTON,
citée par plusieurs professionnels interrogés, peut y aider. Un rôle primordial de la puéricultrice
lors de la naissance d’un enfant va donc être l’observation des interactions entre la mère et son
enfant, afin de discerner d’éventuelles anomalies du lien d’attachement. Marie-Ange
FAIVRE parle alors « d’observation "fine" » et d’une certaine « vigilance dans la mise en place de
l’attachement, des interactions parents-bébé ». « L’observation, c’est comme un muscle, il faut
s’en servir, le cultiver, sinon il s’atrophie »9.
Mais accompagner les parents dans ce nouveau rôle qui est le leur n’est pas si évident, et il en
découle des principes relationnels de communication avec les parents. « Un temps
d’apprivoisement pour chaque relation »10 est nécessaire et la base de la relation se fait sur la
bienveillance et le non-jugement. Il est également important d’avoir "l’élan" de faire les choses
et de « savoir comment on fonctionne pour comprendre les autres et entrer en relation »11. Lors
de la table ronde sur la périnatalité et la parentalité, les intervenantes ont également parlé de
« faire attention aux "à priori" et aux interprétations dans les équipes » qui peuvent fausser
notre regard sur la personne. Pour deux professionnelles interrogées, il est important de faire
attention aux mots que l’on choisit, mais aussi à notre non-verbal qui peut parfois en dire tout
aussi long. « La parole du professionnel a un impact important sur les parents » car nous
sommes souvent vus comme « le professionnel qui sait tout » (MAF). Parfois, la parole du
professionnel peut être « cautionnée » par celle d’autres parents, et le message peut aussi
passer de manière plus efficace lorsque l’on est en difficulté pour communiquer avec une
famille (réunions de parents par exemple). Lors des entretiens, certains des principes de
communication ressortent et semblent particulièrement importants pour conduire une relation
saine avec les parents : « la ressource va être de partir du parent, de ce qu’il souhaite, de ce qu’il
a imaginé », « l’idée c’est vraiment de faire émerger chez l’autre. Il faut que ça vienne de lui
pour que le message soit entendu et validé » (LM). Il ne faut donc pas hésiter à demander
l’autorisation du parent et à dire notre ressenti, mettre des mots sur ce que l’on observe ou ce
que l’on pressent. Le principal est de « rechercher l’alliance ». « Je pense que c’est surtout ça
accompagner la parentalité, ce n’est pas leur dire voila comment être parent, c’est plutôt « et
vous, quel parent aimeriez-vous être ? » (LM).
8
Myriam RASSE, psychologue et intervenante à la conférence « Le bébé est-il bien une personne ? »
Bernard MARTINO, réalisateur et intervenant lors de la conférence « Le bébé est-il bien une personne ? »
10
Véronique GASPARD lors de la conférence sur la communication non-violente
11
Ibidem
9
12
A également été énoncée la notion des valeurs personnelles du professionnel et de sa
formation initiale qui peuvent agir sur l’accompagnement des parents lors de l’arrivée d’un
premier bébé. Tous les professionnels s’accordent à dire que les valeurs et représentations de
la puéricultrice agissent sur la manière dont elle va accompagner le parent, sur ce qu’elle va lui
dire. La formation et l’apprentissage des soins lorsqu’on est élève jouent aussi un rôle sur notre
représentation des soins. « Ce qui est ancré chez le professionnel, formaté, formé dans les
écoles » et on remarque le « poids de l’enseignement sur les pratiques »12. Ces propos sont
confirmés par Laurence MOUILLET lors de mes entretiens exploratoires : « en tant que
professionnels de santé, on a souvent l’habitude que quand il y a un problème, on nous apprend
une solution ; sauf que dans l’apprentissage des soins du nouveau-né aux parents, il y a d’autres
manières de faire qui ne sont pas mauvaises pour autant ». Il faut donc « imaginer que ce n’est
pas forcément comment je ferais moi ». Ses collègues puéricultrices semblent d’accord avec ses
propos : « les valeurs du professionnel sont à connaitre par le professionnel afin qu’il évite de les
plaquer aux parents » (AMB) et « il ne faut pas défendre ses valeurs, mais s’adapter aux valeurs
du parent, car ce n’est pas notre enfant » (MAF). En résumé, « la puéricultrice doit toujours
chercher et trouver le « bon » dans les « mauvaises » idées des parents ». Lors de la table ronde
sur la périnatalité et la parentalité, il a été dit par les intervenantes que pour être une bonne
professionnelle, on a besoin de se remettre en question, de se poser des questions, de se
former, de s’intéresser et de rencontrer d’autres professionnels. « Il ne faut pas reproduire
comment on veut être à la maison avec SES enfants ». La puéricultrice doit donc mettre de côté
ses valeurs personnelles, et comment elle ferait elle, pour se mettre à la place du parent,
comprendre ses envies et ses besoins, et le guider au mieux dans ses choix. « La technique ne
vaut rien sans éthique, sans conscience » et « c’est ce qu’on comprend qui fait la distance entre
savoir-faire et savoir-être »13.
Ce que j’ai principalement retenu de cette phase exploratoire est que l’arrivée d’un enfant est
un moment de bonheur mais également une période de stress et de questionnement, d’autant
plus lorsque l’on est primipare. Chaque mère vit ce moment à sa manière et a des besoins et
des attentes qui lui sont propres, mais doit dans tous les cas être soutenue et guidée par des
professionnels de qualité. Ceux de maternité, et notamment les puéricultrices, sont les
12
13
Bernard MARTINO, réalisateur et intervenant lors de la conférence « Le bébé est-il bien une personne ? »
Bernard MARTINO, réalisateur et intervenant lors de la conférence « Le bébé est-il bien une personne ? »
13
premières personnes qui vont prendre en charge les jeunes accouchées et leur nouveau-né.
Accompagner ces femmes dans leur nouveau rôle de maman demande des compétences
particulières afin d’être les plus aidants possible.
2.2.
Question de recherche :
L’ensemble des informations recueillies lors de ces entretiens exploratoires et de ces
conférences m’ont permis de préciser ma question de recherche :
Comment la puéricultrice, au sein de l’équipe de maternité, peut-elle faire évoluer les
pratiques d’accompagnement à la parentalité des mères primipares ?
2.3.
Hypothèses :
Au vu de ma question de recherche et avec ce que j’ai appris lors de ma phase exploratoire, j’ai
également établi deux hypothèses :
-
Je pense que l’autonomie de la mère dans les soins de son bébé permet la construction
de l’estime de soi, nécessaire à la mise en place de la parentalité
Je pense qu’être conscient du besoin de soutien psychique de la mère en suite de
couche permet de faire évoluer les pratiques d’accompagnement à la parentalité
14
3. Cadre conceptuel :
3.1.
(les références en exposant renvoient à la bibliographie placée à la fin du travail)
Puéricultrice en maternité :
3.1.1. Législation :
La puéricultrice est une infirmière (ou plus rarement une sage-femme) qui a suivi une formation
d’un an en école de puériculture, débouchant sur l’obtention d’un diplôme d’état. La formation
de puéricultrice est régie par l’Arrêté du 12 décembre 1990, relatif à la scolarité, au Diplôme
d’Etat de Puéricultrice et au fonctionnement des écoles, lui-même modifié par l’Arrêté du 15
mars 2010.1
La puéricultrice peut exercer en milieu hospitalier (pédiatrie, maternité, néonatologie…) ou en
milieu extrahospitalier (crèche, PMI, associations…) :
« L’infirmière puéricultrice ou l’infirmier puériculteur exerce des activités de soin et d’éducation
dans les établissements de santé accueillant des enfants de la naissance à l’adolescence, dans
les établissements et services d’accueil des enfants de moins de 6 ans et dans les services de
protection et de promotion de la santé de l’enfant et de la famille ». 1
La professionnelle devient alors spécialisée dans la connaissance de l’enfant de 0 à 18 ans et
travaille en priorité en partenariat avec sa famille. Elle mobilise son expertise pour évaluer
l’état de santé de l’enfant ainsi que son développement psychomoteur, intellectuel, affectif et
social, dans son contexte familial et environnemental. Dans certaines situations, elle est
amenée à poser un diagnostic social et sanitaire pouvant conduire à la mise en œuvre d’un
projet dont l’objectif sera l’autonomie de l’enfant et de sa famille. Elle a également un rôle
d’accompagnement des parents dans l’exercice de leurs fonctions, d’éducation à la santé, de
prévention, ainsi que de protection de l’enfance.
« Les missions de la puéricultrice sont de contribuer au développement de l’enfant, en favorisant
son autonomie et sa socialisation par la mise en place et la surveillance d’actions de soins,
d’éveil, et de soutien en direction de ses parents. Elle surveille, accompagne et soigne l’enfant
malade et soutient sa famille, assure des missions de protection de l’enfance et de promotion de
la santé, et contribue à l’intégration des enfants en situation de handicap et à la lutte contre les
exclusions.
La puéricultrice exerce ses activités d’accompagnement, d’éducation, et de soins, dans les
services de promotion et de protection de la santé de l’enfant et de sa famille, dans les
établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, et les services d’accueil des enfants de la
naissance à l’adolescence. Elle travaille au sein d’équipes pluridisciplinaires et dans les
réseaux ».2
15
Comme énoncé dans l’Article R4311-13 du Code de la Santé Publique :
« Les actes concernant les enfants de la naissance à l’adolescence, et en particulier ceux cidessous énumérés, sont dispensés en priorité par une infirmière titulaire du diplôme d’Etat de
puéricultrice et l’infirmier ou l’infirmière en cours de formation préparant à ce diplôme :
1° Suivi de l’enfant dans son développement et son milieu de vie ;
2° Surveillance du régime alimentaire du nourrisson ;
3° Prévention et dépistage précoce des inadaptations et des handicaps ;
4° Soins du nouveau-né en réanimation ;
5° Installation, surveillance et sortie du nouveau-né placé en incubateur ou sous
photothérapie ».3
Le rôle de la puéricultrice repose donc sur de nombreuses compétences et explore un large
panel d’activités, dont le travail en partenariat avec les parents et la collaboration avec de
nombreux professionnels de l’enfance restent les éléments clés d’une bonne prise en charge de
l’enfant.
3.1.2. Rôle de l’infirmière puéricultrice en maternité :
Le principal rôle de la puéricultrice de maternité est d’assurer la sécurité et le bon
développement du bébé au sein de sa famille. Pour cela, elle doit veiller à la bonne santé de
l’enfant (aspect clinique, comportement, prise de poids, alimentation, élimination, ictère,
compétences, tonus…), mais aussi, et surtout, accompagner les parents dans leur fonction.
Anny MAYEUX dit qu’« il est important pour la puéricultrice de rassurer les parents sur leurs
compétences, de les aider à tenir compte de tous les signaux que leur bébé leur envoie et à y
répondre. La puéricultrice encourage les parents à parler à leur bébé, à lui expliquer ce qui se
passe autour de lui et à le rassurer en lui offrant un contenant affectif. Des conseils peuvent être
donnés ».4
L’IPDE a donc un rôle d’éducation à la santé, reposant en grande partie sur l’information des
parents (prévention des accidents domestiques et prévention sanitaire, besoins et
compétences de l’enfant…) et leur soutien dans l’apprentissage des soins de base du nouveauné (soins quotidiens tels que le bain, le change, les soins du visage et du cordon) et dans la mise
en route de l’alimentation. Elle participe ainsi à leur acquisition des « savoir-faire » et
connaissances nécessaires pour qu’ils répondent aux besoins de leur enfant et suivent sa santé.
Pour Asmaa COCHEREAU, « la puéricultrice est amenée à écouter les parents, à répondre à leurs
questionnements, et à accompagner, le cas échéant, la construction du lien parent-bébé afin de
favoriser le processus de parentalité ».5
L’infirmière puéricultrice a donc également pour mission de veiller à l’établissement du lien
d’attachement entre l’enfant et ses parents (rôle de prévention des anomalies de la relation
16
mère-enfant). De plus, le soutien à la parentalité et le soutien moral des parents lors de
l’arrivée de leur bébé sont importants et font partie intégrante de la fonction de la
puéricultrice. Mais être parent ne s’improvise pas, et cette période heureuse mais néanmoins
bouleversante pour toute la famille, nécessite l’encadrement de professionnels qualifiés.
3.1.3. Compétences :
Afin d’accomplir son métier de manière compétente et efficace (savoir-faire), l’infirmière
puéricultrice en service de suite couche se doit donc d’être observatrice, à l’écoute et
disponible (savoir-être), en plus d’avoir des connaissances pointues sur le nouveau-né, la
grossesse et la parentalité (savoir).
Eliane ZEINDLER la définit comme utilisant « tous les moyens et outils mis à sa disposition, et
mobilisant toutes les techniques et connaissances acquises durant sa formation initiale, qu’elle
aura eu soin de développer et de réactualiser tout le long de sa vie professionnelle. Ce faisant,
elle reste également vigilante au respect des limites imposées par les textes de loi en vigueur,
concernant notamment le secret professionnel. […] Dans un souci d’efficience et d’efficacité, elle
doit être particulièrement vigilante et respectueuse des différences culturelles et
environnementales rencontrées et sur lesquelles elle se sera informée et formée ».6
Chaque mère et chaque père vit la période postnatale de manière différente et a des besoins
spécifiques. La puéricultrice est là pour partager ses connaissances avec les parents tout en les
accompagnants et en répondant au mieux à leurs attentes. Cela nécessite de sa part une
certaine adaptation et des capacités de remise en question.

Remise en question et évolution des pratiques:
L’apprentissage du métier de puéricultrice se fait sur une formation alternant théorie et
pratique, et les soins sont en général protocolaires. Seulement, on ne peut pas dire que telle ou
telle manière de faire les soins correspond aux attentes et aux choix des parents. Il est donc
important pour l’IPDE (Infirmière Puéricultrice Diplômée d’Etat) de savoir remettre en question
ses pratiques pour laisser aux parents la possibilité de faire comme ils le souhaitent. C’est
« modifier son propre cadre pour accueillir ».7
Pour Asmaa COHEREAU, c’est « la capacité à déconstruire ses évidences, considérer des faits
plutôt que le ressenti, constituer une matrice de soutien sans disqualifier les parents, et
réajuster son raisonnement ».5
« Cette posture implique parfois de "se retenir d’agir" »5 mais il faut toujours rechercher
l’intérêt de l’enfant et se demander s’il est en danger ou non.
17
Durant longtemps, nous avons estimé que la technique était « nue », sans impact culturel, et
qu’il suffisait d’appliquer un protocole pour que l’acte soit « correctement » réalisé.
Aujourd’hui, on sait que s’ouvrir à l’autre permet de mieux le comprendre et facilite la mise en
place de relations empathiques, nécessaires pour un accompagnement de qualité en
maternité.
Cette remise en cause des pratiques soignantes a également pour bénéfice l’enrichissement
professionnel. Elle renouvelle « nos manières de penser, nous oblige à nous décentrer, à
complexifier nos modèles et à nous départir de nos jugements »7. On sait également qu’on est
plus productif lorsque l’on échange et confronte nos idées.
Pour Marie-Rose MORO, « si cela n’est pas possible, la pensée ne s’appuie alors que sur ellemême et ses propres ressentis. Cette non-confrontation peut aussi conduire à une rigidification,
à un repli psychique et identitaire. C’est l’échange avec l’autre qui me modifie ».7

Positionnement professionnel et valeurs personnelles :
Mais remettre en cause ses convictions professionnelles, et parfois personnelles, n’est pas si
simple. « Nous risquons sans arrêt, nous, professionnels, de basculer dans le jugement ou la
normalisation ».8 En effet, la formation initiale (études) et l’expérience, ainsi que les valeurs
propres du professionnel de santé, l’amènent à se forger des principes qui sont parfois en
désaccord avec les opinions d’un parent. Et le professionnel peut « être tenté » de regarder le
parent avec un œil critique.
« En quoi les valeurs propres, même auréolées de professionnalisme, seraient-elles les "bonnes
valeurs éducatives" ? Savoir mettre de coté ses propres choix, ses propres convictions, ses
propres valeurs pour faire un bout de chemin en comprenant et acceptant celles des autres,
puisqu’il s’agit d’accepter les personnes comme elles sont tout en sachant qu’il est possible de
faire autrement »9.
Il est donc important pour la puéricultrice de maternité de rester dans son rôle
d’accompagnement et de soutien des parents sans leur inculquer ses propres valeurs
personnelles. Car il ne s’agit pas de « comment j’aurais fait à leur place » (transfert), mais de
« comment je peux les aider à parvenir à leur projet parental », la sécurité et la protection de
l’enfant restant la condition sine qua non. Notons qu’il est possible pour l’IPDE de passer le
relais à une collègue si toutefois elle ne parvient pas à garder son objectivité.
3.1.4. Perception du professionnel par les parents :
« Aujourd’hui, des paroles d’experts, aussi innombrables que divergentes, disent la manière
d’être de bons parents, pour générer des enfants "heureux" ».10
18
En général, après la naissance de leur enfant (d’autant plus lorsque c’est un premier), les
parents se posent beaucoup de questions face à leur nouveau-né, et les réponses des
professionnels rassurent, donnent des raisons, comme il est dit dans le film de Marylise
TREMBLAY11.
Les professionnels de maternité, et notamment les puéricultrices, sont parfois perçus par les
parents comme des experts de la petite enfance, qui savent mieux qu’eux ce qui est le meilleur
pour leur bébé, au point parfois de sacraliser leur parole et de ne pas écouter leur bons sens
(par exemple : donner le sein montre en main ou réaliser le bain exactement dans le même
ordre). Le rôle du professionnel prend alors une place importante pour les parents, permet
dans certains cas de diminuer leur stress, mais peut parfois le majorer en leur rajoutant une
pression supplémentaire.
Comme le disent Mesdames FERRER et BUTHIER, « l’expertise du professionnel met à jour le
sentiment de difficulté ou d’incapacité de certains parents ».12
La puéricultrice se doit donc d’être vigilante sur sa manière d’aborder les parents, ce qu’elle
leur dit, et doit veiller à leur laisser prendre les décisions pour leur enfant en les valorisant dès
que possible.
3.2.
Grossesse et accouchement :
La période périnatale est une phase de grand changement dans la vie familiale. Si chaque mère
la vit de manière différente, cela reste néanmoins un moment dont elle se souviendra toute sa
vie.
3.2.1. Modifications corporelles et psychologiques de la grossesse :

Modifications corporelles :
Tout d’abord, le corps de la femme change. Son ventre s’arrondit, ses seins s’alourdissent… Ces
modifications physiques sont vécues différemment suivant les personnes, mais sont les signes
concrets, palpables, de la grossesse. A cela s’ajoute des manifestations physiologiques telles
que les nausées et vomissements dans les premiers mois, et la fatigue qui accroit au fil des
mois, et qui gène la future maman dans les actes de la vie quotidienne.
Pour Mariella LANDAIS, « durant la grossesse, les transformations du corps de la femme
l’amènent rapidement à se sentir enceinte, puis à imaginer son bébé, sa naissance, ses
besoins ».13
19
Un jour, les mouvements du bébé se font sentir, et ce « petit intrus » tant imaginé manifeste
enfin sa présence. C’est souvent à ce moment là que la femme se sent enceinte, accepte son
état gravidique, et la grossesse, qui n’était jusque là qu’une idée, devient concrète.

Modifications psychologiques :
Mais les plus grandes modifications que la femme enceinte subit sont d’ordre psychologique.
En effet, cette période de grossesse est définie par ce qu’on appelle la « transparence
psychique », synonyme d’une grande vulnérabilité psychologique qui est parfois marquée par
une recrudescence d’anciens affects.
« On le sait, en dehors de ses dimensions sociales et culturelles, cette fonction maternelle peut
être touchée […] par des souffrances anciennes mais non apaisées, qui réapparaissent de
manière souvent brutale au moment de la mise en œuvre de sa propre lignée ».7
La grossesse remet également en question le statut identitaire car elle annonce un changement
de génération : on passe de « l’enfant de » au « parent de ». De plus, la fragilité émotionnelle
de la parturiente peut être à l’origine d’une incompréhension au sein du couple, et il est
fréquent qu’elle ne se sente pas comprise par son entourage.
Les changements lors de la grossesse sont assimilables à des traumatismes qui sont à l’origine
de l’ambivalence de la femme enceinte. Amour, haine, désir, peur, s’entremêlent et peuvent
provoquer un sentiment de culpabilité chez la future maman.
« Le processus s’accompagne de nombreuses émotions, d’attentions portées au futur bébé et à
sa santé (habitudes de vie maternelles, suivi médical), de craintes devant l’accouchement,
d’impatience, de doutes concernant ses capacités et d’une forte responsabilisation (préparatifs,
choix du lieu de naissance et du mode d’alimentation, projet de naissance) ».13
Aujourd’hui, c’est le plus souvent le désir d’enfant qui est à l’origine de la grossesse, et l’enfant
est devenu précieux d’autant plus qu’il est devenu rare. Le projet parental est donc réfléchi, et
l’enfant idéal rêvé. C’est une période de doutes et de questions pour la future mère, qui
engendrent stress et angoisse.
L’aide et le soutien des professionnels de santé, mais aussi de l’entourage et de la famille, sont
importants durant cette période de fragilité, aident à prévenir la solitude et l’isolement de la
femme enceinte, lui permettent de devenir mère petit à petit et d’investir son bébé.
Pour Marie-Rose MORO, « cette prévention en période périnatale est essentielle car cette
période est cruciale pour le développement du bébé ; c’est aussi à ce moment-là que se construit
la place de l’enfant dans la famille ».7
20
3.2.2. Accouchement et premiers jours après la naissance :
« La période périnatale est habituellement reconnue comme source de joie et d’excitation, mais
elle comporte aussi son lot de questionnements, voire de stress pour les familles ». 14
La fin de la grossesse est souvent longue et l’accouchement est un moment éprouvant, qui ne
se passe pas toujours comme on l’avait imaginé : durée du travail, prématurité, complications...
Le vécu de la grossesse et celui de l’accouchement affectent le sentiment de se sentir mère de
la femme, a un retentissement sur sa relation avec son enfant et sur son état psychologique
dans les jours qui suivent la naissance de l’enfant. L’accouchement est aussi le moment de la
confrontation entre le bébé imaginé par la mère et le bébé réel. Il est donc fréquent que les
jeunes mamans se sentent perdues, et le soutien des professionnels est primordial à ce
moment clé : le début du lien d’attachement entre la mère et son enfant.
Comme le dit Eliane ZEINDLER, « à cet âge précoce de la vie de l’enfant, aucune problématique
n’est anodine et toute question est à prendre avec le plus grand sérieux ».6
De plus, les premiers jours après l’accouchement, la jeune maman est fatiguée, voire épuisée,
aussi bien physiquement que mentalement. Ce bébé, qu’elle ne connait pas encore, est à
l’origine du sentiment d’ambivalence de la jeune maman. En effet, même si la jeune mère
éprouve de l’amour pour ce dernier, c’est lui qui est à l’origine de son état physique et mental,
et qui, le plus souvent, attire toute l’attention de l’entourage.
Pour Anna COGNET, « de manière inconsciente, le bébé est considéré comme responsable de ce
soudain vieillissement, de cette perte de l’insouciance, et une part de nous lui en tient rigueur,
qu’on le veille ou non ».15
En atteste ce témoignage d’une jeune primipare : « Je me sentais très mal et je m’en voulais
parce que je m’étais imaginée que je serais juste emplie de bonheur et d’amour pour mon bébé.
J’avais surtout l’impression que c’était la réaction que ma famille et même l’équipe soignante
attendaient de moi. Et puis, tout le monde me parlait du bébé et s’inquiétait pour lui.
Intérieurement, je me disais que c’était plutôt de moi qu’il fallait s’inquiéter : j’étais épuisée,
j’avais vécu un accouchement traumatisant… En même temps, je me sentais affreusement
égoïste d’avoir ce genre de pensées. Et puis un jour, une sage-femme que je ne connaissais pas
encore est rentrée dans ma chambre et m’a demandé comment j’allais. « Euh… fatiguée… mais
très heureuse bien sûr ! », reprenant vite mon masque de maman épanouie. Elle a tout de suite
coupé court à mon jeu : « ça n’a rien à voir, après un accouchement, on n’est pas forcément
folle de joie, on est surtout épuisée et bouleversée, c’est tout sauf facile. » J’ai fondu en larmes,
en ressentant un très grand soulagement. C’est comme si elle m’avait donné le droit d’avoir des
sentiments mitigés ! ».15
Ce discours démontre la complexité des sentiments que ressent une jeune maman dans les
premiers jours après l’accouchement, et en résulte l’importance du rôle des professionnels de
maternité dans la déculpabilisation et l’information de cette dernière.
21
En plus, les séjours de la maternité sont de plus en plus courts, 3 jours en moyenne, et la sortie
se fait dans une période particulièrement sensible. La maman est encore bouleversée par la
naissance, la sensation de « vide » dans le ventre, la fatigue physique… L’allaitement, s’il a lieu,
n’est pas encore mis en place et la montée laiteuse débute seulement… Le bébé n’a pas encore
repris son poids de naissance et la dyade mère-enfant n’a pas encore trouvé ses marques.
« Souvent, trop de professionnels rencontrés en peu de temps, trop de discours différents et un
baby blues naissant font que les mères fragilisées arrivent à la maison particulièrement
angoissées »4, dit Anny MAYEUX.
Aucune mère ne doit donc sortir de la maternité et se retrouver seule à son domicile sans les
coordonnées d’une puéricultrice et/ou d’une sage-femme qu’elle pourra contacter lorsqu’elle
en ressentira le besoin.
3.3.
Premier bébé, parentalité, attachement :
3.3.1. Premier bébé/primiparité :
La primiparité définit le fait d’accoucher d’un premier enfant ; il est l’inverse de multiparité. On
parle alors de maman primipare lorsqu’elle accueil son premier enfant. En revanche, ce terme
ne signifie pas que c’est la première grossesse de la mère.

Bouleversement :
Comme il a été dit plus tôt, l’arrivée d’un bébé est un grand bouleversement, d’autant plus
lorsque c’est un premier enfant. Aussi informé que l’on puisse être, il est difficile de se préparer
à ce grand changement qui modifie tout le quotidien du couple telle une véritable « crise
familiale ». Le bébé change tout, plus rapidement et plus fort que prévu.
« Dans cette nouvelle famille, chacun peut être amené à modifier quelques repères dans son
mode de vie, son fonctionnement, le partage des tâches, les choix éducatifs dont il n’avait pas
été question avant »13, explique Mariella LANDAIS.
De plus, les jeunes parents sont comme « propulsés » dans leur nouvelle fonction : donner des
soins au bébé, répondre à ses besoins, le protéger, prendre des décisions pour lui… Ce bébé,
totalement dépendant d’eux, leur paraît parfois bien fragile et vulnérable. Il est fréquent
qu’une jeune maman (ou un jeune papa) soit désarçonnée et inquiète face aux pleurs de son
nouveau-né et se sente totalement impuissante, perdue, voire isolée. « Est-ce normal qu’il
pleure autant ? Que dois-je faire ? ». Les conseils de la famille, qui se contredisent souvent,
rajoutent de l’inquiétude et des doutes à une maman déjà perdue. Les « pressions » de
l’entourage proche (mère, belle-mère), ou en tout cas ressenties en tant que telles par la jeune
22
maman, sont très présentes et peuvent amener les parents à agir d’une manière plutôt qu’une
autre (comme eux l’auraient peut-être souhaité). La puéricultrice doit donc restée vigilante visà-vis de ce phénomène, souvent plus présent avec les primipares. Cependant, cette « pression
familiale » fait partie de l’accueil d’un première enfant et de l’accès à la parentalité.
Comme le dit Anna COGNET, « dans cette période de plus grande fragilité psychique et
émotionnelle, les parents perdent confiance en eux et en leurs capacités, d’autant plus qu’il
n’existe pas de formule magique, applicable à tous les enfants pour qu’ils dorment, mangent ou
ne pleurent plus, ce qui place les jeunes parents dans un constant sentiment d’échec ».15
Les jeunes parents, dont la confiance en soi est altérée par tant de changements, ne savent pas
toujours vers qui se tourner pour poser les questions qui leurs viennent à l’esprit, et qui parfois,
leur paraissent bien anodines et naïves. S’ajoutent à la tâche de devenir parent les diverses
obligations quotidiennes dont le couple doit se charger (travail, visites, impératifs…). On a mille
et une choses à faire, et plus le temps pour rien !

Idées reçues :
La maternité, ce n’est pas non plus ce qui est écrit dans les livres.
« Tout n’est pas rose layette »15.
Les nombreuses représentations d’une maternité idéalisée, les idées préconçues de la maman
heureuse et épanouie, sont encrées dans les esprits (et le plus souvent renforcées par les
discours de l’entourage) et se confrontent à une réalité toute autre lors de la naissance. Les
jeunes mères sont parfois surprises, déçues, de voir que l’arrivée d’un bébé, ce n’est pas si
évident. Il peut être frustrant pour une maman de ne pas réussir les soins de son enfant
exactement comme elle l’aurait souhaité ou de ne pas réussir à calmer ses pleurs aussi
facilement qu’elle se l’était imaginé. Le bébé « parfait », qui ne pleure pas ou qui fait ses nuits,
est souvent synonyme de réussite, d’être une bonne mère. « Notre bébé n’est pas exactement
comme dans les livres et nous, parents, ne sommes pas exactement comme nous l’avions
souhaité ». Cette pression de réussite et de résultat immédiat est renforcée par la société
actuelle qui incite la population à rechercher le rendement, l’efficacité et la vitesse dans le
domaine professionnel, et parfois personnel.
Il a également été constaté par les équipes de maternité « un manque de connaissances des
parents concernant l’arrivée de leur enfant (ses rythmes, ses besoins primaires, ses pleurs,
etc.) ».16
Les parents découvrent alors un monde qui leur est totalement inconnu et doivent apprendre
un « travail » qui ne s’apprend que sur le terrain !
23

Soins au nouveau-né :
Les soins aux nouveau-nés ont été pendant longtemps l’apanage des professionnels de santé,
c’est pourquoi bon nombre de parents ne se sentent, encore aujourd’hui, pas « suffisamment
bons » pour leur nouveau-né. Le change, les soins du cordon, le bain, les soins du visage,
l’alimentation… sont encore souvent montrés aux parents en maternité, ce qui modélise une
« bonne manière » de faire, en contradiction parfois avec les représentations personnelles des
parents, les discours de leur entourage, ou les modèles diffusés dans les médias. De quoi se
sentir perdus !
Comme le dit Mariella LANDAIS, « les parents sont parfois fragilisés par leur entourage […] : des
discours parfois malveillants, des colportages de mythes, des soupçons d’incompétence et des
injonctions souvent discordantes peuvent venir bousculer leurs émotions ».13
L’apprentissage des soins du nouveau-né a donc un impact sur la confiance en soi, déjà fragile,
des jeunes parents. Ce n’est pas favoriser leur autonomie de leur rajouter du stress et la
pression de bien faire (qu’ils ressentent déjà beaucoup !) en leur montrant les soins et en leur
demandant de refaire la même chose. C’est comme si on leur demandait de montrer des
« capacités à être parent » ! Certains vont donc chercher à reproduire exactement ce qu’on leur
a montré, d’autres vont demander aux soignants de leur remontrer encore une fois, d’autres
encore n’oseront pas réaliser les soins sans la présence d’un professionnel qui les encadre et les
rassure… Alors que la quasi-totalité des parents sont tout à fait capables de réaliser
correctement les soins de leur bébé seuls dès la première fois. Ils trouvent d’ailleurs mieux
leurs marques de cette manière et en seront d’autant plus efficaces et, par conséquent,
d’autant plus confiants et sereins.
A noter cependant que certains jeunes parents préfèrent voir une première fois les soins avant
de les réaliser et que d’autres seront rassurés par la présence d’un soignant à leurs côté.

Compétences du nouveau-né :
Durant longtemps, le nouveau-né était considéré comme un « réceptacle passif des
stimulations de l’environnement »17 ; aujourd’hui, il est reconnu comme un être à part entière,
avec ses émotions et ses besoins. Certes, le bébé nait immature, fragile et dépendant de sa
mère, mais il est déjà pourvu de nombreuses compétences. En effet, il est porteur de réflexes
que l’on appelle réflexes archaïques de par leur caractère automatique et involontaire en
réponse à une stimulation précise. Outre les réflexes de survie comme la succion-déglutition ou
24
le fouissement permettant au nouveau-né de se nourrir, ils ont un rôle dans l’élaboration du
lien d’attachement entre la mère et son enfant, et notamment le réflexe d’agrippement.
D’autres mécanismes lui permettent de manifester ses besoins et d’entrer en relation avec les
personnes environnantes, comme les pleurs, qui lui permettent d’appeler à l’aide lorsqu’il
ressent de l’inconfort, tels un signal d’alarme qui prévient la mère que son enfant a besoin
d’elle. Mais le bébé manifeste d’autres signaux, parfois plus discrets, comme les mimiques ou
les mouvements et positions corporelles, souvent difficiles à interpréter par les parents.
Pourtant, ils sont souvent révélateurs de l’état de bien-être du tout petit.
« Les nouveaux parents se trouvent donc souvent emplis de perplexité devant leur enfant,
s’efforçant de décrypter ses mimiques et sourires car ils comprennent très vite la portée
relationnelle de ces signaux ».13
S’ajoutent à cela les facultés du bébé à fixer et à suivre du regard, mais aussi à s’orienter vers
des stimuli auditifs ou visuels, qui l’aident également en entrer en relation avec son entourage.
On sait aussi que lorsque le bébé vient au monde, ses cinq sens sont fonctionnels : il voit, sent,
entend, et peut discriminer les sons, goûts et odeurs qu’il connait. Cette sensorialité lui permet
de reconnaitre l’odeur de sa mère, sa voix, ce qui participe aux prémices du lien d’attachement.
« Le bébé, on le sait depuis les travaux de Cramer, Lebovici, Stern et bien d’autres, est un
partenaire actif de l’interaction parents/enfants et, par-là même, de la construction de la
parentalité. Il contribue à l’émergence du maternel et du paternel dans les adultes qui
l’entourent, le portent, le nourrissent, lui procurent du plaisir dans un échange d’actes et
d’affects qui caractérisent les tous premiers moments de la vie de l’enfant ».7
Et on ne peut parler de compétences du nouveau-né sans parler des travaux de T.B. Brazelton
qui « avait la conviction que le bébé apportait une contribution majeure à son propre
développement » et que « si l’on pouvait comprendre la part prise par l’enfant dans cette triade,
on pourrait amener les parents à une meilleure compréhension de leur rôle »17. Il a établi une
échelle d’évaluation néonatale dont l’objectif est de montrer aux parents les compétences de
leur nouveau-né, afin de le valoriser à leurs yeux et de leur démontrer que le bébé est bien une
personne à part entière.
3.3.2. Devenir parent et naissance de la parentalité :

Evolution de la famille :
Si avoir un enfant aujourd’hui est le plus souvent à l’origine d’un choix de couple, un procédé
maitrisé, il n’en a pas toujours été ainsi. Jusqu’au XIX ème siècle, le nombre d’enfants par famille
25
était élevé, leur abandon fréquent et la mortalité infantile ordinaire. La perte d’un enfant était
plutôt courante, ce phénomène contrastant avec les notions d’enfant « désiré » et « précieux »
actuelles. Cette évolution est notamment corrélée à l’évolution de la société (augmentation
nombre de femmes travaillant par ex.) et à l’apparition de la contraception orale et de l’IVG.
« De plus, les conditions de vie en société ont considérablement évolué : l’âge de la grossesse a
reculé, les familles nombreuses se font plus rares, les priorités personnelles se confrontent aux
priorités économiques, etc. ».13
Devenir parent dans notre société actuelle est aussi marqué par une pression sociale de
réussite qui n’existait pas auparavant, venant la plupart du temps de la famille et de la bellefamille des jeunes primipares. Ces dernières sont souvent considérées par leur ainées comme
des ignorantes voire des incompétentes, et reçoivent des conseils pas toujours appropriés. Les
nouvelles mamans cherchent à être compétentes, efficaces, parfois à être des « mères
parfaites », ne s’autorisant plus le droit à l’erreur et se posant beaucoup de questions,
n’écoutant plus leur instinct et leur bon-sens.
Deux citations illustrent ce phénomène :
« Etre parent aujourd’hui, c’est se confronter à des attentes singulières de la part de la société,
des institutions et des professionnels ».8
« Ces pressions, qu’elles soient réelles, ressenties ou fantasmées, entraînent chez les parents un
sentiment d’impuissance, d’incompétence et donc de culpabilité ».10
Résultat : des parents plus stressés, plus perdus, moins confiants et donc moins disponibles
pour développer une relation avec leur premier-né.

Impact culturel :
Il n’y a pas qu’une seule manière d’être père ou d’être mère, mais autant qu’il y a de parents.
Comme le dit Marie-Rose MORO, « les éléments culturels se mêlent et s’imbriquent avec les
éléments individuels et familiaux de manière profonde et précoce ».7
Il est certain que l’impact culturel influe sur la manière dont on va être parent et sur les choix
que l’on va faire en tant que tel. Les valeurs ancrées dans la société et les origines culturelles et
familiales, dans lesquelles les jeunes parents baignent depuis leur enfance, vont les guider dans
cette nouvelle fonction, le plus souvent inconsciemment. Respecter cette influence permet au
parent de se sentir plus en adéquation avec ses principes et ses valeurs, et donc plus
performant avec son enfant.
26

Parentalité :
On ne nait pas parent, on le devient. Devenir parent se construit, s’apprend autour de la
singularité de chaque personne.
o Définitions :
Le terme de parentalité est un néologisme apparu pour la première fois dans les années 1960.
De nombreux auteurs ont tenté de le définir sans qu’une définition officielle ne lui soit
attribuée.
Pour Messieurs Lamour et Barraco, « la parentalité peut se définir comme l’ensemble des
réaménagements psychiques et affectifs qui permettent à des adultes de devenir parents, c’est
à dire de répondre aux besoins de leurs enfants à trois niveaux : le corps […], la vie affective, la
vie psychique ».18 C’est un processus maturatif qui mène à l’état d’être parent.
Pour ce qui est de la définition du terme de parent, on peut dire qu’« être parent ne se réduit
pas à une fonction de géniteur. Les géniteurs ont à devenir parents. C’est pourquoi la fonction
peut même être élargie à toute personne répondant aux besoins des enfants et leur apportant
l’amour et l’attention dont ils ont besoin ».19
Cette définition inclut ainsi les parents adoptifs ou les parents de substitution.
o Se construire en tant que parent :
Le fait de devenir parent demande une construction dans les dimensions psychologique,
sociologique, sociale et juridique, et l’arrivée d’un bébé ne sera pas vécue de la même manière
par les mamans. Chaque parent est unique et demande une attention particulière et adaptée à
ses besoins. De plus, chaque famille a son propre fonctionnement, son propre environnement
et sa propre identité culturelle. La survenue d’un enfant dans une famille va bouleverser la
dynamique familiale et provoquer différentes émotions chez les membres du foyer, comme la
joie ou le bonheur, mais aussi l’anxiété, le stress ou le déroutement. Outre l’aspect
physiologique de la mère en suite de couche, la crainte de mal faire, la peur de se retrouver
seule à domicile avec son enfant, l’apprentissage de nouveaux gestes, le contexte de l’hôpital,
et tout simplement l’inconnu, sont des sentiments bels et biens présents. Ces craintes, plus ou
moins évidentes et exprimées, sont observées chez tous les parents, mais le sont d’autant plus
lorsque c’est un premier enfant, comme on l’a vu précédemment. Et on sait que les parents
anxieux en période postnatale sont moins enclins à se percevoir efficaces, ce qui altère la
sensibilité parentale, et donc, la relation à l’enfant.
« C’est pourtant le plus vieux métier du monde, le plus universel, le plus complexe sans doute,
peut-être même le plus impossible mais aussi le plus multiple ».7
27
Le fait d’être parent n’est pas chose facile, cela se fabrique avec des ingrédients complexes :
des attributs collectifs, ancrés ; des attributs intimes, personnels, qu’ils soient conscients ou
non, anciens ou récents ; et des attributs propres au nouveau-né.
« Devenir père ou mère dans la société actuelle résulte d’un processus psychologique complexe
influencé par l’enfance et l’histoire familiale. Mais les parents développent, à travers leur
histoire personnelle et de couple, de nombreuses compétences qui leur permettent d’offrir à leur
enfant le meilleur. Ils deviennent parents dès la grossesse et construisent peu à peu leur
attachement à leur enfant à travers les soins qu’ils lui fournissent et pour lesquels ils acquièrent
des habilités jour après jour. Ils ont souvent besoin d’être confortés dans ces compétences,
soutenus dans la mise en route des soins à leur enfant et accompagnés dans la découverte du
lien qui se tisse ».13
La plupart des mères ressentent les mêmes craintes : que le bébé ne se réveille pas, qu’il
s’étouffe, de ne pas réussir à décrypter ses besoins... Leurs nombreuses questions reflètent leur
besoin d’aide et de soutien plus que leur incompétence. Il importe donc que les parents se
sentent soutenus et reconnus dans leur nouveau rôle pour consolider leur confiance et leur
estime d’eux-mêmes, nécessaires au sentiment de compétence et à leur épanouissement dans
leur nouvelle fonction.
De plus, devenir parent implique une certaine responsabilité, car c’est devenir garant du bienêtre et de la sécurité de son enfant dans les dimensions physiques, psychiques et affectives. Se
cheminement progressif s’appuie sur la découverte de son bébé, de ses besoins, des gestes
appropriés pour celui-ci. C’est petit à petit, à travers les gestes et les échanges quotidiens, que
le lien se tisse entre les parents et leur enfant, et que la parentalité nait et se développe.

Attachement/lien mère-enfant :
Dès la naissance, la mère et son premier-né interagissent par des moyens corporels, visuels et
vocaux, mais aussi émotionnels et psychiques. C’est sur ces interactions que va se tisser le lien
d’attachement, une sorte de « dyade » mère-enfant.
Asmaa COCHEREAU nous explique qu’« à la naissance du bébé, se trouve chez la mère un état
spécifique, une condition psychologique désignée sous le terme de relation symbiotique entre le
bébé et sa mère. La mère d’un tout petit enfant est biologiquement conditionnée à sa tâche très
particulière, qui consiste à s’adapter aux besoins de son enfant. La reconnaissance des besoins
corporels du bébé et leur satisfaction reposent sur une sorte d’indentification consciente mais
aussi profondément inconsciente de la mère à son enfant ».5
C’est également ce que Winnicott a appelé la préoccupation maternelle primaire qu’il définit
comme la capacité de la mère à s’identifier à l’enfant pour le comprendre et ainsi être en
28
résonnance et répondre à ses besoins par l’object-presenting (réponse lors de l’appel du bébé),
le holding (contenance) et le handling (manipulation physique du bébé).
Le bébé, totalement dépendant de sa mère, ressent un besoin fondamental de proximité, de
sécurité et de protection sur lequel va se baser le besoin d’attachement, qui est vital, inné et
universel. Il émet des signaux d’appel afin de stimuler son entourage et discrimine rapidement
une figure d’attachement précise : sa mère. C’est une influence réciproque de la mère sur son
bébé et du bébé sur sa mère, un processus continu de développement et de changement.
Chaque étape de la construction de ce lien va laisser une empreinte plus ou moins perceptible
sur l’enfant et l’adulte à venir. Ce lien, indispensable au bon développement affectif de l’enfant,
est facilité par la proximité entre les deux partenaires, les échanges de regards entre eux, le
contact peau à peau, la reconnaissance sensorielle (notamment olfactive)…
Juste après la naissance, la mère et son nouveau-né vont commencer à se connaitre et à
communiquer. On appelle d’ailleurs proto-regard la première fois que leurs regards se croisent,
souvent décrit comme le moment clé de la naissance de la parentalité. Commence alors pour la
maman le travail d’humanisation du bébé, c'est-à-dire de reconnaissance qu’il est un être à part
entière, une personne avec ses besoins et ses émotions.
« L’enfant est un étranger qu’il faut apprendre à connaitre et à reconnaitre ».7
Pour la puéricultrice, les interactions entre la maman et son petit lui permettent d’apprécier le
lien qui s’est établi entre eux, et d’ainsi prévenir les troubles relationnels mère-enfant.
3.4.
Accompagnement :
Accompagner, c’est être avec quelqu'un, aller avec lui, lui servir de guide, le conduire quelque
part tout en s’associant à lui.20 On retrouve dans cette définition la notion d’aide mais dans une
démarche de collaboration avec la personne.
3.4.1. Accompagnement personnalisé, compétences parentales et confiance en soi :
« Un accompagnement personnalisé, prenant en compte le contexte spécifique de vie de la
famille, est alors proposé, s’appuyant sur ses connaissances et compétences fondamentales
pour faire émerger des solutions pratiques susceptibles de répondre aux problématiques posées
par l’arrivée du nouveau-né ».6
Comme précisé dans la citation précédente, chaque maman vit l’arrivée de son bébé de
manière différente, et présente des besoins qui lui sont propres.
29
On entend souvent parler d’éducation aux soins en service de maternité. Eduquer peut avoir
plusieurs significations ; j’en ai retenu deux dans le cadre de ce travail : « Former quelqu'un en
développant et en épanouissant sa personnalité »20 et « Développer chez quelqu'un certaines
aptitudes, certaines connaissances, une forme de culture »20. Dans ces définitions, le terme
« développer » démontre que l’éducation est basée sur les compétences déjà présentes chez la
personne recevant la formation, et sous-entend par conséquent une adaptation à cette
personne éduquée.
Le parent doit donc être vu comme le principal acteur de la prise en charge de son enfant et
doit être la personne qui réalise les soins de son bébé en priorité. Pour cela, les professionnels
de maternité doivent lui laisser la place de s’approprier les soins, de les réaliser à sa manière,
d’une façon qui « lui parle ».
« Faire une place au parent, c’est le prendre comme il est, accepter son éducation et ne pas
penser avoir une mission d’éducation en sa direction, mais plutôt une mission
d’accompagnement ».9
Chaque parent a des capacités qui lui sont propres et qui ne demandent qu’à être exploitées. Si
tous n’ont pas la même expérience auprès des enfants ni les mêmes compétences en matière
de soins aux nouveau-nés, il n’existe pas de parent qui n’a aucune capacité. C’est donc sur ces
atouts que la puéricultrice de maternité doit se baser pour faire émerger chez le parent des
compétences dont il n’avait peut-être pas conscience. A noter que de manière insidieuse, si les
parents ne sont pas au fond d’eux en accord avec la manière de faire du professionnel, ils
risquent d’envoyer à leur enfant un double-message inconscient, espérant que cela ne va pas
fonctionner pour prouver au soignant qu’il a tord.
Ce qui est confirmé par cette citation : « Toute la difficulté réside donc dans le fait de laisser de
la place pour qu’émergent ces potentialités et que nous nous abstenions de tout jugement sur
« la meilleure façon d’être père ou d’être mère ». Mais c’est un travail ardu, car la tendance
naturelle de tout professionnel est de penser qu’il sait mieux que les parents comment être avec
l’enfant, quels sont ses besoins, ses attentes… Notre rôle devient alors, non pas de dire comment
il faut être, ou même comment il faut faire, mais de permettre que les capacités émergent chez
les parents et que nous les soutenions ».7
De plus, laisser les parents trouver leurs propres repères va leur permettre de trouver leur
propre organisation et ils vont être plus à l’aise dans la réalisation des soins, ce qui est une fois
de plus, bénéfique pour leur confiance en eux.
On peut définir la confiance en soi comme étant le « sentiment que l’on a de sa propre valeur et
dans lequel on puise une certaine assurance »20. Pour GARNAUX Jean, c’est
« l’évaluation réaliste et ponctuelle qu’on a des ressources nécessaires pour affronter une
30
situation particulière. […] La confiance en soi représente donc combien je me considère
CAPABLE ».21
L’estime de soi, c’est « la satisfaction que l’on tire de n’avoir rien à se reprocher »20, ou encore
« le résultat d’une auto-évaluation […], d’un baromètre révélant dans quelle mesure nous vivons
en concordance avec nos valeurs. L’estime de soi représente donc combien je me considère
VALABLE »21.
Comme on l’a vu, ces deux notions sont particulièrement fragilisées durant la période
périnatale. Elles reflètent la manière dont l’adulte se positionne, se perçoit, dans son nouveau
rôle de parent, et vont influer sur la relation que la mère aura avec son bébé. Faire en sorte
qu’une jeune maman ait confiance en elle, c’est prendre soin d’elle et l’aider à accueillir son
bébé en toute sérénité.
Pourtant, il n’est pas évident pour un spécialiste de la maternité de rester totalement neutre et
objectif dans sa profession. En effet, lorsqu’une maman paniquée pose mille questions, on
serait tenté de la conseiller en tout point ; cela va rassurer la maman dans un premier temps,
mais on ne peut jamais savoir exactement l’impact que nos paroles peuvent avoir.
En revanche, les jeunes parents ne peuvent être totalement livrés à eux-mêmes lors de cette
période clé pour la mise en route de la parentalité et du lien d’attachement, et importante pour
le développement de leur enfant. Les soignants doivent être présents et leur rappeler qu’ils ne
doivent pas hésiter à les solliciter s’ils en éprouvent le besoin ou s’ils ont des questions, car il
est important qu’ils sortent de la maternité les plus sereins possible : il faut qu’ils profitent du
séjour en service de suite de couche pour demander tout ce qu’il leur passe par la tête afin de
préparer au mieux le retour à domicile avec leur premier-né.
3.4.2. Relation d’aide et communication :
Il est difficile de définir la relation d’aide, mais il est important de connaitre les principes sur
lesquels elle repose. Etre aidant, c’est écouter, compatir, rassurer, encourager, respecter, faire
verbaliser, soulager, reconnaitre le ressenti de l’autre. Ce principe d’accompagnement est basé
sur la relation de confiance qui s’établit entre le professionnel et la maman, et qui est la
condition sine qua non de son efficacité.
« La relation d’aide ne signifie pas « faire à la place de » mais « être à côté de », être
bienveillant, soutenir, accompagner et surtout ne pas juger […], de faire preuve d’empathie, de
tolérance, de disponibilité, de laisser les parents faire des gestes lents, maladroits, mais adaptés
à l’enfant, et de répondre à leurs questions, à leurs inquiétudes et à ce qui est difficile pour
eux ».4
31
C’est faire un pas vers l’autre, l’accepter tel qu’il est, et construire une alliance pour avancer
côte à côte et dans le même but, à savoir le bien-être du bébé et de sa famille.
Ce concept se rapproche de celui de la bientraitance qui « est un processus d’accompagnement
et de soins à co-construire avec les parents et à partir de leurs propres ingrédients ».7
Soutenir, c’est empêcher quelqu’un de faiblir en lui servant de support et en lui permettant de
se maintenir en lui procurant une aide, un réconfort, une force ; c’est aussi adhérer à sa cause,
le défendre.
Thérèse HIEBEL nous explique que « pour soutenir quelqu’un, il faut pouvoir le toucher, en être
proche et que la personne ait suffisamment confiance en nous pour se laisse soutenir. […] Les
professionnels qui veulent soutenir la parentalité doivent s’interroger sur leur position, sur le
regard qu’ils portent sur les parents et sur la manière dont ils vont se mettre à parité avec les
parents, afin de se présenter, non comme un censeur, mais comme un véritable soutien ».10
Le soutien est donc l’associé de la relation d’aide et repose sur les mêmes principes. A noter
cependant que les parents qui ont le plus besoin de soutien ne sont pas ceux qui viennent
spontanément vers les professionnels de santé, qui doivent donc être vigilants et observateurs
pour apporter leur soutien à ceux qui le nécessite.
La communication tient un rôle primordial dans la mise en place de la relation d’aide.
Communiquer, c’est établir une relation avec autrui, échanger avec lui, lui transmettre quelque
chose. La communication passe par le verbal (mots choisis, ton, intonation) mais encore plus
par le non-verbal, c'est-à-dire les mimiques, les gestes, la posture… Autant dire que l’Homme
ne peut pas ne pas communiquer !
« Selon les études de Albert Mehrabian, lorsqu’une personne communique sur ses sentiments et
états d’esprits, seuls 7% de la communication est verbal (signification des mots). En revanche,
38 % de la communication est vocale (intonation et son) et 55 % de la communication est
visuelle (expressions du visage et langage corporel) ».22
Lors de la prise en charge des jeunes mères en maternité, les compétences relationnelles, et
plus particulièrement les techniques de communication, sont essentielles dans la pratique des
puéricultrices. Même s’il est bien difficile de déterminer des « phrases types » à répondre aux
jeunes mères et de savoir à l’avance l’impact que nos paroles auront sur l’autre, certains
principes sont à respecter, comme la bienveillance, l’empathie, la neutralité (absence d’à priori)
et le non-jugement, et surtout la sincérité dans ses propos et dans l’envie d’aider l’autre.
Les soignants peuvent s’aider de moyens tels que l’écoute active, la reformulation, les silences :
L’écoute active, c’est permettre à l’autre d’exprimer ses émotions et ses sentiments, et mettre
des mots sur ce que l’on a entendu. Pour cela, il faut laisser son interlocuteur parler sans
32
l’interrompre, l’encourager par des signes d’intérêt, le questionner à bon escient et lui
demander de préciser ses propos lorsqu’ils ne sont pas clairs pour nous, dans la limite de « ce
que l’on "peut connaitre" et ce que l’on "doit savoir" »12.
Cet outil de communication demande une importante capacité d’écoute, ce qui n’est pas aussi
évident qu’on pourrait le penser.
« Ainsi nos valeurs, notre culture mais aussi nos objectifs personnels ainsi que nos peurs ou nos
croyances peuvent influencer notre capacité d’écoute. Il est donc primordial d’en avoir
conscience. Par ailleurs, notre pensée divague parfois lorsque nous écoutons quelqu’un d’autre.
Nous nous en rendons alors compte et nous essayons de reprendre le fil de la discussion. Écouter
demande une réelle capacité de concentration et une grande volonté ».23
L’écoute active est dépendante de la concentration active qui « consiste au fait de se centrer
sur l’autre, de rechercher les sentiments, les émotions, de prêter attention à ses gestes et
mimiques, à sa posture, sa respiration. Pour se concentrer activement, il est souvent nécessaire
de libérer notre pensée »23.
La reformulation, consistant à redire de manière fidèle le message entendu avec les mêmes
mots ou d’autres, permet au professionnel d’être sûr d’avoir compris le message émis par la
maman, et donc d’agir en conséquence.
Les silences sont également utiles lors d’un échange ; cela laisse le temps à la personne de
réfléchir, se souvenir, et d’ainsi parler à son rythme.
A noter que certains éléments favorisent les échanges : un environnement accueillant et
respectant l’intimité, une attitude réceptive et une voix calme et douce, un choix des mots
consciencieux, un contact visuel et une proximité physique (prendre le temps de se poser).
33
Deuxième partie : l’enquête :
4. Méthodologie de l’enquête :
A la suite de la rédaction du cadre conceptuel, et afin d’améliorer notre prise en charge qui doit
répondre au plus près des besoins et des attentes des jeunes mamans, je me demande quelles
sont les pratiques d’accompagnement des primipares en maternité, et si celles-ci
correspondent aux attentes des mères.
Mon objectif de la phase d’enquête est donc de recueillir les pratiques professionnelles
actuelles d’accompagnement des primipares dans différentes maternités de FRANCHE-COMTE,
ainsi que le vécu des mères sur leur séjour à la maternité, dans le but de m’aider à cibler les
pratiques pertinentes et aidantes pour les mamans, et celles qui le sont moins.
Pour cela, j’ai décidé de réaliser 4 entretiens auprès des professionnels de maternité, deux
puéricultrices et deux auxiliaires de puériculture, à BESANCON et à VESOUL, afin de comparer
les pratiques dans deux hôpitaux différents. J’ai également décidé de réaliser 3 entretiens
auprès de mamans primipares, ayant eu leur premier enfant à BESANCON (au CHU et à la
Polyclinique de FRANCHE-COMTE) ou à VESOUL. J’ai ciblé l’âge du nouveau-né entre 2 et 6 mois
afin que les mères aient un peu de recul sur leur séjour à la maternité et puisse verbaliser ce qui
leur a semblé bien dans la prise en charge, ou au contraire ce qui leur a déplu ou manqué.
Deux grilles d’entretiens ont été élaborées, une pour les professionnels et une pour les mamans
(Annexes 1 et 2). Elles reprennent les quatre mêmes thèmes pour faciliter le comparatif et sont
réalisées de la manière suivante : quatre questions ouvertes qui laissent libre choix de
commencer par ce qu’on veut, et des sous-questions ayant pour but de me guider dans les
informations que je recherche. Les entretiens sont anonymes, enregistrés, basés sur la volonté
des participants à y répondre, et durent environ 30 à 45 minutes chacun.
5. Réalisation des entretiens :
5.1.
Déroulement des entretiens :
J’ai alors interrogé séparément quatre professionnels sur leur lieu de travail, avec des
expériences professionnelles différentes et variées ; et trois mamans à leur domicile en
34
présence de leur bébé et du papa pour l’une d’entre elles, d’âges différents et avec des bébés
d’âges également différents. La population interrogée est donc volontairement hétéroclite.
Chaque entretien a été réalisé dans des conditions respectant l’anonymat, enregistré avec
l’accord de la personne, et retranscrit mot pour mot afin de citer de manière la plus fiable les
propos recueillis. J’ai présenté mon travail et rappelé l’objet de la rencontre et son caractère
anonyme à chaque début d’entretien, et j’ai remercié fortement les participants pour leur
contribution à mon travail.
5.2.
Présentation des personnes interrogées :
Profession
Lieu
Parcours
professionnel
Professionnels de santé
IP1
IP2
AP1
AP2
IPDE
IPDE
AP
AP
Besançon
Vesoul
Besançon
Vesoul
1 an à Marphan
Diplôme de
Quelques années
Diplôme
7 ans en HOP
puéricultrice en
en médecine
d’auxiliaire en
A la maternité
2009
puis en
2010
depuis 5 ans (UK 2 ans de nuit en
réanimation
Quelque temps à
depuis 2 ans)
psychiatrie
pédiatrique
Montbéliard puis
2 ans en
3 ans en
en crèche
pédiatrie et HDJ
humanitaire
A la maternité
A la maternité
A la maternité
depuis 2 ans et
depuis 2 ans
depuis 30 ans
demi
Mamans
Ville
Lieu d’accouchement
Age de la maman
Age du bébé
M1
Besançon
Maternité du CHU
28 ans
1 mois et demi
M2
Besançon
Maternité de la
Polyclinique de
Franche-Comté
36 ans
3 mois
M3 (+ P3 = papa)
Vesoul
Maternité du CH
22 ans
5 mois
35
6. Analyse des résultats de l’enquête :
Accueil et personnel de la maternité :
Pour commencer, j’ai demandé aux mamans comment s’est passé globalement leur séjour à la
maternité. Les trois se sont empressées de me répondre : « très bien passé », « très bien
accompagnée », « très bon accueil ». Ces remarques confirment qu’on a tous une
représentation heureuse de la grossesse et de l’accouchement, que c’est un moment de
bonheur, et c’est le premier réflexe que ces mamans ont eu. En creusant un peu plus,
j’apprends que tout n’a pas été si parfait. Même si elles sont dans l’ensemble toutes les trois
satisfaites de l’accompagnement des professionnels, elles sont deux à regretter que le père
n’ait pas pu dormir à la maternité (la troisième maman étant seule) ; deux à se plaindre de la
chaleur ; et les trois à avoir eu des difficultés à différencier les professionnels étant intervenus
auprès d’elles (malgré le fait qu’ils se présentaient). « On en voit plein de différents, même si à
chaque fois les personnes se présentent, c’est difficile ». Les trois mamans ont donc pointé du
doigt l’importance que les différents soignants se présentent et expliquent ce qu’ils viennent
faire et pourquoi. Pour elles, c’est rassurant de savoir à qui elles ont à faire et qu’on ne leur
prenne pas leur bébé sans explication. La disponibilité des puéricultrices, sages-femmes et
auxiliaires de puériculture, toujours présentes pour répondre à leurs questions, a également
été appréciée par les trois primipares. « […] toutes bien gentilles, toutes aux petits soins ; […]
dès que j’avais un problème, je pouvais appeler, elles arrivaient tout de suite ».
En revanche, deux mamans reprochent la brusquerie de certaines soignantes. M2 parle d’une
auxiliaire lors d’une mise au sein : « Elle lui mettait la tête sur le sein pour qu’il prenne, et ça a
été la seule qui a fait ça… Ça oui, ça m’a déplu ! C’est peut être les vieilles méthodes mais… Et
forcément, le petit, il est sorti, on a dû utiliser des ventouses, donc il était blessé autour de la
tête, et elle appuyait fort, et le pauvre chaton, il hurlait ! ». La seconde maman évoque une
sage-femme qui est rentrée brusquement dans la chambre en allumant la lumière en pleine
nuit. On a vu dans le cadre conceptuel que la période périnatale n’est pas facile à vivre pour les
jeunes mères, et qu’elles peuvent se sentir seules et vulnérables. Elles ont besoin de douceur et
de soutien, et les professionnels doivent être vigilants dans leur manière d’être avec les jeunes
accouchées. Cette notion d’être « douce » avec les jeunes mamans n’est ressortie qu’une seule
fois lors des entretiens avec les professionnelles.
M3 me raconte également qu’elle a ressenti que certaines soignantes essayaient de lui imposer
leur manière de faire, alors que les deux autres mères décrivent plutôt les professionnels
36
comme des guidants, leur donnant des conseils sans leur imposer, et en leur laissant la liberté
de faire à leur manière. Elle raconte qu’une nuit, « une sage-femme est venue prendre la petite
pour lui donner le biberon […] et ça ne m’a pas trop plu dans le sens où moi je voulais
l’allaitement exclusif [...]. Je pense qu’elle a voulu que je me repose, ce n’était pas une mauvaise
intention je pense, mais c’est vrai que ça fait bizarre quand on se réveille de voir la dame donner
le biberon dans la pièce d’à coté ! ». Elle me raconte par ailleurs une hospitalisation de sa fille à
trois semaines de vie, et décrit des soignants ne respectant pas le rythme de vie que sa petite
avait à leur domicile ; même si cette histoire sort du sujet de ce mémoire qui porte sur le travail
de la puéricultrice en maternité, on peut tout de même noter l’impact qu’ont eu les actes des
professionnels de santé sur le ressenti et le vécu des parents, et supposer qu’une telle situation
aurait pu survenir en service de maternité. Respecter le projet parental doit donc être une
priorité pour la puéricultrice de maternité car on a vu dans le cadre conceptuel à quel point il
était important pour la confiance en soi des jeunes parents et pour le sentiment d’être
compétent pour son bébé, d’être un « bon parent ».
J’ai noté également lors de mes entretiens, que M2 et M3 regrettent toutes deux les discours
discordants entre les différents professionnels, notamment au niveau de l’allaitement
maternel, disant parfois « tout et son contraire ». « C’est vrai que d’une personne à l’autre on
n’a pas du tout les mêmes avis et du coup on se sent un peu perdue ». Il a été développé dans
les concepts que les jeunes accouchées sont souvent perdues à la naissance de leur premier
bébé et on d’autant plus besoin de repères. Même s’il est difficile pour les soignants d’avoir
tous le même discours, particulièrement en matière d’allaitement maternel qui se trouve être
très différent d’une mère à l’autre, il est important d’avoir les mêmes principes de base. Les
formations ont un rôle important dans la réalisation de cet objectif car recevoir tous la même
formation va participer à avoir un discours commun et permet également de mettre à jour ses
connaissances.
Résumé : Ce qui ressort principalement dans cette première partie est l’impact de l’attitude
des professionnels sur les jeunes mères. Si chacune d’entre elles a apprécié la disponibilité
des soignants à leur égard, elles se souviennent également d’événements qui leur ont déplu :
le manque de douceur de certaines soignantes, le non-respect de leur projet parental, les
discours discordants entre les différents professionnels… Il est important que la puéricultrice
de maternité, figure de référence des parents, soit consciente de la portée de ses actes et
adopte une posture professionnelle basée sur le respect et l’absence de tout jugement envers
37
les familles. La remise en question de sa pratique est également un élément fondamental
d’une bonne prise en charge car elle permet à la professionnelle de mettre à jour ses
connaissances et de rester dans une dynamique de perfectionnement.
L’arrivée d’un premier bébé :
Les trois mamans s’entendent à dire que l’arrivée d’un bébé « c’est magique », mais « ça
chamboule bien la vie […], et tant qu’on ne l’a pas eu, on ne peut pas imaginer ! ». Elles
soulignent toutes les trois le fait qu’avoir son propre enfant 24h/24 est complètement différent
de s’occuper occasionnellement des enfants de leur famille, ce qu’elles ont toutes les trois
l’habitude de faire. M2 dit d’ailleurs : « on se demande ce qu’on faisait avant, quand on a un
petit bout, ça nous prend tout notre temps ». Aucune maman ne s’attendait à ce que l’arrivée
de leur bébé bouleverse autant leur quotidien, mais pour M1, qui a bénéficié d’une préparation
à l’accouchement par une sage-femme libérale, être bien informé avant l’arrivée du bébé est
très important et permet de s’y préparer un peu. Les trois mamans me confient tout de même
avoir été très fatiguées en suite de couche et avouent toutes trois que la naissance d’un enfant
n’est pas qu’une partie de plaisir.
Les quatre professionnelles semblent être conscientes de cela et disent être plus attentives et
plus présentes lors de la prise en charge d’une primipare, mais nuancent leurs propos car elles
savent qu’une multipare peut parfois demander autant, voire plus, d’attention que la maman
d’un premier enfant. Même si la notion d’adaptation aux besoins de la mère transparait dans
ces propos, elle ne ressort en ce terme que pour une soignante sur les quatre : « elles ont peutêtre des besoins autres, comme chaque maman est différente […], des besoins différents ».
Une notion inattendue mais développée dans le cadre conceptuel est survenue chez trois
professionnelles sur quatre : celle de l’impact de la société actuelle sur les attentes des jeunes
parents. Pour IP1, les mères sont de moins en moins patientes, « veulent tout, tout de suite » et
ont « des idées reçues qu’elles ont lu dans tel livre ». Sa collègue auxiliaire la rejoint en disant
que « les mamans sont trop exigeantes par rapport à leur bébé » et que le fait d’avoir un enfant
est devenu trop « intellectualisé », rempli de clichés. AP2 parle plutôt de la représentation du
« bébé idéal » chez les primipares et pense qu’il « faut être attentive par rapport à ça ». L’idée
que la maternité doit être « heureuse et épanouie », développée dans le cadre conceptuel,
ressort donc dans les propos des mamans mais aussi dans ceux des professionnelles.
Pour ce qui est de l’apprentissage des soins du nouveau-né aux mères, le fonctionnement varie
d’un établissement à un autre. A Besançon, l’atelier bain (maximum 3 ou 4 mamans qui font le
38
bain dans la pouponnière) est proposé aux primipares afin qu’elles puissent échanger entre
elles et ne pas avoir le regard de la professionnelle essentiellement centré sur elles. La
transmission de savoirs entre les mères est favorisée par le mélange de primipares et de
multipares lorsque c’est possible. Une des mamans interrogées s’est vue proposer d’y
participer mais a refusé pour « rester dans sa petite bulle avec sa fille ». Je n’ai donc pas de
retour de la part des mamans sur ce qu’elles pensent de cet atelier bain et s’il atteint les
objectifs escomptés. Pour les mamans ayant eu une césarienne ou ne souhaitant pas participer
à l’atelier, le bain est montré dans la chambre. A Besançon, le bain est réalisé la première fois
par les mamans sauf si elles demandent à ce qu’une professionnelle leur montre avant. A
Vesoul, c’est l’inverse : le bain est montré par une auxiliaire le premier jour sauf si la maman
demande à le faire elle-même dès la première fois. La maman est ensuite « encadrée » le
deuxième jour puis réalise le bain seule le troisième jour dans la majorité des cas. A noter qu’il
n’existe plus de pouponnière où les mamans « peuvent faire le bain ensemble et regarder
comment font les autres », le bain se réalise obligatoirement dans la chambre. Malgré le
fonctionnement différent entre les deux hôpitaux, la réponse est unanime lorsque que je leur
demande aux professionnelles ce qu’elles font si jamais une maman réalise le bain d’une
manière peu commune : elles la laissent faire, et même l’encouragent à faire à sa manière, du
moment que la sécurité de l’enfant (citée par deux soignantes) et le bien être de l’enfant (cité
par AP2) sont assurés. « Elles sont mamans, elles ne sont pas là pour faire le bain dans la
technique comme on nous l’apprend à l’école. Mais simplement ce qui est important, c’est de le
prendre et de le glisser dans la baignoire, et que ce soit fait en sécurité ». Deux soignantes
rattachent cela à la notion de l’impact culturel qui influence la manière de faire des mères.
Seule IP2 nous explique s’être parfois sentie « heurtée » par la manière de faire de certaines
mamans, en contradiction avec ce qu’on lui avait appris à l’école, ce qui renvoie à l’idée des
valeurs personnelles et de la formation initiale qui peuvent influer notre prise en charge,
développées dans le cadre conceptuel. A noter qu’il est souvent précisé aux jeunes mamans
que le bain peut être occasionnellement remplacé par une petite toilette et que « si un jour
elles sont fatiguées et qu’elles n’ont pas envie de donner le bain, il vaut mieux ne pas le faire
plutôt que le faire sans être là ».
Les autres soins du nouveau-né, comme le change, les soins du cordon et du visage, sont
montrés aux parents dans les deux établissements, et l’accompagnement est adapté aux
capacités et aux demandes de la mère.
39
Pour confronter la pratique de l’apprentissage des soins réalisée en maternité aux attentes des
mamans, j’ai également interrogé les primipares. Concernant l’apprentissage du bain, une seule
d’entre elles a pu réaliser le bain elle-même dès la première fois, à sa demande auprès de
l’auxiliaire présente ce jour. Cette dernière souhaitait réaliser le bain elle-même car elle ne
voyait pas l’intérêt qu’une professionnelle lui montre les gestes, mais a apprécié la présence de
l’auxiliaire pour la guider lorsqu’elle en a eu besoin. « J’ai apprécié de pouvoir faire moi, mais
avec quelqu’un à côté, puis après, dès la deuxième fois, parce que j’étais bien à l’aise, j’ai pu
faire toute seule ». Cette jeune maman se décrit comme une personne à l’aise dans les soins du
bébé, qui sait ce qu’elle veut et qui a su s’imposer et prendre l’initiative de faire les choses ellemême, et pense que les soignantes l’ont ressenti et lui ont fait confiance. Elle m’explique que
plusieurs de ses amies lui avaient confiée n’avoir « pas osé dire » aux professionnelles lors de
leur séjour à la maternité, et s’était donc jurée de ne pas avoir de regret elle aussi : « je me suis
dit avant "c’est moi la maman, c’est moi qui ai accouché, c’est mon bébé, donc je dois pouvoir
dire ce que je veux" ». M1 a également pris l’initiative de demander à faire seule le change et
les soins du visage de son nouveau-né. En revanche, elle a préféré qu’une soignante lui montre
les soins du cordon une fois car elle n’aurait pas su le faire seule. Elle m’énonce également que
son mari n’a pas osé réaliser les soins de leur fille à la maternité car « il se sentait un peu stressé
d’être regardé ; il préférait faire seul avec moi après », et ils ont donc fait ensemble après le
retour à domicile. Il est dommage que certains parents n’osent pas dire aux professionnels ce
qu’ils souhaitent et/ou qu’ils n’osent pas s’occuper de leur bébé de peur de se sentir jugé ; je
pense qu’il serait intéressant de se poser la question de l’image que reflète les soignants, peut
être à l’origine du manque de prise d’initiative des primipares. On a vu dans le cadre conceptuel
que le professionnel de santé pouvait être perçu par les parents comme un expert qui sait
mieux qu’eux ce qui est bon pour leur bébé. Or, c’est bel et bien le parent qui est le plus à
même de comprendre son enfant et de répondre au mieux à ses besoins. La puéricultrice de
maternité doit donc toujours garder ce fait en tête et ne pas se substituer aux géniteurs,
prioriser leur participation dans les soins de leur nouveau-né et les encourager dans leur prise
d’initiative, que l’on sait par ailleurs importante pour leur estime et leur confiance en eux. Cela
passe par les mots mais aussi, et essentiellement, par l’attitude du soignant.
Pour M2, les choses se sont passées différemment. Le premier bain de son fils a été réalisé au
sein du service de néonatologie par les soignantes de nuit, et le lendemain, la sage-femme
présente pour le bain du bébé lui a proposé de le faire elle-même en restant à coté d’elle pour
l’aider. « C’est ça qui m’a plu », me dit-elle. La jeune maman me raconte que la professionnelle
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l’encadrant pour le bain lui a dit « de toute façon, ce que je vous ai montré là, au prochain bain
vous ne ferai peut être pas comme je vous ai dit, vous vous adapterez ». Pour les autres soins
(change, cordon, visage), ils lui ont été montrés, puis elle a été accompagnée, pour les faire
seule au bout de la troisième fois. Je pense que préciser aux jeunes mères qu’il n’y a pas de
manière « type » de réaliser les soins du bébé est important pour dédramatiser l’apprentissage,
diminuer le stress de « bien faire » lorsqu’il est présent, et de les amener à écouter leurs envies.
Pour la troisième maman, le bain a été montré au papa le premier jour et c’est lui qui a réalisé
le deuxième bain de leur fille pour le lui montrer. Elle décrit l’apprentissage des soins comme
ayant été « très succin ». Elle trouve insuffisant le fait que les soins n’aient été montrés qu’une
fois et qu’ils aient dû les faire seuls en présence d’une soignante dès la deuxième fois. Pour elle,
la professionnelle présente « ne regardait pas ce qu’on faisait » et semblait impatiente que le
papa termine le bain. « Donc là on s’est sentis un petit peu abandonnés à notre sort ; après il
faut bien se débrouiller tous seuls un jour mais bon… ». Elle aurait souhaité une professionnelle
plus présente auprès d’eux. Cependant, le papa n’a pas le même ressenti ; pour lui, la soignante
présente lors du bain a su le mettre en confiance et l’a rassuré, et il s’est senti « plus zen » que
s’il avait du réaliser le bain seul. En revanche, il aurait tout de même préféré faire le bain dès la
première fois avec la présence d’une professionnelle pour le guider dans ses gestes. On
remarque donc que les trois témoignages des parents interrogés sont très différents. La plupart
auraient souhaité faire le bain dès la première fois (les deux mamans pour qui cela s’est fait en
ont été satisfaites), mais une maman aurait eu besoin de plus d’accompagnement.
L’apprentissage des soins par la puéricultrice doit donc être réalisé au cas par cas, en fonction
des besoins des parents ; et la meilleure façon de connaitre ces besoins est encore de leur
demander ce qu’ils souhaitent, leurs attentes, comment ils visualisent le soin et comment ils
ont envie que ça se passe. Cela permet une prise en charge adaptée au plus près du projet
parental.
Les trois mamans trouvent qu’il a été relativement simple pour elles d’apprendre les soins du
nouveau-né même si elles avaient « moins d’automatismes » et d’organisation qu’aujourd’hui.
Cependant, en creusant plus, M2 me dit que le plus difficile pour elle a été le bain, et
notamment de savoir tenir son bébé pour le mettre dans l’eau, ce qui rejoint M3 qui a ressenti
certaines peurs lorsqu’elle a réalisé le bain seule sans la présence d’un soignant : « peur de la
faire tomber ou qu’elle mette la tête sous l’eau ». Le papa interrogé évoque le fait qu’il
tremblait lors du premier bain car ça fille venait à peine de naitre et était pour lui « du cristal
super fragile ». Ce jeune papa a par ailleurs été choqué par les soins du nouveau-né en salle de
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naissance, qu’il a trouvé très invasifs, et pour lesquels il n’a pas eu d’explications. De plus, il
évoque une pédiatre qui était au téléphone pour réaliser les soins de sa fille et a trouvé cela
« complètement déplacé ». On note donc que les gestes qui paraissent banals aux
professionnels ne sont pas forcément ressentis comme tels par les parents, et que
l’accouchement reste un moment éprouvant pour eux. Il est donc d’autant plus important de
leur expliquer nos actes et de leur montrer le respect qu’il ce doit, et ce, tout au long du séjour
à la maternité.
Après avoir su que les parents auraient souhaité pour la plupart faire le bain eux-mêmes dès la
première fois, je leur ai posé la question de s’ils pensaient qu’ils auraient réalisé le bain
différemment s’ils l’avaient fait seuls la première fois sans la présence d’une professionnelle.
Les deux mamans me répondent qu’elles auraient certainement savonné leur bébé directement
dans l’eau car c’est comme ça qu’elles ont vu faire au sein de leur famille, et P3 n’a pas su me
répondre. Je me pose alors la question de l’intérêt de montrer aux jeunes parents une manière
de réaliser le bain qu’ils n’auraient pas fait instinctivement, sachant qu’ils sont les mieux placés
pour prendre soin de leur bébé. Savonner le bébé dans l’eau du bain lui assure un moment plus
confortable, plus agréable, et répondant mieux à ses besoins ; il serait donc judicieux de laisser
aux parents le choix de procéder pour les soins avec leur instinct, qui est par ailleurs souvent
plus adapté à leur bébé que la manière de faire des équipes de maternité.
Dans la même optique, je leur ai ensuite posé la question de s’ils ont réalisé le bain
différemment à leur retour à domicile avec leur bébé, ce à quoi ils ont répondu « non » pour
deux d’entre eux : pour M3, la manière apprise à la maternité lui convenait à elle et à son
compagnon, et ils l’ont suivie « à la lettre » ; pour M2, elle a avait l’intention de savonner son
fils directement dans l’eau du bain à son retour à domicile et ne l’a finalement pas fait car « ce
n’était pas de cette manière qu’elle avait appris à le faire ». On remarque alors l’impact
important de l’apprentissage imputé par les professionnels sur les mamans qui n’osent pas
s’imposer. J’en déduis donc que le fait d’apprendre aux parents une manière de faire à la
maternité peut les limiter dans l’écoute de leur instinct. Seule M1, ayant affirmé sa volonté
durant tout son séjour en service de suite de couche, a décidé de savonner sa fille dans l’eau du
bain une fois à la maison afin de préserver le confort et le calme de la petite lors de ce moment.
En ce qui concerne la mise en place et le suivi de l’alimentation du bébé, que ce soit
l’allaitement maternel ou la nutrition artificielle, elle est citée par les quatre professionnelles et
son accompagnement semble être une priorité pour chacune d’entre elles. Sont mentionnées
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l’aide à la mise au sein, les différentes positions de l’allaitement, l’information sur les rations et
les conseils de préparation des biberons.
Les trois mamans interrogées ont allaité leur bébé de manière exclusive ou mixte, et se sont
senties accompagnées dans la mise en route de cette alimentation qu’elles avaient choisie pour
leur bébé. Elles ont apprécié que les professionnels de maternité les guident sans faire à leur
place, leur expliquent sans les forcer. Elles regrettent par contre les avis différents qui les ont
perdues. M1 me dit lors de l’entretien qu’au début elle se disait qu’un allaitement n’était pas
compliqué : « quand on voit les mamans faire, on a l’impression qu’on met le bébé et c’est
parti ! ». Même si elle a été prévenue que l’allaitement n’était pas si facile que ça lors des cours
de préparation à l’accouchement, elle a eu des moments de doutes et a pensé plusieurs fois à
arrêter durant les premières semaines ; elle souligne l’importance du soutien car « même en
étant prévenue, il y a quand même des moments difficiles ». Je remarque également dans ses
propos l’importance de l’information par les soignants car le fait de connaitre les bénéfices de
l’allaitement maternel pour son bébé lui a donné une motivation supplémentaire de persévérer
dans son choix. Elle me précise que la montée de lait l’a inquiétée : « j’avais peur que ce soit
irréversible, et qui si elle ne tétait plus, mon sein allait être bloqué ! ». Ce témoignage donne
une idée de ce qui peut passer par la tête des jeunes primipares lors de la mise en route de
l’allaitement : souvent des questions et des peurs qui ne viendrait pas à l’esprit d’une
puéricultrice, d’où l’intérêt d’être à l’écoute des mamans, de leurs craintes, leurs peurs, leurs
doutes, et de les rassurer en conséquence.
M3 est dans l’ensemble satisfaite de l’accompagnement des professionnelles de maternité qui
ce sont montrées présentes lorsqu’elle en éprouvait le besoin et à l’écoute de ses demandes
(bouts de seins, tire-lait). Elle me confie également avoir été perdue les premières fois qu’elle
devait donner le sein : « Je ne savais plus comment faire ! », mais garde une bonne impression
en ce qui concerne les conseils et le suivi dont elle a bénéficié en service de suite de couche. En
revanche, pour elle, l’allaitement a été « le point négatif » de sa prise en charge par l’équipe de
la maternité : « Tout de suite, elles ont installé l’allaitement mixte ; moi je leur ai fait confiance
car c’est quand même des professionnel(le)s, et je regrette un peu car je me dis que j’aurais peut
être pu persévérer dans l’allaitement exclusif ». Dans ce cas, le projet d’allaitement et le souhait
d’allaiter exclusivement son bébé de la jeune maman n’a pas été suffisamment pris en compte
par l’équipe soignante. Le choix de l’alimentation de son bébé est une décision très importante
pour le couple parental et la puéricultrice de maternité doit faire tout ce qu’elle peut pour aider
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les parents à le mettre en place. S’il est impossible pour une maman d’allaiter son enfant (cas
peu fréquent), la professionnelle doit l’informer des raisons qui rendent l’allaitement
compromis et voir avec elle comment elle souhaite contourner cette difficulté (élaboration d’un
nouveau projet d’alimentation de son bébé). En aucun cas une soignante ne peut prendre cette
décision à la place de la maman tant la signification est grande et impacte sur le sentiment
d’avoir fait le meilleur choix pour son enfant (naissance de la parentalité).
Résumé : On remarque dans les différents entretiens que les parents ont des besoins
différents et des ressentis très variables en ce qui concerne leur séjour à la maternité. Même
s’ils ont tous dans l’ensemble un bon souvenir du service de suite de couche, certains
auraient souhaité que ça se passe différemment, notamment pour l’apprentissage des soins.
Trois parents sur quatre présents lors des entretiens auraient voulu réaliser le bain euxmêmes dès la première fois avec la présence d’un soignant, et une maman aurait eu besoin
d’être plus encadrée et s’est sentie livrée trop vite à elle-même. On remarque donc que
certains parents apprécient de pouvoir faire les soins eux-mêmes dès la premières fois, et que
d’autres sont rassurés par un accompagnement plus long par les professionnels. Demander
aux parents comment ils souhaitent que l’apprentissage des soins se passe, comment ils le
visualisent, ce qu’ils souhaitent faire eux-mêmes et ce qu’ils attendent de nous,
professionnels (= connaitre le projet parental), permet de s’adapter au plus près de leurs
besoins et de leurs attentes (ceci étant également valable pour l’allaitement maternel). De
plus, j’ai recueilli que deux mamans auraient réalisé le bain différemment si elle l’avait réalisé
elles-mêmes la première fois, et d’une manière qui respecte mieux les besoins de leur bébé.
On a vu également que l’apprentissage des soins par les soignants impacte fortement les
parents et peut les freiner dans leur envie de réaliser les soins d’une manière qu’ils auraient
jugé meilleure ou qui leur correspondait mieux. Il est donc important que les puéricultrices de
maternité encouragent les primipares à suivre leur instinct et leurs envies, par ailleurs
souvent très adaptés. Cela demande à la soignante une posture professionnelle basée sur
l’écoute et le respect, mais surtout fondée sur l’ajustement aux parents et la remise en
question de ses aprioris. Il est important pour une puéricultrice de savoir et d’accepter qu’il
n’y a pas UNE manière de faire, mais autant qu’il y a de parents, et qu’ils sont les mieux
placés pour savoir ce qui est le meilleur pour leur enfant.
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Autonomie et confiance en soi :
Les quatre professionnelles énoncent en premier le fait qu’inciter et encourager les mères à
réaliser les soins favorise leur autonomie, mais seules les deux soignantes de Besançon font le
lien avec la confiance en soi : « La plupart du temps elles disent "ah non je ne vais pas pouvoir",
et puis le fait de le faire seule et de voir que ça se passe bien, elles reprennent confiance ». Ces
propos sont confirmés par les dire d’une maman qui dit : « au début, c’est vrai qu’on se dit "je
n’y arriverai pas toute seule" et en fait ça va ! C’est vrai qu’il faut bien se lancer un jour… ». Les
deux mêmes professionnelles énoncent également le fait que laisser les bébés dans la chambre
de leur mère la nuit favorise également l’autonomie de celle-ci. On retrouve donc bien dans ces
propos le fait que l’autonomie favorise la confiance en soi, tendant vers une validation de ma
première hypothèse qui était : je pense que l’autonomie de la mère dans les soins de son bébé
permet la construction de l’estime de soi, nécessaire à la mise en place de la parentalité.
Pour deux soignantes, le verbal joue également un grand rôle dans la confiance en soi des
jeunes femmes en suite de couche. L’auxiliaire parle des encouragements, tandis que la
puéricultrice énonce plutôt la réassurance, la dédramatisation et la valorisation de la mère par
le biais des paroles aux bébés : « t’as vu, maman elle gère ! », ce qui a été développé dans le
cadre conceptuel.
Cette question n’a pas été simple pour les professionnelles, qui ont souvent marqué un temps
d’arrêt avant d’y répondre. Il semble difficile de prendre du recul sur sa pratique, sur ses
automatismes, et de se questionner sur le « pourquoi on fait ça ? »…
Résumé : Même s’il a été difficile pour les professionnelles interrogées de réfléchir sur leur
manière de favoriser l’autonomie et la confiance en soi des jeunes mères, les deux notions
sont clairement liées. En effet, on sait que l’autonomie des mamans dans les soins les
valorise, leur prouve qu’elles sont capables, et, de ce fait, leur donne confiance dans leur
capacité à s’occuper de leur bébé, et plus globalement, en elles.
Soutien moral et soutien à la parentalité :
Lorsque je pose aux soignantes la question de ce qui est mis en place par l’équipe pour soutenir
moralement la mère lors de la naissance de son premier bébé, les réponses obtenues sont
assez hétéroclites. La présence auprès de la jeune maman est citée par trois interrogées sur
quatre mais aucune d’entre elles ne pense aux psychologues du service, pourtant présents dans
les deux structures. L’écoute n’est citée en ce terme que par une auxiliaire mais ressort de
manière sous-entendue par les trois autres soignantes : « être présente si elles ont besoin de
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parler ». Les deux professionnelles de Vesoul parlent de « rassurer les mères », et de prendre le
« un temps pour parler avec elles ». La disponibilité de la puéricultrice, ressortant des quatre
entretiens, est donc importante afin de répondre aux questions verbales ou insinuées, ou pour
écouter la maman.
Deux soignantes évoquent le fait que les mamans pleurent régulièrement en service de suite de
couche, et sont conscientes que l’arrivée d’un bébé n’est pas si facile qu’on pourrait le croire.
IP1 insiste sur le fait qu’il faut leur dire que c’est normal, que l’allaitement c’est dur, que
« pleurer ça fait du bien ». Rappeler que l’équipe est là pour répondre à leurs questions et les
accompagner permet également de soulager les mères qui ne vont pas très bien, et est cité
deux fois.
J’ai posé la même question aux mamans. Même si de prime abord les jeunes mères interrogées
ont un bon vécu de leur séjour dans leur maternité respective, elles s’accordent toutes trois à
avouer qu’elles ont eu leurs petits « coups de mou ». Chacune le nomme à sa manière et le
justifie par une raison qui lui est propre (fatigue, inquiétude, solitude). On ne parle ici pas de
baby blues, qu’aucune n’a ressenti à la maternité, mais seulement une fois de retour à la
maison. On a vu en effet dans le cadre conceptuel que de nombreux facteurs rendent la jeune
mère particulièrement vulnérable dans les jours qui suivent la naissance et on sait que la chute
hormonale participe également à ce phénomène. Pour les trois mamans, les professionnelles
ont été présentes par leur écoute et leurs paroles principalement. L’observation et les
techniques de relation d’aide permettent à la puéricultrice de maternité de décrypter quand les
nouvelles accouchées ont besoin de soutien : « je voulais juste l’attention et qu’on me prenne la
température pour me rassurer, c’était le moment où j’en avais besoin ; elle a compris que je ne
me sentais pas bien ». Cette maman nous montre qu’une demande, comme la prise d’une
température, peut servir de prétexte pour solliciter le soutien du personnel, et cache parfois
une autre demande plus profonde. La puéricultrice doit donc toujours avoir cette idée en tête,
et être vigilante et réceptive aux demandes des jeunes mamans.
Pour M1 et M3, les paroles encourageantes, la présence et l’écoute des soignantes étaient ce
dont elles avaient besoin lorsque ça n’allait pas. M1 se souvient de deux phrases qu’une
soignante lui a dit et qui lui ont fait du bien : « même s’il y a des difficultés, il y a toujours une
solution, on va y arriver » et « c’est normal, vous avez le droit de ne pas savoir, de ne pas y
arriver, et on est là pour vous aider ». Cela lui a permis de souffler, de dédramatiser ses
difficultés, et d’être rassurée sur le fait que beaucoup de mamans sont dans ce cas lors de
l’arrivée de leur premier bébé. Les petites attentions des membres de l’équipe de maternité
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(repas gardé au chaud après l’accouchement, demandes de ce dont elles avaient besoin…) ont
également été citées, ce que les primipares ont beaucoup aimé. Etre chouchouté dans cette
période est appréciable et peut vraiment remonter le moral. La puéricultrice ne doit donc pas
hésiter à prendre le temps de rester avec les mamans et à veiller à leur confort.
M1 précise que ce sont surtout les cours de préparation à l’accouchement qui l’ont aidée « à
relativiser » durant cette période délicate. Elle pense fortement qu’être prévenue des
difficultés qu’une mère rencontre après la naissance du premier bébé permet de les surmonter
plus facilement. On remarque alors l’importance d’être préparée au fait que la natalité « ce
n’est pas tout rose », mais aussi les dangers de la vision trop idéalisée de la naissance d’un
enfant actuellement développée dans notre société.
Les mamans nuancent tout de même leurs propos en évoquant certaines soignantes plus
présentes que d’autres : « Surtout celles de nuit ; elles venaient, on parlait, on voit qu’elles ont
du métier ; elles m’ont tout de suite réconfortée et ça faisait du bien au moral parce que toute
seule, avec le papa à la maison… C’est vrai que là-dessus j’ai été vachement bien aidée ».
De plus, seule une auxiliaire évoque le fait qu’il faut être « douce » avec les nouvelles
accouchées car « accoucher, c’est un événement pas simple ! ». Je trouve que cette notion n’est
pas assez ressortie chez les professionnelles alors que les jeunes mères l’évoquent d’emblée
comme quelque-chose qu’elles ont apprécié.
Les propos des professionnels et des mamans confirment ma deuxième hypothèse qui était : je
pense qu’être conscient du besoin de soutien psychique de la mère en suite de couche permet
de faire évoluer les pratiques d’accompagnement à la parentalité. Les dires des mamans
montrent qu’elles ont besoin de soutien psychologique, de réassurance et de douceur en cette
période de vulnérabilité psychique, certes ressentie plus ou moins violemment suivant les
propriétés personnelles de la primipare, mais tout de même présente chez toutes les mères.
Elles expriment clairement que c’est ce dont elles avaient besoin lors de cette période délicate,
que c’est ce qu’elles attendaient et que ça leur a suffi. En revanche, on remarque que certaines
professionnelles sont plus sensibilisées à cette notion que d’autres, ce qui est dommage car on
a vu dans le cadre conceptuel l’importance de cette période post-natale sur le lien mère-enfant
et sur la naissance de la parentalité.
Dans mes entretiens, seule une auxiliaire parle de l’importance du soutien du papa et de la
reconstruction du couple mère-père en triade mère-père-bébé. Cette notion est pourtant
primordiale pour les jeunes mères. M3 énonce le fait que le soutien de son conjoint l’a aidée et
que le fait qu’il ait pris le relais la journée lui a permis de se reposer. Cela confirme l’importance
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de l’entourage dans le soutien des jeunes mères, d’où l’intérêt pour la puéricultrice de
rechercher les ressources familiales et amicales dont dispose une mère venant d’avoir son
premier bébé : il faut à tout prix éviter son isolement dans cette période de vulnérabilité que
l’on sait également cruciale pour l’élaboration du lien d’attachement mère-enfant.
Les deux auxiliaires me parlent de l’influence de la famille sur les jeunes accouchées, mais pour
AP1 la famille a plus un rôle de soutien, alors que pour AP2 les familles peuvent être
« toxiques » et avoir des « réflexions qui tuent » ; c’est pourquoi elle fait sortir les visites de la
chambre de la mère lors d’un soin ou d’une mise au sein. C’est ce qui est arrivé à M3, qui a
apprécié l’intervention d’une sage-femme alors qu’elle recevait beaucoup de visites et qu’elle
n’arrivait pas à leur demander de sortir pour donner le sein à sa fille : « elle est rentrée, elle a
compris sur notre visage qu’on avait besoin d’aide, et à ce moment là, elle a demandé à tout le
monde de partir, et là c’était le pied ! Parce que nous, pour le coup, on ne savait pas trop
comment s’y prendre… ».
Je fais une parenthèse pour M2, dont le conjoint est partit à l’annonce de la grossesse. Elle
avait « le moral à zéro » à l’arrivée de son fils et a eu besoin d’un suivi un peu plus renforcé
avec l’intervention de la psychologue du service pour l’aider à surmonter ses difficultés. Cette
aide lui a permis de se confier et de mettre d’autres mots que ceux des soignants sur son
ressenti. Elle a énormément apprécié la disponibilité du personnel hospitalier qu’elle a su
solliciter lorsqu’elle en a eu besoin et qui a toujours répondu présent. Son séjour à la maternité
a également été rallongé de quelques jours pour lui laisser le temps de se préparer au retour à
domicile. On remarque donc qu’on peut rencontrer des mamans plus vulnérables que d’autres,
seules, qui demandent plus d’attention et de soutien de la part des professionnels de
maternité. Connaitre l’histoire de la mère et le contexte actuel permet de mieux comprendre sa
situation, de la soulager et de lui proposer l’accompagnement adéquat. Je préciserais
également que la puéricultrice doit faire confiance à son ressenti : lorsqu’elle ressent qu’une
jeune maman ne va pas bien, elle doit à tout prix essayer d’en savoir plus et lui proposer de se
livrer, ceci faisant référence à la relation d’aide décrite dans le cadre conceptuel.
Résumé : Dans l’ensemble, les quatre professionnelles interrogées sont conscientes du besoin
de soutien psychique de la mère en suite de couche, même s’il n’est pas énoncé en ce terme.
Cependant, selon les mamans, toutes les professionnelles ne semblent pas sensibilisées à la
relation d’aide et certaines se sont montrées plus aidantes que d’autres lors de leur séjour à
la maternité. A noter que la notion d’être « douce » ressort peu chez les soignantes
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enquêtées alors que c’est ressorti par les primipares comme étant très important dans la
prise en charge. Les mères ont toutes ressenti des périodes de « mou » et ont clairement
décrit un besoin d’être chouchoutée lors de cette période heureuse mais malgré tout difficile
moralement. Je note également l’importance des petites attentions dont les mamans se
souviennent et qui les ont réconfortées à un moment où elles en avaient besoin. Pour les
deux premières mamans, l’écoute, la disponibilité, les paroles rassurantes amenées par
l’équipe étaient ce dont elles avaient besoin et leur ont fait du bien. Pour la troisième
maman, fragilisée par son histoire de vie, un suivi psychologique plus approfondi a été mis en
place. Il est important que la puéricultrice sache repérer les mères en difficultés, dont la
détresse lui semble inhabituelle, plus prononcée que chez les autres mères ou impactant sur
la relation mère-bébé, afin de lui proposer les mesures adaptées pour l’aider à surmonter
cette épreuve. Mais le soutien psychique et la relation d’aide doivent être mis en place chez
toutes les mamans, même lorsqu’elles ne semblent pas en avoir besoin, car on connait
l’impact de l’état psychique de la mère sur sa relation avec son enfant. Les professionnels de
maternité ont un grand rôle à jouer dans cette prévention car ils sont les plus proches des
jeunes accouchées, particulièrement la nuit, moment où elles ont le plus besoin de présence,
d’écoute et de réassurance.
Lien mère enfant :
« C’est une fois qu’ils me l’avaient vraiment posée sur moi que là j’ai compris que j’avais
vraiment accouché ! J’avais du mal à réaliser au début… ».
La naissance est un moment merveilleux, le moment où les parents rencontrent enfin leur
enfant, leur vrai bébé, et non le bébé imaginaire qu’ils avaient en tête. Cette confrontation au
bébé réel peut tout de même parfois les surprendre car il est vrai que le bébé nait bleu, sale,
couvert de liquide amniotique et parfois de sang, avec une tête souvent déformée… M3 me dit
qu’à l’accouchement, « quand ils nous le posent directement dessus, on n’a pas une réaction de
dégout, mais limite… », propos confirmés par le papa : « on se dit, "c’est quoi ça ?!" ». Mais
cette impression passe bien vite, et le lien d’attachement se met en place dans les premières
minutes après la naissance. M3 regrette seulement ne pas avoir eu sa fille plus longtemps sur
elle à sa naissance : « on accouche, on se donne à fond, et la récompense, on nous l’enlève tout
de suite ! ». Pour elle, la proximité avec le bébé est ce qui favorise le plus le lien mère-enfant.
En ce qui concerne ce qui est mis en place pour favoriser le lien d’attachement entre la mère et
son nouveau-né, toutes les professionnelles interrogées sont conscientes que la proximité aide
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à l’élaboration de ce lien et que le fait que ce soit les mamans qui s’occupent de leur bébé y
contribue également. Les mères citent également ces éléments comme favorisant le lien avec
leur bébé.
Le peau à peau en salle de naissance, mais aussi en service de suite de couche, est cité par trois
professionnelles, et la quatrième parle de portage dans les bras ; on voit donc que le contact
mère-enfant est pour les quatre soignantes un moyen d’établir l’attachement. « On fait
beaucoup de peau à peau, […] la mise au sein précoce pour les femmes qui allaitent, essayer de
leur montrer les compétences de leur enfant, […] repérer les signes de faim, comprendre les
pleurs de leur enfant… ». Sa collègue rejoint ces dires en citant également « le portage, le
toucher, la voix, le fait de parler à son bébé, qu’elles le touchent ». Une autre professionnelle
dit : « Votre bébé a des besoins, essayez de comprendre, là, pourquoi il pleure ? […] Le bébé, il
faut le regarder, chaque bébé est différent ». L’information des mères sur le fait que le bébé est
une personne, qu’il a des compétences et des besoins qu’il sait manifester, semble prendre une
place importante dans la pratique des deux auxiliaires. Pourtant, aucune des trois mamans ne
me dit avoir été informée par l’équipe de la maternité des compétences du nouveau-né, et
pour deux d’entre elles, ce sont des informations qu’elles ont recherchées par elles-mêmes par
des lectures sur internet principalement. Montrer les capacités de leur bébé aux parents leur
permet de reconnaitre leur enfant comme étant une personne, avec ses propres besoins, et
participe au lien d’attachement (cf. travaux de Brazelton décrit dans le cadre conceptuel).
Les jeunes primipares sont assez d’accord avec les soignantes car deux mamans me citent
immédiatement le peau-à-peau réalisé en salle de naissance comme les ayant aidées à
rencontrer leur bébé. Pour le couple M3-P3, c’est Monsieur qui a eu leur fille en peau-à-peau à
sa naissance. C’est un moment qu’il a particulièrement apprécié, qu’il a d’ailleurs refait une fois
à domicile, et qu’il souhaite refaire pour un prochain enfant. Pour lui, ce temps qu’il a eu avec
sa fille lui a permis de se sentir père et a renforcé le lien père-enfant. « On ne l’a pas portée
donc ce n’est pas pareil, nous on ne se rend compte que quand on l’a dans les bras, et ça, c’est
important à mes yeux ». Sa compagne me dit : « moi, le contact, je l’avais tous les jours du fait
que je l’allaitais […] donc ça ne m’a pas dérangée que ce soit lui qui le fasse ». Les deux autres
mamans s’accordent à dire que l’allaitement a joué un grand rôle de leur attachement à leur
bébé.
Si on sait maintenant que la réalisation des soins par la maman contribue à l’estime et à la
confiance en soi de cette dernière, il parait évident que s’occuper de son bébé participe
également à l’élaboration du lien d’attachement. C’est ce que M2 me décrit en évoquant le
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premier bain réalisé en néonatologie par les sages-femmes sans elle : « Sur le coup, je me suis
dit elles font leur travail, et après y avoir repensé, j’aurais préféré être là quand même… ». La
mère doit être la personne qui doit s’occuper en priorité de son bébé car ce sont les premiers
jours, voire les premières heures, que se jouent les prémices d’un lien qui durera toute la vie.
A ma grande surprise, aucune maman n’a été gênée d’avoir été séparée de son bébé pour les
prises de sang et le test de dépistage post-natal, et aucune ne souhaitait l’accompagner lors des
soins. D’ailleurs, aucune d’entre elles ne m’a évoquée d’elle-même le fait qu’elles aient été
séparées de leur enfant à plusieurs reprises lors du séjour à la maternité, et ne s’en souvenaient
même plus. Même si je sais que la séparation de la mère et de son bébé entrave le lien mèreenfant, il apparait qu’à très court terme, cela n’a pas tellement d’impact. M2 me confie tout de
même qu’une nuit, lorsqu’elle a appelé une soignante pour qu’elle prenne quelques heures son
fils qui pleurait sans cesse, elle a eu du mal à le laisser : « j’en avais gros sur la patate de le
laisser la nuit, mais je n’en pouvais plus ». La séparation lors de cette période de fusion n’est
donc pas facile à vivre pour la mère ni pour son bébé, et ne doit être effectuée qu’à la demande
de la maman ou en cas de situation exceptionnelle.
A noter qu’aucun des deux établissements ne propose d’atelier de massage bébé ou d’atelier
de portage en écharpe au sein de la maternité à ce jour, mais cela est en cours d’installation à
Vesoul. C’est regrettable car on a vu dans le cadre conceptuel que ce sont des outils utiles pour
favoriser le lien d’attachement mère-bébé par le fait que ça rapproche physiquement la mère
et son bébé, et permet leur interaction.
Si la distance et la séparation fragilisent la relation entre la maman et son bébé, proximité,
contact corporel et réalisation des soins contribuent bel et bien à l’élaboration du lien
d’attachement ; mais d’autres facteurs rentrent en compte :
Pour M1 et M3, parler à leur bébé, répondre à ses pleurs, le porter, le consoler, s’est fait
naturellement. Toutes deux lui parlaient déjà lors de leur grossesse et PV énonce que la
préparation à l’accouchement a aidé sa femme à prendre conscience qu’elle allait devenir
mère. En revanche M2, fragilisée mentalement par sa situation personnelle (départ du papa), a
eu besoin des encouragements des professionnels pour entrer en relation avec son fils. Moins
disponible pour son bébé, le personnel de la maternité l’a encouragée à parler à son bébé et à
le porter contre elle. Elle cite les paroles que lui a dit une soignante : « maintenant c’est le petit,
la priorité c’est le petit bonhomme […], il faut que vous aillez bien pour qu’il aille bien ». On
remarque dans ces propos que rentrer en relation avec son bébé n’est pas évident et inné pour
51
toutes les mamans. Des facteurs extérieurs peuvent perturber la disponibilité de la mère pour
son nouveau-né et, par conséquent, le lien d’attachement qui s’établit entre eux après la
naissance. Il est important que la puéricultrice de maternité rapproche la mère de son bébé,
l’encourage à lui parler, à le porter, à répondre à ses pleurs, afin de rétablir le rôle de
maternage, fragilisé, qui est à l’origine du lien relationnel et affectif qui s’établit entre la mère
et son enfant.
Les deux puéricultrices semblent plus sensibilisées aux pathologies de la mise en place du lien
d’attachement que les auxiliaires ; en effet, certaines choses les alertent: « une maman qui ne
prend pas bébé dans les bras, qui le couche pour donner le biberon, qui n’a pas de gestes
tendres envers bébé, qui ne va pas le prendre, qui ne répond pas à ses pleurs, qui nous le laisse
en pouponnière… ». IP1 évoque plutôt le fait que le trouble du lien d’attachement est souvent
rattaché à une pathologie psychiatrique chez la maman, souvent décelée lors de la grossesse.
Les quatre soignantes sont tout de même vigilantes aux interactions entre la mère et son
premier-né, et AP1 parle de veiller à ce que les mères soient « disponibles » pour leur bébé. A
noter qu’une psychomotricienne passe une à deux fois par semaine à la maternité de Vesoul
pour rassurer les parents particulièrement anxieux (repérés par l’équipe) sur l’état de santé de
leur bébé.
Résumé : L’accouchement et l’accueil d’un premier bébé peut être surprenant pour les jeunes
parents, mais c’est un moment vite oublié par la mise en place d’un lien fort qui se créé entre
le bébé et ses géniteurs dans les premières minutes après la naissance. La proximité et le
contact physique avec son bébé favorisent ce lien, autant pour la mère que pour le père,
notamment le peau à peau, la mise au sein, le portage et le maternage. Cependant, le
massage du bébé et le portage en écharpe sont peu présents dans les services, et les
compétences du nouveau-né ne sont pas présentées systématiquement aux parents. Ces
outils sont pourtant des importants facilitateurs du lien mère-enfant. On a vu également que
la distance et la séparation pouvaient fragiliser ce lien, mais lorsqu’elles se prolongent ou
surviennent sur un « terrain vulnérable ». Le maternage n’est pas évident pour toutes les
mères, et certains facteurs extérieurs peuvent limiter les interactions entre la maman et son
enfant. Il est du rôle de la puéricultrice de maternité d’encourager les mères à être proches
de leur bébé. Elle doit donc rester vigilante aux signes interpellants (pas de portage, pas de
réponse aux pleurs, pas de paroles à son bébé…) qui surviennent lors du séjour en suite de
couche, et qui sont parfois annonciateurs d’une pathologie du lien d’attachement.
52
Sortie et retour à domicile (RAD) :
Dans les deux structures, une réunion de préparation à la sortie de la maternité est proposée
aux parents (réunion « Carnet de santé » à Besançon et réunion de sortie à Vesoul). Elles
consistent à aborder tous les sujets susceptibles de questionner les jeunes mamans :
alimentation, sommeil, sécurité (prévention des accidents domestiques (AD) et de la mort
inattendue du nourrisson), visite du 1er mois chez le pédiatre, vaccins, soins, pesée du bébé
toutes les semaines le 1er mois, selles, cordon… L’objectif est de permettre aux mamans de
poser toutes les questions qu’elles ont en tête afin qu’elles rentrent à la maison sereines. Pour
IP2, ces réunions ont pour avantage l’échange et le partage des expériences entre les mamans :
« l’effet de groupe, il y a plus de questions posées, donc c’est plus intéressant, et les parents
peuvent interagir entre eux ».
Mais il arrive que certains parents refusent ou ne peuvent se rendre à la réunion de sortie ; les
puéricultrices prennent donc un temps avec les parents pour leur donner les conseils de sortie,
leur remettre le carnet de santé et répondre à leurs dernières questions. A Vesoul, ce temps
d’échange dure entre 30 et 45 minutes : « les parents veulent se projeter donc ça prend du
temps ». Il est également parfois proposé aux parents de venir préparer un biberon avec une
auxiliaire afin qu’ils puissent le faire au moins une fois avant leur départ.
Aucune des 3 mamans interrogées n’a participé aux réunions de sorties organisées dans les
services de maternité car elles souhaitent rester seules dans leur « cocon ». Ce fait m’a plutôt
étonné car je pensais que les primipares étaient demandeuses de réunions de mamans, que ça
les rassurait de parler avec d’autres jeunes mères ; or, deux mamans sur les trois n’avaient pas
envie de sortir de leur chambre pour rencontrer d’autres mamans et la troisième ne s’est pas
vue proposer cette rencontre. Les conseils de sortie ont donc été donnés dans les chambres et
j’ai pu voir que ce qui intéresse les mamans sont les conseils pratiques : conservation du lait
maternel, conseils pour le confort du bébé lors du bain, conseils de prévention des AD et du
bébé secoué… Les parents ont également été submergés par les conseils de leur famille
respective et me disent : « J’ai pris tous les conseils parce que tous les conseils sont bons à
prendre, après on se fait son opinion soi-même […]. J’ai fait à ma sauce ! » ; « C’est vrai que tous
les conseils sont bons à prendre mais après on fait comme on peut, et comme on veut ! On fait
ce qu’on a envie » ; « Après je pense que c’est le bébé qui nous dit ». On remarque alors
l’évolution des parents dans leur discours : au début des entretiens, ils regrettent les conseils
contradictoires des professionnels et de leur entourage à l’arrivée de leur bébé, mais cela ne
semble plus les déranger une fois qu’ils ont l’habitude de s’occuper de leur bébé et qu’ils ont
53
repris confiance en eux. A noter que seule une professionnelle interrogée est consciente que
les jeunes primipares rencontrent beaucoup de professionnels différents durant leur séjour en
suite de couche.
La PMI, l’HAD, le Prado ou un report de la date de sortie de la maternité sont parfois proposés
par l’équipe aux mères qui ont besoin de soutien ou d’un suivi au retour à domicile. La PMI est
la structure la plus recommandée dans les deux établissements. Certaines mères reprennent
contact à la sortie avec la sage-femme qui a suivi leur grossesse. Le numéro direct de la
maternité est donné à Besançon mais pas à Vesoul, où en revanche de nombreux fascicules et
plaquettes d’informations sont donnés aux jeunes mères, ainsi que le numéro des conseillères
en lactation pour les mamans allaitantes.
Concernant les mamans, le retour à domicile peut être stressant. Comme le dit M3, « au début,
c’est vrai qu’on se dit "je n’y arriverai pas toute seule" et en fait ça va ! » même si à la fin des
quatre jours elle était tout de même pressée de rentrer chez elle. Cette maman est sortie à son
domicile sans bénéficier d’aucun suivi et n’a contacté aucun professionnel une fois rentrée chez
elle car elle me dit n’en avoir « pas eu l’utilité », mais raconte avoir lu toutes les brochures
données à la maternité et lire régulièrement le carnet de santé en fonction de l’âge de sa fille
« car c’est des trucs qui servent sur plein de choses ».
M2 a bénéficié de l’intervention d’une sage-femme de l’HAD (service d’Hospitalisation A
Domicile) sur une semaine, ce qu’elle a trouvé très rassurant. Son séjour à la maternité a duré
une semaine et elle redoutait de rentrer à la maison. Elle a d’ailleurs rappelé le service de
maternité un soir alors que son bébé ne s’arrêtait pas de pleurer : « ça faisait deux heures qu’il
pleurait, je ne savais plus quoi faire ; elles m’avaient dit "si vous avez un souci, vous pouvez
appeler, de jour comme de nuit", ce que j’ai fait ». On remarque donc l’importance de donner
les coordonnées de professionnels à contacter une fois de retour à la maison car une maman
seule peut vite se sentir démunie face à son bébé.
Quant à M1, elle est sortie avec l’intervention d’une sage-femme du PRADO (Programme
d'accompagnement du Retour A Domicile après hOspitalisation) qui n’est intervenue qu’une
seule fois : « pourtant moi je ne suis pas une grande angoissée, mais j’étais contente d’avoir eu
la visite, de voir qu’elle avait repris du poids, que tout allait bien, de poser mes petites questions
d’allaitement, donc ça c’était bien ». Si son retour à domicile était « conforme » à ce qu’elle
avait imaginé et qu’elle me dit ne pas s’être sentie perdue à la maison, elle raconte tout de
même qu’il y a beaucoup de choses à faire une fois rentrée (rendez-vous avec le pédiatre par
54
exemple). Elle aussi a lu les messages de prévention et d’information du carnet de santé et des
dépliants qu’on lui avait donnés à la maternité, et, même s’ils ne lui ont rien appris de plus, elle
pense que c’est bien d’avoir des rappels et des documents auxquels on peut se référer s’il y a
besoin.
Lors de mes entretiens, les deux soignantes de Vesoul m’ont fait part de leur regret que le
séjour à la maternité soit de moins en moins long. Le suivi en devient, d’après elles, plus
« compliqué ». « Quand elles sortent à J5-J6, on a vu tout le démarrage de l’allaitement depuis
le début, mais quand elles sortent à J3, elles partent, on est un petit peu sur notre faim, on ne
sait pas comment ça va à la maison. […] Je pense qu’il y a des allaitements qui s’arrêtent
beaucoup à cause de ça, c’est un peu dommage… ». La mise en place d’un suivi au domicile par
un organisme divers permet de limiter cette « cassure » de la prise en charge et de suivre les
jeunes mamans un peu plus longtemps dans une période, rappelons-le, de fragilité plus ou
moins importante.
Résumé : Le retour à domicile peut être stressant pour les jeunes primipares et il est
important qu’elles sortent avec une information conséquente et éclairée, mais aussi avec de
la documentation, des adresses et des numéros à contacter en cas de besoin ou de question.
Les réunions de sortie, présentant un intérêt pédagogique certain d’après les professionnels,
n’ont pas attiré les mamans interrogées qui ont préféré rester seules dans leur « cocon ». Cet
élément m’a surpris car je pensais que les mères souhaitent partager ce moment avec
d’autres accouchées alors qu’il apparait qu’elles préfèrent être dans un espace rien que pour
elles et leur bébé, ce qui rappelle le terme de symbiose entre la mère et son nouveau-né dans
les premiers jours qui suivent l’accouchement. Le séjour à la maternité est de plus en plus
court et on a vu dans le cadre conceptuel qu’il survenait souvent dans une période où rien
n’était encore vraiment installé, et où la fragilité psychique est à son maximum. La mise en
place de l’intervention d’un organisme (PMI, HAD, Prado…) peut être très rassurante pour
une maman, et permet un suivi un peu plus long de la mère et de son enfant lors de cette
période décisive pour la suite de la parentalité.
55
7. Résumé des résultats de l’enquête :
L’accouchement de son premier enfant est un événement unique dans la vie d’une femme, et
le séjour à la maternité qui suit est un moment marquant, qui reste gravé dans les mémoires. Je
remarque dans les entretiens réalisés auprès des jeunes mamans que chacun de nos gestes et
de nos paroles sont retenus, et qu’elles se souviennent de beaucoup de détails, même plusieurs
mois après le séjour dans le service. L’impact des professionnels est fort sur les jeunes mères
qui manquent d’expérience car ils sont la principale figure de référence qu’elles ont lors de leur
hospitalisation. Si la disponibilité des soignants a été appréciée par les jeunes mères
interrogées, certains événements leur ont déplu : le manque de douceur, le non-respect de leur
projet parental, les discours discordant des différents professionnels… Il est donc important
que la puéricultrice de maternité soit consciente de la portée de ses actes, et qu’elle adopte
une posture professionnelle basée sur le respect et l’absence de tout jugement envers les
familles. La remise en question de sa pratique est également un élément fondamental d’une
bonne prise en charge car elle permet à la professionnelle de mettre à jour ses connaissances
et de rester dans une dynamique de perfectionnement.
Même si l’apprentissage des soins tend à être de moins en moins protocolisé dans les
maternités, les pratiques mettent du temps à évoluer et certains professionnels peuvent être
résistants au changement. On remarque dans les différents entretiens que les parents ont des
besoins différents et des ressentis très variables en ce qui concerne leur séjour à la maternité.
Même s’ils ont tous dans l’ensemble un bon souvenir du service de suite de couche, certains
auraient souhaité que ça se passe différemment, notamment pour l’apprentissage des soins
(réalisation du premier bain eux-mêmes, ou au contraire, plus d’accompagnement) et pour la
mise en route de l’allaitement maternel. Certains parents apprécient de pouvoir faire les soins
eux-mêmes dès la premières fois alors que d’autres sont rassurés par un accompagnement plus
long par les professionnels. Demander aux parents comment ils souhaitent que l’apprentissage
des soins se passe, comment ils le visualisent, ce qu’ils souhaitent faire eux-mêmes et ce qu’ils
attendent de nous, permet de s’adapter au plus près de leurs besoins et de leurs attentes. C’est
un travail individualisé, basé sur les compétences parentales, qui a pour but de faire émerger
les capacités des parents à s’occuper de leur bébé afin qu’ils se sentent performants et
compétents, et par conséquent, plus confiants en eux. La puéricultrice doit donc toujours
nuancer ses propos et proposer sans jamais imposer.
56
De plus, on sait également que l’apprentissage des soins par les soignants impact fortement les
parents et peuvent les freiner dans leur envie de réaliser les soins d’une manière qu’ils auraient
jugée meilleure ou qui leur correspondait mieux. Lors de mes entretiens, j’ai recueilli que deux
mamans auraient réalisé le bain différemment si elles l’avaient fait elles-mêmes la première
fois, et d’une manière qui respecte mieux les besoins de leur bébé. Il est donc important que les
puéricultrices de maternité encouragent les primipares à suivre leur instinct et leurs envies, par
ailleurs souvent très adaptés. Cela demande à la soignante une posture professionnelle basée
sur l’écoute et le respect, mais surtout fondée sur la remise en question de ses aprioris. Il est
important pour une puéricultrice de savoir et d’accepter qu’il n’y a pas UNE manière de faire,
mais autant qu’il y a de parents, et qu’ils sont les mieux placés pour savoir ce qui est le meilleur
pour leur enfant ; et il est important qu’elle puisse le préciser aux parents : « il existe des
centaines de manières de faire, toutes bonnes, et vous devez trouver celle qui vous convient le
mieux et qui respecte le plus votre projet de parent ».
J’ai pu voir lors de ma phase d’enquête que cette manière d’accompagner la réalisation des
soins du nouveau-né, et plus particulièrement l’autonomie laissée aux parents, valorise les
jeunes mères, leur prouve qu’elles sont capables, et, de ce fait, leur donne confiance en elles.
Ces éléments viennent confirmer ma première hypothèse posée en début de travail : je pense
que l’autonomie de la mère dans les soins de son bébé permet la construction de l’estime de
soi, nécessaire à la mise en place de la parentalité. Cependant, la puéricultrice doit rester
vigilante car certaines mères ont besoin de plus de présence que d’autres, et les laisser seules
trop rapidement peut avoir l’effet inverse. On ne peut donc pas généraliser cette hypothèse à
toutes les mères, mais seulement à la majorité d’entre elles. Le rôle de la puéricultrice est donc
de transmettre savoirs et « savoir-faire » tout en laissant l’autonomie et la liberté nécessaires
au sentiment de compétence dont la primipare a besoin pour avoir confiance en elle, ce qui par
ailleurs, est essentiel à la mise en route de la parentalité. Renforcer la confiance d’une
primipare, c’est valoriser sa capacité à s’occuper de son nouveau-né, adopter une posture de
relation d’aide, lui permettre d’exprimer ses émotions, doutes et ressentis, la féliciter,
l’informer et répondre à ses questions. C’est aussi encourager la prise d’initiative, valoriser les
réussites, et guider le parent si nécessaire.
La puéricultrice ne peut donc pas accompagner toutes les mères de la même manière. Il faut
d’abord qu’elle cible les attentes, les souhaits, les valeurs, les craintes, l’état physique et
psychologique, l’environnement, les particularités etc. de la jeune maman afin de lui proposer
57
une prise en charge la plus adaptée possible à ses besoins, et notamment au besoin de soutien
psychique. On a vu dans le cadre conceptuel que l’arrivée d’un bébé n’est pas une période
« rose layette » et qu’elle fragilise la jeune accouchée. Dans l’ensemble, les quatre
professionnelles interrogées sont conscientes du besoin de soutien psychique de la mère en
suite de couche, mais selon les mamans, certaines professionnelles se sont montrées plus
aidantes que d’autres lors de leur séjour en suite de couche. Les mères ont toutes ressenti des
périodes de « mou » et ont clairement décrit un besoin d’être chouchoutées lors de cette
période heureuse mais malgré tout difficile moralement. Je note également l’importance des
petites attentions dont les mamans se souviennent et qui les ont réconfortées à un moment où
elles en avaient besoin. Pour deux mamans, l’écoute, la disponibilité, les paroles rassurantes de
l’équipe étaient ce dont elles avaient besoin et leur a fait du bien, ce qui rappelle le terme de
relation d’aide défini dans le cadre conceptuel. Pour la troisième maman, fragilisée par son
histoire de vie, un suivi psychologique plus approfondi a été mis en place. Il est important que
la puéricultrice sache repérer les mères en difficultés, dont la détresse semble plus prononcée
que chez les autres mères, afin de lui proposer les mesures adaptées pour l’aider à surmonter
cette épreuve (prophylaxie des pathologies du lien mère-enfant). Mais le soutien psychique et
la relation d’aide doivent être mis en place chez toutes les mamans, même lorsqu’elles ne
semblent pas en avoir besoin, car on connait l’impact de l’état psychique de la mère sur sa
relation avec son enfant. Les professionnels de maternité sont les premiers acteurs de cette
prévention car ils sont les plus proches des jeunes accouchées lors de cette période de
vulnérabilité psychique, notamment la nuit. Contenir, soutenir, encourager, valoriser la jeune
maman va l’aider à aller mieux et à se consacrer à son bébé, car n’oublions pas qu’une
personne bien-traitante est avant tout une personne bien-traitée. Ces données tendent à
valider ma deuxième hypothèse : je pense qu’être conscient du besoin de soutien psychique de
la mère en suite de couche permet de faire évoluer les pratiques d’accompagnement à la
parentalité. La relation d’aide est un outil très précieux pour la puéricultrice de maternité car
on sait qu’elle est souvent la seule personne qui va permettre aux mères de se confier, de
verbaliser leurs craintes, leurs interrogations, leurs difficultés et leur ressenti.
A noter que connaitre les éventuelles difficultés rencontrées pendant la grossesse peut nous
aider à mieux comprendre la relation de la mère avec son enfant, et que les cours de
préparation à l’accouchement ont été cités plusieurs fois par les mamans comme étant un bon
moyen de se préparer à la naissance de son bébé et aux difficultés éventuelles lors de cette
période pas si évidente.
58
Je sais également que l’accouchement et l’accueil d’un premier bébé peuvent être un moment
éprouvant pour les jeunes parents, mais que c’est un moment vite oublié par la mise en place
d’un lien fort qui se créé entre le bébé et ses géniteurs dans les premières minutes après la
naissance. La proximité et le contact physique avec son bébé favorisent ce lien, autant pour la
mère que pour le père (peau à peau, mise au sein, portage, maternage), et doivent donc être
favorisés au maximum par la puéricultrice. J’ai recueilli lors de l’enquête que les ateliers
« massage bébé » et « portage en écharpe » sont inexistants dans les services, et que les
compétences du nouveau-né ne sont pas présentées systématiquement aux parents. Ces outils
sont pourtant des importants facilitateurs du lien mère-enfant. On a vu également que la
distance et la séparation pouvaient fragiliser ce lien, mais il apparait que c’est seulement le cas
lorsqu’elles se prolongent ou surviennent sur un « terrain vulnérable ». Si le maternage n’est
pas évident pour toutes les mères et que certains facteurs extérieurs peuvent limiter les
interactions entre la maman et son enfant, il est du rôle de la puéricultrice de maternité de
rester vigilante et de savoir repérer les signes interpellant (pas de portage, pas de réponse aux
pleurs, pas de paroles à son bébé…), parfois annonciateurs d’une pathologie du lien
d’attachement.
Il est ressorti dans les entretiens que le retour à domicile peut être stressant pour les jeunes
primipares et qu’il est important qu’elles sortent avec une information conséquente et éclairée,
que ce soit par les réunions de sorties ou les entretiens de sortie dans les chambres. Ces temps
de préparation à la sortie doivent être complétés par de la documentation, des adresses et des
numéros à contacter en cas de besoin ou de questions une fois de retour à la maison. Je sais
que le séjour à la maternité est de plus en plus court et on a vu dans le cadre conceptuel qu’il
survenait souvent dans une période où rien n’est encore vraiment installé et où la fragilité
psychique est à son maximum. La mise en place de l’intervention d’un organisme (PMI, HAD,
Prado…) peut être très rassurante pour la maman, et permet un suivi un peu plus long de la
mère et de son enfant lors de cette période décisive pour la suite de la parentalité. Et il est du
rôle de la puéricultrice, de rechercher les ressources (entourage) dont la mère pourra faire
usage une fois à son domicile afin qu’elle ne se retrouve jamais isolée avec son bébé.
59
8. Analyse critique de l’outil d’enquête :
Les grilles d’entretien pour les parents et les professionnels de maternité se sont montrées
assez efficientes car elles m’ont permise de recueillir les données souhaitées.
J’ai pu analyser le fonctionnement des différentes maternités, même s’il aurait été intéressant
que j’interroge des professionnels de la Polyclinique de Franche-Comté (PFC), d’autant plus
qu’une des mamans interrogées y a accouché. J’aurais cependant souhaité avoir plus de temps
pour m’entretenir avec les professionnels, mais les conditions d’entretien (au sein des services
de maternité) ont rendu les rencontres plus succinctes et le recueil de données plus pauvre que
s’ils avaient été réalisés en dehors du temps de travail des soignants.
Les entretiens avec les mamans se sont montrés plus productifs bien que je n’en ai réalisé que
trois, car il a été difficile prendre contact avec des mamans sorties de la maternité depuis
plusieurs mois. Les conditions d’entretien, à leur domicile, étaient plus propices aux échanges
et aux confidences, et les jeunes mères se sont montrées investies et intéressées par mon
travail.
La quantité de personnes enquêtées était limitée par des contraintes de temps et d’échéances,
mais donne un bon aperçu des réalités du terrain, d’autant plus que la population consultée
était assez diversifiée.
Cette enquête m’a permis de valider mes deux hypothèses, d’apporter de nombreux
compléments et enrichissements à mon cadre conceptuel, et de répondre plus précisément à
ma question de recherche : Comment la puéricultrice, au sein de l’équipe de maternité, peutelle faire évoluer les pratiques d’accompagnement à la parentalité des mères primipares ?
60
Troisième partie : le projet d’action :
9. Objectifs de l’action :
Au vu des résultats de l’analyse de l’enquête, j’ai établi les objectifs que devra remplir mon
action auprès des professionnels de maternité :
Objectif principal : faire évoluer les pratiques d’accompagnement des primipares en maternité.
Objectifs intermédiaires :

Recueillir les attentes des mamans concernant les professionnels de maternité

Sensibiliser les professionnels de maternité à l’importance de la relation d’aide

Faire évoluer l’apprentissage des soins en maternité afin de favoriser l’autonomie
des parents et le respect du projet parental
10. Contenu de l’action :
Afin d’atteindre les objectifs fixés en regard des résultats de l’enquête, j’ai pensé à deux outils :
un questionnaire de satisfaction à faire remplir anonymement par les mères sortantes du
service de maternité, ainsi que des réunions d’équipe auprès de tous les professionnels de
maternité (auxiliaires de puériculture, infirmière, puéricultrices, sages-femmes) basées sur les
résultats de ces questionnaires. Plusieurs réunions seront organisées afin que tous les
professionnels puissent y participer au moins une fois et seront divisées en deux temps : une
première phase d’analyse des résultats des questionnaires de satisfaction ; et une seconde
phase de dialogue entre les soignants.
Ce travail se fera en collaboration avec la cadre de santé du service de maternité et avec l’aval
de la hiérarchie. Aucun fond n’est nécessaire hormis de quoi financer l’impression des
questionnaires pour les parents, et seule une salle de réunion devra être disponible lors de ses
temps d’échanges.
61
Conclusion
Ce travail m’a permis de renforcer mon niveau de connaissances en matière
d’accompagnement des primipares à la maternité, et de ce fait, de toutes les jeunes mamans,
car on sait que chaque naissance reste un grand bouleversement pour la toute famille. J’ai
principalement retenu de cette partie théorique l’importance de l’adaptation du professionnel
aux parents qu’il accompagne, et l’intérêt de favoriser l’autonomie, et par conséquent, la
confiance en soi de ceux-ci, dans le but d’aider la naissance de la parentalité et la construction
du lien mère-enfant.
J’ai également pu confronter la théorie à la pratique sur le terrain, ainsi qu’aux attentes et aux
témoignages des jeunes mères, ce qui a enrichi mon travail et m’a permis d’élaborer un projet
d’action visant à améliorer les pratiques d’accompagnement en service de suite couche. Il en
est notamment ressorti l’importance de la relation d’aide et du soutien psychologique des
nouvelles accouchées lors de cette période de grande vulnérabilité, que je prioriserai
dorénavant dans ma pratique quotidienne quelque-soit mon lieu de travail.
A noter qu’il serait intéressant de se pencher sur un aspect ressorti par les mamans lors des
entretiens, bien que hors-sujet de ce mémoire : la préparation à l’accouchement et à la
naissance. On peut se poser la question du rôle de la puéricultrice dans cette anticipation qui a
semblé aux jeunes mères si importante pour aider l’arrivée de leur premier bébé…
« Le plus grand bien que nous faisons aux autres hommes n’est pas de leur communiquer notre
richesse, mais de leur révéler la leur » - Louis LAVELLE
62
BIBLIOGRAPHIE
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www.ceepame.com/le-metier-de-puericultrice (page consultée le 21.09.14)
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www.syndicat-infirmier.com/Referentiel-d-activites-de.html (page consultée le 21.09.14)
3
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www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006913901&cidTexte=LEGI
TEXT000006072665&dateTexte=20060721 (page consultée le 21.09.14)
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2012, page 12 à 13
11
« Devenir parents… Allaiter bébé », réalisé par TREMBLAY Marylise, LF Vidéo Femmes,
Copyright, 2003
12
FERRER L., BUTHIER J. « Quand les parents nous questionnent », EJE Journal, n°39, mars
2013, page 16 à 17
13
LANDAIS Mariella. « Devenir parents : compétences et adaptations des adultes », Vocation
Sage-femme, n°104, septembre/octobre 2013
14
DE MONTIGNY F., ST-ARNEAULT K. « L’expérience familiale à la naissance d’un enfant »,
Revue de l’infirmière, n°177, janvier 2012, page 34 à 35
15
COGNET Anna. « Le premier enfant : quel soutien à la parentalité ? », Le journal des
Professionnels de l’Enfance, n°66, septembre/octobre 2010, page 58 à 59
16
MATHIEU Cécile. « "A la rencontre de son bébé", une action d’éducation pour la santé auprès
des parents en PMI », Cahiers de la puéricultrice, n°272, décembre 2013, page 25 à 26
17
Béatrice THIEBO « L’ECHELLE D’EVALUATION NEONATALE DE T.B.BRAZELTON »,
disponible sur :
http://psychomot.soyezcreateur.info/L-ECHELLE-D-EVALUATION-NEONATALE-DE-T-BBRAZELTON.html (page consultée le 21.09.14)
18
Maison Départementale des Adolescents de Loire Atlantique, disponible sur :
http://mda44.free.fr/ (document PDF) (page consultée le 27 avril 2013)
19
DOUMONT D. et RENARD F., disponible sur :
http://www.uclouvain.be/ (page consultée le 11 mai 2013)
20
Dictionnaire de Français Larousse, Accompagner, disponible sur :
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/accompagner/470?q=accompagner#463
(page
consultée le 22.09.14)
21
LAROCQUE Karène, « L'estime de soi... ça se mérite! La confiance en soi... ça se développe! »,
disponible sur :
http://www.infopsy.com/estimeconf1.html (page consultée le 22.09.14)
22
« Quelques clefs pour une communication efficace », disponible sur :
http://www.accompagnement-developpement.com/quelques-clefs-pour-une-communicationefficace/#.VCCKhPl_syQ (page consultée le 22.09.14)
23
« L’art de l’écoute active dans la relation d’aide », disponible sur :
http://www.accompagnement-developpement.com/lart-de-lecoute-active-dans-la-relationdaide/#.VCCIePl_syQ (page consultée le 22.09.14)
DOCUMENTATION SUPPLEMENTAIRE
Articles :
- CASSE I., POLOMENO V. « L’adaptation des pères à leur premier nouveau-né », Soins
pédiatrie-puériculture, n°255, juillet/août 2010, page 38 à 41
- SCHUHL Christine. « Entre soutien et accompagnement de la fonction parentale », Métiers de
la petite enfance, n°161, mai 2010, page 14 à 15
- MOISSET Pierre. « Pour un partenariat consistant, il faut travailler avec, "sur" et sans les
parents », Métiers de la petite enfance, n°161, mai 2010, page 16 à 18
- BLANC Pascale. « En accueil à domicile, la professionnelle doit créer les conditions d’une
rencontre », Métiers de la petite enfance, n°161, mai 2010, page 19 à 20
- BOUVE Catherine. « Les relations parents-professionnels : un peu d’histoire », EJE Journal,
n°28, avril/mai 2011, page 36 à 37
- BOUREGBA Alain. « Au cœur de la parentalité », EJE Journal, n°28, avril/mai 2011, page 62 à
65
- SCHUHL Christine. « Parentalité », Métiers de la petite enfance, n°157, janvier 2010, page 7
- THILLIER Florence et al. « L’accompagnement des mères à la sortie de la maternité », Cahiers
de la puéricultrice, n°214, février 2008, page 29 à 30
- Dossier parentalité : Métiers de la petite enfance, n°161, mai 2010 :
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
SCHUHL Christine. « Entre soutien et accompagnement de la fonction parentale »,
page 14 à 15
MOISSET Pierre. « Pour un partenariat consistant, il faut travailler avec, sur et sans
les parents », page 16 à 18
BLANC Pascal. « En accueil à domicile, la professionnelle doit créer les conditions
d’une rencontre », page 19 à 20
- Dossier Brazelton : Le journal des professionnels de l’enfance, mars/avril 2010 :
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
FABRE GRENET Marie. « A l’origine ! », page 36 à 39
MILLIARD Sandrine. « Le bébé compétent : une force pour l’attachement des
parents », page 40 à 41
SPARROW Joshua. « Les points forts », page 42 à 45
BRUSCHWEILER-STERN Nadia. « Instants précieux », page 46 à 47
GRENIER Johanna. « L’échelle de Brazelton », page 48 à 50
CANDILIS-HUISMAN Drina. « L’échelle de Brazelton, un outil au service de la capacité
de rêverie maternelle », page 51 à 55
MILLIARD Sandrine. « Laissons du temps aux bébés ! », page 56 à 59
Ouvrages :
- SELLENET Catherine. « La parentalité décryptée », Edition L’Harmattan, juillet 2011, 188 pages
- APTER Gisèle et al. « Etre parents aujourd’hui », Fondation Mustela, novembre 2012, 62 pages
- MANCIAUX Michel et al. « Santé de la mère et de l’enfant », Edition Flammarion médecine
science (1984), 498 pages.
Autres :
- CARRIERE Clarisse. « Se faire parents à l’hôpital », Dossier d’étude n°101, février 2008
Cours :
- FEBVRE-CHARLOT V - « La sensorialité fœtale » - 2014.
- DODANE M-A - « La construction de l’estime de soi » - 2014.
ANNEXES
Annexe n° 1 : Grille d’entretien des professionnels de maternité : puéricultrice
et auxiliaire de puériculture
Bonjour, je suis Gabrielle, infirmière étudiante puéricultrice, et je réalise un mémoire sur
l’accompagnement par la puéricultrice de maternité des mamans d’un premier enfant, et j’ai besoin
de votre avis pour trouver des axes d’amélioration dans notre prise en charge. Si ça ne vous dérange
pas, je vais enregistrer cet entretien afin d’être plus disponible pour vous. Cet entretien est anonyme.
Pour commencer, j’aurais besoin de savoir :
-
Votre profession :
Et votre parcours professionnel (ancienneté, services…) :
1. Pouvez-vous m’expliquer ce que vous mettez en place pour l’apprentissage des soins du
nouveau-né chez une maman primipare ?
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Les soins sont-ils montrés à la maman ? Si oui combien de fois ?
Comment estimez-vous que la mère est autonome dans la réalisation des soins
de son bébé ?
Lorsqu’elle ne fait pas comme vous, corrigez-vous la maman sur sa manière de
faire ?
Qu’est-ce qui est important pour vous/quels sont les points cruciaux sur lesquels
vous insistez lors de l’apprentissage des soins du nouveau-né ?
2. Que mettez-vous en place pour favoriser l’autonomie et la confiance en elle de la jeune
maman ?
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Compliments, valorisation, encouragements ?
Laisser faire la mère à sa manière ?
S’appuyer sur les compétences de la mère/partir de ce qu’elle sait faire ?
Partir de ce que souhaite la maman/de comment elle imagine les soins ?
S’intéresser au retour à domicile et l’anticiper, s’est-elle déjà projetée, comment
elle va s’organiser chez elle, a-t-elle le matériel… ?
3. Que mettez-vous en place pour favoriser le lien mère-enfant ?
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Proximité mère-bébé ?
Valorisation mère et bébé, compliments ?
Favoriser interactions entre mère et son bébé ?
Faire découvrir aux parents les compétences de leur bébé ?
Peau à peau, massage bébé, portage en écharpe ?
Observation des interactions mère-enfant ?
Participation des parents aux soins ou aux examens ?
68
Annexe n° 1 : Grille d’entretien des professionnels de maternité : puéricultrice
et auxiliaire de puériculture
4. Comment soutenez-vous la maman lors de cette période heureuse mais malgré tout
difficile moralement ?
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Ecoute attentive, soutien, revalorisation sur les capacités à s’occuper de son
bébé, sur les qualités qui font d’elle une « bonne mère » ?
Recherche des ressources disponibles pour la mère dans son entourage ?
Proposer un entretien avec le ou la psychologue du service ?
Proposition d’un suivi après la sortie de la maternité… ?
Décharger la maman de sont travail si elle en a besoin et le souhaite ?
Réunion parents ?
Je vous remercie de votre participation, vos réponses vont m’être très utiles pour la suite de mon
mémoire.
69
Annexe n° 2 : Grille d’entretien mamans primipares
Bonjour, je suis Gabrielle, infirmière étudiante puéricultrice, et je réalise un mémoire sur
l’accompagnement par la puéricultrice de maternité des mamans d’un premier enfant, et j’ai besoin
de votre avis pour trouver des axes d’amélioration dans notre prise en charge. Si ça ne vous dérange
pas, je vais enregistrer cet entretien afin d’être plus disponible pour vous. Cet entretien est anonyme.
Pour commencer, j’aurais besoin de savoir :
-
Votre âge :
Et celui de votre 1er enfant :
1. Pouvez-vous me dire comment vous avez vécu votre séjour à la maternité et votre
ressenti ? (question de mise en confiance)
2. Concernant l’apprentissage des soins de votre bébé, vous êtes vous sentie accompagnée
par l’équipe ?
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Qu’est-ce qui a été mis en place pour vous accompagner à l’apprentissage des
soins de votre bébé ?
Qu’est-ce qui vous a convenu dans l’accompagnement par les professionnels ?
Qu’est-ce qui vous a déplu dans l’accompagnement par les professionnels ?
Qu’est-ce qui vous a manqué/ce que vous auriez eu besoin d’avoir à ce
moment là ?
Etait-ce facile pour vous d’apprendre les soins de votre bébé ?
Avez-vous pu faire à votre manière ?
Avez-vous l’impression que les professionnels vous ont imposé leur manière de
faire ?
Vous a-t-on montré les soins avant que vous les fassiez vous-même ?
Vous êtes vous sentie écoutée lorsque vous aviez des demandes/questions/
réticences ?
Avez-vous eu envie de réaliser les soins différemment en maternité ? Si oui avezvous été soutenue ?
Avez-vous réalisé les soins différemment après votre retour à domicile ?
3. Qu’est-ce qui a été mis en place par les professionnels pour vous aider à rencontrer votre
bébé/pour favoriser le lien entre vous et votre enfant ?
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Peau à peau, massage bébé, portage en écharpe ?
Les compétences du bébé ont-elles été montrées ?
Les professionnels vous ont-ils encouragé à parler à votre bébé lors des moments
d’éveil, du bain et de l’alimentation ?
Avez-vous été séparé de votre enfant lors de votre séjour à la maternité ?
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Annexe n° 2 : Grille d’entretien mamans primipares
4. La période après la naissance, ce n’est pas facile. Entre la fatigue, les douleurs, l’arrivée du
bébé, l’apprentissage des soins et toutes les questions qu’une jeune maman se pose… Vous
êtes-vous sentie soutenue par l’équipe soignante ?
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Qu’est-ce qui a été mis en place pour vous soutenir moralement ?
Qu’est-ce qui vous a plu dans le soutien des professionnels ?
Qu’est-ce qui, au contraire, vous a déplu ?
Qu’est-ce qui vous a manqué/de quoi auriez-vous eu besoin à ce moment là ?
Avec le recul, comment avez-vous vécu cette période post-natale ?
Je vous remercie de votre participation, vos réponses vont m’être très utiles pour la suite de mon
mémoire.
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