Dette grecque : chronologie de la crise La crise de la dette publique grecque est issue de la crainte des créanciers de la Grèce sur sa capacité à rembourser sa dette publique ainsi que de payer les intérêts de cette dette. Elle résulte à la fois de la crise économique mondiale et de facteurs propres au pays : fort endettement (environ 120 % du PIB) en 2010, déficit budgétaire qui dépasse les 13 % du PIB. Cette crise marque de façon plus globale le début de la crise de la dette dans la zone euro. 2009 : L’Europe découvre l’état des finances grecques Novembre : Le nouveau gouvernement de Georges Papandréou réalise les premières estimations du budget qui font apparaître un déficit de 12,70% du PIB, le double de ce qui était initialement annoncé. Décembre : Les sociétés de notation financière abaisse la note de la Grèce (Fitch Ratings et Standard & Poor’s dégrade la note de A- à BBB+ et Moody’s dévalue la note de A1 à A2). 2010 : Premier plan d’aide de 110 milliards d’euros Janvier : Le gouvernement Papandréou dévoile un programme de réduction des dépenses et d’augmentation de la fiscalité visant à ramener le déficit budgétaire à 2,8% du PIB en 2012 pour respecter le pacte de stabilité et de croissance de la Grèce. Avril : Les responsables politiques des pays de la zone euro se mettent d’accord sur un plan d’aide à la Grèce reposant sur des prêts bilatéraux d’un montant de 30 milliards d’euros (durée trois ans, taux d’intérêt d’environ 5%). A la fin du mois, l’agence Standard & Poor’s abaisse la note de la dette grecque en catégorie spéculative. Mai : Le Conseil européen valide le plan d’aide à la Grèce de 110 milliards de prêts sur 3 ans. Un Fonds européen de stabilité financière de 750 milliards d’euros est créé pour faire face à la peur des marchés et éviter que la crise grecque ne s’étende. La BCE décide de permettre aux banques centrales de la zone euro d’acheter de la dette publique et de la dette privée sur les marchés secondaires. Juin : Moody’s dégrade la note de la dette à Ba1. La note est de BB+ pour Standard & Poor’s et BBB- pour Fitch Ratings. 2011 : La zone euro élabore un second plan d’aide à la Grèce Juin : Standard & Poor’s abaisse la note grecque à CCC, estimant que le pays se dirige désormais vers une situation de défaut de paiement. Octobre : Le Premier ministre Papandréou annonce un referendum sur le plan d’austérité et l’aide financière internationale. Novembre : Le ministre des Finances annonce l’abandon du projet de referendum qui provoque une crise politique intérieure en Grèce. Georges Papandréou démissionne. Lucas Papademos, ancien vice-président de la BCE, le remplace et forme un gouvernement de coalition. 2012 : Vote d’un nouveau plan d’austérité Janvier : La Grèce a besoin de 99 milliards d’euros, environ 30 milliards utilisable pour les négociations avec les créanciers privés, 30 à 40 milliards pour recapitaliser les banques et 29 milliards pour faire face au service de la dette. Février - mars : Un deuxième plan d’aide internationale est élaboré sur la base d’un montant de 130 milliards d’euros dont le versement doit être étalé jusqu’à la fin 2014. Les fonds proviennent du FMI et du Fonds européen de stabilité financière. Le plan s’accompagne d’une restructuration de la dette détenue par des créanciers privés, qui renoncent à la moitié de leurs créances. Mai - juin : A l’issu des élections législatives anticipées, le Parlement est ingouvernable faute de majorité. De nouvelles élections se déroulent le 17 juin, remportées par le parti d’Antonis Samaras, qui devient Premier ministre. 2013 : Echec des négociations pour un troisième plan d’aide Juin : Le FMI admet que le premier plan de sauvetage de la Grèce s’était consolidé par des « échecs notables » en raison notamment de désaccords avec ses partenaires européens. Antonis Samaras annonce mi-juillet la fermeture de la radiotélévision publique ERT provoquant le départ de ses alliés du Dimar. Juillet : Le Parlement adopte la réforme dans la fonction publique (4 200 fonctionnaires devront être redéployés). C’était la condition exigée par les créanciers d’Athènes pour verser une nouvelle tranche d’aide de 6,8 milliards d’euros. Décembre : Les membres de la troïka n’ont pas trouvé d’accord avec le gouvernement grec. Un prêt d’un milliards d’euros est en suspens. 2014 : Retour à un excédent budgétaire primaire Mai : La Grèce renoue avec la croissance, son budget dégage de nouveau un excédent primaire et le Trésor parvient à lever sans difficulté 3 milliards d’euros sur le marché obligataire. Décembre : De nouvelles élections législatives anticipées sont mise en œuvre. 2015 : Prolongement du programme d’aide Janvier : Le parti de la gauche radicale Syriza remporte les élections législatives anticipées. Le gouvernant de coalition (partie de la gauche radicale Syriza et les souverainistes de droite du Parti des Grecs indépendants Anel) annonce un gel du programme de privatisations. Alexis Tsipras, Premier ministre, et Yanis Varoufakis, ministre des Finances, font le tour des capitales européennes pour négocier un allègement de la dette grecque pour parvenir à un accord viable et « mutuellement bénéfique » avec les créanciers d’Athènes. Février : La Banque Centrale Européenne annonce au début du mois la suspension du régime obligataire de refinancement qu’elle accordait aux banques grecques. Le 20 février, les ministres des Finances de l’Eurogroupe s’accordent sur une extension de 4 mois du plan d’aide international à la Grèce, qui expirait théoriquement fin février. Le déblocage de la dernière tranche d’aide, de 7,5 milliards d’euros, est toutefois conditionné à une liste de réformes que le gouvernement grec s’engage à présenter dans les plus brefs délais. Juin : La Grèce, après avoir exposé à ses partenaires européens son programme de réformes, parvient à s’acquitter de plusieurs remboursements au FMI en début de mois. Cependant, le FMI impose à celui-ci de regrouper toutes les échéances de juin, d’un montant total de 1,6 milliards d’euros, à la fin du mois. Un sommet extraordinaire s’est tenu à Bruxelles le 22 juin convoquant d’urgence les dirigeants européens. Le sommet n’a pas débouché sur un accord entre le premier ministre grec, Alexis Tsipras, et ses créanciers. Il a toutefois permis de rapprocher les positions, avec de nouvelles propositions d’Athènes. 2009 2011 2013 L'Europe découvre l'état des finances grecques La zone euro élabore un second plan d'aide à la Grèce Echec des négociations pour un troisième plan d'aide 2015 Prolongement du programme d'aide 2010 2012 2014 Premier plan d'aide de 110 milliards d'euros Vote d'un nouveau plan d'austérité Retour à un excédent budgétaire primaire La crise de la dette grecque Les origines de la dette grecque La crise de la dette grecque était prévisible. Mais les gouvernements qui se sont succédé ont systématiquement fermé les yeux. Elle provient essentiellement : de déficits structurels d’Athènes ; d’un modèle social fondé sur des dépenses publiques généreuses et le maintien d’un secteur public surdimensionné ; d’une économie souterraine qui prospère, notamment dans les services et le tourisme ; de la corruption généralisée des classes dirigeantes dite « économie grise » ; de « l’économie clandestine » (fraude fiscale) ; d’une instabilité politique. La crise économique globale est apparue en 2009 avec des revers soudains dans le tourisme et le transport maritime, deux secteurs d’activité essentiels. Le gouvernement conservateur de l’époque a préféré maquiller les comptes publics transgressant le Pacte européen de stabilité financière. En novembre 2009, le nouveau gouvernement socialiste réalise les premières estimations du budget qui font apparaître un déficit de 12,70% du PIB, le double de ce qui était initialement annoncé. La croissance de la dette depuis la crise est le produit de l’effet combiné des crues d’austérité et de la spéculation financière qui fait exploser les taux d’intérêts. Répartition des créanciers de la dette grecque fin 2014 Allemagne 13% Divers 11% Fonds privés 9% FMI 10% France 10% Dette grecque 320 milliards d'euros Fonds Européen de Stabilité Financière Etats Européens Banque Centrale Européenne Fonds Monétaire International Autres 22% BCE 8% Autres 8% France 3% Allemagne 5% Source : FESF, FMI, Bloomberg Les impacts sur l’Union Européenne et les créanciers En Europe, la crise de la dette éclate en 2010 lorsque le déficit et la dette publique grecs affolent les marchés. Cette panique est aggravée par la spéculation de certains investisseurs qui parient sur un défaut de paiement de l’État grec. Les marchés se mettent à exiger de la Grèce, pour son refinancement, des taux si élevés que son économie ne peut les assumer. Le risque est celui d’un défaut de paiement grec, d’un éclatement de la zone euro, et d’une propagation de la tempête financière aux autres économies de la périphérie de la zone euro (Grèce, Italie, Irlande, Portugal et Espagne). En mai 2010, les pays européens et le FMI refinancent la dette grecque en échange d’un plan d’austérité budgétaire drastique. Les États de la zone euro et la Banque centrale européenne imaginent ensuite en un temps record des mécanismes permettant de ramener les marchés des dettes souveraines à des comportements plus mesurés. Des plans d’aide sont élaborés pour les différents pays en difficulté. Ces actions permettent de créer des conditions stables pour entamer les réformes structurelles, parfois très lourdes, qui sont nécessaires dans les pays touchés. Néanmoins, en mars 2012, la dette vis-à-vis du secteur privé a été restructurée avec une perte substantielle pour les investisseurs, donnant ainsi lieu au premier défaut souverain de la zone euro. En théorie, le risque de contagion est contenu. D'abord par la création du Mécanisme européen de stabilité financière (MES) avec 500 milliards d'euros de réserves. Ensuite parce que l'essentiel de la dette grecque est détenu par des Etats ou des organismes internationaux (FMI, FESF, BEI…), l'exposition des banques et assureurs européens est aujourd'hui plus limitée qu'il y a trois ans. Le risque financier des Etats, estimé autour de 300 milliards d'euros, paraît important en tant que tel, mais la dette grecque détenue par les Etats ne représente que 3 % du PIB de la zone. Le risque ne semble donc pas de nature systémique. Enfin le programme massif de rachats d'actifs (QE) de la BCE peut servir d'amortisseur. Mais en pratique, la montée de la volatilité sur les marchés obligataires et la forte réactivité des marchés actions aux dissensions entre la Grèce et ses créanciers depuis quelques semaines, montrent que les marchés financiers ne sont pas forcément à l'abri d'une correction d'ampleur, notamment dans les pays périphériques (Espagne, Portugal, Italie…). Les banques européennes sont parmi les plus importants créanciers de la Grèce, en particulier les banques allemandes et françaises qui seraient les premières touchées par une restructuration de la dette grecque, mais qui resterait gérable selon elles. En cas de défaut de la Grèce, la Banque centrale européenne risque d’enregistrer des dizaines de milliards d’euros de pertes. Et si une restructuration entraînant des pertes se produisait, une recapitalisation de la BCE serait sans doute nécessaire. La situation actuelle de la dette grecque En début d’année, après plusieurs réunions des ministres des Finances de l’Eurogroupe, une extension du plan d’aide international à la Grèce est accordée. Le déblocage de la dernière tranche d’aide de 7,2 milliards d’euros, est toutefois conditionné à une liste de réformes que le gouvernement grec s’engage à présenter dans les plus brefs délais. Cependant, les négociations entre Athènes et ses créanciers sur le détail des mesures bloquent. Le relèvement de la TVA, la réforme des retraites et celle du marché du travail, les objectifs d’excédent primaire, la volonté grecque d’obtenir une restructuration de sa dette publique sont autant de points de divergence. En l’absence des 7,2 milliards d’euros d’aides internationales suspendus, la situation est tendue dans un pays dont les caisses se vident sous l’effet de mauvaises rentrées fiscales et qui ne peut se financer sur les marchés. La Grèce après avoir exposé à ses partenaires européens son programme de réformes, parvient à s’acquitter de plusieurs remboursements au FMI en ce début de mois. Cependant, le FMI impose à celui-ci de regrouper toutes les échéances de juin, d’un montant total de 1,6 milliards d’euros à la fin du mois. Au fil des jours, le ton ne cesse de monter entre les négociateurs. Un sommet extraordinaire s’est tenu à Bruxelles le 22 juin, convoquant d’urgence les dirigeants européens. Le sommet n’a pas débouché sur un accord entre le premier ministre grec, Alexis Tsipras, et ses créanciers. Il a toutefois permis de rapprocher les positions, avec de nouvelles propositions d’Athènes. Dans les semaines à venir, la Grèce et ses créanciers vont continuer les négociations. Entre la fermeté de la BCE et les orientations politiques de Tsipras plusieurs scénarios sont possibles avec des conséquences économiques et politiques (une perspective du contrôle des capitaux, un rallongement de la dette grecque, un défaut de paiement de la Grèce, un « Grexit », …).