Le Pôle Territorial de Coopération Economique (PTCE) de la Haute-Vallée de l’Aude Dossier de présentation « la question de l’innovation - qu’elle soit technologique ou sociale - dans les territoires ruraux, est un levier d’amélioration de la qualité de vie de nos concitoyens, mais aussi de développement économique. Je sais que les territoires ruraux ne manquent pas d’idées en la matière ! » Sylvia Pinel, ministre du Logement, de l’Egalité des territoires et de la Ruralité. Le projet de PTCE de la Haute-Vallée de l’Aude est issu de la volonté des services de l’Etat de corriger ces inégalités par des mesures d'équité territoriale et d’impulser une dynamique de revitalisation économique portée par les acteurs du territoire. Il s’agissait donc de fédérer l’ensemble des acteurs autour d’un projet qui réponde concrètement aux besoins des entreprises et des populations et qui soit porteur d’une ambition collective : revitaliser en imaginant collectivement des solutions durables et responsables. Une stratégie ambitieuse pour développer l’expérimentation de l’entrepreneuriat en milieu rural A l’instar de nombreux territoires de montagne, la Haute-Vallée de l’Aude est historiquement marquée par des pratiques coopératives et des pratiques d’entraide fortes. L’enclavement du territoire l’a contraint à développer une économie sociale et solidaire avant la lettre, dans les relations entre voisins, entre agriculteurs, entre membres de mêmes communautés villageoises. Paradoxalement, ces pratiques très développées ne se sont que marginalement traduites dans la constitution de projets économiques coopératifs ou associatifs ; c’est principalement le secteur agricole qui s’est approprié depuis longtemps les avantages de ces pratiques de mutualisation ou de cofinancement. Aujourd’hui, l’enjeu territorial est en grande partie lié à la transformation de ces dynamiques locales sous la forme de projets économiques créateurs d’emplois. De nombreux freins économiques (accès au financement, accès à des bassins de consommation, contraintes logistiques et techniques de l’environnement montagnard, etc.) ou culturels (manque de formation des ressources, éloignement des nouveaux outils numériques, craintes vis-à-vis du monde économique…) ont été identifiés par les acteurs du territoire. Aussi, et dans une démarche volontariste impulsée par la sous préfète de l’arrondissement, un collectif d’acteurs s’est constitué pour construire un écosystème de l’expérimentation de l’entrepreneuriat en milieu rural. Les partis-pris de la démarche La problématique du PTCE a rapidement rejoint la problématique d’un territoire marqué par un grand nombre de fractures territoriales : de par son enclavement, la Haute-Vallée de l’Aude se heurte encore à de nombreuses difficultés d’accès à de nombreux leviers de développement (accès aux services publics, accès au numérique, accès à l’emploi, accès aux autres territoires, accès à la mobilité…). C’est donc dans une approche inclusive du projet de territoire que le PTCE a été construit et non comme un outil déconnecté de cette réalité territoriale ; cette approche s’est appuyée sur les partis-pris suivants pour construire le sens de la démarche. Construire un projet, avec et pour le territoire La démarche mise en œuvre a reposé sur une posture de l’action publique : s’appuyer sur l’expertise d’usage des acteurs du territoire pour susciter un projet économiquement viable parce qu’économiquement utile. De cette posture est née la volonté d’associer l’ensemble des forces de la Haute-Vallée de l’Aude, et en premier lieu les acteurs qui ne sont que trop rarement mobilisés, les femmes et les jeunes, avant d’élargir la concertation aux acteurs économiques. Les différents partenaires ont été associés au travers de réunions collectives ou de groupes de réflexion, pour générer des idées, des projets, des rencontres et des coopérations. Innover pour faire projet Dans un petit territoire où les modalités de fonctionnement sont ancrées sur des temps longs, la démarche a voulu bousculer le jeu de contraintes pour faciliter l’émergence d’idées et d’initiatives. Ainsi, c’est en favorisant le contact direct, la convivialité, l’expression libre et non censurée que la parole a été donnée aux différents collèges d’acteurs par la sous préfète Sylvie Siffermann , tiers de confiance et facilitatrice. De même, la mobilisation officielle des acteurs institutionnels n’a été engagée que dans un second temps afin de ne pas brider les débats avec des a prioris politiques. Organiser la transversalité Afin de diffuser largement une innovation dans les modes de fonctionnement, une démarche transversale a été préférée à une démarche par secteurs d’activité ou par filière. Ainsi, l’innovation (et en particulier l’innovation numérique comme facteur d ’innovation sociale) a été retenue comme « le fil rouge » des débats, permettant de requestionner les modes de fonctionnement traditionnels et d’identifier de nouvelles modes de coopération. Assurer la pérennité de la dynamique territoriale Processus de transformation d’un territoire rural, l’accent a été mis dans un premier temps sur la dynamique économique et dans la perspective du second appel à projet 2015 pour la labellisation des PTCE. Ceci étant, ce projet est construit en cohérence ou en complémentarité avec d’autres démarches susceptibles d’accompagner cette dynamique territoriale. Ainsi : - Le contrat de ville de Limoux(centré sur le quartier Aude et signé le 13 février 2015)engage la démarche sur une dimension urbaine. Nouvel entrant dans la géographie prioritaire de la politique de la ville, Limoux a son seul quartier prioritaire situé en partie en centre-ville et associant des éléments de ville datant du XVIIIème siècle, des extensions urbaines des années 1950 et 1960, des friches industrielles et le quartier Saint-Antoine. Poumon économique local, Limoux se découvre ainsi des problématiques de pauvreté et de précarité qui la rapproche de certaines des difficultés de la Haute-Vallée de l’Aude ; dans ce cadre, le projet de PTCE est envisagé comme générateur de coopérations économiques et sociales entre espaces urbains et espaces ruraux ; Devenir un territoire d’expérimentation Le projet du PTCE est envisagé également comme un espace d’expérimentation, un écosystème territorial d’innovation : expérimentation de nouveaux concepts, expérimentations de nouveaux modèles économiques, expérimentations d’usage. Si le territoire de la Haute-Vallée de l’Aude n’est pas le premier lieu de l’innovation technologique, il peut être un lieu d’innovation sociale et d’innovation par les usages, comme l’atteste le caractère innovant de son tiers-lieux numérique porté par une SCIC, développé en milieu rural et autour duquel se greffe une dynamique de projets. Poser les bases d’une économie circulaire Productrice de matières premières agricoles et sylvicoles, la Haute-Vallée de l’Aude dispose d’un potentiel de valorisation important de ses coproduits ; ce gisement suggère de s’inscrire dans les logiques de l’économie circulaire. Le périmètre retenu pour le PTCE : la Haute-Vallée de l’Aude Le périmètre de projet visait initialement les plateaux du Pays de Sault, qui constituent une unité géographique naturelle au sud-est de Quillan, dans l’Aude, qui portent une culture locale historiquement marquée par le catharisme et par un enclavement qui reste important. Ce territoire très rural était en effet emblématique des nombreuses problématiques (fractures, mais également potentialités) de la Haute-Vallée de l’Aude : enclavement, faible densité, faible attractivité… Il disposait par ailleurs de leviers propres pour assurer sa revitalisation (développement de nouvelles formes d’agriculture, de nouvelles formes de tourisme…). Une dynamique territoriale co-construite La mise en œuvre de cette démarche de mobilisation s’est appuyée sur les jalons suivants, organisés par collège d’acteurs : Jalons Date Objectif Réunion des Femmes 8 octobre Ecouter la parole des femmes du territoire (chefs dirigeantes 2014 d’entreprise, présidentes d’association, élues, agricultrices…) sur les potentiels de création d’activités en lien avec un projet de PTCE Réunion des Jeunes et 27 Présenter les technologies d’impression 3D et Etudiants novembre questionner leurs apports pour le territoire 2014 Ecouter la parole des jeunes du territoire sur les opportunités de développement économique Réunion des Entreprises 28 janvier Générer des projets de coopération économique ou (62 acteurs économiques 2015 identifier des coopérations économiques présents) Mobilisation des Elus 12 février Informer et associer les 89 conseillers locaux (conseil 2015 communautaires de la communauté de communes communautaire) des Pyrénées audoises de la dynamique et de la démarche engagée Réunion n°2 des 24 février Partager l’avancée du projet ainsi que les premiers Femmes dirigeantes 2015 enseignements de la démarche Réunion du Monde Mars 2015 Identifier et s’associer à de nouvelles dynamiques anglo-saxon et d’Europe pour redynamiser la Haute-Vallée de l’Aude du Nord Réunion de Mobilisation 13 mars Mobiliser les acteurs de la communauté anglodes seniors 2015 saxonne dans la dynamique de projet GT Economie circulaire 7 avril Rechercher, entre acteurs économiques des pistes de 2015 coopération, sur la thématique de la valorisation des déchets Jalons Cellule économique Réunion des acteurs de la formation et de la recherche Date 9 avril 2015 28 avril 2015 Objectif Présenter le projet start-up est dans le pré Renforcer le lien entre acteurs économiques et acteurs des sphères de l’éducation et de la recherche (publique ou privée) o Identifier des potentiels de coopération La démarche engagée s’est appuyée sur une approche très participative mêlant ateliers, réunions publiques, entretiens ; elle a permis d’identifier 10 thématiques pour lesquelles le territoire dispose d’atouts importants pour la définition de nouvelles coopérations économiques Au travers des débats, différents enjeux sont revenus de manière récurrente ; ils sont synthétisés ciaprès. Enjeu n°1 : Construire des coopérations économiques entre acteurs Au travers des différentes réunions qui ont structuré la démarche d’émergence du PTCE de la Haute-Vallée de l’Aude et qui ont systématiquement rencontré un vif succès, de nouvelles dynamiques se sont créées autour d’un même constat : le manque d’instances et de lieux de concertation entre les acteurs du territoire. Ainsi, le territoire est une terre d’accueil de nouvelles populations, fréquemment étrangères. La réappropriation de la ruralité par des acteurs exogènesconstitue alors un potentiel important de coopérations économiques pour le territoire ; éventuellement portés par des valeurs qui tentent de concilier une certaine forme de développement économique et de respect du territoire, les nouveaux venus génèrent des besoins en termes de services ou de construction par exemple. Par ailleurs, ils sont en attente de lien social et d’occasions de développer de nouvelles activités ou de transmettre leurs savoir-faire et leur expérience. Enjeu n°2 : Ancrer localement la valeur La Haute-Vallée de l’Aude est un territoire dont le caractère est marqué par une géographie qui façonne les relations économiques et sociales (entre enclavement et solidarité) et une histoire forte ; son potentiel touristique repose sur de nombreux atouts, mais la vallée ne sait pas encore capter et ancrer la plus-value économique générée par ses paysages et ses nombreuses activités ludiques et sportives. Aussi, et pour construire une dynamique sur le sentiment d’appartenance territorial, il a été proposé de mettre en œuvre une monnaie complémentaire locale (le denier cathare). Cette monnaie ne pouvant être dépensée que localement, elle pourrait permettre de fixer la richesse apportée en particulier par les touristes. Enjeu n°3 : Renouveler les activités traditionnelles Dans un environnement général qui reste très traditionnel, l’exploitation des nouvelles fonctionnalités conférées par le numérique pourrait être un outil de redynamisation des activités traditionnelles. Il en est ainsi des entreprises qui se sont positionnées dans la vente à distance et qui trouve là de nouveaux canaux de commercialisation qui s’affranchissent des contraintes géographiques. Le développement durable est également un puissant levier de changement des industries traditionnelles. Enjeu n°4 : Encourager l’entrepreneuriat et réduire l’isolement des entrepreneurs Dans un environnement peu dense en termes de services à l’entreprise, la démarche de création d’entreprise n’est pas facilitée ; elle est même d’autant moins naturelle sur un territoire qui a été marqué par d’importantes (et relativement récentes) faillites industrielles. Le territoire ne dispose pas par ailleurs de l’attractivité qui lui permettrait d’engager son développement économique sur des apports exogènes ; il doit donc se concentrer sur l’endogène, sur ses forces vives, pour construire de l’économie et de l’emploi. Dans ce sens, les initiatives visant à accompagner l’entrepreneur au travers de son parcours de création et de développement de l’entreprise, mais également visant à constituer une communauté d’acteurs économiques partageant des espaces de rencontre et éventuellement d’affaires, soutiennent favorablement le développement du territoire.La pépinière d’entreprise ERECO et le Tiers Lieux de Limoux constituent à cet égard un atout ; les événements la start-up est dans le pré sont une opportunité de développement économique.Un réseau de cafés culturels, de repair-cafés peuvent accompagner une logique d’organisation d’événements à finalité économique. Enjeu n°5 : Améliorer l’employabilité et l’efficacité professionnelle Les réunions successives avec les étudiants (au Lycée technologique de Quillan ou Lycée enseignement général de Limoux) et avec les acteurs économiques ont mis en exergue la difficulté de construire des parcours de formation, la difficulté de disposer d’une ressource qualifiée et professionnelle pour les autres. Enjeu n°6 : Développer de nouvelles offres de service La Haute-Vallée de l’Aude est menacée par des mouvements de vieillissement naturel de sa population et de désertification de ses espaces les plus ruraux. Inversement, avec un acteur des services à la personne de premier plan sur le territoire et des formations dédiées aux soins et au service à la personne, elle dispose également d’un potentiel pour adresser les nouveaux marchés économiques liés au vieillissement. Ayant accès à certaines nouvelles technologies (télémédecine), elle pourrait constituer un lieu d’expérimentation de nouvelles pratiques.(silver economie) Enjeu n°7 : Développer l’itinérance L’itinérance peut permettre de pallier les difficultés liées à la faible densité démographique et la dévitalisation des zones rurales. Ainsi, l’école numérique, si elle est itinérante, peut être couplée aux manifestations culturelles… dont elle serait un volet. Une logique d’université populaire itinérante pourrait également être associée, par exemple autour du thème de la ruralité pour un premier cycle (qui passerait par une association des habitants à la construction d’une nouvelle ruralité choisie et non subie) et qui pourrait s’appuyer sur les MOOC.