Problèmes posés par l’utilisation irrationnelle des médicaments Document pour les participants L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MÉDICAMENTS Problèmes posés par l’utilisation irrationnelle des médicaments DOCUMENT POUR LES PARTICIPANTS OBJET ET CONTENU Les médicaments sont fréquemment utilisés de manière inappropriée, inefficace et inefficiente sur un plan économique, aussi bien dans les pays développés que dans les pays en développement (PED). Les coûts supplémentaires résultant de cette utilisation irrationnelle des médicaments sont considérables. Cette dernière a des conséquences aussi bien sur le plan économique (dans un contexte où les ressources sont rares) que sur le plan médical dans la mesure où certains traitements médicamenteux peuvent présenter des risques bien réels et n’entraîner aucun bénéfice objectif. Ce cours cherche à sensibiliser les participants à la réalité du mauvais usage des médicaments dans les PED. En leur présentant des exemples concrets ainsi que des modèles de prescriptions inadaptées relevés dans leurs propres pays. Après un aperçu rapide des différents points problématiques impliqués par l’utilisation des médicaments, ce cours identifiera également quelques-unes des causes les plus importantes de leur mauvais usage. Ce n’est qu’en s’appuyant sur une compréhension précise des schémas thérapeutiques existants, de l’importance des écarts entre ces traitements et une pratique optimale, ainsi que des facteurs (médicaux, psychologiques, politiques, économiques et culturels) qui les sous-tendent, qu’il sera possible d’améliorer la qualité et l’efficience (économique) des traitements pharmaceutiques. OBJECTIFS Ce cours vous aidera à : 1. Déterminer l’importance et la nature des situations d’utilisation irrationnelle des médicaments. 2. Comprendre les effets négatifs du mauvais usage des médicament. 3. Décrire les facteurs qui influencent le processus de décision en matière d’utilisation des médicaments. 4. Identifier les facteurs qui influencent les comportements des prescripteurs et des patients. 5. Établir les liens entre ces facteurs et les problèmes d’utilisation irrationnelle de certains médicaments. 1 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS PRÉPARATION 1. Lisez les notes figurant dans ce support de cours 2. Préparez une liste de situations de mauvais usage des médicaments qui pourra servir lors des travaux pratiques décrits plus loin. LECTURES COMPLÉMENTAIRES 1. Laing, R.O., Rational Drug Use: An Unsolved Problem: Tropical Doctor 1990, 20, 101-103. 2. Avorn, J. Harvey, K., Soumerai, S.B., et al., Information and Education as Determinants of Antibiotic Use, Reviews of Infectious Diseases, 1987, 9 (S3), S286-S296. 3. Vance, M.A., Millington, W.R., Principles of Irrational Drug Therapy, International Journal of Health Services, 1986, 16 (3),355-361. 4. Quick, J.D., Foreman, P., Ross-Degnan, D., et al., Where Does the Tetracycline Go?: Health Center Prescribing and Child Survival in East Java and West Kalimantan, Indonesia, Management Sciences for Health, October 1988. 5. Ross-Degnan, D, Laing, R.O., Quick, J,D, et al., A Strategy for Promoting Improved Pharmaceutical Use: The International Network for Rational Use of Drugs, Social Science and Medicine, 1992, 35(11),1329-1341. 2 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS NOTES DE COURS CONTEXTE On peut observer des cas d’utilisation inappropriée, inefficace et absurde sur un plan économique des produits pharmaceutiques dans le monde entier mais plus particulièrement dans les pays en développement (PED). Cependant, divers aspects des prescriptions inadéquates passent fréquemment inaperçus des décideurs du monde de la santé ou des prestataires de soin. En fait, ces problèmes ne sont portés à l’attention des décideurs ou des gestionnaires que lorsque les budgets pharmaceutiques sont en déficit aigu et qu’une intervention pour maîtriser les coûts devient absolument nécessaire. La nécessité de promouvoir un usage rationnel des médicaments ne relève pas uniquement de raisons financières bien que, habituellement, politiques et dirigeants soient principalement mobilisés par ces dernières. Un bon usage des médicaments est également un des éléments essentiels de la qualité des soins au plan individuel et collectif. Bien évidemment, cette question doit également devenir une préoccupation pour les praticiens. Les actions ou programmes d’intervention pour promouvoir le bon usage des médicaments devraient, par conséquent, être mis en place de manière continue et figurer systématiquement comme des éléments essentiels du système de santé. Ce cours constitue une introduction au problème plus général de la promotion de l’utilisation rationnelle des médicaments dans les PED. Les débats auront pour premier but de définir ce qu’est un usage rationnel des médicaments. Sur la base de cette définition, des situations de mauvaise utilisation seront décrites et mises en lumière à travers des exemples courants. On s’attachera également à décrire les conséquences de l’utilisation irrationnelle des médicaments autant que la nature des facteurs qui la sous-tendent. Une série d’exemples sera présentée, allant de schémas généraux d’utilisation des médicaments à des aspects plus spécifiques relatifs aux infections respiratoires aiguës, aux diarrhées et autres maladies courantes. 3 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Qu’appelle-t-on utilisation rationnelle des médicaments ? Dans le cadre de ce cours, on parlera indifféremment d’utilisation rationnelle, d’utilisation appropriée ou de bon usage des médicaments. Mais qu’appelle-t-on utilisation rationnelle des médicaments et que signifie le terme rationnel ? On peut avoir différents points de vue et façons de comprendre la notion générale d’utilisation rationnelle des produits pharmaceutiques, ou plus spécifiquement celle de prescription rationnelle. Cependant, la conférence d’experts sur l’utilisation rationnelle des médicaments, réunie à Nairobi en 1985 par l’Organisation Mondiale de la Santé, a proposé la définition suivante : Une utilisation rationnelle des médicaments implique que les patients reçoivent les traitements appropriés à leurs besoins médicaux, à des doses qui correspondent à leur caractéristiques individuelles, sur une durée adaptée et au moindre coût pour eux et pour la collectivité. Cette définition s’inscrit essentiellement dans une perspective médicale. Ces exigences seront satisfaites si le processus de prescription est correctement suivi. Celui-ci comprend différentes étapes qui consistent à : Définir la nature du problème du patient (diagnostic). Définir les traitements efficaces et sûrs (médicamenteux ou non). Choisir les médicaments appropriés, leurs doses et leurs durées d’administration. Écrire la prescription. Donner aux patients une information adéquate. Planifier l’évaluation de la réponse aux traitements prescrits. Cette définition sous-entend que l’usage rationnel des médicaments, notamment au niveau de la prescription, réponde aux critères suivants : Indication appropriée. La décision de prescrire des médicaments est entièrement fondée sur un raisonnement médical et le produit pharmaceutique prescrit a fait la preuve de son efficacité et de sa sécurité d’emploi. Médicament approprié. Le choix du médicament est basé sur des critères d’efficacité, de sécurité, de commodité d’emploi et sur des considérations de coûts. Patient approprié. Il ne présente aucune contre-indication et la probabilité d’effets secondaires est minimale. 4 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Information appropriée. Les patients doivent recevoir une information adaptée, juste, importante et claire à propos de leurs maladies et des médicaments qui leur sont prescrits. Monitoring approprié. Les effets potentiels et inattendus des médicaments doivent faire l’objet d’un suivi approprié. Malheureusement, dans le monde réel, les processus de prescription ne répondent pas toujours à ces différents critères. On peut alors distinguer les prescriptions rationnelles de celles qui ne le sont pas. Les prescriptions irrationnelles peuvent être assimilées à une « pathologie » de la prescription, lorsqu’elles ne correspondent pas aux critères décrits ci-dessus. Parmi les situations fréquentes de prescriptions irrationnelles, plusieurs formes peuvent être distinguées : Utilisation de médicaments quand ils ne sont pas indiqués : par exemple, prescription d’antibiotiques pour des infections respiratoires hautes d’origine virale. Utilisation de médicaments inadaptés pour une pathologie qui nécessite un traitement pharmaceutique : par exemple, prescription de tétracyclines dans la diarrhée de l’enfant alors que celle-ci ne demanderai qu’une réhydratation orale. Utilisation de médicaments d’efficacité douteuse ou de produits inefficaces : par exemple, utilisation de médicaments agissant sur la motricité digestive lors d’une diarrhée aiguë. Utilisation de médicaments insuffisamment évalués sur le plan de leur sécurité : par exemple, utilisation de produits à base de dipyrone. Incapacité à fournir des médicaments sûrs et efficaces : par exemple, incapacité à assurer une vaccination contre la rougeole ou le tétanos, incapacité à prescrire des sels de réhydratation orale en cas de diarrhée aiguë. Utilisation des bons médicaments mais avec une voie d’administration, une dose ou une durée incorrectes : par exemple, utilisation de la voie IV pour un traitement par metronidazole qui demanderai uniquement un traitement par voie orale ou rectale. Utilisation de traitements inutilement chers : par exemple, utilisation d’un antibiotique de troisième génération à large spectre alors qu’un antibiotique de première intention à spectre étroit est indiqué. 5 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Parmi les exemples de pratiques de prescriptions inappropriées fréquemment rencontrées dans les services de santé, on peut citer : L’utilisation excessive d’antibiotiques et d’antidiarrhéiques pour les diarrhées non spécifiques de l’enfance. L’utilisation abusive d’injections, par exemple pour traiter le paludisme. Les prescriptions multiples ou trop importantes. L’utilisation d’antibiotiques pour des infections modérées, comme les infections respiratoires aiguës. Prescription de stimulants et de multivitamines en cas de malnutrition. Utilisation superflue de traitements antihypertenseurs coûteux. non-bactériennes Le système de dispensation des médicaments est complexe et peut varier d’un pays à l’autre. Les produits peuvent être importés ou fabriqués localement. Ils peuvent être utilisés dans les hôpitaux ou les centres de santé, par des praticiens privés et vendus dans des pharmacies ou dans des drogueries où l’on vend des médicaments sans ordonnance. Dans certains pays, tous les médicaments sont en vente libre ! Enfin, la population comprend des individus extrêmement divers qui ont des connaissances, des croyances et des attitudes variées par rapport aux médicaments. Les consommateurs peuvent avoir une opinion très différente de ce qui est rationnel. Les facteurs qui sous-tendent l’usage irrationnel des médicaments Il y a beaucoup de facteurs différents qui peuvent intervenir dans l’utilisation irrationnelle des médicaments. De plus, selon les cultures, les médicaments sont perçus de manière différente et cela peut modifier la façon dont ils sont utilisés. On peut classer les facteurs les plus importants selon qu’ils relèvent des patients, des prescripteurs, du lieu d’exercice des professionnels, du système de fourniture des médicaments et en particulier de l’influence des industriels, de la réglementation, de l’information ou de la désinformation sur les médicaments, ou enfin, d’une combinaison de ces facteurs. Patients - Mauvaise information sur les médicaments - Croyances erronées - Demandes/attentes des patients Prescripteurs - Formation initiale et continue insuffisante - Conception inappropriée de leur rôle 6 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS - Information objective insuffisante - Tendance à généraliser une expérience limitée - Croyances erronées sur l’efficacité des médicaments Lieu d’exercice - Charge de travail lourde - Pression sur la prescription - Possibilités insuffisantes de réalisation d’examens biologiques - Coordination insuffisante entre professionnels Système de fourniture - Fournisseurs peu fiables - Pénurie de médicaments - Fourniture de médicaments périmés Réglementation - Disponibilité de médicaments non-essentiels - Prescripteurs informels - Insuffisance des mesures d’exécution Industrie - Activités promotionnelles - Formulations trompeuses Tous ces facteurs peuvent être touchés par les changements de pratiques nationales et globales. Par exemple, l’utilisation trop fréquente des injections est en train de diminuer dans de nombreux pays africains du fait de la peur liée au SIDA. Dans certains pays cependant, l’utilisation des injectables reste élevée car les prescripteurs considèrent à tort que les injections améliorent la satisfaction des patients et qu’elles sont toujours souhaitées par ces derniers. Impact de l’utilisation irrationnelle des médicaments Cet impact peut-être mis en évidence sur plusieurs plans : Une augmentation de la morbidité et la mortalité à travers une diminution de la qualité des traitements délivrés. 7 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Une limitation de l’accès aux autres médicaments essentiels et un accroissement des coûts, du fait du gaspillage des ressources. Une augmentation des risques d’effets indésirables comme, par exemple, les effets secondaires ou l’émergence d’une résistance en ce qui concerne le paludisme ou la tuberculose. Un impact psychosocial, lorsque les patients commence à croire qu’il existe une pilule pour chaque maladie, ce qui peut se traduire par une demande accrue de médicaments. Travaux pratiques 1: La notion de bon usage des médicaments Voir en fin de document EXEMPLES D’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MÉDICAMENTS Il existe diverses formes d’utilisation irrationnelle des médicaments. Cette utilisation peut-être évaluée dans un contexte général mais également dans le contexte plus spécifique de certaines pathologies. Les exemples suivants issus de différentes études réalisées dans le monde entier illustrent l’ampleur des problèmes de mauvais usage ou d’usage excessif des médicaments. Toutes maladies Polymédicamentation. Quand plus d’un médicament est prescrit (le plus souvent inutilement) pour une maladie, leur nombre par cas ou par épisode décrit le niveau de polymédicamentation. Dans une étude réalisée en Indonésie, le nombre moyen de médicaments par cas était de 3,8 tous âges confondus, ce qui témoigne d’une polymédicamentation évidente (Pour plus d’informations sur cette étude voir Quick, Foreman, Ross-Degnan, et al. indiqué dans les lectures complémentaires en page 2). 8 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Nombre de médicaments par patient selon la classe d’âge E. Java & W. Kalimantan, Indoné Indonésie, 1987 Trois 27% Trois 29% Deux 14% Deux 9% Un 1% Six + 6% Un 3% Quatre 26% Cinq 17% Six+ Six+ 13% Quatre 35% Moins de 5 ans Cinq 19% Plus de 5 ans L'utilisation irrationnelle des médicaments 10 Quand on regarde la répartition du nombre de médicaments selon le diagnostic, on note très peu de différences. Le phénomène de polymédicamentation dépend assez peu de la nature des pathologies. Nombre de médicaments par patient selon la pathologie E. Java & W. Kalimantan, Indoné Indonésie, 1987 Nombre de médicaments par patient 5 4 Moins de 5 ans 3 5 ans et plus 2 1 0 Total Diarrhée Mal. Resp. Peau Digestif Muscles/squelette. Muscles/squelette L'utilisation irrationnelle des médicaments 11 9 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Utilisation des antibiotiques L’utilisation des antibiotiques est un indicateur couramment utilisé pour le suivi de l’utilisation des médicaments. Un excès d’antibiotiques peut conduire au développement de résistances. Pourcentage de patients ayant reçu des antibiotiques E. Java & W. Kalimantan, Indoné Indonésie, 1987 Un 56% Aucun 35% Aucun 12% Trois et + 3% Deux 29% Moins de 5 ans Trois et + 2% Un 36% Deux 27% 5 ans et plus L'utilisation irrationnelle des médicaments 12 10 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Utilisation des injections Le recours aux injections est un autre indicateur simple des pratiques thérapeutiques. Dans l’étude indonésienne mentionnée plus haut, environ la moitié des enfants de moins de 5 ans et plus de 70% du groupe des 5 ans et plus ont reçu au moins une injection. Pourcentage de patients ayant reç reçu des injections E. Java & W. Kalimantan, Indoné Indonésie, 1987 Aucune 56% Aucune 26% Deux et + 10% Un 34% Un 54% Deux et + 20% 5 ans et plus Moins de 5 ans L'utilisation irrationnelle des médicaments 13 Quand on observe les taux d’utilisation des injections par diagnostic, une surutilisation est constatée pour la plupart des maladies. Les raisons qui conduisent à une sur-utilisation des injections sont complexes. Les prescripteurs ont tendance à croire que les patients s’attendent à recevoir des injections et qu’ils en sont satisfaits. Certains patients expriment effectivement une telle demande. Toutefois, la plupart d’entre eux n’aiment pas les injections mais les acceptent en considérant que « le docteur sait ce qui est le mieux ». Il y a en fait de grandes variations entre les pays en ce qui concerne les attitudes vis à vis des injections. 11 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Utilisation des injections par diagnostics, Indonésie 1987 Diagnostics uniques seulement Diarrhées Respiratoire Peau Gastroentérologie Muscl. Squel. Nutrition Oeil Moins de 5 ans Under Five 5 ans et plus Five & Over Bouche et dents Fièvre Total 0 10 20 30 40 50 60 70 % de patients Receiving ayant reçuInjection des injections of Patients Indicateurs spécifiques de pathologies Quand l’utilisation des médicaments est étudiée dans le contexte d’une maladie spécifique, des indicateurs supplémentaires peuvent être dégagés. Médicaments utilisés dans les infections respiratoires aiguës Beaucoup de médicaments, particulièrement des antibiotiques, sont utilisés pour traiter des infections mineures des voies respiratoires supérieures. Une part importante des coûts des traitements de ces infections est attribuable à cet excès d’utilisation des antibiotiques. 12 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Schémas de traitement des infections respiratoires aiguës E. Java & W. Kalimantan, Indoné Indonésie, 1987 Nombre moyen de médicaments par patient 1.4 1.2 1 Moins de 5 ans 5 ans et plus 0.8 0.6 0.4 0.2 0 Antibio. Antibio. Analgésie Toux Antihist. Antihist. Autres L'utilisation irrationnelle des médicaments 14 Dans de nombreux pays africains, le paludisme est traité par des injections de chloroquine, plutôt que par des doses orales adaptées. Cette situation conduit à des échecs apparents, ce qui est appelé au Ghana le « paludisme à bas bruit ». Mauvaise observance des traitements antituberculeux Dans la plupart des pays où ont été mis en place des programmes de lutte antituberculeuse, moins de 50% des patients suivent leur traitement sur toute la durée qui peut aller de 6 à 8 mois. Cela mène à de nombreux échecs dans le traitement et à l’émergence de bactéries multirésistantes. Pour contrecarrer cette tendance dangereuse, l’OMS et l’Union Internationale contre la Tuberculose ont favorisé l’utilisation des schémas courts de traitement sous contrôle. Dans ces schémas, les patients tuberculeux sont directement surveillés lorsqu’ils prennent leurs traitements. Quand de telles mesures sont prises, on peut s’attendre à des taux de guérison de plus de 90%. Cependant, l’efficacité de ces schémas varie notablement selon l’environnement. (Pour avoir plus d’informations sur ces schémas de traitements courts (DOTS en anglais), allez sur site http://www.who.ch/gtb/dots/index.htm). 13 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Sous-utilisation de médicaments efficaces Certaines maladies pour lesquelles des thérapeutiques efficaces existent sont parfois sous-traitées dans les PED comme dans les pays développés. Il s’agit, par exemple, d’hypertension, de dépression, d’anémie durant la grossesse. Ces pathologies peuvent menacer la vie du patient ou se traduire par des handicaps graves. Elles sont sous-diagnostiquées, car elles ne font pas l’objet d’une surveillance régulière et parce que les professionnels de la santé ne les prennent pas suffisamment en considération. Pourtant, ces maladies peuvent facilement être soignées par les traitements. Par conséquent, il s’agit là d’une autre forme d’utilisation irrationnelle des médicaments. Difficultés spécifiques au contexte hospitalier L’utilisation des médicaments à l’hôpital a peu été étudiée. Pourtant, une mauvaise utilisation des antibiotiques a fréquemment été rapportée, tant dans les pays développés que dans les PED, en particulier dans le cadre des prophylaxies péri-chirurgicales. Les hôpitaux ont pu montrer cependant qu’ils étaient capables d’améliorer l’utilisation des antibiotiques à travers l’utilisation de formulaires. LES CONDITIONS D’UTILISATION DES MÉDICAMENTS DANS LES PED Dans le but de promouvoir une approche standardisée de l’évaluation des conditions d’utilisation des médicaments, l’INRUD a coordonné le développement d’indicateurs types et a encouragé la réalisation d’études fondées sur ces indicateurs dans un grand nombre de PVD durant la période 1990-1992 (Les indicateurs sur l’utilisation des médicaments sont décrits de manière plus détaillée dans les sessions suivantes). Ces résultats sont présentés ci-dessous. Le nombre moyen de médicaments prescrits dans le secteur public varie dans la plupart de ces pays entre 1,3 et 2 médicaments. Toutefois l’Indonésie, le Nigeria et le Ghana s’écartent significativement de cette moyenne. 14 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Nombre moyen de médicaments par patient Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Yémen Ouganda Soudan Malawi Indonésie Bangladesh Zimbabwe Tanzanie Nigeria Népal Équateur Guatemala Antilles Orientales Jamaïque Ghana Cameroun Salvador 0 1 2 3 4 5 Nombre moyen de médicaments L'utilisation irrationnelle des médicaments 16 Le taux d’utilisation des génériques varie entre 37% et 94%. Ce pourcentage semble dépendre des politiques gouvernementales et des mesures réglementaires prises dans les pays. Pourcentage de génériques parmi les prescriptions Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Soudan Indonésie Zimbabwe Tanzanie Nigeria Népal Équateur Guatemala Antilles Orientales Ghana Cameroun Salvador Jamaïque 0 20 40 60 80 100 % médicaments génériques L'utilisation irrationnelle des médicaments 17 15 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Les antibiotiques sont fréquemment utilisés dans les PED du fait de la fréquence des infections. La plupart des pays se situent dans la tranche 25-40%, bien que certains aient un taux de prescription nettement plus élevé. Pourcentage de patients ayant reçu des antibiotiques Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Yemen Ouganda Soudan Malawi Indonésie Bangladesh Zimbabwe Tanzanie Nigeria Népal Equateur Guatemala Antilles Orientales Jamaïque Ghana Cameroun Salvador 0 20 40 60 80 100 % de consultations entraînant une prescription d’antibiotiques L'utilisation irrationnelle des médicaments 18 Le taux de recours aux injections varie également fortement et semble en diminution dans de nombreux pays. Ce taux est en partie déterminé par la disponibilité des médicaments injectables, des seringues et des aiguilles. Un taux atteignant 48% a été observé en Ouganda en septembre 1990, ce qui est nettement trop élevé, surtout dans une zone à forte prévalence du VIH. 16 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Pourcentage de patients ayant reçu des injections Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Yémen Ouganda Soudan Malawi Indonésie Bangladesh Zimbabwe Tanzanie Nigeria Népal Équateur Guatemala Antilles Orientales Jamaïque Ghana Cameroun Salvador 0 20 40 60 80 100 % de consultations entraînant une injection L'utilisation irrationnelle des médicaments 19 17 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Les indicateurs des soins délivrés aux patients Plus récemment des efforts ont été réalisés pour quantifier certains aspects du processus de consultation et de dispensation. Durée de la consultation Le temps moyen consacré à une consultation se situe entre 2,3 et 3,5 minutes dans la plupart des pays. Les actes effectués durant ces consultations n’incluent pas toujours un examen physique des patients. Durée moyenne de la consultation Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Malawi Indonésie Tanzanie Nigeria Népal 0 1 2 3 4 5 6 7 Durée moyenne de la consultation (en minutes) L'utilisation irrationnelle des médicaments 20 18 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Durée de la dispensation Les conditions de dispensation n’ont été observées que dans un faible nombre de pays. Le temps moyen consacré à cette activité varie entre 12 et 86 secondes, ce qui est une durée extrêmement courte pour transmettre les informations parfois complexes sur les traitements médicamenteux délivrés aux patients. Durée moyenne de la dispensation des médicaments Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Tanzanie Nigeria Népal Antilles Orientales Ghana 0 50 100 150 200 Durée moyenne (en secondes) de la dispensation L'utilisation irrationnelle des médicaments 21 19 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Connaissance de la posologie des médicaments par les patients Quand on demande aux patients s’ils savent comment prendre leurs médicaments, entre 27% et 83% sont capables de fournir une réponse correcte. Il peut donc en résulter une mauvaise utilisation des produits. Pourcentage de patients connaissant la posologie de leurs médicaments Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Malawi Indonésie Bangladesh Tanzanie Nigeria Népal Antilles Orientales Ghana 0 20 40 60 80 100 % patients connaissant la posologie de leur traitement L'utilisation irrationnelle des médicaments 22 20 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS Les indicateurs relatifs à l’approvisionnement en médicaments Les traitements médicamenteux peuvent varier en fonction de la disponibilité des produits. Dans une série d’études portant sur la disponibilité de 10 à 15 produits essentiels, les médicaments étaient disponibles entre 60% et 90% du temps, excepté en Equateur. Pourcentage de médicaments en stocks Indicateurs sur l’l’utilisation des mé médicaments dans le secteur public 19901990-1993 Malawi Tanzanie Nigeria Népal Équateur Cameroun Ghana Salvador Guatemala Jamaïque 0 20 40 60 80 100 % de médicaments essentiels en stock L'utilisation irrationnelle des médicaments 23 Ces données provenant de différents pays reflètent la situation actuelle en matière de prescription. À ce stade, nous ne savons pas ce qui serait idéal. Nous n’avons pas de référence absolue à laquelle comparer les conditions d’utilisation des médicaments dans un site ou dans un pays. Toutefois, des actions sont en cours afin de définir de telles références dans chaque pays. Les premiers résultats concrets ont été obtenus au Nigeria par le Dr. Ambrose Isah. [http://www.who.ch/programmes/dap/icium/posters/1A2_txt.html] 21 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS TRAVAUX PRATIQUES 2 : Identifier un problème prioritaire Voir plus loin CONCLUSION La prescription des médicaments termine une consultation médicale. S’assurer que le bon médicament est prescrit, délivré et pris par le patient doit être une priorité pour tous les professionnels de la santé. Il existe des moyens pour évaluer les conditions d’utilisation des médicaments, pour intervenir afin de changer les pratiques et pour évaluer l’impact de ces interventions. Les planificateurs sanitaires et les prescripteurs ont besoin de ces outils afin d’améliorer la qualité des soins délivrés aux patients. 22 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS TRAVAUX PRATIQUES TRAVAUX PRATIQUES 1: La notion de bon usage des médicaments La notion de bon usage des médicaments peut recouvrir des réalités différentes selon les personnes interrogées. Dans votre groupe discutez, du sens que peut avoir cette notion du point de vue du : Groupe 1 - Patient Groupe 2 - Médecin Groupe 3 - Gestionnaire Groupe 4 - Pharmacien Groupe 5 - Industriel du médicament, laboratoire pharmaceutique Utilisez un chevalet de présentation pour écrire les mots qui décrivent au mieux cette notion. 23 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS TRAVAUX PRATIQUES 2 : Identifier un problème prioritaire Lors de cet exercice, vous allez travailler sur un exemple de problème de priorité. Pour cet exercice, vous devez avec les participants : 1. Identifier jusqu’à 5 problèmes (par exemple : utilisation des injections, surconsommation d’antibiotiques, etc.). 2. Définir jusqu’à 5 critères pour évaluer l’importance de chaque problème (par exemple : le risque médical, l’impact économique, la prévalence du problème, l’importance pour les patients, la simplicité de la solution, l’importance du déficit en formation, l’intérêt pour l’industrie, etc.). 3. Définir, pour chacun de ces critères, une pondération comprise entre 0 et 10. Par exemple, si vous pensez que le risque médical est l’élément le plus important, attribuez-lui un poids maximal égal à 10, alors que si vous pensez que l’extension du problème n’est pas un élément important, vous ne lui attribuerez qu’un poids faible de 5 ou 6. Notez les poids dans la seconde colonne. 4. Déterminer, pour chaque problème, le score que vous attribuez pour chacun des critères dans la limite des poids déterminés précédemment. Par exemple, si vous avez décidé que le poids correspondant à « l’extension du problème » n’était que de 5, alors vous ne pouvez attribuer qu’un score inférieur ou égal à 5 pour cette dimension, à chacun des problèmes. 5. Préparer une présentation de vos résultats. À partir de ces exercices, un problème courant sera sélectionné. 24 L’UTILISATION IRRATIONNELLE DES MEDICAMENTS SUPPORT DU COURS Feuille de travail pour l’exercice 2 Sélection d’un problème Critère Total Problème d’utilisation des médicaments Total 25