N° 7 Rome, 4 novembre 1985 Chères Soeurs, A l`approche du

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N° 7
Rome, 4 novembre 1985
Chères Soeurs,
A l'approche du Synode extraordinaire, c'est une note de reconnaissance qui jaillit de partout pour les richesses du plus grand don de l'Esprit à l'Eglise du XX e siècle : Vatican II. C'est vraiment un encouragement
pour tous ceux qui ont tant travaillé au renouveau de la vie de l'Eglise. Et parmi les secteurs mis en lumière,
on relève l'importance, pour chaque congrégation, de revenir de nouveau aux éléments essentiels de sa
propre tradition ; ainsi, chaque orientation de notre Chapitre peut trouver sa source dans le Concile. Ce sont
là quelques-uns des nombreux aspects positifs du renouveau conciliaire, et nous ne connaissons que trop
bien certaines de ses difficultés. En regardant l'Institut, je dirais que dans bien des domaines, il y a une ligne
inégale de croissance et de renouveau, réalisée à des rythmes différents selon les endroits. Elle est encore
bien fragile et sans racines profondes. Par moments, on a considéré et accepté les changements simplement
comme de nouvelles normes plutôt que comme le fruit d'une évolution de la pensée. Continuons notre
marche - une marche qui conduit à de nouvelles découvertes insoupçonnées. Dieu nous aime, Il marche
devant nous, Il nous prodigue un amour sans limites: c'est notre assurance dans notre service pour annoncer
la Bonne Nouvelle non seulement en paroles, mais par toute notre vie, sachant que nous pouvons faire naître
de nouvelles espérances là où il y a eu échec apparent. Au fond de tout cela se trouve l'appel à une conversion personnelle. Cette année tout particulièrement, en signe de notre intérêt pour les fruits du Synode, puissions-nous de nouveau être convaincues de l'interpellation de notre premier appel personnel, et vivre avec
plus d'ardeur la Parole de Dieu, notre charisme et notre réponse aux signes des temps. Tout ceci nous encourage à une qualité de vie qui témoigne du Royaume.
Je suis toujours stupéfaite et confuse chaque fois que j'ai la grâce de participer à une session sur Marie de la
Passion, comme c'était le cas dernièrement durant la rencontre des maîtresses des novices. C'est comme si je
découvrais de nouveau ma vocation personnelle qui m'apparaîtrait encore une fois toute nouvelle; c'est
comme si je voyais, d'un regard neuf, ce que veut dire appartenir à un Institut international selon notre charisme. Cette lumière était pourtant déjà en moi, aussi suis-je étonnée de ne pas l'avoir vue auparavant de la
même manière. Je me sens toute petite parce que je connais si peu et que je vis encore moins notre idéal.
L'appel à l'Institut est pour chacune de nous un appel d'amour, un don de Dieu que nous recevons dans
l'amour. Dès lors, chacune personnellement doit porter la responsabilité du charisme. Les orientations du
Chapitre général présupposent une vision universelle. “Le monde entier est ma patrie” - “marche ... comme
un Evangile vivant” (NS 288).
Pour un service authentique dans le monde d'aujourd'hui, nous avons toutes besoin de bien comprendre,
avec clarté et rectitude, notre identité. Si nous sommes et voulons être F. M. M., nous devons connaître le
contenu de cette identité. Je voudrais partager avec vous, si vous le voulez bien, une courte définition du
charisme dans son unité, comme nous l'a présenté Soeur Luigia Vittoria Alini. Laissons-le nous imprégner,
en ce 81ème anniversaire de la mort de Mère Fondatrice. Puissions-nous en être enthousiasmées et en vivre,
car c'est cette façon de voir qui nous fait, chaque jour, aller de l'avant.
Dans la contemplation des grands mystères de la foi, Marie de la Passion discerne et souligne l'unité des
éléments du charisme que Dieu lui a confiés pour son Institut : elle invite à vivre l'offrande rédemptrice de
“victime” au sens biblique du mot, afin de compléter, selon l'expression paulinienne, ce qui manque à la
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Passion du Christ en faveur de son Corps qui est l'Eglise; offrande qui demeure le fondement premier de
toute sa spiritualité et dans laquelle les autres éléments s’intègrent et s’unifient. C'est dans l'Eucharistie
adorée et contemplée chaque jour que se puise la force de vivre cette offrande dans une disponibilité, parfois héroïque, au service de l’évangélisation. L'abandon, sans compromis et sans reprise, essentiel à la
vocation “d'une victime, missionnaire adoratrice” trouve son expression dans l'Ecce de Marie, dont elle
continue l'action sur la terre. L'unité du charisme s’approfondit et se consolide dans la voie franciscaine
imprégnée d'Evangile: en effet, François, contemplant Marie dans l’humilité de l'Incarnation, s’unissant à
la souffrance rédemptrice du Christ à l'Alverne, adorant l'Eucharistie avec un ardent amour, vivant enfin le
sens ecclésial de l'action apostolique animée d'une intense contemplation, semble offrir le milieu vital où se
réalise la synthèse des éléments qui composent le charisme des Franciscaines Missionnaires de Marie.
Nous sommes une grande famille, une famille diversifiée et unie, parce que nous partageons la même identité et la même manière de vivre transmises par Marie de la Passion. Très bonne fête à chacune le 15 !
Notre famille missionnaire n'a qu'une tâche : faire advenir la "création nouvelle" (Ap 21). Nous devons
vivre et promouvoir les valeurs que Jésus nous indique comme signes du Royaume qui s'édifie parmi nous :
amour, miséricorde, communion, paix, dignité, liberté et justice.
Là où ces valeurs sont manifestes, nous pouvons dire avec le Seigneur : “Vous n'êtes pas loin du Royaume”;
là où elles sont menacées ou absentes, nous sommes appelées à les annoncer et à en vivre. Nous existons
pour les autres, “pour le salut de la multitude”. Selon Vatican II, l'Eglise - nous toutes - a pour vocation de
construire le Royaume de Dieu sur la terre. Vous sentirez là à quel point la formation initiale et permanente
est une exigence dans le contexte de nos communautés. Toutes, et pas seulement les jeunes, nous devons
accepter le défi des idées, des valeurs, des attitudes et des convictions de la tradition f.m.m. que nous partageons, et qui devrait en nous rejaillir constamment en vie nouvelle. Aussi est-ce la qualité de notre expérience de foi vécue au fil du quotidien, qui rend notre apostolat efficace dans les différents services que
nous assurons. L'Esprit-Saint s'empare des savants comme des ignorants, des riches comme des pauvres.
Chacune est appelée à être responsable et authentique dans sa propre vie. Peut-être avons-nous besoin de
préciser davantage notre notion de formation permanente f.m.m. et la manière de faire fructifier, de valoriser, d'affermir et d'approfondir ce don en nous-mêmes, chaque jour de notre vie. Ce qui implique une ligne
précise, simple mais profonde, pour celles que le Seigneur appelle à partager notre vie. Soyons toujours
attentives à laisser le Seigneur nous retourner, pétrir nos vies selon sa Parole en nous. La conversion, telle
que nous la voyons, est un appel à monter, à grandir dans une réponse toujours plus libre, neuve, créative;
elle est l'exercice persévérant de la liberté responsable, dont le sommet est une maturité spirituelle qui témoigne davantage de Jésus-Christ. “Vous avez été engendrés à nouveau par une semence non pas corruptible mais incorruptible, par la parole de Dieu vivante et permanente” (1 P 1, 23). Quand nous prenons
vraiment au sérieux l'appel à suivre le Christ et à porter son message, alors tout, dans la vie comme dans la
mort, prend sens.
L'approbation, par Jean-Paul II, de la Règle du Troisième Ordre Régulier en 1982 a mis le point final à la
recherche et aux efforts de renouvellement faits durant plusieurs années par quelque 413 congrégations
franciscaines qui suivent cette Règle et sont de plus en plus conscientes de leur interdépendance dans la
mission. L'Institut a pris large part à cette tâche historique avec Soeur Alma, comme membre du Bureau
Franciscain International, et S. Louise Dendooven, qui en était la coordonnatrice. A ce moment, bien que
l’objectif ait été atteint avec l'élaboration d'une Règle rénovée et acceptée à un niveau international, il avait
été convenu que ces rencontres de toute la famille franciscaine devaient continuer afin de promouvoir une
communion centrée sur la Règle et la Vie des Frères et des Soeurs des Instituts du Troisième Ordre Régulier
de saint François, selon les trois axes principaux de cette Règle : suivre fidèlement les traces de notre Seigneur Jésus-Christ (8, 25); rendre témoignage à l'Evangile de paroles et d'actions (9, 29); être messagers de
paix par nos paroles et la posséder encore plus dans nos coeurs (9, 30).
Le projet appelait la création de quelques structures permanentes: la rédaction et l'approbation des Statuts
de la Conférence Internationale de ces Instituts, et l'élection des membres du bureau qui seraient au service
de cette communion fraternelle. C'était le principal objectif de la Conférence Franciscaine Internationale,
tenue à Assise du 19 au 26 octobre. Plusieurs F.M.M. participaient aux services de secrétariat, traductions,
liturgie, et S. Sheila O'Neill était responsable de la commission qui préparait le projet de base des statuts. Il
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était assez émouvant de faire partie d'une assemblée de 240 supérieurs généraux qui s'engageaient à la solidarité au-delà de leurs propres Instituts et nations, pour servir la famille franciscaine et promouvoir ses valeurs dans la société d'aujourd'hui. Soeur Alma a été élue secrétaire générale du premier Conseil Franciscain
International, pour un mandat de quatre ans. Si l'Institut la laisse disponible pour répondre à cet appel, c'est
parce que nous voyons là un très grand service d'avenir, une nouvelle semence capable de transmettre au
monde les valeurs franciscaines. Son bureau sera à Rome et temporairement à Via Giusti, jusqu'à ce qu’on
trouve une solution appropriée.
La rencontre d'Assise a été aussi une ouverture sur la réalité de notre temps grâce à ses conférenciers, dont
S. Lingomba Moika, provinciale du Zaïre-sud; son exposé : “Suivre fidèlement les traces de notre Seigneur
Jésus-Christ dans la vie de relation aujourd'hui en Afrique”, a été grandement apprécié. Tous ont montré à
l'évidence qu'en ce moment de notre histoire, Dieu révèle un certain aspect de son mystère et de son plan
pour la croissance du Royaume. Et cet aspect, c’est la masse des pauvres qui émerge au centre de l'histoire
moderne, et notre disponibilité à nous laisser évangéliser par la profondeur de la foi chrétienne que l'on
trouve souvent en eux. Nous étions une fois de plus pressés d'unir nos efforts pour susciter une transformation plus radicale en nous-mêmes et dans le monde pour le Règne de Dieu. François et Marie de la Passion
ont éprouvé le désir de revenir sans cesse sur le thème du Royaume. Vivre l’Evangile en est la note-clé,
surtout la paix évangélique et la vraie liberté. Dans la dynamique de cet Evangile vécu, on porte toujours le
poids de son état de pécheur, un mouvement où l'on tombe mais où l'on se relève de nouveau, dans la liberté
de l'amour de Dieu.
Comme nouvelle de famille, je suis heureuse de vous dire qu'avant la dispersion du conseil, nous avons fixé
pour juin 1988, à Grotta, le Conseil Général Elargi ; il sera précédé d'une session pour les nouvelles provinciales. Une réunion d'économes provinciales aura lieu également à Grotta, en 1987, à peu près à la même
époque. Actuellement, les conseillères visitent plusieurs provinces, et je me prépare à aller en Espagne
jusqu’au 13 décembre.
Avec vous toutes, Soeurs, nous remercions Dieu d'avoir préservé nos soeurs de Mexico lors du récent tremblement de terre ; nous Le remercions pour le courage de nos soeurs dans les régions déchirées par la
guerre; et pour l'endurance pleine d'amour de celles qui vivent dans des situations de répression plus ou
moins intense ; nous sommes remplies de reconnaissance pour leur présence et leur témoignage et nous en
sommes profondément encouragées. Tout ceci est source de grâce pour l'Institut tout entier.
Bientôt viendra l'Avent, la plus belle peut-être des saisons liturgiques. Il nous offre bien des occasions de
renouveler nos forces, si nous savons consacrer du temps et de l'attention à la liturgie au coeur de nos vies.
La nourriture qui soutient notre démarche de conversion, c’est le “Pain de Vie”. Que les semaines qui précèdent Noël nous fassent toutes entrer plus profondément dans l’expérience de la grande attente qui, avec
Marie, “enfante le Sauveur” dans ce monde souffrant ; il a si désespérément besoin de sa Présence
qui-donne-vie. Je souhaite à chacune la lumière et l'amour qu’Il apporte tandis que nous nous préparons à sa
venue avec joie et reconnaissance; et je vous remercie aussi pour votre foi et votre amour qui me soutiennent et sont pour moi source continuelle d’inspiration. C'est dans cette assurance de fidélité vécue que nous
poursuivons notre marche ensemble.
Plus que jamais, nous serons présentes les unes aux autres dans notre prière à Noël.
MAURA O'CONNOR
f.m.m., Sup. Gle
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