s-” VAUCLUSE MATIN le 25 septembre 2001 Caubère : quand le théâtre se moque du théâtre Deuxième partie de son autobiographie théâtrale, “68 selon Ferdinand” est une satire violente contre le théâtre des années 70 mais aussi une occasion pour l’acteur-metteur en scène de régler ses comptes avec le théâtre d’aujourd’hui. A savourer au théâtre du Chêne Noir à Avignon L e spectateur est tout de suite averti : c’est un spectacle "intellectuel" qui s’adresse aux intellectuels. Pourtant si le public doit être averti, c’est surtout du fait qu’il rentre dans un univers particulier, celui de Philippe Caubère. Univers dans lequel le théâtre côtoie l’histoire et l’autobiographie pour deux heures de pure méchanceté. La cible favorite de l’acteur est le théâtre soixantehuitard avec tout ce qu’il porte comme fausses inovations. Celui qui est en première ligne pour cet assassinat public est le prof de théâtre qui inaugure le rôle du metteur en scène sclérosant. Ferdinand, inscrit à un cours de théâtre, fait tour à tour l’expérience de deux méthodes opposées (mais pas tant que ça). La première met l’accent sur "l’expression Page 1 sur 2 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce - s-” corporelle" dans un déchaînement et un oubli de toutes les inhibitions. Le spectateur est entrainé dans un maelström de dérision où le corps est mis à mal. Vient ensuite la méthode "classique", aussi déjantée que la première, car le professeur se transforme en un metteur en scène qui étouffe le comédien en représentation par des indications aussi farfelues les unes que les autres. Mais que veut donc Caubère ? D’où lui vient cette rage? Il veut faire table rase du passé, dénoncer le théâtre qui s’est enlisé et n’a pas dépassé Mnouchkine et Savary. Il n’hésite pas à dénigrer Mnouchkine avec un rictus d’heureuse cruauté tout en rappelant "ce que je lui dois". La satire dénonce le peu de confiance dont bénéficie l’acteur pris, comme ici, dans des rivalités intestines entre professeurs. Mais c’est aussi une manière de rappeler que l’acteur est porteur de qualités qui peuvent se passer de la mise en scène et oublier les gros décors. La force de Caubère consiste surtout en une incroyable capacité à faire rire. De tout, même du pire. Il nous rappelle aussi avec violence que l’acteur est avant tout un corps qui se livre. Majestueux. Florentina GHERMAN Page 2 sur 2 - Philippe Caubère 68 selon Ferdinand – Pièce -