A qui profite l’intégration économique SADC : Une approche théorique et empirique. Par Opara Opimba Lambert, doctorant rattaché à la Chaire Jean Monnet, l’Université Montesquieu Bordeaux4. Résumé : A partir d’un modèle de gravité inversé et réduit, nous montrons comment les coopérations bilatérales (échanges commerciaux bilatéraux) affectent le bien-être social des Etats membres d’une même zone à travers leur revenu par tête et le pourcentage de leur population vivant en dessous du seuil de pauvreté. Dans le cas de la SADC6, les relations bilatérales privilégiées dans la régions ne contribuent pas significativement à améliorer le bien-être des Etats coopérants. 1. Introduction. L’un des grands défis auxquels les pays africains sont confrontés en ce vingt-et-unième siècle est, à la fois, de réussir à créer des blocs économiques et monétaires pouvant leur permettre de réduire le degré de marginalisation dont ils sont victimes à l’échelle mondiale, et de promouvoir leur développement socio-économique et institutionnel durable. Dans une certaine mesure, ce double objectif peut se rapporter en un seul, si l’on considère qu’une bonne intégration économique accélère la dynamique de la productivité régionale. Une telle ambition nécessite des mesures d’engagement fermes et une sérieuse prise de conscience en matière de coopération entre les Etats africains. D’ailleurs, ces Etats ne sont pas en marge de l’évolution actuelle du régionalisme. Mais la politique de régionalisation en Afrique souffre d’un sérieux problème d’application des textes régissant les accords passés entre membres d’une région. Si théoriquement il existe une franche volonté de la part des dirigeants africains de vouloir transformer leurs régions respectives en zone de libre-échange et de coordonner leurs politiques économiques, force est de constater que la réalité nous livre un autre scénario très éloigné du cadre théorique défini. Les raisons à cela sont multiples. Parmi celles-ci il y a : (i) la faible intensité d’échanges commerciaux formels intra-africains ; (ii) les structures productives disproportionnées entre les Etats membres d’une même région favorisent les asymétries des gains considérables auxquels il est difficile de mettre en place un système de compensation entre les gagnants et les perdants (P. et S. Guillaumont,1993); (iii) les conflits politiques et les luttes de leadership entre les Etats d’un même ensemble économique tendent à fragiliser l’optimalité de l’intégration de ces Etats; (iv) la faible incitation et la moindre motivation administrative à faire appliquer les obligations coopératives régissant les accords. Depuis la fin des années 80, les enjeux de l’intégration ont repris un regain d’intérêt en Afrique, poussant ainsi la création de certains blocs comme la SADC (Southern African Development Cooperation). La SADC, créée en 1992 en remplacement de la SADCC, est un regroupement économique des 12 pays d’Afrique australe dont l’objet est de créer une zone de libre échange entre les Etats membres d’ici 2015. Au même titre que les autres blocs régionaux, elle s’engage à tirer vers le haut la productivité des économies très peu complémentaires de ces pays. En effet, les structures économiques de ces différents pays membres restent asymétriques : les pays relativement plus « avancés » (l’Afrique du sud et l’Ile Maurice) s’intègrent avec les moins avancés ; d’où l’intérêt de ce papier de s’intéresser à l’asymétrie des gains de coopération économique dans un tel cas d’intégration comme l’ont fait Ph. Cour et F.Rupprech (1996) pour le cas de l’ALENA. La question principale est de savoir à qui profite le plus cette intégration australe. Comment le bien-être des Etats –à travers l’indice de la population en dessous du seuil de la pauvreté (de chaque Etat)- se comporte t-il face à certains facteurs ‘‘associés’’ à la création de la SADC (effet de création et / ou de contournement du commerce, l’ouverture commerciale extérieure, l’apport des investissements directs étrangers)? Cette problématique s’inspire de l’hypothèse selon laquelle la finalité des effets de gains à l’intégration doit s’observer sur le développement humain. Ce pourquoi, nous avons opté pour l’indice de la population nationale vivant en dessous du seuil de pauvreté 1 dans la région SADC pour apprécier les effets des coopérations économiques et commerciales sur le bienêtre social respectif de chaque Etat. Nous avons pris un échantillon que nous qualifions de SADC-6 qui regroupe les six Etats des douze de la SADC (Afrique du sud, Botswana, Lesotho, Namibie, Swaziland et Zimbabwe). Après avoir montré que l’effet de création du commerce SADC6 ne découle pas de l’effet de contournement de son commerce avec les régions hors SADC (partie 3), nous montrerons à partir d’un modèle gravitationnel réduit2 que, (i) s’il existe une relation économétrique entre les PIB par tête des principaux partenaires bilatéraux de la région (sauf pour l’Afrique du sud), en revanche, (ii) leur coopération respective -depuis la création de la SADC- ne semble pas affecter, d’une manière positive et significative, le nombre de la population en dessous du seuil de pauvreté de chaque Etat (partie 4). Mais avant, faisons une bref rappel des aspects socioéconomiques de la SADC-6. 1 Nous nous référons ici aux données et à la définition du PNUD, en considérant le seuil de la pauvreté monétaire, c’est-à-dire le pourcentage de la population annuel dans les ménages vivant avec moins d’un dollars US par jour en parité de pouvoirs d’achat. 2 Nous empruntons l’approche gravitationnelle non pas pour expliquer les échanges commerciaux bilatéraux, mais pour une démarche inversée. C’est-à-dire, voir dans quelle mesure les relations commerciales bilatérales affectent les indices de la population en dessous du seuil de pauvreté de chaque Etat de l’échantillon. 2. Un mot sur la SADC6 Graphique1. évolution des taux de croissance SADC6 15 Afrique du Sud 10 20 02 20 00 19 98 -5 19 96 Namibie 19 94 0 19 92 Lesotho 19 90 taux Bostwana 5 Swaziland Zimbabwe -10 années Source : élaborés à partir des données de IMF international financial statistic Le tableau 1 montre une évolution différenciée des certains taux de croissance des Etats de la SADC6 qui peut s’expliquer par plusieurs facteurs tant structurels que conjoncturels. Ces facteurs sont regroupés pour chaque Etat dans le tableau sommaire ci-dessous. Tableau 1. Les caractéristiques générales de la SADC-6. SADC6 Natures exportations Botswana Objectif : profiter au maximum des profits de la mondialisation Diamants Cuivre Nickel soda Lesotho Une économie tenue par la forme fragile de la manufacture et des aides internationales importations Machine, équipement de transport Nourriture, boissons (beverage) Principaux partenaires exportations importations EU SACU Zimbabwe SACU EU Zimbabwe Biens manufacturés Machines, équipements de transport, nourriture et animaux Amérique du Nord SACU EU Asie SACU Asie EU Amérique du Nord Namibie L’avantage comparatif semble se jouer sur l’agriculture, colonne vertébrale de l’économie Diamants Métaux Uranium Biens manufacturés poissons (2000) Afrique du Sud Allemagne U.S.A. France Russie Afrique duSud Priorité gouvernementale : lutter contre la pauvreté et les inégalités Bijouteries et pierres précieuses Machines et équipements de transport Métaux de base (métallurgie) (2000) Royaume-Uni Afrique du Sud Espagne France Suisse Belgique Italie Allemagne Japon (2002) U.S.A. Royaume-Uni. Allemagne Japon Pays bas Belgique Machines et équipements de transport Produits chimiques Minerais Textile (2002) Allemagne U.S.A. U.K. Arabie Saoudite Japon Particularités et enjeux Les institutions existent, reste à savoir leur efficacité. • Un des plus faibles taux d’imposition de la région (15% sur les compagnies manufacturières) •Bénéficie des effets industriels de l’AGOA act (système de préférences généralisées qui lui permet d’accroître son champ d’exportation aux USA •Le pays dépend énormément des aides internationales. •Le pays possède un gros potentiel de minerais faiblement exploités faute des investisseurs. •Le gouvernement encourage les sociétés privées à s’intéresser à l’industrie minière. •Les institutions accompagnent les firmes nouvellement installées (comme la LNDL qui a aidé 21 firmes entre 2000 et 2001) •3ème exportateur des textiles aux USA (grâce à l’AGOA act) •Ascendant du secteur manufacturier •L’agriculture et les mines tiennent l’économie. •Contrairement aux autres Etats, l’avantage comparatif namibien provient beaucoup plus de la diversité du secteur agricole. •70% de la population vit avec des revenus tirés de l’activité agricole [mais leur contribution ne représente que 6,7 % du PIB (2002)] •L’agriculture a une structure dualiste : 41% des terres nationales sont utilisées par le secteur communal alors que 44% sont détenues par le secteur commercial qui domine sur la production nationale. •Est l’économie la plus avancée en Afrique noire. •Son système financier (marché boursier) fait partie du Top 15 mondial. •Considérée comme une économie émergente au monde, l’Afrique du Sud est mondialement compétitive dans l’exportation des biens et la production des biens à forte valeur ajoutée. •La recherche et développement a une place de plus en plus Swaziland Objectif : tout faire pour attirer les IDE. Une économie tournée largement vers l’exportation = 70% PIB Minerais Produits chimiques Nourriture, beverage et tabac Produits végétaux Métallurgies Italie Zimbabwe Mozambique Chine France Iran Italie Biens manufacturés (textile, sucres, …) Produits chimiques et dérivés Tabac Machines et équipements de transport Biens manufacturés Food et Produits chimiques Carburant Articles manufacturés Afrique du Sud Mozambique Reste de la SADC U.S.A. Royaume-Uni. France Afrique du Sud Japon Royaume-Uni Singapour U.S.A. significative dans les budgets annuels de l’Etat. L’accent est mis sur la recherche en santé, en industries biotechnologiques etc… •D’importants moyens sont mis en place pour attirer des investissements étrangers. D’ailleurs l’Afrique du sud est la première destination en Afrique des capitaux étrangers. • Le développement des PME est l’un des objectifs de la politique économique. L’Etat accorde certains avantages fiscaux à leur émergence. •Une petite économie largement dépendante de l’économie mondiale. •L’agriculture reste la principale ressource d’exportation. •AGOA act contribue à développer l’industrie textile. •Durant les années 80, l’économie a connu un boom d’IDE qui a eu des effets positifs sur la croissance économique. Cet afflux des IDE dans les années 80 a été favorisé par des sanctions internationales contre l’Afrique du Sud. •Mais depuis la fin de l’apartheid, le taux de croissance connaît une diminution de sa tendance, à cause d’un effet de réallocation d’investissement en Afrique du Sud. •Déficit public accru. Zimbabwe L’agriculture est le socle de l’économie et fait l’objet d’un acte constitutionnel. •Les réformes.ont conduit à une réaction violente de la communauté internationale qui a pris des mesures de représailles virulentes à l’encontre du pays. comme l’application des tarifs des douanes par les USA et l’exclusion du AGOA Act. •Tabac brut •Or et diamants et autres minerais •Produits alimentaires Textiles •Produits chimiques •Carburants et électricité • Machineries et équipements de transport • Biens manufacturés Afrique du Sud Japon Hollande Allemagne U.K. Chine Malawi Afrique du Sud Mozambique Allemagne Royaume-Uni Botswana Inde chine •Une économie relativement sophistiquée possédant le 2nd marché boursier en Afrique sub-saharienne •Actuellement le pays traverse de graves difficultés socioéconomiques à cause de la politique de la réallocation des terres cultivables entamée par le président MUGABE qui pourrait être inspirée par d’autres pays de la région comme la Zambie. Car le Zimbabwe est le premier pays africain à voir véritablement engager des réformes foncières en expropriant une partie de la population au profit d’une majorité. •Depuis la mise en pratique de cette politique de la réallocation des terres, qui a profondément bouleversé les normes économiques du pays, le PIB réel a considérablement chuté. Ainsi en 2003, le pays occupait la 145ème place de l’IDH. • Le Zimbabwe tente difficilement de nos jours de satisfaire à son autosuffisance alimentaire alors que c’était une fonction que le secteur agricole assurait jadis. •Cette politique n’a pas seulement affecté les performances du secteur agricole, elle a aussi affecté négativement le secteur de la manufacture •De plus, l’environnement international n’a pas apprécié le changement politique intervenu dans le pays, ce qui semble expliquer le déclin des investissements internationaux dans le pays entraînant par la suite la faible performance du secteur industriel comme le textile (voir schéma ci-dessous). Réformes Réformesagraires agraires Fin Findes des coopérations coopérations avec certains avec certains Etats européens Etats européens Réactions internationale Réactiondedelalacommunauté communauté internationale Déclin IDE Déclindes des IDE Exclusion l’AGOA actact Exclusiondede AGOA Baisse des activités industrielles et agricoles zimbabweenne Augmentation du tarif des douanes 3. Y’a-t-il des effets de création ou de détournement depuis la mise en place de la SADC (cas de la SADC6) ? La SADC et les effets de création du commerce La SADC regroupe des Etats très peu complémentaires, mais qui regorgent d’énormes potentiels économiques. Ces Etats sont définis par les mêmes structures économiques hormis l’Afrique du sud, et donc, ont cette nature de commercialiser entre eux. Mais la SADC est loin d’être un bloc naturel au sens de Krugman (1991b)3. Car, elle dépend énormément des relations commerciales et d’autres types de coopérations entretenues avec les régions développées (comme l’Union Européenne et les Etats-Unis). D’un autre côté, la SADC pourrait être une zone naturelle dans le cadre des échanges agricoles et textiles. Parce que les Etats qui la composent sont, pour une bonne partie, des Etats où l’agriculture domine dans leur PIB respectif (Namibie, Swaziland Zimbabwe) (i). Et aussi, parce que, grâce au partenariat avec les Etats-Unis, à travers l’AGOA act, le textile est entrain d’évoluer industriellement dans certains pays comme le Swaziland ou le Lesotho qui était en 2000 le troisième exportateur du textile aux USA (ii). L’intérêt de cette section est de montrer si la SADC « crée » du commerce entre les Etats de la SADC-6. Autrement dit, de voir s’il existe des effets de création comme la théorie du commerce international le démontre dans la cadre des coopérations commerciales et économiques (Viner 1950, DeMelo Siroën 2004). En effet, plusieurs effets sont attendus lorsque des pays appartenant à une zone géographique décident de se regrouper pour constituer une organisation commerciale régionale. Ainsi, plusieurs modèles comme ceux que l’on peut considérer comme des modèles traditionnels du commerce international (la théorie des avantages comparatifs de Ricardo, le modèle de Viner et le modèle Heckscher-OhlinSamuelson), et ceux qui font actuellement l’objet de leur dépassement que l’on désigne par la terme de la nouvelle théorie du commerce international défendue par Krugman et alii, ont essayé de mettre en évidence les retombées d’une telle intégration sur le bien-être collectif. Ces modèles, bien que reposant sur des structures robustes et faisant l’objet d’une grande pertinence, doivent néanmoins être pris avec précaution. Car, les effets d’une régionalisation commerciale peuvent être contradictoires et dépendants de la spécificité des régions (complémentarité ou substituabilité des Etats composant le bloc). Il y a effet de création de commerce, d’après le modèle Viner, lorsque, suite à une intégration, les échanges entre les Etats formant le nouveau bloc commercial, augmentent significativement dans le temps. Cette création du commerce intrazone, favorisée, entre autre, par des accords préférentiels régionaux, peut malheureusement entraîner dans certains cas la destruction partielle ou totale du commerce avec le reste du monde (effets de détournement) 4. Or, pour que le bien-être collectif de la zone augmente avec la coopération régionale, il faut que les effets de création soient importants et les effets de détournement faibles (Siroën, 2004). Vu autrement, cela signifie qu’il ne faut pas limiter les choix des consommateurs pour ne pas biaiser le welfare régional. D’ailleurs sur ce point, Dixit et Stiglitz (1977) montrent remarquablement que l’élargissement de l’assiette des choix accroît la satisfaction du consommateur. Dès lors, l’union sud-africaine, en même temps qu’elle crée un cadre La définition que Krugman attribue à une zone naturelle est qu’elle permet, en absence de barrières aux échanges et d’accords de préférence, une meilleure intensité des échanges au sein de la dite zone qu’avec le reste du monde. 4 Voir Siroën (2004,pp 26-49) pour un développement analytique approfondi sur les effets de création et de détournement du commerce suite à une intégration commerciale régionale. L’auteur reprend une revue de la littérature succincte sur le sujet. 3 « dynamique » d’échanges entre les Etats, ne doit pas constituer un obstacle majeur aux échanges avec le reste du monde. C’est qui n’est d’ailleurs pas le cas, puisque d’après le graphique1, si la SADC « crée » du commerce entre les Etats la composant, ce n’est pas pour autant qu’elle en détruit avec le reste du monde. Les effets de création sont vérifiés et n’entraînent aucun impact négatif pouvant se traduire par des effets de détournement du commerce avec les plus importants partenaires commerciaux de la région. D’une manière théorique, l’estimation des effets de création du commerce (EC) au sein d’un bloc nouvellement établi peut se faire à partir de l’expression mathématique ci-dessous. Cette formulation intertemporelle des EC est inspirée de la méthodologie développée par la Cnuced et la Banque Mondiale largement utilisée pour estimer les retombées des accords bilatéraux et multilatéraux. (1 T1 ) (1 T0 ) (1). EC eM (1 T0 ) Où, e est l’élasticité de la demande d’importation de l’Union, M étant le volume courant des importations intrarégionale et Ti l’évolution relative des barrières tarifaires sur deux périodes, i=0,1. L’inconvénient de ce modèle est double. D’abord, hormis le fait que les EC restent proportionnels à deux variables (M et e), on remarque toutefois que le calcul de cet indicateur repose sur une base de statique comparative qui, non seulement, ne permet pas de prendre en compte des effets dynamiques, mais aussi d’élucider - théoriquement- des informations sur certaines variables. La deuxième faiblesse, du moins, de cette méthode est qu’elle ne permet pas aussi d’appréhender sur une longue période continue les effets de création de commerce d’une région, car elle considère fixe l’élasticité de demande d’importation. Si cette variable peut être stable sur une courte période, rien ne garantir sa tendance stationnaire sur le long terme. Dans la mesure où le comportement des consommateurs régionaux peut différer dans le temps. Or, si l’on s’inspire de la nouvelle théorie du commerce international concernant les effets de la création du commerce5, on peut rendre l’équation (1) plus dynamique, en endogéneisant M et en insistant sur la propension marginale à commercialiser entre les Etats membres.. Ainsi, en tenant compte de la réalité des économies en développement, on peut, par exemple, définir M comme dépendante des capacités productives des Etats plus ou moins avancés par rapport aux autres de la région (dans le cas de la SADC, on fera allusion à l’Afrique du sud et au Zimbabwe), des infrastructures favorisant les échanges et enfin, des mésententes politiques et des rivalités commerciales qui empêchent l’abolition totale des barrières tarifaires et nontarifaires dans la région. Sur ce dernier point particulier, la SADC reste un cas typique. En effet, il existe des tensions entre ces Etats qui la composent. Ces conflits entre par exemple l’Afrique du sud et le Zimbabwe ou l’Afrique du sud et la Zambie, sont explicitement dus aux barrières douanières et non-douanières que l’Afrique du sud pratique pour protéger ses industries exposées aux seuls produits concurrentiels de ses voisins. Dans la région SADC, les pays qui pratiquent des tarifs douaniers les plus élevés sont les deux pays qui dominent notre échantillon (SADC6), c’est-à-dire l’Afrique du sud et le Zimbabwe. D’un autre côté, les observations faites sur les regroupements commerciaux dans le monde montrent que les régions où un potentiel réel d’échanges existe, renforçant de surcroît l’intérêt 5 Contrairement à la théorie néoclassique (comme celle de HOS) qui explique les effets de création à partir de la concurrence pure et parfaite, et montre que ces effets de création induisent une hausse tendancielle du coût marginal à travers la production qu’ils suscitent, la nouvelle approche, quant à elle, aborde les effets de création en s’inspirant de la l’économie industrielle et l’économie géographique intégrant les externalités et le effets d’agglomération. Elle met l’accent sur les imperfections du marché, la concurrence imparfaite et l’impact des rendements croissants (provenant des économies d’échelle, de l’effet d’apprentissage, etc) pour expliquer les gains des échanges intra zone. du marché régional commun, sont des régions qui connaissent un commerce intrarégional important (tableau 3). Cette évolution des échanges intrazone reste, entre autre, expliquée par l’importance de la propension marginale que ces Etats ont à commercialiser entre eux. Cette propension marginale qui dérive du rapport entre la variation des importations intrarégionales et la production régionale (M / Y ) , conduit, si elle est significative, à une intégration économique plus porteuse d’échanges au sein de la région. Car, une intégration par le marché dépend de la potentialité commerciale intrarégionale existant avant tout processus à l’intégration. Dès lors, un dynamisme réel ou potentiel, qui se veut naturel, favoriserait davantage les gains à l’intégration, auxquels la dimension institutionnelle de celle-ci, à travers l’élaboration d’un système commun de règles et de politiques (de Melo et alii, 1993), pourrait renforcer. Les effets attendus de la création du commerce passe également par l’importance de l’élasticité de demande d’importations intrarégionale. En effet, dans le modèle classique, l’importance d’une telle élasticité favorise l’intégration commerciale (Siroën, 2004). Cette élasticité mesure la sensibilité des importations intrarégionales face au changement relatif du prix des biens produits localement. Cette variation des prix relatifs peut être due à une modification des coûts des facteurs (qui seraient croissants d’après le modèle HOS et décroissants selon la nouvelle théorie du commerce international). Les prix peuvent également être affectés par des coûts des transactions si l’effet de distance et les moyens de communications se font ressentir. Tableau2 : Commerce intra SADC en % des exportations totales Années 1970 1980 1990 1995 2000 Echanges 4,2 0,4 3,1 10,6 11,7 2001 10,3 2002 8,8 2003 22 Sources :UNCTAD Globstat pour l’année 1970 ; Manuel de statistique Cnuced 2003 pour la période 1980-2002 et SADC secretariat pour l’année 2003 Tableau 3 : Commerce intrarégional des principaux blocs au monde (valeurs des exportations en millions de dollars et en % des exportations totales de chaque bloc) ALENA(1992) UE(1957) ASEAN(1967) MERCOSUR(1994) 1980 102 218 33,6% 483 141 60,9% 12 413 17,4% 3 424 11,6% 1990 226 273 41,4% 1 022 932 67,1% 27 365 19,0% 4 127 8,9% 1995 394 472 46,2% 1 385 805 66,1% 79 544 24,6% 14 199 20,3% 2000 676 441 55,7% 1 616 964 67,2% 98059 23,0% 17 910 20,9% 2001 639 137 55,5% 1 618 192 66,6% 87 902 22,4% 15 244 17,3% 2002 612 965 56,0% 1 699 581 66,6% 94 760 22,8% 16 544 17,7% Source : Manuel de statistique Cnuced, 2003. (..) date de création des blocs Partant de ces remarques théoriques et de ces observations, on peut reformuler l’équation (1) t ainsi : ect e M (Y (t ), G(t ), T (t ))dt (2) o Avec, M(.) les importations traduisant le commerce intrarégional et dépendant dans le temps (t) des capacités productives des Etats membres l es plus avancés (Y), de l’amélioration des infrastructures commerciales (G) et des politiques commerciales internes (T). Ici, t=0 désigne le début des processus d’intégration, autrement dit la date de la création de l’union. L’évolution des EC à tout point de t serait : dECt M M M e y g dt G T Y Le point sur les variables désigne leur variation par rapport au temps. Il ressort de cette différenciation les effets de création du commerce dans le temps dépend de des différents impact marginaux que y, g et ont respectivement sur M. Bien entendu, M Y' m1 correspond à la propension marginale du commerce intrazone. M G' m2 équivaut l’impact marginal des dépenses publiques collectives en matières des infrastructures (amélioration des voies de communications, développement des projets communs de production, etc) sur le commerce régional. Et M T' m3 est l’impact marginal d’une variation d’un 1% des tarifs douaniers sur le commerce intrazone. Où 0<mi<1. En clair, ec e(m1 y m2 g m3 ) (3). Par ailleurs on peut se demander comment se manifesteraient les effets de créations si le bloc reste fermé. Considérons toujours la zone SADC6 où coexistent des pays relativement forts (Afrique du sud et Zimbabwe) avec des pays relativement faibles (Lesotho, Namibie…). Dans la somme des importations intrarégionales serait égale à celle des exportations intrarégionales. Soit, M = X (4). Si l’on décompose X, on aura des exportations venant des pays relativement forts (Xfort) et des exportations des pays relativement faibles (Xfaible). Ce qui donne : X = Xfort + Xfaible. Soit b la part des Xfort dans M. Autrement dit, l’égalité (4) devient : M= b-1Xfort (5). Avec 0<b<1. Or, Xfort dépend étroitement de la capacité productive réelle des pays relativement forts. Ainsi, Xfort = f(Y/p). p étant le prix relatif des facteurs de production. M= b-1 f(Y/p) (6). En tenant compte du temps et en introduisant (6) dans (2), ce dernier devient: t e 1 (7) ect f ( Y (Gt , Tt ))dt b o pt La fonction (7) exprime que les effets de création du commerce dans une zone commercialement intégrée et fermée dépendent des capacités productives réelles des pays dominants la région. Dans ce cas, les EC seraient d’autant plus significatifs si b est imposante dans la région. Par contre, les EC risqueraient d’être négativement affectés si les coûts de production (p) sont élevés. Ainsi, si le redéploiement de la capacité productive des Etats plus avancés se traduit par une modification à la hausse des coûts de production, celle-ci va se répercuter sur les prix des « biens régionaux ». Partant de là, les effets de création du commerce coûteront plus chers à la zone qui est en situation d’autarcie. S’il n’y a pas un support au portefeuille du consommateur, son pouvoir d’achats risquerait d’être affaibli. Si la zone est ouverte, les EC risqueraient d’être anéantis par les importations provenant de l’Etranger. D’autres enseignements à tirer de cette relation fonctionnelle sont que les pays relativement forts nécessiteraient la coopération des autres Etats pour stimuler les EC. Car, la fluidité des transactions intrarégionales dépend entre autre des mécanismes incitatifs aux échanges. Comme par exemple, la libre circulation des biens et des capitaux, le développement des projets infrastructurels communs, etc. Il faudrait insister plus sur un cadre réceptif des « biens régionaux » pour que la capacité productive réelle des Etats relativement avancés puisse jouer favorablement sur les gains de l’intégration. En d’autre terme, l’équation (7) montre que, en terme d’effet de production (ou d’effet de revenu), les économies qui, au préalable, ont une relative avance sur autres économies de la région, bénéficieraient davantage de l’intégration commerciale et de la spécialisation qui en résulterait par la suite. Cette fonction intégrante peut être exprimée d’une manière exponentielle si l’on se fie aux observations du tableau 3 et du graphique 2. Ces deux observations montrent l’évolution des échanges intrablocs. Il ressort d’après le tableau2 qu’entre 1980 et 2002, les commerces intrarégionaux ont été respectivement multipliés par 6 pour l’ALENA, par 3,5 pour l’UE, par 7,6 pour l’ASEAN et par 4,8 pour le MERCOSUR. Le graphique 1 nous livre un regain des importations intraSADC. En effet, avant la reformulation de la SADCC, c’est-à-dire avant 1992, les échanges commerciaux intraSADC étaient insignifiants. Ils représentaient en moyenne 4% du total des exportations et 2,5% du total des importations. Depuis la reformulation et l’adhésion de l’Afrique du sud, le commerce intraSADC pèse de plus en plus des parts significatives dans le volume commercial global. Cette augmentation est due en premier lieu à l’intensité des échanges entre l’Afrique du sud et la Zimbabwe. Puisqu’ils représentent à eux seuls environ 85% du commerce intraSADC. C’est l’effet gravitationnel. Comme le souligne Siroën (2004) : « deux grands pays ont davantage de chance de s’attirer que deux petit pays ». Le commerce intraSADC gravite beaucoup plus autour de ces deux Etats que les autres nations réunies. Sur le plan théorique, si l’on tient compte des effets d’incitation développés ci-dessus, la relation fonctionnelle (7) devient une fonction temporelle de maximisation sous contrainte. t 1 1 f ( Y (Gt , Tt ))e ( m1 e )t dt (8) b o pt sous contrainte des effets d’incitation de: Max ect g >0, et <0. L’équation (8) sous contraint des effets d’incitation, expliquerait au mieux, tout du moins à partir des informations qu’il dégage, les gains relatifs au regroupement commercial. La mise sous forme exponentielle de (m1 + e) est justifiée par leur impact significatif dans les échanges. Elles ont certainement une part non négligeable de l’évolution statistique du commerce intrabloc observée (tableau 2 et 3). Graphique2. Evolution en log des importations intra et hors SADC-6. 18 17 16 15 14 13 12 LNMISADC 11 LNMHSADC 1975 1979 1977 1983 1981 1987 1985 1991 1989 1995 1993 1999 1997 2003 2001 années LNMISADC= log des importations SADC-6 provenant des 12 Etats membres de la SADC. LNMHSADC= log des importations SADC-6 provenant de l’Etranger. Les effets de détournement du commerce : pourquoi ne sont-ils pas vérifiés ? Le graphique2 met en évidence une évolution non opposée entre la courbe des effets de création du commerce au sein de la SADC-6 (à travers les importations intrarégionales) et celle de la relation commerciale que les pays de notre échantillon entretiennent avec les Etats hors SADC (à travers leurs importations). En fait, depuis 1990, l’évolution des importations intraSADC-6 ne semble pas avoir des conséquences significatives sur les importations de la SADC-6 de l’Etranger, même si l’évolution logarithme de cette dernière est plus ou moins stationnaire. En effet, la définition des effets de détournement du commerce, tirée du modèle de Viner (Siroën, 2004), est qu’ils sont la conséquence du regroupement commercial des pays de l’union qui privilégie les accords préférentiels et le libre-échange. Ainsi, l’unification commerciale de la zone pousse les pays membres à limiter leurs échanges avec les pays hors zone au profit des autres pays membres. Dès lors, le commerce qui se crée dans la zone résulterait, en partie, du détournement du commerce avec les Etats hors zone. Mais, cette définition n’est pas vérifiée dans le cas de notre échantillon, du moins à partir des données statistiques à notre disposition. Car, si de 1990 à 2000, les importations intraSADC-6 ont été quintuplées, dans la même période, les importations SADC-6 de l’Etranger ont, quant à eux, été triplées. Dans ce cas spécifique, il faut dire que plusieurs facteurs expliquent la non corrélation entre les effets de création et détournement du commerce au sein de la SADC-6. D’abord, il convient de souligner les conditions pour lesquelles les effets de détournement interviennent généralement. i) La disposition. Au préalable, les Etats candidats doivent avoir une intensité d’échanges intrarégionale relativement forte. A la limite, ils constitueraient déjà une zone naturelle au sens de krugman. ii) La substitution. La zone a la capacité réelle de produire des biens similaires aux biens importés. Et ceci, tant qualitativement que quantitativement iii) La prévoyance. Eviter les effets de Stolper-Samuelson6. En effet, l’ouverture commerciale de la zone ne doit pas entraîner des coûts d’ajustement importants sur les structures productives des Etats membres. En ce sens qu’une augmentation de la production ne doit s’accompagner d’une hausse des coûts des facteurs, qui risque d’être répercutée les prix des certains biens régionaux. Cette situation peut entraîner la réduction ou le délaissement de certaines activités dans la zone du fait des coûts d’opportunité. En somme, les coûts liés à l’intégration ne doivent pas excéder les gains escomptés. iv) La préférence. La zone doit s’investir à produire des biens similaires ou différenciés dont les prix sont relativement plus bas ou proches des prix mondiaux. v) Le blocage. Si la zone forme une union douanière, les barrières tarifaires ou non tarifaires communes adressées à l’Etranger doivent être suffisamment élevées pour décourager les importations des biens concurrentiels. . Concernant les Etats de la SADC6, ils sont loin de remplir ces dispositifs. Dans la mesure où, comme nous l’avons déjà montré, ils ne constituent pas une zone naturelle au sens développé par Krugman. Ajouter à cela, ils ne peuvent substituer parfaitement ou totalement leurs importations de l’Etranger. Car, n’ayant pas la structure développée et le capital, tant humain que physique, pour produire localement les principaux biens dont ils importent. En général, le commerce intraSADC repose sur des biens de consommation et d’investissement ; des produits semi-finis et chimiques (venant essentiellement de l’Afrique du sud et, dans une moindre mesure, du Zimbabwe) ; des textiles ; des biens agricoles ; du ciment et des matières premières brutes. A l’échelle internationale, la SADC-6 exporte plus les produits de base, les textiles et quelques produits manufacturés (d’origine sud-africaine). Par contre ses importations sont essentiellement des produits sophistiqués ou technologiques, des biens d’équipements et de transports, des produits chimiques et pharmaceutiques et d’autres biens industriellement (semi)finis qui font parfois l’objet d’assemblage au niveau régional. Enfin la SADC n’est pas une union douanière. Donc, elle ne peut instaurer une tarification commune à toute importation venant de l’Etranger. Pour le moment, les pays membres ont la liberté de leur politique commerciale, même si les négociations et les accords bilatéraux prolifèrent dans la région. C’est d’ailleurs les engagements bilatéraux qui priment sur l’entente multilatérale, et de surcroît retardent l’abolition complète des barrières tarifaires et non tarifaires. Stolper et Samuelson montrent que l’ouverture économique a un coût d’ajustement social important. Ce coût se traduirait par la baisse du pouvoir d’achat, et même de la hausse du chômage, de la classe des travailleurs peu qualifiés dans un pays relativement bien doté en travail qualifié, en capital et en technologie. Autrement dit, l’intégration des pays « avancés » avec des pays « moins avancés » conduirait à l’abandon des activités à bas salaire ou intensives en main d’œuvre peu qualifiée dans les pays « avancés ». 6 4. Le bien-être social et l’intégration économique SADC6. Le modèle général. Dans un cadre général, on peut exprimer le bien-être social net pour chaque Etat (W) en fonction des retombés socioéconomique de l’intégration corrigés des externalités négatives. Ainsi, en considérant que l’amélioration du bien-être social de chaque Etat s’observe à partir de la réduction de l’écart des revenus entre les deux extrêmes de ménages (les plus riches et les plus pauvres) mesuré par l’indice de Gini, le W serait sous la forme d’une fonction CES : 1 I min Ginii ,t 1 ( i ,t i ,t ) Z i ,t ( sadc ) i 1 Zi étant les facteurs économiques liés à la création de la SADC, comme les effets de création et de détournement du commerce, les investissements étrangers et les aides au développement favorisés par la crédibilité du bloc austral, l’ouverture au nouveau marché, etc. ( i,t - i,t ) est le gain marginal net affecté a chaque variable Zi en temps t. Si i,t - i,t < 0, alors la variable i liée à l’intégration SADC induit plus de coûts que des gains escomptés. est la qualité de la redistribution des gains nets à l’intégration régionale de entre les ménages. Elle peut être parfaitement bonne) ou parfaitement de mauvaise qualité ( =0). En principe, si la répartition des gains nets est relativement bonne, Ginii,t tendrait manière décroissante en fonction de ( i,t - i,t ) >0 pour =1. Gini ( i,t - i,t >0) pour =1 L’approche économétrique. L’objet de cette section est de vérifier si économétriquement, depuis sa création, la SADC exerce un effet positif sur le niveau de vie des populations de la SADC6. Le test porte sur courte période de 1990 à 20037. La démarche est celle-ci. D’abord, en faisant l’hypothèse que le welfare correspond à l’amélioration de la qualité de vie qui, elle-même, dépend de l’amélioration du revenu et de la réallocation qui s’en suit, nous testons dans un premier 7 Nous étions contraint de limiter notre étude sur ce laps de temps pour de raison de la disponibilité des données statistiques. modèle les effets des relations bilatérales entre les principaux partenaires commerciaux de la région sur leur revenu par tête respectif. Le deuxième modèle vérifiera si les principaux partenaires bilatéraux bénéficient des retombés significatifs sur leur bien-être respectif de leur coopération. Pour les deux modèles, nous nous inspirerons de l’approche gravitationnelle8. Généralement utilisée pour expliquer les flux commerciaux, nous l’utilisons ici dans un cadre inversé : comment les coopérations commerciales bilatérales dans un contexte d’intégration SADC affectent les revenus par tête et le pourcentage de la population en dessous du seuil de pauvreté. Modèle 1 ln Pibp i ,t a1i a 2i ln Ebil ij,t a3i ln Pibp j ,t a 4i ln Ouv i ,t a5i ln IDE i ,t a6i stabt u i ,t Modèle 2 ln Povi ,t c1i c 2i ln Ebil ij,t c3i ln Ouv i ,t c 4i ln IDE i ,t a5i stabt dumi ,t i ,t ln Pibi est log du PIB par tête du pays i. ln Povi,est log du taux de la population en dessous du seuil de pauvreté dans la pays i. ln Ebilij est log des échanges bilatéraux entre i et j (création de commerce entre i et j depuis la naissance du bloc SADC). ln Pibpj est log du PIB par tête du pays j : le principal partenaire commercial de i dans la région SADC. ln Ouvi est log du commerce hors SADC de i (dans le cas où l’effet de détournement n’existe pas). Autrement dit, Ouvi est le taux d’ouverture économique hors SADC du pays ( X M )Totali,t ( X M ) int raSADC i,t i. Ouv i PIBi ,t (X+M)totalei et (X+M)intraSADCi sont respectivement le commerce totale et intrasadc du pays i. ln IDEi est log du stock des investissement directs étrangers qu’aurait bénéficié le pays i grâce à l’existence du bloc SADC. Car si l’on en croit de Sousa et Lochard (2004), « l’intégration économique confère une opportunité d’attraction puisque l’IDE est une possibilité pour les pays non membres de pénétrer le marché commun, en établissant des filiales dans certains pays membres ». Sachant que l’Afrique australe est une région relativement instable au niveau sociopolitique, nous introduisons une variable mesurant la stabilité moyenne de la région. Cet indice est calculé à partir des classification internationale de Gleditsh et Ward (1999) sur les niveaux de démocratie dans le monde et des données de base POLITY IV. Dumi est la caractéristique de chaque type de coopération ou de chaque pays. Cette variable muette peut également désigner le début des coopérations privilégiées entre les deux Etats ou l’entrée en vigueur des accords SADC. Elle vaut 1 s’il existe un fait caractéristique et 0 sinon. ui et i sont des facteurs résiduels respectivement de deux modèles. Les deux modèles sont définis en tenant compte du temps. L’estimation de ces deux modèles porte sur 6 pays de la SADC pris individuellement et repose sur des données statistiques tirées dans IMF international financial Statistics et Contrairement à l’approche traditionnelle du modèle de gravité, nous n’intégrons pas ici les variables naturelles ou géographiques telles que la population de deux Etats, leur superficie, la distance géographique les séparant, le partage d’une frontière commune… 8 Econstats (2003) pour les PIB par tête et les IDE. Les données sur les commerces bilatéraux et internationaux proviennent du CNUCED (rapport 2004) et du secrétariat de la SADC. Enfin les indices de la population en dessous du seuil de pauvreté sont issus de base de données du PNUD et traduisent le nombre des personnes dans les ménages vivant avec moins d’un dollar $ US par jour, exprimé en parité de pouvoir d’achat. Résultats économétriques La méthode d’estimation est le moindre carré ordinaire. Afrique du Sud Variables d’explicatives Constant PIB/tête zimbabwéen Commerce bila. Zimbabwe Ouvert. écoq. hors SADC IDE Stabilité reg. SADC R2 R2ajusté DW Modèle1 Coef estim. -6,573 0,072 0,569 -0,775 0,070 -0,0268 Modèle2 t-student -1,493 1,137 3,603 -4,516 1,137 -0,664 Coef estim. 15.17581 t-student 0.673 -0,11146 0,10410 -0,46156 0,25383 -0,130 0,116 -0,734 0,779 0,918 0,868 1.7475 0.3071 -0.1260 2.553687 p-valeur F 0,00036(5%) 0.63334 Botswana Modèle1 Modèle2 Variables d’explicatives Constant PIB/tête moyen SACU Commerce bila. SACU Ouvert. écoq. hors SADC IDE Stabilité reg. Dum2 R2 R2ajusté DW Coef estim. -4,172 0,467 -0,071 -0,344 0,467 0,015 t-student -1,378 3,578 -1,348 -1,709 4,658 1,019 Coef estim. 2,37703 t-student 0,364 0,08201 -0,07654 -0,02977 -0,10017 0,04983 0,738 -0,224 -0,130 -2,362 0,367 0,922 0,874 2,97 0,7978 0,6714 p-valeur F 0,000(5%) 0,011(5%) Lesotho Modèle1 Modèle2 Variables d’explicatives Constant PIB/tête moyen SACU Commerce bila. SACU Ouvert. écoq. hors SADC IDE Stabilité reg. SADC AGOA act R2 R2ajusté DW p-valeur F Coef estim. -4, 218 1,277 -0,107 -0,072 0,143 -0,045 0,033 t-student -1,663 8,872 -0,712 -1, 383 1,194 -0,856 0,535 Coef estim. 5,331 t-student 0,450 -0,2973 -0,2428 0,23271 -0.1345 -0,728 -1,171 0,456 -0.530 0,955 0,918 2,71 0,7346 0,4250 2,759174 0,00021(5%) 0,15614(5%) Namibie Variables d’explicatives Constant PIB/tête Afrique. Sud Commerce bila. Afriq Sud Ouvert. écoq. hors SADC IDE Stabilité reg. SADC R2 R2ajusté DW p-valeur F Swaziland Variables d’explicatives Constant PIB/tête Afriq. Sud Commerce bila. Afriq. Sud Ouvert. écoq. hors SADC IDE Stabilité reg. AGOA act R2 R2ajusté DW p-valeur F Zimbabwe Variables d’explicatives Constant PIB/tête Afriq. Sud Commerce bila. Afriq. Sud Ouvert. écoq. hors SADC IDE Stabilité reg. SADC Dum2 Dum3 R2 R2ajusté DW p-valeur F Modèle1 Coef estim. 6,675 0,889 -0,310 -0,150 0,0023 0,0433 Modèle2 t-student 2,529 13,002 -2,443 -1,895 0,045 3,248 Coef estim. 1.83618 t-student 0.258 -0,35553 0,06522 0,43746 0,05647 -0,20306 -1,018 0,344 2,249 1,528 -2,151 0,97 0,96 1,548 0,7001 0,3503 2,2533 0,0000(5%) 0.20811 (5%) Modèle1 Modèle2 Coef estim. 2,404 0,567 0,075 -0,07 -0,068 -0,007 t-student 0,562 4,596 0,422 -0,516 -0,922 -0,210 Coef estim. -1,67763 t-student -0,337 0,41904 -0,17050 -0,22661 -0,14266 -0,26297 1,882 -1,017 -2,671 -3,418 -2,301 0,758 0,607 2,280 0,7988 0,6730 2,140662 0,02222(5%) 0,01137(5%) Modèle1 Modèle2 Coef estim. 15,835 0,931 -0,190 -0,868 -0,724 0,399 0,178 t-student 1,202 2,028 -0,314 -7,363 -2,765 2,209 0,864 Coef estim. 19,509 t-student 3,467 -0,76668 -2,829 0,34762 0,54483 0,40832 1,977 2,920 2,312 0,916 0,845 2,75 0,8034 0,6349 1,701 0,00181(5%) 0,02995(5%) Les résultats qui se dégagent de ces différents tests sont étonnants dans leur ensemble. Autrement dit, les retombés issus des commerces bilatéraux (ou de coopérations bilatérales) intraSADC ne semblent pas permettre aux Etats membres d’améliorer la situation socioéconomique de leur population respective. La faiblesse de l’intensité commerciale intraSADC semble être une explication non négligeable à ce manque de dynamisme concernant le bilatéralisme régional. Toute fois, quelques résultats sont intéressants à interpréter. D’après, l’estimation du modèle 1, il apparaît une relation significative entre les PIB par tête des principaux partenaires bilatéraux (sauf pour le cas de l’Afrique du Sud). En effet, à l’exception de celui de l’Afrique du Sud, le revenu par tête du partenaire principal dans la région est significativement différent d zéro. En poussant plus loin l’analyse, cela semble dire que lorsque deux pays ont des relations (commerciales) soutenues dans la région, le pays dont le PIB par tête est supérieur tirerait vers le haut celui de son partenaire. La vérification empirique est telle que si le PIB par tête de l’Afrique du Sud explique positivement celui de son principal partenaire régional qui est le Zimbabwe dont le PIB par tête est inférieur, la relation inverse ne semble pas être vérifiée. Egalement, la Namibie dont l’Afrique du sud est le principal partenaire commercial régional, a un PIB par tête positivement expliqué par celui de son principal partenaire. Alors même que, entre les deux, la réciproque n’est non plus observée. Il semble exister un effet de sens unique lorsque l’écart de richesse entre les principaux partenaires bilatéraux est élevé. En fait, l’explication que l’on pourrait apporter à cela est que, c’est le revenu par tête le plus faible entre les deux qui bénéficie davantage de la coopération bilatérale. C’est pourquoi, lors d’un test économétrique de ce genre, ce revenu a plus de probabilité d’être expliqué par son « binôme supérieur» que d’expliquer le « binôme supérieur ». Ce dernier point nous conduit à l’interrogation suivante : Lors d’une intégration régionale avec des Etats relativement moins avancés, comment se comporte alors le revenu des Etats relativement avancés ? Si l’Afrique du Sud semble tirer vers le haut le revenu par tête de ses partenaires commerciaux intraSADC6 grâce à sa richesse intérieure, en revanche il semble être le seul à bénéficier davantage des effets de création du commerce intraSADC6. D’après le test, il est le seul pays de la SADC6 dont la variable « échanges bilatéraux » affecte positivement le revenu par tête. Ce résultat spécifique conforte notre équation 7, qui justifiait qu’en terme d’effet de production, les économies qui, au préalable, ont une relative avance sur les autres économies de la région, bénéficieraient davantage de l’intégration commerciale. Mais ce gain commercial que semble bénéficier l’Afrique du sud est redistribué, en partie et d’une manière indirecte, entre les revenus par tête de ses partenaires bilatéraux. La partie étonnante de cette étude est le signe ou l’absence en terme de signification des variables d’ouverture économique hors SADC et des IDE. En effet, on sait pertinemment que la zone australe est la principale destination des investissements étrangers en Afrique subsaharienne (Goldstein, 2004) et qu’elle est très dépendante de l’économie mondiale et ne détruit pas le commerce avec le reste du monde (la région vit des exportations des matières premières). Or, dans notre estimation, les seuls pays (Afrique du Sud et Zimbabwe) qui justifient un coefficient d’ouverture significativement différent de zéro, sont affectés négativement au niveau de leur revenu par tête respectif. Quant aux IDE, ils sont corrélés positivement pour les revenus par tête botswanais et namibien et négativement pour celui du Zimbabwe. La richesse par tête issue des coopérations bilatérales reste néanmoins, pour certains, sensiblement l’évolution sociopolitique de la région. En effet, pour les pays comme le Zimbabwe et la Namibie, la variable « stabilité régionale » a un coefficient significativement différent de zéro et de signe positif. Mais, pour l’Afrique du sud, elle de signe négatif. La stabilité régionale aurait des effets asymétriques L’estimation du modèle2 laisse très peu satisfaisante. Car, les coopérations bilatérales privilégiées dans la région SADC n’affecterait pas significativement le bien-être social des Etats respectifs. Pour chaque Etat de notre échantillon, les échanges commerciaux avec son principal partenaire de la région ne contribue pas significativement à améliorer le pourcentage de sa population vivant en dessous du seuil de pauvreté. Il va sans dire que les Etats gagnent davantage de leurs échanges sur la scène mondiale que régionale. Hormis le fait que le commerce intraSADC n’est pas fortement intensifié, d’autres explications semblent justifier ce résultat. D’abord, le fait qu’il n’ y ait pas de libre circulation des personnes dans la région pénalise l’ajustement du marché du travail régional, et se traduirait par un manque à gagner pour une bonne tranche de la population à l’immigration. Ensuite, les rapports bilatéraux privilégiés entre la plupart des Etats SADC fragmente le potentiel commercial et économique de la région. C’est d’ailleurs le cas de la SACU (Union douanière entre l’Afrique du Sud, le Botswana, la Namibie, le Lesotho et le Swaziland). Ces Etats bénéficient d’une protection commune assortie de compensations financières. Or ce principe de compensations est remis en cause par la SACU hors Afrique du sud. Ces pays estiment que la croissance plus rapide de leur PIB justifierait une hausse de la compensation à leurs consommateurs, et accusent l’Union douanière d’avoir freiné leur industrialisation (les conglomérats décourageraient les implantations étrangères). Conclusion L’objet de ce papier est d’étudier l’impact de l’intégration SADC sur le bien-être de certains Etats membres. En partant d’une logique simple, le but est de voir si les facteurs qui riment avec l’intégration commerciale et économique affectent significativement le revenu par tête et le pourcentage de la population en dessous du seuil de la pauvreté. Théoriquement les pays qui ont une relativement avance sur les autres membres de la région, devraient davantage bénéficier des gains à l’intégration. Cette approche analytique semble être appuyée par l’approche empirique. En effet, depuis la création SADC, l’Afrique du sud bénéficie des effets de création du commerce qui s’en suit. Elle est la seule dont le revenu par tête est expliqué par ce facteur lié à l’intégration. Par ailleurs son revenu par tête explique ceux de ses partenaires bilatéraux. Semble t-il qu’il y’ a un effet de redistribution des gains. Reste à savoir si cet effet est équitable. Enfin, malgré le fait que le commerce intraSADC6 soit faiblement intensifié, il ne contribue pas à diminuer significativement le nombre des populations vivant avec moins d’un dollar US par jour dans les six pays, à cause de l’asymétrie des coopérations et de l’immobilisme du facteur travail dans la région. Ne serait-il plus avantageux pour la région de se lancer davantage dans des accords multilatéraux que bilatéraux. Bibliographie Aghion Ph et Williamson, J.G.(1998), Growth, inequality and globalization: theory, history and policy, Cambridge University Press. Cardebat, J-M., (2002), La mondialisation et l’emploi, Paris, éd. La Découverte. Chauvin, S. et Gaulier, G. 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