A qui profite l`intégration économique de la SADC

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A qui profite l’intégration économique SADC : Une approche théorique et empirique.
Par Opara Opimba Lambert, doctorant rattaché à la Chaire Jean Monnet, l’Université
Montesquieu Bordeaux4.
Résumé : A partir d’un modèle de gravité inversé et réduit, nous montrons comment les
coopérations bilatérales (échanges commerciaux bilatéraux) affectent le bien-être social des
Etats membres d’une même zone à travers leur revenu par tête et le pourcentage de leur
population vivant en dessous du seuil de pauvreté. Dans le cas de la SADC6, les relations
bilatérales privilégiées dans la régions ne contribuent pas significativement à améliorer le
bien-être des Etats coopérants.
1. Introduction.
L’un des grands défis auxquels les pays africains sont confrontés en ce vingt-et-unième
siècle est, à la fois, de réussir à créer des blocs économiques et monétaires pouvant leur
permettre de réduire le degré de marginalisation dont ils sont victimes à l’échelle mondiale,
et de promouvoir leur développement socio-économique et institutionnel durable. Dans une
certaine mesure, ce double objectif peut se rapporter en un seul, si l’on considère qu’une
bonne intégration économique accélère la dynamique de la productivité régionale. Une telle
ambition nécessite des mesures d’engagement fermes et une sérieuse prise de conscience en
matière de coopération entre les Etats africains. D’ailleurs, ces Etats ne sont pas en marge de
l’évolution actuelle du régionalisme. Mais la politique de régionalisation en Afrique souffre
d’un sérieux problème d’application des textes régissant les accords passés entre membres
d’une région. Si théoriquement il existe une franche volonté de la part des dirigeants africains
de vouloir transformer leurs régions respectives en zone de libre-échange et de coordonner
leurs politiques économiques, force est de constater que la réalité nous livre un autre scénario
très éloigné du cadre théorique défini. Les raisons à cela sont multiples. Parmi celles-ci il y a :
(i) la faible intensité d’échanges commerciaux formels intra-africains ; (ii) les structures
productives disproportionnées entre les Etats membres d’une même région favorisent les
asymétries des gains considérables auxquels il est difficile de mettre en place un système de
compensation entre les gagnants et les perdants (P. et S. Guillaumont,1993); (iii) les conflits
politiques et les luttes de leadership entre les Etats d’un même ensemble économique tendent
à fragiliser l’optimalité de l’intégration de ces Etats; (iv) la faible incitation et la moindre
motivation administrative à faire appliquer les obligations coopératives régissant les accords.
Depuis la fin des années 80, les enjeux de l’intégration ont repris un regain d’intérêt en
Afrique, poussant ainsi la création de certains blocs comme la SADC (Southern African
Development Cooperation). La SADC, créée en 1992 en remplacement de la SADCC, est un
regroupement économique des 12 pays d’Afrique australe dont l’objet est de créer une zone
de libre échange entre les Etats membres d’ici 2015. Au même titre que les autres blocs
régionaux, elle s’engage à tirer vers le haut la productivité des économies très peu
complémentaires de ces pays. En effet, les structures économiques de ces différents pays
membres restent asymétriques : les pays relativement plus « avancés » (l’Afrique du sud et
l’Ile Maurice) s’intègrent avec les moins avancés ; d’où l’intérêt de ce papier de s’intéresser à
l’asymétrie des gains de coopération économique dans un tel cas d’intégration comme l’ont
fait Ph. Cour et F.Rupprech (1996) pour le cas de l’ALENA. La question principale est de
savoir à qui profite le plus cette intégration australe. Comment le bien-être des Etats –à travers
l’indice de la population en dessous du seuil de la pauvreté (de chaque Etat)- se comporte t-il
face à certains facteurs ‘‘associés’’ à la création de la SADC (effet de création et / ou de
contournement du commerce, l’ouverture commerciale extérieure, l’apport des
investissements directs étrangers)?
Cette problématique s’inspire de l’hypothèse selon laquelle la finalité des effets de gains à
l’intégration doit s’observer sur le développement humain. Ce pourquoi, nous avons opté pour
l’indice de la population nationale vivant en dessous du seuil de pauvreté 1 dans la région
SADC pour apprécier les effets des coopérations économiques et commerciales sur le bienêtre social respectif de chaque Etat.
Nous avons pris un échantillon que nous qualifions de SADC-6 qui regroupe les six Etats des
douze de la SADC (Afrique du sud, Botswana, Lesotho, Namibie, Swaziland et Zimbabwe).
Après avoir montré que l’effet de création du commerce SADC6 ne découle pas de l’effet de
contournement de son commerce avec les régions hors SADC (partie 3), nous montrerons à
partir d’un modèle gravitationnel réduit2 que, (i) s’il existe une relation économétrique entre
les PIB par tête des principaux partenaires bilatéraux de la région (sauf pour l’Afrique du
sud), en revanche, (ii) leur coopération respective -depuis la création de la SADC- ne semble
pas affecter, d’une manière positive et significative, le nombre de la population en dessous du
seuil de pauvreté de chaque Etat (partie 4). Mais avant, faisons une bref rappel des aspects
socioéconomiques de la SADC-6.
1
Nous nous référons ici aux données et à la définition du PNUD, en considérant le seuil de la pauvreté
monétaire, c’est-à-dire le pourcentage de la population annuel dans les ménages vivant avec moins d’un dollars
US par jour en parité de pouvoirs d’achat.
2
Nous empruntons l’approche gravitationnelle non pas pour expliquer les échanges commerciaux bilatéraux,
mais pour une démarche inversée. C’est-à-dire, voir dans quelle mesure les relations commerciales bilatérales
affectent les indices de la population en dessous du seuil de pauvreté de chaque Etat de l’échantillon.
2. Un mot sur la SADC6
Graphique1.
évolution des taux de croissance SADC6
15
Afrique du Sud
10
20
02
20
00
19
98
-5
19
96
Namibie
19
94
0
19
92
Lesotho
19
90
taux
Bostwana
5
Swaziland
Zimbabwe
-10
années
Source : élaborés à partir des données de IMF international financial statistic
Le tableau 1 montre une évolution différenciée des certains taux de croissance des Etats de la
SADC6 qui peut s’expliquer par plusieurs facteurs tant structurels que conjoncturels. Ces
facteurs sont regroupés pour chaque Etat dans le tableau sommaire ci-dessous.
Tableau 1. Les caractéristiques générales de la SADC-6.
SADC6
Natures
exportations
Botswana
Objectif : profiter au
maximum des profits
de la mondialisation
Diamants
Cuivre
Nickel
soda
Lesotho
Une économie tenue
par la forme fragile de
la manufacture et des
aides internationales
importations
Machine,
équipement de
transport
Nourriture,
boissons
(beverage)
Principaux partenaires
exportations
importations
EU
SACU
Zimbabwe
SACU
EU
Zimbabwe
Biens manufacturés
Machines,
équipements de
transport,
nourriture et
animaux
Amérique du
Nord
SACU
EU
Asie
SACU
Asie
EU
Amérique du
Nord
Namibie
L’avantage comparatif
semble se jouer sur
l’agriculture, colonne
vertébrale de
l’économie
Diamants
Métaux
Uranium
Biens manufacturés
poissons
(2000)
Afrique du
Sud
Allemagne
U.S.A.
France
Russie
Afrique duSud
Priorité
gouvernementale :
lutter contre la
pauvreté et les
inégalités
Bijouteries et
pierres précieuses
Machines et
équipements de
transport
Métaux de base
(métallurgie)
(2000)
Royaume-Uni
Afrique du Sud
Espagne
France
Suisse
Belgique
Italie
Allemagne
Japon
(2002)
U.S.A.
Royaume-Uni.
Allemagne
Japon
Pays bas
Belgique
Machines et
équipements de
transport
Produits
chimiques
Minerais
Textile
(2002)
Allemagne
U.S.A.
U.K.
Arabie
Saoudite
Japon
Particularités et enjeux
Les institutions existent, reste à savoir leur efficacité.
• Un des plus faibles taux d’imposition de la région (15% sur les
compagnies manufacturières)
•Bénéficie des effets industriels de l’AGOA act (système de
préférences généralisées qui lui permet d’accroître son champ
d’exportation aux USA
•Le pays dépend énormément des aides internationales.
•Le pays possède un gros potentiel de minerais faiblement
exploités faute des investisseurs.
•Le gouvernement encourage les sociétés privées à s’intéresser à
l’industrie minière.
•Les institutions accompagnent les firmes nouvellement installées
(comme la LNDL qui a aidé 21 firmes entre 2000 et 2001)
•3ème exportateur des textiles aux USA (grâce à l’AGOA act)
•Ascendant du secteur manufacturier
•L’agriculture et les mines tiennent l’économie.
•Contrairement aux autres Etats, l’avantage comparatif namibien
provient beaucoup plus de la diversité du secteur agricole.
•70% de la population vit avec des revenus tirés de l’activité
agricole [mais leur contribution ne représente que 6,7 % du PIB
(2002)]
•L’agriculture a une structure dualiste : 41% des terres nationales
sont utilisées par le secteur communal alors que 44% sont détenues
par le secteur commercial qui domine sur la production nationale.
•Est l’économie la plus avancée en Afrique noire.
•Son système financier (marché boursier) fait partie du Top 15
mondial.
•Considérée comme une économie émergente au monde, l’Afrique
du Sud est mondialement compétitive dans l’exportation des biens
et la production des biens à forte valeur ajoutée.
•La recherche et développement a une place de plus en plus
Swaziland
Objectif : tout faire
pour attirer les IDE.
Une économie tournée
largement vers
l’exportation = 70%
PIB
Minerais
Produits chimiques
Nourriture,
beverage et tabac
Produits végétaux
Métallurgies
Italie
Zimbabwe
Mozambique
Chine
France
Iran
Italie
Biens manufacturés
(textile, sucres, …)
Produits chimiques
et dérivés
Tabac
Machines et
équipements de
transport
Biens
manufacturés
Food et
Produits
chimiques
Carburant
Articles
manufacturés
Afrique du Sud
Mozambique
Reste de la
SADC
U.S.A.
Royaume-Uni.
France
Afrique du
Sud
Japon
Royaume-Uni
Singapour
U.S.A.
significative dans les budgets annuels de l’Etat. L’accent est mis
sur la recherche en santé, en industries biotechnologiques etc…
•D’importants moyens sont mis en place pour attirer des
investissements étrangers. D’ailleurs l’Afrique du sud est la
première destination en Afrique des capitaux étrangers.
• Le développement des PME est l’un des objectifs de la politique
économique. L’Etat accorde certains avantages fiscaux à leur
émergence.
•Une petite économie largement dépendante de l’économie
mondiale.
•L’agriculture reste la principale ressource d’exportation.
•AGOA act contribue à développer l’industrie textile.
•Durant les années 80, l’économie a connu un boom d’IDE qui a
eu des effets positifs sur la croissance économique. Cet afflux des
IDE dans les années 80 a été favorisé par des sanctions
internationales contre l’Afrique du Sud.
•Mais depuis la fin de l’apartheid, le taux de croissance connaît
une diminution de sa tendance, à cause d’un effet de réallocation
d’investissement en Afrique du Sud.
•Déficit public accru.
Zimbabwe
L’agriculture est le
socle de l’économie et
fait l’objet d’un acte
constitutionnel.
•Les réformes.ont
conduit à une réaction
violente de la
communauté
internationale qui a
pris des mesures de
représailles virulentes
à l’encontre du pays.
comme l’application
des tarifs des douanes
par les USA et
l’exclusion du AGOA
Act.
•Tabac brut
•Or et diamants
et autres
minerais
•Produits
alimentaires
Textiles
•Produits
chimiques
•Carburants et
électricité
• Machineries et
équipements de
transport
• Biens
manufacturés
Afrique du Sud
Japon
Hollande
Allemagne
U.K.
Chine
Malawi
Afrique du Sud
Mozambique
Allemagne
Royaume-Uni
Botswana
Inde
chine
•Une économie relativement sophistiquée possédant le 2nd marché
boursier en Afrique sub-saharienne
•Actuellement le pays traverse de graves difficultés socioéconomiques à cause de la politique de la réallocation des terres
cultivables entamée par le président MUGABE qui pourrait être
inspirée par d’autres pays de la région comme la Zambie. Car le
Zimbabwe est le premier pays africain à voir véritablement engager
des réformes foncières en expropriant une partie de la population
au profit d’une majorité.
•Depuis la mise en pratique de cette politique de la réallocation des
terres, qui a profondément bouleversé les normes économiques du
pays, le PIB réel a considérablement chuté. Ainsi en 2003, le pays
occupait la 145ème place de l’IDH.
• Le Zimbabwe tente difficilement de nos jours de satisfaire à son
autosuffisance alimentaire alors que c’était une fonction que le
secteur agricole assurait jadis.
•Cette politique n’a pas seulement affecté les performances du
secteur agricole, elle a aussi affecté négativement le secteur de la
manufacture
•De plus, l’environnement international n’a pas apprécié le
changement politique intervenu dans le pays, ce qui semble
expliquer le déclin des investissements internationaux dans le pays
entraînant par la suite la faible performance du secteur industriel
comme le textile (voir schéma ci-dessous).
Réformes
Réformesagraires
agraires
Fin
Findes
des
coopérations
coopérations
avec certains
avec
certains
Etats européens
Etats
européens
Réactions
internationale
Réactiondedelalacommunauté
communauté
internationale
Déclin
IDE
Déclindes
des
IDE
Exclusion
l’AGOA
actact
Exclusiondede
AGOA
Baisse des activités industrielles et agricoles
zimbabweenne
Augmentation du tarif des douanes
3. Y’a-t-il des effets de création ou de détournement depuis la mise en place de la SADC
(cas de la SADC6) ?
La SADC et les effets de création du commerce
La SADC regroupe des Etats très peu complémentaires, mais qui regorgent d’énormes
potentiels économiques. Ces Etats sont définis par les mêmes structures économiques hormis
l’Afrique du sud, et donc, ont cette nature de commercialiser entre eux. Mais la SADC est
loin d’être un bloc naturel au sens de Krugman (1991b)3. Car, elle dépend énormément des
relations commerciales et d’autres types de coopérations entretenues avec les régions
développées (comme l’Union Européenne et les Etats-Unis). D’un autre côté, la SADC
pourrait être une zone naturelle dans le cadre des échanges agricoles et textiles. Parce que les
Etats qui la composent sont, pour une bonne partie, des Etats où l’agriculture domine dans
leur PIB respectif (Namibie, Swaziland Zimbabwe) (i). Et aussi, parce que, grâce au
partenariat avec les Etats-Unis, à travers l’AGOA act, le textile est entrain d’évoluer
industriellement dans certains pays comme le Swaziland ou le Lesotho qui était en 2000 le
troisième exportateur du textile aux USA (ii).
L’intérêt de cette section est de montrer si la SADC « crée » du commerce entre les Etats de la
SADC-6. Autrement dit, de voir s’il existe des effets de création comme la théorie du
commerce international le démontre dans la cadre des coopérations commerciales et
économiques (Viner 1950, DeMelo Siroën 2004). En effet, plusieurs effets sont attendus
lorsque des pays appartenant à une zone géographique décident de se regrouper pour
constituer une organisation commerciale régionale. Ainsi, plusieurs modèles comme ceux que
l’on peut considérer comme des modèles traditionnels du commerce international (la théorie
des avantages comparatifs de Ricardo, le modèle de Viner et le modèle Heckscher-OhlinSamuelson), et ceux qui font actuellement l’objet de leur dépassement que l’on désigne par la
terme de la nouvelle théorie du commerce international défendue par Krugman et alii, ont
essayé de mettre en évidence les retombées d’une telle intégration sur le bien-être collectif.
Ces modèles, bien que reposant sur des structures robustes et faisant l’objet d’une grande
pertinence, doivent néanmoins être pris avec précaution. Car, les effets d’une régionalisation
commerciale peuvent être contradictoires et dépendants de la spécificité des régions
(complémentarité ou substituabilité des Etats composant le bloc).
Il y a effet de création de commerce, d’après le modèle Viner, lorsque, suite à une
intégration, les échanges entre les Etats formant le nouveau bloc commercial, augmentent
significativement dans le temps. Cette création du commerce intrazone, favorisée, entre autre,
par des accords préférentiels régionaux, peut malheureusement entraîner dans certains cas la
destruction partielle ou totale du commerce avec le reste du monde (effets de détournement) 4.
Or, pour que le bien-être collectif de la zone augmente avec la coopération régionale, il faut
que les effets de création soient importants et les effets de détournement faibles (Siroën,
2004). Vu autrement, cela signifie qu’il ne faut pas limiter les choix des consommateurs pour
ne pas biaiser le welfare régional. D’ailleurs sur ce point, Dixit et Stiglitz (1977) montrent
remarquablement que l’élargissement de l’assiette des choix accroît la satisfaction du
consommateur. Dès lors, l’union sud-africaine, en même temps qu’elle crée un cadre
La définition que Krugman attribue à une zone naturelle est qu’elle permet, en absence de barrières aux
échanges et d’accords de préférence, une meilleure intensité des échanges au sein de la dite zone qu’avec le reste
du monde.
4
Voir Siroën (2004,pp 26-49) pour un développement analytique approfondi sur les effets de création et de
détournement du commerce suite à une intégration commerciale régionale. L’auteur reprend une revue de la
littérature succincte sur le sujet.
3
« dynamique » d’échanges entre les Etats, ne doit pas constituer un obstacle majeur aux
échanges avec le reste du monde. C’est qui n’est d’ailleurs pas le cas, puisque d’après le
graphique1, si la SADC « crée » du commerce entre les Etats la composant, ce n’est pas
pour autant qu’elle en détruit avec le reste du monde. Les effets de création sont vérifiés et
n’entraînent aucun impact négatif pouvant se traduire par des effets de détournement du
commerce avec les plus importants partenaires commerciaux de la région.
D’une manière théorique, l’estimation des effets de création du commerce (EC) au sein d’un
bloc nouvellement établi peut se faire à partir de l’expression mathématique ci-dessous. Cette
formulation intertemporelle des EC est inspirée de la méthodologie développée par la Cnuced
et la Banque Mondiale largement utilisée pour estimer les retombées des accords bilatéraux et
multilatéraux.
(1  T1 )  (1  T0 )
(1).
EC  eM
(1  T0 )
Où, e est l’élasticité de la demande d’importation de l’Union, M étant le volume courant des
importations intrarégionale et Ti l’évolution relative des barrières tarifaires sur deux périodes,
i=0,1.
L’inconvénient de ce modèle est double. D’abord, hormis le fait que les EC restent
proportionnels à deux variables (M et e), on remarque toutefois que le calcul de cet indicateur
repose sur une base de statique comparative qui, non seulement, ne permet pas de prendre en
compte des effets dynamiques, mais aussi d’élucider - théoriquement- des informations sur
certaines variables. La deuxième faiblesse, du moins, de cette méthode est qu’elle ne permet
pas aussi d’appréhender sur une longue période continue les effets de création de commerce
d’une région, car elle considère fixe l’élasticité de demande d’importation. Si cette variable
peut être stable sur une courte période, rien ne garantir sa tendance stationnaire sur le long
terme. Dans la mesure où le comportement des consommateurs régionaux peut différer dans
le temps. Or, si l’on s’inspire de la nouvelle théorie du commerce international concernant les
effets de la création du commerce5, on peut rendre l’équation (1) plus dynamique, en
endogéneisant M et en insistant sur la propension marginale à commercialiser entre les Etats
membres..
Ainsi, en tenant compte de la réalité des économies en développement, on peut, par exemple,
définir M comme dépendante des capacités productives des Etats plus ou moins avancés par
rapport aux autres de la région (dans le cas de la SADC, on fera allusion à l’Afrique du sud et
au Zimbabwe), des infrastructures favorisant les échanges et enfin, des mésententes politiques
et des rivalités commerciales qui empêchent l’abolition totale des barrières tarifaires et nontarifaires dans la région. Sur ce dernier point particulier, la SADC reste un cas typique. En
effet, il existe des tensions entre ces Etats qui la composent. Ces conflits entre par exemple
l’Afrique du sud et le Zimbabwe ou l’Afrique du sud et la Zambie, sont explicitement dus aux
barrières douanières et non-douanières que l’Afrique du sud pratique pour protéger ses
industries exposées aux seuls produits concurrentiels de ses voisins. Dans la région SADC, les
pays qui pratiquent des tarifs douaniers les plus élevés sont les deux pays qui dominent notre
échantillon (SADC6), c’est-à-dire l’Afrique du sud et le Zimbabwe.
D’un autre côté, les observations faites sur les regroupements commerciaux dans le monde
montrent que les régions où un potentiel réel d’échanges existe, renforçant de surcroît l’intérêt
5
Contrairement à la théorie néoclassique (comme celle de HOS) qui explique les effets de création à partir de la
concurrence pure et parfaite, et montre que ces effets de création induisent une hausse tendancielle du coût
marginal à travers la production qu’ils suscitent, la nouvelle approche, quant à elle, aborde les effets de création
en s’inspirant de la l’économie industrielle et l’économie géographique intégrant les externalités et le effets
d’agglomération. Elle met l’accent sur les imperfections du marché, la concurrence imparfaite et l’impact des
rendements croissants (provenant des économies d’échelle, de l’effet d’apprentissage, etc) pour expliquer les
gains des échanges intra zone.
du marché régional commun, sont des régions qui connaissent un commerce intrarégional
important (tableau 3). Cette évolution des échanges intrazone reste, entre autre, expliquée par
l’importance de la propension marginale que ces Etats ont à commercialiser entre eux. Cette
propension marginale qui dérive du rapport entre la variation des importations intrarégionales
et la production régionale (M / Y ) , conduit, si elle est significative, à une intégration
économique plus porteuse d’échanges au sein de la région. Car, une intégration par le marché
dépend de la potentialité commerciale intrarégionale existant avant tout processus à
l’intégration. Dès lors, un dynamisme réel ou potentiel, qui se veut naturel, favoriserait
davantage les gains à l’intégration, auxquels la dimension institutionnelle de celle-ci, à travers
l’élaboration d’un système commun de règles et de politiques (de Melo et alii, 1993), pourrait
renforcer.
Les effets attendus de la création du commerce passe également par l’importance de
l’élasticité de demande d’importations intrarégionale. En effet, dans le modèle classique,
l’importance d’une telle élasticité favorise l’intégration commerciale (Siroën, 2004). Cette
élasticité mesure la sensibilité des importations intrarégionales face au changement relatif du
prix des biens produits localement. Cette variation des prix relatifs peut être due à une
modification des coûts des facteurs (qui seraient croissants d’après le modèle HOS et
décroissants selon la nouvelle théorie du commerce international). Les prix peuvent
également être affectés par des coûts des transactions si l’effet de distance et les moyens de
communications se font ressentir.
Tableau2 : Commerce intra SADC en % des exportations totales
Années
1970
1980
1990
1995
2000
Echanges 4,2
0,4
3,1
10,6
11,7
2001
10,3
2002
8,8
2003
22
Sources :UNCTAD Globstat pour l’année 1970 ; Manuel de statistique Cnuced 2003 pour la période 1980-2002 et SADC
secretariat pour l’année 2003
Tableau 3 : Commerce intrarégional des principaux blocs au monde (valeurs des exportations
en millions de dollars et en % des exportations totales de chaque bloc)
ALENA(1992)
UE(1957)
ASEAN(1967)
MERCOSUR(1994)
1980
102 218
33,6%
483 141
60,9%
12 413
17,4%
3 424
11,6%
1990
226 273
41,4%
1 022 932
67,1%
27 365
19,0%
4 127
8,9%
1995
394 472
46,2%
1 385 805
66,1%
79 544
24,6%
14 199
20,3%
2000
676 441
55,7%
1 616 964
67,2%
98059
23,0%
17 910
20,9%
2001
639 137
55,5%
1 618 192
66,6%
87 902
22,4%
15 244
17,3%
2002
612 965
56,0%
1 699 581
66,6%
94 760
22,8%
16 544
17,7%
Source : Manuel de statistique Cnuced, 2003. (..) date de création des blocs
Partant de ces remarques théoriques et de ces observations, on peut reformuler l’équation (1)
t
ainsi : ect  e M (Y (t ), G(t ), T (t ))dt (2)
o
Avec, M(.) les importations traduisant le commerce intrarégional et dépendant dans le temps
(t) des capacités productives des Etats membres l es plus avancés (Y), de l’amélioration des
infrastructures commerciales (G) et des politiques commerciales internes (T). Ici, t=0 désigne
le début des processus d’intégration, autrement dit la date de la création de l’union.
L’évolution des EC à tout point de t serait :
dECt
 M  M  M  
 e
y
g

dt
G
T 
 Y
Le point sur les variables désigne leur variation par rapport au temps.
Il ressort de cette différenciation les effets de création du commerce dans le temps dépend de



des différents impact marginaux que y, g et  ont respectivement sur M. Bien entendu,
M Y'  m1 correspond à la propension marginale du commerce intrazone. M G'  m2 équivaut
l’impact marginal des dépenses publiques collectives en matières des infrastructures
(amélioration des voies de communications, développement des projets communs de
production, etc) sur le commerce régional. Et M T'  m3 est l’impact marginal d’une variation
d’un 1% des tarifs douaniers sur le commerce intrazone. Où 0<mi<1.




En clair, ec  e(m1 y  m2 g  m3  ) (3).
Par ailleurs on peut se demander comment se manifesteraient les effets de créations si le bloc
reste fermé. Considérons toujours la zone SADC6 où coexistent des pays relativement forts
(Afrique du sud et Zimbabwe) avec des pays relativement faibles (Lesotho, Namibie…).
Dans la somme des importations intrarégionales serait égale à celle des exportations
intrarégionales. Soit, M = X (4). Si l’on décompose X, on aura des exportations venant des
pays relativement forts (Xfort) et des exportations des pays relativement faibles (Xfaible). Ce qui
donne : X = Xfort + Xfaible. Soit b la part des Xfort dans M. Autrement dit, l’égalité (4) devient :
M= b-1Xfort (5). Avec 0<b<1.
Or, Xfort dépend étroitement de la capacité productive réelle des pays relativement forts.
Ainsi, Xfort = f(Y/p). p étant le prix relatif des facteurs de production.
M= b-1 f(Y/p) (6). En tenant compte du temps et en introduisant (6) dans (2), ce dernier
devient:
t
e
1
(7)
ect   f ( Y (Gt , Tt ))dt
b o pt
La fonction (7) exprime que les effets de création du commerce dans une zone
commercialement intégrée et fermée dépendent des capacités productives réelles des pays
dominants la région. Dans ce cas, les EC seraient d’autant plus significatifs si b est imposante
dans la région. Par contre, les EC risqueraient d’être négativement affectés si les coûts de
production (p) sont élevés. Ainsi, si le redéploiement de la capacité productive des Etats plus
avancés se traduit par une modification à la hausse des coûts de production, celle-ci va se
répercuter sur les prix des « biens régionaux ». Partant de là, les effets de création du
commerce coûteront plus chers à la zone qui est en situation d’autarcie. S’il n’y a pas un
support au portefeuille du consommateur, son pouvoir d’achats risquerait d’être affaibli. Si la
zone est ouverte, les EC risqueraient d’être anéantis par les importations provenant de
l’Etranger.
D’autres enseignements à tirer de cette relation fonctionnelle sont que les pays relativement
forts nécessiteraient la coopération des autres Etats pour stimuler les EC. Car, la fluidité des
transactions intrarégionales dépend entre autre des mécanismes incitatifs aux échanges.
Comme par exemple, la libre circulation des biens et des capitaux, le développement des
projets infrastructurels communs, etc. Il faudrait insister plus sur un cadre réceptif des « biens
régionaux » pour que la capacité productive réelle des Etats relativement avancés puisse
jouer favorablement sur les gains de l’intégration.
En d’autre terme, l’équation (7) montre que, en terme d’effet de production (ou d’effet de
revenu), les économies qui, au préalable, ont une relative avance sur autres économies de la
région, bénéficieraient davantage de l’intégration commerciale et de la spécialisation qui en
résulterait par la suite.
Cette fonction intégrante peut être exprimée d’une manière exponentielle si l’on se fie aux
observations du tableau 3 et du graphique 2. Ces deux observations montrent l’évolution des
échanges intrablocs. Il ressort d’après le tableau2 qu’entre 1980 et 2002, les commerces
intrarégionaux ont été respectivement multipliés par 6 pour l’ALENA, par 3,5 pour l’UE, par
7,6 pour l’ASEAN et par 4,8 pour le MERCOSUR.
Le graphique 1 nous livre un regain des importations intraSADC. En effet, avant la
reformulation de la SADCC, c’est-à-dire avant 1992, les échanges commerciaux intraSADC
étaient insignifiants. Ils représentaient en moyenne 4% du total des exportations et 2,5% du
total des importations. Depuis la reformulation et l’adhésion de l’Afrique du sud, le
commerce intraSADC pèse de plus en plus des parts significatives dans le volume
commercial global. Cette augmentation est due en premier lieu à l’intensité des échanges
entre l’Afrique du sud et la Zimbabwe. Puisqu’ils représentent à eux seuls environ 85% du
commerce intraSADC. C’est l’effet gravitationnel. Comme le souligne Siroën (2004) : « deux
grands pays ont davantage de chance de s’attirer que deux petit pays ». Le commerce
intraSADC gravite beaucoup plus autour de ces deux Etats que les autres nations réunies.
Sur le plan théorique, si l’on tient compte des effets d’incitation développés ci-dessus, la
relation fonctionnelle (7) devient une fonction temporelle de maximisation sous contrainte.
t
1
1
f ( Y (Gt , Tt ))e ( m1 e )t dt (8)

b o pt
sous contrainte des effets d’incitation de:
Max ect 

g >0,

et
 <0.
L’équation (8) sous contraint des effets d’incitation, expliquerait au mieux, tout du moins à
partir des informations qu’il dégage, les gains relatifs au regroupement commercial. La mise
sous forme exponentielle de (m1 + e) est justifiée par leur impact significatif dans les
échanges. Elles ont certainement une part non négligeable de l’évolution statistique du
commerce intrabloc observée (tableau 2 et 3).
Graphique2. Evolution en log des importations intra et hors SADC-6.
18
17
16
15
14
13
12
LNMISADC
11
LNMHSADC
1975
1979
1977
1983
1981
1987
1985
1991
1989
1995
1993
1999
1997
2003
2001
années
LNMISADC= log des importations SADC-6 provenant des 12 Etats membres de la SADC.
LNMHSADC= log des importations SADC-6 provenant de l’Etranger.
Les effets de détournement du commerce : pourquoi ne sont-ils pas vérifiés ?
Le graphique2 met en évidence une évolution non opposée entre la courbe des effets de
création du commerce au sein de la SADC-6 (à travers les importations intrarégionales) et
celle de la relation commerciale que les pays de notre échantillon entretiennent avec les Etats
hors SADC (à travers leurs importations). En fait, depuis 1990, l’évolution des importations
intraSADC-6 ne semble pas avoir des conséquences significatives sur les importations de la
SADC-6 de l’Etranger, même si l’évolution logarithme de cette dernière est plus ou moins
stationnaire. En effet, la définition des effets de détournement du commerce, tirée du modèle
de Viner (Siroën, 2004), est qu’ils sont la conséquence du regroupement commercial des pays
de l’union qui privilégie les accords préférentiels et le libre-échange. Ainsi, l’unification
commerciale de la zone pousse les pays membres à limiter leurs échanges avec les pays hors
zone au profit des autres pays membres. Dès lors, le commerce qui se crée dans la zone
résulterait, en partie, du détournement du commerce avec les Etats hors zone.
Mais, cette définition n’est pas vérifiée dans le cas de notre échantillon, du moins à partir des
données statistiques à notre disposition. Car, si de 1990 à 2000, les importations intraSADC-6
ont été quintuplées, dans la même période, les importations SADC-6 de l’Etranger ont, quant
à eux, été triplées.
Dans ce cas spécifique, il faut dire que plusieurs facteurs expliquent la non corrélation entre
les effets de création et détournement du commerce au sein de la SADC-6. D’abord, il
convient de souligner les conditions pour lesquelles les effets de détournement interviennent
généralement.
i)
La disposition. Au préalable, les Etats candidats doivent avoir une intensité
d’échanges intrarégionale relativement forte. A la limite, ils constitueraient déjà
une zone naturelle au sens de krugman.
ii)
La substitution. La zone a la capacité réelle de produire des biens similaires aux
biens importés. Et ceci, tant qualitativement que quantitativement
iii)
La prévoyance. Eviter les effets de Stolper-Samuelson6. En effet, l’ouverture
commerciale de la zone ne doit pas entraîner des coûts d’ajustement importants sur
les structures productives des Etats membres. En ce sens qu’une augmentation de la
production ne doit s’accompagner d’une hausse des coûts des facteurs, qui risque
d’être répercutée les prix des certains biens régionaux. Cette situation peut
entraîner la réduction ou le délaissement de certaines activités dans la zone du fait
des coûts d’opportunité. En somme, les coûts liés à l’intégration ne doivent pas
excéder les gains escomptés.
iv)
La préférence. La zone doit s’investir à produire des biens similaires ou
différenciés dont les prix sont relativement plus bas ou proches des prix mondiaux.
v)
Le blocage. Si la zone forme une union douanière, les barrières tarifaires ou non
tarifaires communes adressées à l’Etranger doivent être suffisamment élevées pour
décourager les importations des biens concurrentiels.
.
Concernant les Etats de la SADC6, ils sont loin de remplir ces dispositifs. Dans la mesure
où, comme nous l’avons déjà montré, ils ne constituent pas une zone naturelle au sens
développé par Krugman. Ajouter à cela, ils ne peuvent substituer parfaitement ou
totalement leurs importations de l’Etranger. Car, n’ayant pas la structure développée et le
capital, tant humain que physique, pour produire localement les principaux biens dont ils
importent. En général, le commerce intraSADC repose sur des biens de consommation et
d’investissement ; des produits semi-finis et chimiques (venant essentiellement de
l’Afrique du sud et, dans une moindre mesure, du Zimbabwe) ; des textiles ; des biens
agricoles ; du ciment et des matières premières brutes.
A l’échelle internationale, la SADC-6 exporte plus les produits de base, les textiles et
quelques produits manufacturés (d’origine sud-africaine). Par contre ses importations sont
essentiellement des produits sophistiqués ou technologiques, des biens d’équipements et de
transports, des produits chimiques et pharmaceutiques et d’autres biens industriellement
(semi)finis qui font parfois l’objet d’assemblage au niveau régional.
Enfin la SADC n’est pas une union douanière. Donc, elle ne peut instaurer une tarification
commune à toute importation venant de l’Etranger. Pour le moment, les pays membres ont
la liberté de leur politique commerciale, même si les négociations et les accords bilatéraux
prolifèrent dans la région. C’est d’ailleurs les engagements bilatéraux qui priment sur
l’entente multilatérale, et de surcroît retardent l’abolition complète des barrières tarifaires
et non tarifaires.
Stolper et Samuelson montrent que l’ouverture économique a un coût d’ajustement social important. Ce coût se
traduirait par la baisse du pouvoir d’achat, et même de la hausse du chômage, de la classe des travailleurs peu
qualifiés dans un pays relativement bien doté en travail qualifié, en capital et en technologie. Autrement dit,
l’intégration des pays « avancés » avec des pays « moins avancés » conduirait à l’abandon des activités à bas
salaire ou intensives en main d’œuvre peu qualifiée dans les pays « avancés ».
6
4. Le bien-être social et l’intégration économique SADC6.
Le modèle général.
Dans un cadre général, on peut exprimer le bien-être social net pour chaque Etat (W) en
fonction des retombés socioéconomique de l’intégration corrigés des externalités
négatives. Ainsi, en considérant que l’amélioration du bien-être social de chaque Etat
s’observe à partir de la réduction de l’écart des revenus entre les deux extrêmes de
ménages (les plus riches et les plus pauvres) mesuré par l’indice de Gini, le W serait sous
la forme d’une fonction CES :
1
I


min Ginii ,t  1  (  i ,t   i ,t ) Z i ,t ( sadc )
i 1


Zi étant les facteurs économiques liés à la création de la SADC, comme les effets de
création et de détournement du commerce, les investissements étrangers et les aides au
développement favorisés par la crédibilité du bloc austral, l’ouverture au nouveau marché,
etc. (  i,t -  i,t ) est le gain marginal net affecté a chaque variable Zi en temps t. Si  i,t -  i,t <
0, alors la variable i liée à l’intégration SADC induit plus de coûts que des gains
escomptés.  est la qualité de la redistribution des gains nets à l’intégration régionale de
entre les ménages. Elle peut être parfaitement bonne) ou parfaitement de mauvaise qualité
(  =0).
En principe, si la répartition des gains nets est relativement bonne, Ginii,t tendrait manière
décroissante en fonction de (  i,t -  i,t ) >0 pour  =1.
Gini
(  i,t -  i,t >0) pour  =1
L’approche économétrique.
L’objet de cette section est de vérifier si économétriquement, depuis sa création, la SADC
exerce un effet positif sur le niveau de vie des populations de la SADC6. Le test porte sur
courte période de 1990 à 20037. La démarche est celle-ci. D’abord, en faisant l’hypothèse
que le welfare correspond à l’amélioration de la qualité de vie qui, elle-même, dépend de
l’amélioration du revenu et de la réallocation qui s’en suit, nous testons dans un premier
7
Nous étions contraint de limiter notre étude sur ce laps de temps pour de raison de la disponibilité des données
statistiques.
modèle les effets des relations bilatérales entre les principaux partenaires commerciaux de
la région sur leur revenu par tête respectif. Le deuxième modèle vérifiera si les principaux
partenaires bilatéraux bénéficient des retombés significatifs sur leur bien-être respectif de
leur coopération.
Pour les deux modèles, nous nous inspirerons de l’approche gravitationnelle8.
Généralement utilisée pour expliquer les flux commerciaux, nous l’utilisons ici dans un
cadre inversé : comment les coopérations commerciales bilatérales dans un contexte
d’intégration SADC affectent les revenus par tête et le pourcentage de la population en
dessous du seuil de pauvreté.
Modèle 1
ln Pibp i ,t  a1i  a 2i ln Ebil ij,t  a3i ln Pibp j ,t  a 4i ln Ouv i ,t  a5i ln IDE i ,t  a6i stabt  u i ,t
Modèle 2
ln Povi ,t  c1i  c 2i ln Ebil ij,t  c3i ln Ouv i ,t  c 4i ln IDE i ,t  a5i stabt  dumi ,t   i ,t
ln Pibi est log du PIB par tête du pays i. ln Povi,est log du taux de la population en dessous
du seuil de pauvreté dans la pays i.
ln Ebilij est log des échanges bilatéraux entre i et j (création de commerce entre i et j depuis
la naissance du bloc SADC).
ln Pibpj est log du PIB par tête du pays j : le principal partenaire commercial de i dans la
région SADC.
ln Ouvi est log du commerce hors SADC de i (dans le cas où l’effet de détournement
n’existe pas). Autrement dit, Ouvi est le taux d’ouverture économique hors SADC du pays
( X  M )Totali,t  ( X  M ) int raSADC i,t 
i. Ouv i 
PIBi ,t
(X+M)totalei et (X+M)intraSADCi sont respectivement le commerce totale et intrasadc du
pays i.
ln IDEi est log du stock des investissement directs étrangers qu’aurait bénéficié le pays i
grâce à l’existence du bloc SADC. Car si l’on en croit de Sousa et Lochard (2004),
« l’intégration économique confère une opportunité d’attraction puisque l’IDE est une
possibilité pour les pays non membres de pénétrer le marché commun, en établissant des
filiales dans certains pays membres ».
Sachant que l’Afrique australe est une région relativement instable au niveau
sociopolitique, nous introduisons une variable mesurant la stabilité moyenne de la région.
Cet indice est calculé à partir des classification internationale de Gleditsh et Ward (1999)
sur les niveaux de démocratie dans le monde et des données de base POLITY IV.
Dumi est la caractéristique de chaque type de coopération ou de chaque pays. Cette
variable muette peut également désigner le début des coopérations privilégiées entre les
deux Etats ou l’entrée en vigueur des accords SADC. Elle vaut 1 s’il existe un fait
caractéristique et 0 sinon. ui et  i sont des facteurs résiduels respectivement de deux
modèles. Les deux modèles sont définis en tenant compte du temps.
L’estimation de ces deux modèles porte sur 6 pays de la SADC pris individuellement et
repose sur des données statistiques tirées dans IMF international financial Statistics et
Contrairement à l’approche traditionnelle du modèle de gravité, nous n’intégrons pas ici les variables naturelles
ou géographiques telles que la population de deux Etats, leur superficie, la distance géographique les séparant, le
partage d’une frontière commune…
8
Econstats (2003) pour les PIB par tête et les IDE. Les données sur les commerces
bilatéraux et internationaux proviennent du CNUCED (rapport 2004) et du secrétariat de
la SADC. Enfin les indices de la population en dessous du seuil de pauvreté sont issus de
base de données du PNUD et traduisent le nombre des personnes dans les ménages vivant
avec moins d’un dollar $ US par jour, exprimé en parité de pouvoir d’achat.
Résultats économétriques
La méthode d’estimation est le moindre carré ordinaire.
Afrique du Sud
Variables d’explicatives
Constant
PIB/tête zimbabwéen
Commerce bila. Zimbabwe
Ouvert. écoq. hors SADC
IDE
Stabilité reg.
SADC
R2
R2ajusté
DW
Modèle1
Coef estim.
-6,573
0,072
0,569
-0,775
0,070
-0,0268
Modèle2
t-student
-1,493
1,137
3,603
-4,516
1,137
-0,664
Coef estim.
15.17581
t-student
0.673
-0,11146
0,10410
-0,46156
0,25383
-0,130
0,116
-0,734
0,779
0,918
0,868
1.7475
0.3071
-0.1260
2.553687
p-valeur F
0,00036(5%)
0.63334
Botswana
Modèle1
Modèle2
Variables d’explicatives
Constant
PIB/tête moyen SACU
Commerce bila. SACU
Ouvert. écoq. hors SADC
IDE
Stabilité reg.
Dum2
R2
R2ajusté
DW
Coef estim.
-4,172
0,467
-0,071
-0,344
0,467
0,015
t-student
-1,378
3,578
-1,348
-1,709
4,658
1,019
Coef estim.
2,37703
t-student
0,364
0,08201
-0,07654
-0,02977
-0,10017
0,04983
0,738
-0,224
-0,130
-2,362
0,367
0,922
0,874
2,97
0,7978
0,6714
p-valeur F
0,000(5%)
0,011(5%)
Lesotho
Modèle1
Modèle2
Variables d’explicatives
Constant
PIB/tête moyen SACU
Commerce bila. SACU
Ouvert. écoq. hors SADC
IDE
Stabilité reg.
SADC
AGOA act
R2
R2ajusté
DW
p-valeur F
Coef estim.
-4, 218
1,277
-0,107
-0,072
0,143
-0,045
0,033
t-student
-1,663
8,872
-0,712
-1, 383
1,194
-0,856
0,535
Coef estim.
5,331
t-student
0,450
-0,2973
-0,2428
0,23271
-0.1345
-0,728
-1,171
0,456
-0.530
0,955
0,918
2,71
0,7346
0,4250
2,759174
0,00021(5%)
0,15614(5%)
Namibie
Variables d’explicatives
Constant
PIB/tête Afrique. Sud
Commerce bila. Afriq Sud
Ouvert. écoq. hors SADC
IDE
Stabilité reg.
SADC
R2
R2ajusté
DW
p-valeur F
Swaziland
Variables d’explicatives
Constant
PIB/tête Afriq. Sud
Commerce bila. Afriq. Sud
Ouvert. écoq. hors SADC
IDE
Stabilité reg.
AGOA act
R2
R2ajusté
DW
p-valeur F
Zimbabwe
Variables d’explicatives
Constant
PIB/tête Afriq. Sud
Commerce bila. Afriq. Sud
Ouvert. écoq. hors SADC
IDE
Stabilité reg.
SADC
Dum2
Dum3
R2
R2ajusté
DW
p-valeur F
Modèle1
Coef estim.
6,675
0,889
-0,310
-0,150
0,0023
0,0433
Modèle2
t-student
2,529
13,002
-2,443
-1,895
0,045
3,248
Coef estim.
1.83618
t-student
0.258
-0,35553
0,06522
0,43746
0,05647
-0,20306
-1,018
0,344
2,249
1,528
-2,151
0,97
0,96
1,548
0,7001
0,3503
2,2533
0,0000(5%)
0.20811 (5%)
Modèle1
Modèle2
Coef estim.
2,404
0,567
0,075
-0,07
-0,068
-0,007
t-student
0,562
4,596
0,422
-0,516
-0,922
-0,210
Coef estim.
-1,67763
t-student
-0,337
0,41904
-0,17050
-0,22661
-0,14266
-0,26297
1,882
-1,017
-2,671
-3,418
-2,301
0,758
0,607
2,280
0,7988
0,6730
2,140662
0,02222(5%)
0,01137(5%)
Modèle1
Modèle2
Coef estim.
15,835
0,931
-0,190
-0,868
-0,724
0,399
0,178
t-student
1,202
2,028
-0,314
-7,363
-2,765
2,209
0,864
Coef estim.
19,509
t-student
3,467
-0,76668
-2,829
0,34762
0,54483
0,40832
1,977
2,920
2,312
0,916
0,845
2,75
0,8034
0,6349
1,701
0,00181(5%)
0,02995(5%)
Les résultats qui se dégagent de ces différents tests sont étonnants dans leur ensemble.
Autrement dit, les retombés issus des commerces bilatéraux (ou de coopérations
bilatérales) intraSADC ne semblent pas permettre aux Etats membres d’améliorer la
situation socioéconomique de leur population respective. La faiblesse de l’intensité
commerciale intraSADC semble être une explication non négligeable à ce manque de
dynamisme concernant le bilatéralisme régional.
Toute fois, quelques résultats sont intéressants à interpréter. D’après, l’estimation du
modèle 1, il apparaît une relation significative entre les PIB par tête des principaux
partenaires bilatéraux (sauf pour le cas de l’Afrique du Sud). En effet, à l’exception de
celui de l’Afrique du Sud, le revenu par tête du partenaire principal dans la région est
significativement différent d zéro. En poussant plus loin l’analyse, cela semble dire que
lorsque deux pays ont des relations (commerciales) soutenues dans la région, le pays dont
le PIB par tête est supérieur tirerait vers le haut celui de son partenaire. La vérification
empirique est telle que si le PIB par tête de l’Afrique du Sud explique positivement celui
de son principal partenaire régional qui est le Zimbabwe dont le PIB par tête est inférieur,
la relation inverse ne semble pas être vérifiée. Egalement, la Namibie dont l’Afrique du
sud est le principal partenaire commercial régional, a un PIB par tête positivement
expliqué par celui de son principal partenaire. Alors même que, entre les deux, la
réciproque n’est non plus observée. Il semble exister un effet de sens unique lorsque
l’écart de richesse entre les principaux partenaires bilatéraux est élevé. En fait,
l’explication que l’on pourrait apporter à cela est que, c’est le revenu par tête le plus faible
entre les deux qui bénéficie davantage de la coopération bilatérale. C’est pourquoi, lors
d’un test économétrique de ce genre, ce revenu a plus de probabilité d’être expliqué par
son « binôme supérieur» que d’expliquer le « binôme supérieur ».
Ce dernier point nous conduit à l’interrogation suivante : Lors d’une intégration régionale
avec des Etats relativement moins avancés, comment se comporte alors le revenu des Etats
relativement avancés ?
Si l’Afrique du Sud semble tirer vers le haut le revenu par tête de ses partenaires
commerciaux intraSADC6 grâce à sa richesse intérieure, en revanche il semble être le seul
à bénéficier davantage des effets de création du commerce intraSADC6. D’après le test, il
est le seul pays de la SADC6 dont la variable « échanges bilatéraux » affecte positivement
le revenu par tête. Ce résultat spécifique conforte notre équation 7, qui justifiait qu’en
terme d’effet de production, les économies qui, au préalable, ont une relative avance sur
les autres économies de la région, bénéficieraient davantage de l’intégration commerciale.
Mais ce gain commercial que semble bénéficier l’Afrique du sud est redistribué, en partie
et d’une manière indirecte, entre les revenus par tête de ses partenaires bilatéraux.
La partie étonnante de cette étude est le signe ou l’absence en terme de signification des
variables d’ouverture économique hors SADC et des IDE. En effet, on sait pertinemment
que la zone australe est la principale destination des investissements étrangers en Afrique
subsaharienne (Goldstein, 2004) et qu’elle est très dépendante de l’économie mondiale et
ne détruit pas le commerce avec le reste du monde (la région vit des exportations des
matières premières). Or, dans notre estimation, les seuls pays (Afrique du Sud et
Zimbabwe) qui justifient un coefficient d’ouverture significativement différent de zéro,
sont affectés négativement au niveau de leur revenu par tête respectif. Quant aux IDE, ils
sont corrélés positivement pour les revenus par tête botswanais et namibien et
négativement pour celui du Zimbabwe.
La richesse par tête issue des coopérations bilatérales reste néanmoins, pour certains,
sensiblement l’évolution sociopolitique de la région. En effet, pour les pays comme le
Zimbabwe et la Namibie, la variable « stabilité régionale » a un coefficient
significativement différent de zéro et de signe positif. Mais, pour l’Afrique du sud, elle de
signe négatif. La stabilité régionale aurait des effets asymétriques
L’estimation du modèle2 laisse très peu satisfaisante. Car, les coopérations bilatérales
privilégiées dans la région SADC n’affecterait pas significativement le bien-être social des
Etats respectifs. Pour chaque Etat de notre échantillon, les échanges commerciaux avec son
principal partenaire de la région ne contribue pas significativement à améliorer le
pourcentage de sa population vivant en dessous du seuil de pauvreté. Il va sans dire que les
Etats gagnent davantage de leurs échanges sur la scène mondiale que régionale. Hormis le
fait que le commerce intraSADC n’est pas fortement intensifié, d’autres explications
semblent justifier ce résultat.
D’abord, le fait qu’il n’ y ait pas de libre circulation des personnes dans la région pénalise
l’ajustement du marché du travail régional, et se traduirait par un manque à gagner pour
une bonne tranche de la population à l’immigration.
Ensuite, les rapports bilatéraux privilégiés entre la plupart des Etats SADC fragmente le
potentiel commercial et économique de la région. C’est d’ailleurs le cas de la SACU
(Union douanière entre l’Afrique du Sud, le Botswana, la Namibie, le Lesotho et le
Swaziland). Ces Etats bénéficient d’une protection commune assortie de compensations
financières. Or ce principe de compensations est remis en cause par la SACU hors Afrique
du sud. Ces pays estiment que la croissance plus rapide de leur PIB justifierait une hausse
de la compensation à leurs consommateurs, et accusent l’Union douanière d’avoir freiné
leur industrialisation (les conglomérats décourageraient les implantations étrangères).
Conclusion
L’objet de ce papier est d’étudier l’impact de l’intégration SADC sur le bien-être de
certains Etats membres. En partant d’une logique simple, le but est de voir si les facteurs
qui riment avec l’intégration commerciale et économique affectent significativement le
revenu par tête et le pourcentage de la population en dessous du seuil de la pauvreté.
Théoriquement les pays qui ont une relativement avance sur les autres membres de la
région, devraient davantage bénéficier des gains à l’intégration. Cette approche analytique
semble être appuyée par l’approche empirique. En effet, depuis la création SADC,
l’Afrique du sud bénéficie des effets de création du commerce qui s’en suit. Elle est la
seule dont le revenu par tête est expliqué par ce facteur lié à l’intégration. Par ailleurs son
revenu par tête explique ceux de ses partenaires bilatéraux. Semble t-il qu’il y’ a un effet
de redistribution des gains. Reste à savoir si cet effet est équitable.
Enfin, malgré le fait que le commerce intraSADC6 soit faiblement intensifié, il ne
contribue pas à diminuer significativement le nombre des populations vivant avec moins
d’un dollar US par jour dans les six pays, à cause de l’asymétrie des coopérations et de
l’immobilisme du facteur travail dans la région. Ne serait-il plus avantageux pour la région
de se lancer davantage dans des accords multilatéraux que bilatéraux.
Bibliographie
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