1 LA CRISE FINANCIERE CAUSES CONSEQUENCES LEÇONS RAPPEL Le système financier (banques, établissements de crédit, Bourses) permet de trouver les fonds nécessaires, en mettant en rapport ceux qui veulent placer des fonds et ceux qui veulent les utiliser. Pour construire un logement, un particulier a besoin de fonds qu’il peut acquérir en empruntant auprès de sa banque (la banque est le premier agent financier, intermédiaire, qui reçoit l’épargne des entreprises et des ménages et qui met des fonds à la disposition des entreprises et des ménages) La banque a intérêt à évaluer correctement la solvabilité de ses clients. . Pour se développer une entreprise, a également besoin de fonds qu’elle peut obtenir en empruntant à une banque, ou en recherchant des investisseurs prêts à s’engager (sous la forme d’actions, d’obligations). L’émission de titres met en relation directe prêteurs et emprunteurs sur le marché des capitaux (la bourse). Ces titres peuvent être cédés à un prix variant selon l’offre et la demande contrairement aux créances détenues par les banques (qui ont accordé des prêts) qui ne s’effacent de leur bilan qu’après extinction de la dette. Investisseurs et vendeurs interviennent sur ces marchés via des agents : traders, agents de change qui vendent, achètent ces titres. Les innovations financières des années 1980, donnent aux banques la possibilité de se débarrasser de ces créances en les revendant à un prix inférieur à leur valeur faciale, à des investisseurs prêts à en assumer le risque. La titrisation permet de regrouper des crédits en lots, à les découper en tranches puis à les transférer à des sociétés qui les transforment en titres (obligations) pour les revendre aux fonds d’investissement. Contexte début des années 1990 : forte période de croissance, la plus élevée dans toute l’histoire de l’humanité : - amélioration du niveau de vie de la classe moyenne des pays émergents, et même réduction de la pauvreté. - Le crédit se développe : baisse des taux d’intérêt (la Banque centrale des EU (la FED) baisse son taux directeur de 6,5 % fin 2000 à 1,75 % fin 2001, à 1 % mi-2003 jusqu’à mi-2004). - Les instruments financiers se diversifient - Libéralisation des marchés financiers - Réduction du rôle de l’Etat - Flexibilité du travail Cependant des signes de craquement : - 1997 Crise asiatique (monétaire et financière). Les Chinois craignent de voir leur monnaie réévaluée. Ils commencent à acheter des dollars. De plus en plus croissance et déficits américains sont financés par l’épargne chinoise. (couple étrange « la chimérique »). - 2000 : la bulle Internet explose, le Nasdaq, qui concerne les valeurs technologiques, s’effondre. - 2001, 11 septembre au lendemain des attentats l’indice Dow Jones recule. 2 - 2002 : le courtier américain en énergie, Enron, falsifie ses comptes, les bourses sont chahutées. Les « initiés » (dirigeants des entreprises financières) réalisent d’importants profits sur un marché de plus en plus risqué Comment la crise a commencé ? - 2002 : faiblesse de la demande aux EU. Pour ne pas se lancer dans une politique des revenus, le gouvernement américain incite les acteurs de l’immobilier (notamment Freddie Mac et Fannie Mae) à prêter à des ménages modestes (surnommés « ninja » no-income, no-job, no-asset = pas de revenu, pas de travail, pas de patrimoine). C’est une chance unique, pour ces ménages d’accéder à la propriété car ils ne présentent pas assez de garanties pour accéder à un prêt normal (prime). Ces produits sont plus risqués : les « subprimes ». Les ménages américains s’endettent pour accéder à l’immobilier => hausse de la valeur de l’immobilier. Ces ménages pouvaient toujours espérer avoir d’ici là revendu plus cher leur logement ou renégocier leur prêt. La hausse du cours de l’immobilier leur donne la possibilité d’accroître leurs crédits. En cas de non remboursement, les biens immobiliers sont saisis (ils servent de garantie, d’hypothèque). L’argent facile a alimenté une flambée des prix de l’immobilier qui a permis aux ménages américains d’accroître leurs dettes au fur et à mesure que la valeur de leur patrimoine immobilier augmente. Prix de l’immobilier Vendus Taux d’intérêt Logements - La croissance mondiale reprend avec l’endettement. La demande est nourrie par l’endettement des salariés, lui-même gagé sur la valeur des biens achetés avec cette dette. Le taux d’endettement des ménages américains est très élevé. Année 2004, la FED relève le taux d’intérêt de 1 à 5 % en 2006. - Les charges de remboursement s’alourdissent, les ménages américains surendettés ne parviennent plus à payer leur maison => hausse de la vente de l’immobilier => baisse de la valeur des habitations. La valeur de leur dette devient supérieure à celle de leur maison. => saisies, les banques mettent en vente les maisons impayées, ce qui fait encore plus baisser les prix. 3 - - Eté 2007, un million d’emprunteurs perdent leur logement, le taux de non remboursement des crédits augmente fortement => chute des titres adossés à ces crédits Les établissements de crédit font faillite (2007 : banque Bear Stearns aux EU, la Northern Rock en GB, 2008 : deux organes de crédit ne peuvent plus rembourser leurs dettes : Freddie Mac et Fannie Mae, la banque Lehman Brother avoue avoir 613 milliards de dettes…). Comme les banques ne savent pas ce que leur doivent celles qui ont fait faillite, elles ne prêtent plus à personne. Les entreprises américaines ne trouvent plus de crédit. L’économie est au bord de l’asphyxie. Taux d’intérêt A VENDRE Prix de l’immobilier Logements Comment la crise s’est disséminée ? La défaillance des particuliers n’aurait dû entraîner que celle de société de crédit et des banques engagées sur ces opérations hasardeuses. Pourquoi y a-t-il eu contagion à tout le système financier ? Par le phénomène de la titrisation. En quoi consiste-t-elle ? Les banques qui accordent des crédits, au lieu de les conserver vont les transférer, surtout pour ne pas garder les plus risquées dans leur bilan. Elles découpent les créances immobilières les plus risquées, les subprimes et les regroupent avec des crédits moins risqués. Ces paquets sont ensuite vendus comme des obligations sur le marché. L’opération remporte vite un très grand succès, en raison de la rentabilité exceptionnelle promise aux acheteurs de ces titres. Tous les épargnants institutionnels du monde en veulent pour eux-mêmes et pour les placer auprès de leurs clients (banques, les grandes entreprises, les fonds de placement comme les hedge funds, les fonds souverains) et quelques très gros particuliers (George Soros). Ces subprimes titrisés se retrouvent ainsi dans les banques non américaines qui les replacent auprès de leurs clients non américains. Tous les marchés sont contaminés par un « virus invisible ». Devant ce succès, on voit se développer des titrisations de dettes de toute nature (dettes sur cartes de crédit, voiture…) sous le nom de asset-backed securities (titres adossés à des actifs). Tant que le marché de l’immobilier reste à la hausse, le virus ést inoffensif, quand le marché 4 de l’immobilier se retourne (2006-2007), les crédits deviennent « toxiques ». Mais voilà où se trouvent ces crédits douteux (problème de traçabilité)? NB. La titrisation peut être un facteur d’efficience des marchés et de la gestion des risques, en dispersant les risques parmi un grand nombre d’acteurs financiers qui sont à même de les porter. Cependant, ce ne doit pas être un moyen de se défausser des risques sur d’autres. Pour cela, il serait nécessaire que le premier créancier ne se départit pas de la totalité du risque du prêt initial. Pour vendre ces titres aussi complexes à une vaste gamme d’investisseurs, les banques avaient besoin des agences de notation. Elles sont présentes à toutes les étapes du processus de titrisation. Cependant, elles accordent trop généreusement de très bonnes notes car elles sont dépendantes, puisqu’elles sont censées noter leurs clients, d’autre part il n’est pas facile d’évaluer ces produits financiers (ainsi les titres risqués (subprime) sont parés de la même respectabilité que les placements sans risque). Effet dominos La méfiance se généralise au point que les banques cessent de se faire crédit entre elles. Face au blocage du marché interbancaire aux EU et en Europe (pénurie d’argent), les banques centrales interviennent massivement pour fournir des liquidités aux banques. Des plans de sauvetage sont mis en place Il faut éviter que le système bancaire s’effondre et avec lui l’ensemble de l’économie. Le Trésor américain, qui intervient tardivement. Le plan Paulson propose le rachat aux banques des créances douteuses. Ce plan est vivement critiqué. Il sera rejeté par le Congrés. Wall street chute. Le nouveau plan va s’inspirer du modèle anglais proposé par Gordon Brown : venir en aide aux banques menacées de faillite en injectant des fonds, en garantissant les emprunts immobiliers. La crise de liquidité se propage en Europe et en Asie. Les banques sont menacées, plusieurs sont nationalisées Les banques centrales injectent des liquidités considérables aux banques afin de leur permettre de renforcer leurs ressources et d’accorder des crédits (aux ménages, entreprises et collectivités locales). Pour relancer la consommation, l’investissement les autorités pratiquent une politique monétaire expansive : la baisse des taux d’intérêt. Reste à savoir si toutes ces mesures pour soutenir le crédit, ne seront pas bloquées par le ralentissement de la croissance et la montée du chômage. En Europe, les marges de manœuvre sont réduites par le pacte de stabilité qui définit un degré d’endettement. Aujourd’hui, le sauvetage des banques est engagé, mais sur une base nationale. La coopération internationale est inexistante. Quelles leçons tirer ? La crise financière a mis en évidence la place démesurée prise par la sphère financière dans les économies contemporaines et la faiblesse des contrôles monétaires et financiers. Elle nous montre que pour bien fonctionner le marché a besoin d’être régulé pour pallier les défaillances et rétablir une responsabilité des acteurs. Réguler la finance : un meilleur contrôle dans les banques, limiter la spéculation, s’attaquer aux paradis fiscaux, abandonner les parachutes dorés, réformer les agences de notation, réguler les fonds spéculatifs, instaurer une gouvernance de la finance mondialisée… 5 Les conséquences sur la croissance ? Si le plus gros de la crise financière est derrière nous, la crise économique vient de commencer : - croissance négative, car activité comprimée par les deux bouts - En amont : difficultés pour les entreprises à faire face à leurs besoins de trésorerie. - En aval : ralentissement du crédit des ménages (les banques prêtent moins donc les ménages consomment moins). Ils achètent moins de logement, moins de voitures…, la demande se dégrade - Les prix de l’immobilier baissent : les ménages se sentent moins riches. - Chômage en augmentation qui contribue à renforcer le ralentissement économique Inventer de nouvelles solutions ? - Dépenses pour la mutation écologique des infrastructures. - La crise a-t-elle sonné la fin d’un modèle de croissance ? Dossier réalisé d’après : - « Dossiers & Documents du Monde », « Spécial crise financière », n°381 décembre 2008. - Alternatives Economiques n° 274, « Spécial crise », novembre 2008 pages 45 à 72. - Sciences Humaines, n°199, décembre 2008 « Psychologie des crises financières » pages 16 à 25. - Alternatives Internationales, Hors série n°6, décembre 2008 « Finance : la crise d’un paradigme » page 34 à 38. - Jacques Attali, « La crise et après ? » Fayard, novembre 2008. 6 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Guerre Irak Stagnation des salaires 7 LA GENESE DE LA CRISE 2001-2006 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Guerre Irak Stagnation des salaires Amorce crise Baisse des taux directeurs 8 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Guerre Irak Stagnation des salaires Liquidités abondantes Amorce crise Baisse des taux directeurs Faible coût de l’argent 9 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Liquidités abondantes Amorce de crise économique Baisse des taux directeurs Faible coût de l’argent Guerre Irak Stagnation des salaires Conditions de crédit très souples 10 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Liquidités abondantes Amorce crise Baisse des taux directeurs Faible coût de l’argent Guerre Irak Stagnation des salaires Conditions de crédit très souples Augmentation du risque 11 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Liquidités abondantes Amorce crise Baisse des taux directeurs Faible coût de l’argent Guerre Irak Stagnation des salaires Les ménages sont incités à s’endetter (prêts immobiliers) Titrisation des créances Conditions de crédit très souples Augmentation du risque 12 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Liquidités abondantes Amorce crise Baisse des taux directeurs Faible coût de l’argent Guerre Irak Stagnation des salaires L’immobilier augmente Les ménages sont incités à s’endetter (prêts immobiliers) Augmentation de la valeur des biens Titrisation des créances Conditions de crédit très souples Augmentation du risque Augmentation de l’effet de richesse Crédits Alt-A, Prime Accession à la propriété de foyers pauvres Crédits subprime (600 milliards de $ en 2006) 13 Explosion de la bulle Internet 11 sept.01 Liquidités abondantes Baisse des taux directeurs Amorce crise Faible coût de l’argent Guerre Irak Stagnation des salaires Ménages incités à s’endetter (prêts consommation) Consommation L’immobilier augmente Augmentation de la valeur des biens Les ménages sont incités à s’endetter (prêts immobiliers) Conditions de crédit très souples Titrisation des créances Augmentation du risque Excellents résultats des entreprises Création d’emplois Augmentation de l’effet de richesse Crédits Alt-A, Prime Accession à la propriété de foyers pauvres Crédits subprime (600 milliards de $ en 2006) LA MACHINE SE GRIPPE 2006-2007 Emballement de l’économie Déficit commercial abyssal hausse des taux d’intérêt défaut de règlement des subprimes Surendettement des ménages EXTENSION DE LA CRISE 2008 … hausse des saisies immobilières chute de la valeur de l’immobilier la valeur des produits titrisés s’effondre dépréciations d’actifs crise de liquidité des banques les banques ne se prêtent plus entre elles faillites bancaires intervention des Etats pour « éteindre l’incendie » chute de la valeur des bourses crise de confiance panique des ménages chute de la consommation difficultés des entreprises faillites destruction d’emplois récession … dépression …