I - La Relation soignant soigné Une relation, c’est une interaction, une liaison entre plusieurs personnes ou entités(wiktionnaire : http://fr.wiktionary.org/wiki/relation). Dans le cadre de la relation soignant soigné, ces personnes sont d’une part, l’infirmière qui représente le soignant et d’autre part, le patient qui est le soigné. Etre soignant qu’est ce que cela implique ? C’est tout d’abord être professionnel : Selon le code de la santé publique française (Art L4311-1), « est considérée comme infirmière, toute personne qui donne habituellement des soins infirmiers sur prescription ou conseil médical, ou en application du rôle propre qui lui est dévolu ». Elle possède des connaissances, des capacités techniques et respecte le secret professionnel. Mais c’est aussi être soi même en tant que personne en fonction de sa personnalité, de son vécu. C’est avoir des capacités relationnelles pour entrer en contact avec le patient et le prendre en charge comme si nous étions à sa place. L’infirmière nécessite également certaines qualités : une capacité d’écoute, de compréhension de l’autre et une attitude adaptée face à lui. Confrontée chaque jour à la souffrance physique et psychique patient, ainsi qu’à son environnement, elle reste attentive et donne d’elle-même. « Etre soignant c’est être là pour soi et pour l’autre »1 (bas de page a compléter), c’est donc être humain avant tout. Le terme soigné désigne une personne malade, un patient. « Le malade à l’hôpital vit une épreuve véritable »2 : entouré de personnes inconnues, il se trouve dans un monde qu’il ignore : « Je me sens à la fois transplanté dans un milieu que je ne connais pas, non accueilli, face au monde des soignants avec leur code et leur langage que je ne comprends pas »3. Le soigné est une personne malade, ce qui implique que un ou plusieurs de ses besoins fondamentaux sont perturbés. Maslow a hiérarchisé ces besoins(voir annexe1) : - besoin d'accomplissement - besoin d'estime : être respecté et reconnu par les autres - besoin d'appartenance et d'affection : être aimé et intégré dans un groupe - besoin de sécurité: se sentir à l'abri physiquement et psychologiquement, avoir des repères - besoin de communication - besoins physiologiques : faim, soif, hygiène corporelle… « Le corps malade peut donc se sentir dépendant, dévalorisé, abandonné » (P98 idem) C’est pourquoi l’interaction soignant/soigné est une rencontre où les protagonistes peuvent avoir deux places différentes. Le soigné sera dans une situation de dépendance et peut ainsi se sentir en infériorité par rapport au soignant. L’infirmière aura une attitude « protectrice » et un rôle « d’accompagnement sécurisant ». (Soins 681 P37) Tout deux auront cependant un même objectif : le rétablissement du patient. 1 SANCHEZ DIAZ Barbara, La relation soignant soigné, cours effectué, 2006 HAREL-BIRAUD Hélène, Manuel de psychologie à l’usage des soignants, Editions Masson, 1990, p108 3 LE COSTAOÛEC Alain, La relation soigné soignant, Les Dossiers de l’Obstétrique, 2002, n° 306, p3 2 L’infirmière entrera dans son intimité. Il sera donc nécessaire pour cela d’instaurer une relation de confiance qui s’établira au quotidien. La pratique de la relation soignant soigné au quotidien La relation soignant soigné c’est tout d’abord une relation de civilité, de politesse (Soins 681 P30) et de respect mutuel. C’est savoir dire bonjour, frapper à la porte avant d’entrer, se présenter devant le patient. L’infirmière soigne le patient quel que soit sa religion, ses croyances, sa culture ou son origine. (voir legislation). (soins 680 P45) « Elle accepte le malade tel qu’il est et non tel qu’elle voudrait qu’il soit » (manuel psy soignant P109). Lors de l’arrivée du patient, l’infirmière a un rôle important d’accueil : elle doit mettre en confiance le patient, angoissé par sa maladie et son hospitalisation. Celui-ci lors de ce moment, aura une première approche des soignants. De son côté, le soignant aura une première connaissance du patient notamment par son recueil de données. « L’accueil dans les premiers instants est essentiel », (Soins 681 P37) « C’est le premier contact avec un monde inconnu » (attach homo) Le soin relationnel est essentiel à la prise en charge infirmière. Il apporte notamment un bon déroulement du soin technique. L’infirmière a un rôle d’information, d’explication et de reformulation : elle explique au patient ses gestes, le prévient des soins avant leur déroulement. Elle reformule aussi les informations du médecin que le patient n’a éventuellement pas compris. Le soignant entre également en relation avec la famille du patient. Par sa disponibilité et sa présence continue, elle peut les rassurer et les informer. Cette relation permettra aussi de mieux connaître le soigné. L’infirmière fait preuve de sincérité dans la relation (soins 681). Si celle ci connaît le patient, le patient connaît aussi l’infirmière qui le soigne au fil des jours. L’infirmière reste donc naturelle, elle même. « Dans ces échanges, nous sentons aussi les peurs, les craintes, les angoisses des soignantes » « Lorsque nous sentons le stress chez le soignant, il nous le transmet » (Manuel psy soignt P3) Mais avant tout, la relation soignant soigné se créée grâce à des petits gestes effectués au quotidien. Sourire au patient, remettre son adaptable après les soins… Ce sont des actes qui ne coûtent rien et qui sont essentiels pour que le patient se sente en confiance. Ces capacités relationnelles s’apprennent avec le temps et l’expérience. Dans la relation entre donc les notions de confiance, distance, écoute et tolérance. Pour une relation appropriée, le soignant et le soigné devront avoir une communication adaptée. Les moyens pour entrer en relation Entre le soignant et le soigné, ce sont les cinq sens qui entrent en relation : le toucher, l’odorat, la vue, la voix et l’ouïe. Pour entrer en relation avec le patient, l’infirmière peut utiliser la communication verbale : l’infirmière et le patient parlent, échangent. Le soigné pourra exprimer son ressenti, sa douleur, ses peurs. Par cette communication verbale, elle jouera son rôle d’information et de reformulation. Mais avant tout elle sera là pour l’écouter. Le soigné la percevra également selon sa voix, le ton de ses paroles. Pourtant, la communication non verbale, représentant 80% du langage, est prédominante. En effet, le premier contact avec le patient est visuel. Nous renvoyons une image de nous mêmes, nous montrons nos émotions et notre attention face à lui. De plus, tous les soins prodigués par l'infirmière s'effectueront par l'intermédiaire du toucher. Selon Von Gannach, cette dimension non verbale complète la communication verbale: "les gestes appuient les paroles, les soulignent, les accentuent, les contredisent"4(manuel psychologie du soin P166). Enfin, certaines situations font que la communication verbale est impossible (exemple : patient trachéotomisé). Ce sont ces situations qui montrent que le langage non verbal est essentiel. Inconsciemment, tous ces facteurs seront déterminants à la relation entre le patient et l’infirmière. Les différents niveaux de la relation soignant/soigné On distingue plusieurs stades dans la relation entre l’infirmière et le patient : - La relation de civilité : c’est une relation où l’échange ne vise pas de but ou de sujet précis. C’est une relation simple qui n’est pourtant pas toujours présente. - La relation fonctionnelle : Elle vise la connaissance de l’autre dans un domaine spécifique (pathologie, signes, habitudes de vie, données familiales et socioprofessionnelles d’un patient). (cours Grassi) Le soignant cherche alors à mieux connaître le patient pour une prise en charge de qualité (par exemple grâce au recueil de données dans le cadre de la démarche de soins). - La relation d’écoute et de compréhension : L’infirmière apporte son soutien au patient et a une attitude d’empathie. Elle a un rôle important d’écoute. - La relation d’aide : Elle a été décrite par Carl Rogers. C’est une relation soignant/soigné qui consiste en plusieurs actions sous entendues avec une intention précise (abrégés prof IDE Soins IDE P13). Elle nécessite des capacités relationnelles spécifiques et une grande expérience. Elle a pour objectif que le patient puisse résoudre ses difficultés lui-même. « Elle vise avant tout à un réconfort psychologique et une mobilisation active des ressources du patient » (manuel psy du soin). Le rôle du soignant est donc de contribuer à ce qu’il utilise ces capacités et à ne pas trouver une solution à sa place. Cette relation permet au patient de verbaliser ses émotions et ses craintes. La place de l’affectivité dans la relation De part une rencontre entre deux personnes, la relation soignant/soigné implique que l’affectivité a une place importante. L’infirmière et le patient ressentiront des sentiments et des émotions. Un sentiment est une disposition affective éprouvée par 1 BIOY Antoine, FOUQUES Damien, Manuel de psychologie du soin, Editions Bréal, 2002, p166 le sujet pour un objet en particulier ou une personne et pouvant être vécu sur le registre du plaisir ou du déplaisir (pratiquer relation soignant soigné P42). On peut distinguer cinq types de sentiments dans la relation : - Le sentiment d’impuissance qui peut apparaître lors d’une fin de vie ou d’une pathologie lourde. Le soignant ne sait pas comment faire face à la situation et se sent démuni. Une émotion de tristesse et de colère peut alors apparaître. - Le sentiment de découragement qui peut entraîner un « burn out » (bas de page lexique ?) du soignant. Dans ce cas de figure, on observe une fatigue chronique voire une dépression ainsi qu’un désintérêt et un désinvestissement. - Le sentiment de satisfaction qui entre en jeu lors d’une bonne relation avec le patient, sa famille et l’équipe soignante. Le soignant a le sentiment d’avoir joué son rôle et d’améliorer ses compétences. Ce sentiment peut entraîner la joie, la générosité, la sympathie, l’amitié, l’apaisement. - Le sentiment de responsabilité. Il est présent en permanence dans le quotidien du soignant et peut être parfois difficile à assumer. Le soignant peut dépasser son rôle social et prendre une situation du malade « trop à cœur » dû au service, à son implication. Dans ce cas, l’infirmière va plus loin que le demande la conscience professionnelle. Ce dernier sentiment peut entraîner sympathie, attachement mais aussi inquiétude, colère, tristesse, découragement et peur. Les sentiments ont une place prépondérante dans la relation infirmière/patient et ceux – ci ne peuvent passer outre. Ces sentiments peuvent être positifs et négatifs et sont naturels puisque tous deux sont des êtres humains avec leur ressenti propre. La relation soignant/soigné est donc essentielle pour le soignant afin d’avoir la meilleure prise en charge possible. Cette importance est d’autant plus remarquée par les soignants eux-mêmes (voir annexe) Transition : Les soins relationnels sont donc au cœur de la pratique de l’infirmière. Cependant, il arrive fréquemment que celle-ci se trouve en difficulté dans la relation instaurée avec le patient. Analyse Lorsque nous entrons en Institut de Formation en Soins Infirmiers (IFSI), nous sommes très vite envoyés en stage et confrontés à la pratique de l’infirmier(e), à l’hôpital et aux patients. Nous entrons donc en relation avec eux très tôt. Mon stage se déroulait en fin de 1ère année. J’avais encore peu d’expérience et je n’avais jamais été confrontée aux services hospitaliers avant ma formation. La relation soignant/soigné décrite dans ma situation a débutée lors de la prise en charge des soins d’hygiène de Mr N. J’étais en position de soignante avec l’aide soignante que je suivais. Mr N lui était le soigné. Celui-ci avait une pathologie lourde et devait rester en isolement. Il était dépendant pour les actes de la vie quotidienne et pour se mobiliser. En tant que soignante, je contribuais à pallier ses besoins perturbés : besoins physiologique (j’effectuais sa toilette chaque matin pendant une semaine), besoin de considération et besoin de communication (j’essayais de lui parler au maximum pendant ces moments de présence). Très vite et sans savoir pourquoi, nous avons établit un bon contact. Je pense que la relation que j'ai instaurée avec Mr N a été favorisée par la prise en charge de ses soins d'hygiène : "le toucher, la préhension (action de saisir des objets, des proies ou autre avec la main) et la manipulation des corps (toilette, changement de position) sont un mode de relation privilégié du soignant dans le cadre de son expérience professionnelle"5 (RISPAIL Dominique, Mieux se connaître pour mieux soigner, Editions Masson, 2002, p151) C’est donc une relation au quotidien qui s’est effectuée lors de cette première semaine. Celle-ci s’effectuait en complémentarité par communication verbale et non verbale. Le toucher entrait en compte dans le soin de sa toilette. J’entrais dans son intimité. Je pense que le niveau de la relation que nous avions était fonctionnel. J’apprenais des choses sur lui mais il ne me parlait pas de son ressenti. Je ne le jugeai pas et nous ne parlions que très peu de sa maladie. Mon niveau de formation et mon manque d’expérience faisaient que je ne pouvais envisager une relation d’aide. Notion qui est souvent difficile à distinguer de la relation soignant/soigné simple lors de la formation. Je restais donc moi-même avec le patient. Certes je restais moimême avec lui mais je ne me souciais pas des conséquences de mon attitude. La notion de distance et de limite dans la relation, je n’y réfléchissais que peu. Comme dans toute relation, nous ressentions des sentiments. Je pense qu’il était reconnaissant des soignants. Lorsqu’il m’a réclamé la semaine suivante, j’ai ressenti un sentiment de satisfaction et j’ai cru lui avoir apporté quelque chose. J’ai continué alors à lui rendre visite malgré l’interruption de ma prise en charge. 1 RISPAIL Dominique, Mieux se connaître pour mieux soigner, Editions Masson, 2002, p151