Chapitre 4 : Conflits et mobilisation sociale

publicité
Conflits et mobilisation sociale

Objectifs :
Le chapitre précédent a souligné la tension entre l’idéal démocratique d’égalité et la permanence des inégalités ; cette tension est source de conflits. Ce chapitre montrera en quoi les
conflits participent à la dynamique sociale mais aussi comment les conflits évoluent avec la société.
Dans un premier temps, il est donc nécessaire de relier les mutations du travail aux conflits sociaux. Cette influence est réciproque. En effet, les conflits du travail transforment les relations de travail, les rapports sociaux de travail mais ces mutations du travail contribuent également, en retour, à modifier les enjeux et les formes des conflits du travail. Les mutations du travail
ont accompagné le passage de la société industrielle à la société postindustrielle et ont entrainé
une transformation du salariat. Nous montrerons comment les conflits ont pu forger les identités
professionnelles, notamment l’identité ouvrière, puis nous soulignerons que les conflits de classe
se sont effacés sans pour autant que cela signifie la disparition des conflits du travail mais plutôt
leur métamorphose. Il faut enfin analyser les conséquences de toutes ces transformations sur les
syndicats, notamment « la crise du syndicalisme » et la place croissante des acteurs non institutionnalisés.
Dans un deuxième temps, nous étudierons « les nouveaux mouvements sociaux ». Nous
nous appuierons sur l’analyse d’Alain Touraine et montrerons que ces mouvements dont définis à
partir de trois caractéristiques : la tentative d’affirmation d’identités ou de valeurs spécifiques ;
la structuration par opposition à une situation dominante et la tentative d’élaboration d’un projet
social et politique alternatif. Nous montrerons aussi que les stratégies des NMS permettent de les
rapprocher et de les distinguer des groupes de pression.

Plan :
Introduction : définition des concepts.
I.
Mutations du travail et conflits sociaux.
A. Des conflits du travail aux conflits sociaux.
B. Les conséquences des mutations du travail sur les conflits sociaux : l’exemple de la classe ouvrière.
C. Le rôle des syndicats dans les conflits sociaux.
II.
Diversité des objets et des formes de l’action collective.
A. Les nouveaux mouvements sociaux.
B. La fin des conflits du travail ?
C. Nouveaux mouvements sociaux et changement social.

Vocabulaire :
Classes sociales ; groupes de pression ; identité ; institutionnalisation des conflits ; lutte des classes ; mobilisation collective ; mouvements sociaux ; rapports sociaux ; syndicat ; valeurs.

Site internet à consulter :
http://www.travail-solidarite.gouv.fr
1
Conflits et mobilisation sociale.

Introduction :
Dans le chapitre précédent, nous avons souligné l’existence d’inégalités dans les sociétés démocratiques qui reposaient, par ailleurs, sur un idéal égalitaire. Ces inégalités entraînent des tensions qui
se traduisent souvent par des conflits.
Le conflit social a une dimension collective et met les individus en situation d’interdépendance.
Etudier les conflits va nous permettre de comprendre le changement social. En effet, le conflit
revêt une dimension sociale permettant aux individus de se forger des identités et de développer des solidarités. Mais le changement social peut aussi provoquer des conflits, il faut donc s’interroger sur les
interdépendances le changement social et les conflits.
Les conflits font apparaître des rapports de pouvoir (rapports de force) et des enjeux (victoire ou
défaite, gagner ou perdre…)
Le conflit naît donc des tensions qui peuvent exister entre les individus ou les groupes sociaux.
Les conflits peuvent conduire à des ruptures ou déboucher sur des discussions sur le domaine concerné
par le conflit.
Les formes d’action changent au cours du temps, de la même façon que change la façon dont la
société s’organise pour résoudre les conflits. Ainsi depuis le XIXème siècle, les conflits sociaux étaient
centrés autour du travail et de l’emploi puis de nouvelles formes de conflits sociaux sont apparues pouvant être qualifiées d’actions collectives. En effet, dans l’action collective, les individus se regroupent
pour agir sans entrer nécessairement en conflit avec un autre groupe social.
I.
Mutations du travail et conflits sociaux.
A. Des conflits du travail aux conflits sociaux.
Différentes raisons expliquent que l’essentiel des conflits sociaux, depuis la révolution industrielle, portent sur le travail et l’emploi. Tout d’abord, le travail occupe l’essentiel de la vie des individus
et c’est dans le travail que se nouent les liens sociaux. Par ailleurs, le travail est une des valeurs centrales.
Mais pourquoi les conflits sociaux se développent-ils à partir du travail. Ce sont essentiellement
les inégalités qui conduisent aux conflits du travail.
1. Les inégalités du monde du travail, facteurs de conflits.
 Les inégalités suscitent le conflit lorsqu’elles ne sont pas acceptées (cf. chapitre précédent).
 Mais les inégalités ne suffisent pas à déclencher un conflit social. En effet, elles peuvent susciter
une compétition entre les individus plutôt qu’entre les groupes. Un individu peut améliorer sa situation
sociale en agissant pour le sort de tous ceux qui sont la même situation sociale que lui (conflit social)
mais aussi en recherchant une promotion individuelle (pas de conflit social).
 L’intensité de la mobilité sociale favorise la capacité de mobilisation. Si la mobilité sociale est
forte alors un individu peut espérer améliorer sa situation personnelle par son seul mérite, sans agir au
profit au profit de l’ensemble du groupe social. En revanche, si la mobilité sociale est faible alors les
revendications personnelles passeront par une revendication collective (cf. la remise en cause du système
fordiste)
Les inégalités ne sont pas à elles seules la cause des conflits sociaux.
2
2. Les inégalités et les conflits participent à la constitution de groupes sociaux.
En quoi l’organisation du travail, la division horizontale et verticale du travail sont-elles source
du conflit social ?
 La division du travail conduit à la différenciation des travailleurs et contribue à forger des identités professionnelles distinctes. En effet, l’identité professionnelle se construit à partir de ses appartenances, de sa position dans le groupe et sa hiérarchie, des valeurs partagées au sein du groupe.
 Les identités professionnelles entrent en concurrence dans l’entreprise. Tout groupe social a des
valeurs particulières et donc une culture spécifique. Chaque groupe peut avoir une idée différente de la
valeur des métiers et donc de leurs rémunérations. Pourquoi tel métier est-il mieux payer que tel autre ?
De même la logique entrepreneuriale peut s’opposer à la logique des salariés, dans d’une délocalisation
d’une entreprise par exemple.
Ainsi, l’affirmation d’une identité professionnelle fait apparaître un groupe social mais lui donne
aussi un adversaire. Pour qu’il y ait conflit du travail, il faut donc qu’il y ait un conflit d’intérêt, autour
des inégalités dans l’entreprise. Il faut qu’il y ait également des identités collectives fortement affirmées
pour que le conflit prenne une dimension sociale, et oppose des groupes les uns aux autres. Enfin, il faut
que ces groupes se mobilisent, c'est-à-dire que les individus qui les composent acceptent d’agir ensemble
avec des objectifs communs. Mais la relation entre conflit et identité professionnelle marche également
dans l’autre sens. Ainsi, un conflit peut déboucher sur solidarité retrouvée, et donc constituer un groupe
social (cf. conflit des infirmières au milieu des années 1990)
3. Les conflits s’étendent à toute la société.
Il faut ici bien maîtriser la notion de classe sociale (cf. programme de 1 ES)
Au sein de l’entreprise, il existe une opposition entre les ouvriers qui vendent leur force de travail
et les dirigeants d’entreprise, les cadres qui détiennent directement ou indirectement le capital.
Cette opposition au sein de l’entreprise peut s’appliquer à l’échelle de la société entière.
 l’opposition entre ouvriers et bourgeois a pris une valeur politique.
Au début du XXème siècle le clivage entre la droite et la gauche se confond avec celui des travailleurs et des capitalistes. Le développement de la classe ouvrière a politisé la question de la propriété.
Ainsi, la gauche, représentant les salariés, voulait exproprier les capitalistes en nationalisant les entreprises. A l’inverse, la droite défendait le droit de propriété et donc le pouvoir des actionnaires dans
l’entreprise. Mais l’enjeu politique entre la droite et la gauche a été aussi moins radical. Ainsi, des lois et
des règlements ont été adoptés, visant à limiter le pouvoir des employeurs sur les salariés (semaine de
40h, congés payés, droit du travail, protection contre les licenciements, indemnisation du chômage…)
 L’opposition entre ouvriers et bourgeois a pris une valeur culturelle.
La culture ouvrière était fondé sur le travail ouvrier qui reposait souvent sur la force physique, les
connaissances et les astuces pratiques qui se transmettaient au sein de l’atelier. Il existait par ailleurs
une fierté du métier.
La culture bourgeoise reposait sur la culture savante, celle qui se transmettait à l’école et dans
les universités.
Par ailleurs, les pratiques culturelles n’étaient pas les mêmes.
 L’opposition entre ouvriers et bourgeois a conduit à une véritable ségrégation sociale.
Elle se manifestait dans la structure des villes, où les « quartiers ouvriers » se situaient souvent à
la périphérie des villes (banlieues) – s’opposaient aux « beaux quartiers » -le centre ville. Cette opposition aussi dans l’école puisque les enfants des milieux populaires et supérieurs ne fréquentaient pas les
mêmes écoles, avant la création du collège unique.
Le conflit social qui concernait initialement l’entreprise s’est étendu à toute la société ; c’est
pourquoi la notion de classes sociales apparaît plus justifiée que celle de groupes sociaux.
3
4. Conflit social et lutte des classes.
La lutte des classes renvoie à l’analyse de Karl Marx. Il a été l’un des premiers à analyser les
conflits sociaux comme une conséquence normale du fonctionnement des sociétés. Il a relié les conflits
sociaux et l’organisation du travail en définissant les « rapports de production ».
Dans les sociétés contemporaines capitalistes, la lutte des classes oppose les salariés et les capitalistes. Le conflit d’intérêt repose sur une injustice faite aux salariés – l’exploitation – devient un conflit
social quand les groupes se transforment en classes sociales.
 L’analyse de l’exploitation capitaliste :
Les capitalistes sont ceux qui possèdent les moyens de production alors que les salariés ne disposent que de leur force de travail. Ces derniers sont contraints de louer leur force de travail aux capitalistes pour vivre et ces capitalistes s’approprient la valeur de la production en échange d’un salaire.
Cette domination des salariés par les capitalistes permet à ces derniers de les exploiter en leur versant un
salaire (la valeur d’échange du travail) inférieur à la valeur de la production (la valeur d’usage du travail) et de s’approprier la différence (la plus-value). Cette appropriation est possible parce que les salariés ne sont pas organisés, les employeurs peuvent jouer sur la concurrence entre eux et qu’il existe, dans
les sociétés industrielles, une réserve perpétuelle de chômage (« l’armée de réserve » capitaliste) qui
favorise la concurrence entre les salariés (les chômeurs sont prêts à accepter un salaire plus faible pour
retrouver un travail et échapper à la misère). L’existence du profit est donc la conséquence d’un rapport
de force. Seul le travail est source de valeur.
 la constitution des groupes en classe sociale :
le conflit social suppose que les individus (les salariés) partageant une même situation dans les
rapports de production aient conscience de leurs similitudes et s’unissent pour revendiquer contre un
adversaire commun. Ils constituent alors une classe sociale, la classe en soi devient une classe pour soi.
Cette constitution va se produire avec le développement des grandes usines au XIXème siècle lorsque les
ouvriers vont prendre conscience de leur identité professionnelle et qu’ils vont s’organiser en syndicats,
en partis politiques, pour structurer leurs actions revendicatives et défendre leurs intérêts. De même, les
capitalistes vont se structurer en organisations patronales.
Ainsi, l’analyse marxiste théorise les conflits du travail et donne une vision conflictuelle de la société. Les conflits du travail vont structurer la société en classes sociales antagonistes, organiser les
identités professionnelles et la vie politique.
B. Les conséquences des mutations du travail sur les conflits sociaux : l’exemple de la classe
ouvrière.
L’opposition entre les ouvriers et les patrons a longtemps été le modèle de référence de la transformation du conflit social en lutte des classes. Mais cette opposition à l’intérieur de l’entreprise est devenue valable dans toute la société. Cependant, le travail des ouvriers s’est profondément transformé au
cours des trente dernières années et on peut dès lors s’interroger sur l’existence de la classe ouvrière.
1. Une diminution de la part des ouvriers dans la population active, une identité professionnelle
moins marquée.
 En 1982, les ouvriers étaient plus de 7 millions ; 6,5 millions environ en 1990 ; un peu moins de 6
millions en 1999 et 2005. Dans le même temps, la population active n’a cessé de croître ce qui a accentué
la baisse de la part des ouvriers dans la population active. Ainsi, elle est passée de 38% en 1962 à 33 %
en 1982, 26% en 1999 et 24% en 2005 soit -37% entre 1962 et 2005.
 La transformation de la nature du travail des ouvriers :
De plus en plus d’ouvriers travaillent dans les services. Ainsi, en 2001, le nombre d’ouvriers tra
vaillant dans les services est plus important que celui travaillant dans le secondaire. Ces ouvriers sont en
particulier des ouvriers d’entretien et de maintenance. Même dans le secteur secondaire, les ouvriers
effectuent moins souvent des tâches de production du fait de l’automatisation de la production. On assiste
4
à un développement des activités de tri, d’emballage et de manutention en général d’un côté, et une augmentation des tâches de surveillance, contrôle et réglage des machines automatisées d’autre part.
Une autre transformation importante concerne la qualification des ouvriers. Celle-ci s’est globalement élevée néanmoins, ils exercent souvent un emploi dont la qualification est inférieure à celle qu’ils
possèdent, 31% des salariés embauchés pour un emploi ne demandant pas de qualification possèdent un
CAP ou un BEP.
 Taille des entreprises et du collectif de travail :
La taille des entreprises dans lesquelles travaillent les ouvriers a beaucoup diminué et ce pour plusieurs
raisons :
 l’automatisation des tâches de production.
 Les ouvriers travaillent de plus en plus dans les entreprises du tertiaire dont la taille est inférieure
à celle des entreprises industrielles.
Le cadre de travail des ouvriers s’est donc transformé. C’est la fin des grands rassemblements
ouvriers à l’ouverture des grilles de l’usine. Toutefois, la diminution de la taille des entreprises
n’implique pas un rapprochement entre les ouvriers et le patron. Les petites entreprises appartiennent
souvent à de grands groupes industriels et financiers et le pouvoir est en général loin du lieu de production.
 les transformations récentes du travail et de l’emploi (précarisation du travail, suppression des
emplois non qualifiés, individualisation de la carrière…) agissent sur l’identité professionnelle. Les frontières de l’emploi sont plus floues, les métiers se transforment, les horaires sont « à la carte ». Ainsi,
l’individu semble triompher au détriment du collectif. L’identité professionnelle semble donc moins « imposée » à l’individu qui doit davantage trouver ses repères seul pour la construire. La mobilisation en
vue d’un conflit devient donc plus difficile à obtenir.
 La culture ouvrière recule avec la transformation du travail ouvrier :
La précarisation du travail, l’expérience du chômage (les ouvriers sont plus touchés que les
autres catégories) dévalorisent le travail ouvrier tandis que le changement de la nature du travail ouvrier
dû à l’automatisation modifie directement sa spécificité.
De même, les conditions de vie des ouvriers se sont transformées, semblant rejoindre celles d’une
vaste classe moyenne. Au cours des années 1960-1970, les ouvriers ont accédé à la société de consommation et le mode de vie des ménages ouvriers s’est transformé par le développement du travail des femmes
d’ouvriers, l’allongement de la durée de scolarisation des enfants d’ouvriers et le développement de
l’accession à la propriété à l’aide du crédit.
2. Ce déclin de l’influence politique et sociale des ouvriers reste relatif.
On ne peut pas affirmer que les ouvriers ont disparu ; en revanche, ils ont leur statut de classe sociale c'est-à-dire la capacité à transposer leur conflit à l’échelle de la société tout entière. Par ailleurs,
les sources du conflit social, les inégalités, la faible mobilité sociale, perdurent et même parfois
s’aggravent.
 le poids numérique des ouvriers dans la, population active reste important malgré leur déclin relatif : Aujourd’hui, près d’un tiers des pères de famille sont ouvriers et 40% des enfants sont élevés dans
un ménage où un des deux adultes au moins est ouvrier. Par ailleurs, la diminution des effectifs ouvriers
s’est arrêtée depuis 2-3 ans.
 La faible mobilité sociale enferme la classe ouvrière sur elle-même et la coupe des classes supérieures : Depuis 20 ans, la mobilité sociale nette est faible ; les chances de monter dans la hiérarchie
sociale, en dehors des possibilités liées aux transformations de l’emploi, sont faibles. Malgré la prolongation de la scolarité des enfants d’ouvriers, ceux-ci connaissent une faible mobilité ascendante. Même si
les enfants ont fait des études plus longues que leurs parents, ceux-ci ont plus de difficultés pour accéder
au marché du travail et obtiennent un emploi équivalent voire moins élevé que leurs parents.
 Les inégalités, y compris matérielles, demeurent importantes :
Certes, les ouvriers ont accédé à la société de consommation mais la distinction se porte dorénavant sur de nouveaux biens et surtout sur les services (taux de départ en vacances, accès à internet, consommation de services à domicile – femmes de ménage, garde d’enfants…- et il existe des différences
5
qualitatives (les cadres et les ouvriers n’ont pas le même type de vacances, n’ont pas les mêmes pratiques
culturelles…). De même, l’habitat reste spatialement très différencié…
C. Le rôle des syndicats dans les conflits sociaux.
Aux débuts de la révolution industrielle, les travailleurs n’avaient quasiment aucun droit. Il faut
attendre 1864 pour que la grève ne soit plus considérée comme un délit. Jusqu’à cette, c’est l’armée en
général qui est chargé de réprimer les grèves. En France, ce n’est qu’en 1884 que les syndicats sont
autorisés.
Au cours de la première moitié du XXème siècle, les syndicats vont se construire et acquérir peu à
peu une légitimité. Le premier rôle des syndicats sera d’endiguer la violence des conflits et de diminuer
les risques individuels encourus par les grévistes. La légitimité des syndicats apparaîtra en 1936 avec la
signature des accords Matignon.
En France, la période fordiste (1945-1975) est marquée par le triomphe des syndicats et on observe leur institutionnalisation, c'est-à-dire qu’ils deviennent des partenaires obligés de toutes les négociations. Ils participent à la gestion des conflits mais aussi à la gestion des institutions mises en place
pour protéger ou défendre les travailleurs (protection sociale et conseil des prud’hommes). De même, les
conflits s’institutionnalisent c'est-à-dire qu’ils suivent une procédure (préavis de grève, premières négociations, échec des négociations, grève effective, nouvelles négociations…).
1. Syndicats, conflits sociaux et institutionnalisation des conflits.
 Les syndicats rassemblent les moyens matériels et humains de l’action collective :
Ils collectent des cotisations, reçoivent parfois des dons ou des subventions publiques qui permettent de faire face aux dépenses nécessaires à la mobilisation des salariés (presse syndicale, tracts, locaux
et moyens de communication, transports des militants, caisse de solidarité pour compenser les pertes de
salaires…) mais ces moyens permettent aussi de payer des permanents c'est-à-dire des personnes qui
travaillent à temps plein.
 Les syndicats sont un cadre institutionnel permettant d’aboutir à des décisions collectives et de
mener des négociations pour sortir des conflits :
Un cadre institutionnel démocratique donne aux individus les moyens de s’exprimer, de désigner
des représentants, et pour ces représentants, il faut des instances de réunion et de décision pour aboutir à
des choix collectifs proches des souhaits des adhérents. Les syndicats représentent un interlocuteur représentatif pour organiser une négociation permanente, prévenir les conflits, mettre un terme aux conflits
en cherchant d’éventuelles solutions de compromis.
Par ailleurs, avant de prendre une décision, la consultation des syndicats permet de repérer ce
qui peut éventuellement poser problème et susciter le conflit.
 les syndicats permettent de maintenir le conflit dans des formes socialement acceptables :
Les syndicats permettent d’éviter des dérapages éventuels. Ainsi, lors des manifestations, les syndicats ont un service d’ordre pour maintenir la revendication dans certaines limites, éviter des violences
ou des dégradations commises par les manifestants.
Ainsi, au cours du temps, les employeurs et les syndicats ainsi que l’Etat ont été amenés à
s’entendre pour édicter des règles qui régissent les situations de conflits potentiels. Ainsi, le droit du travail encadre les licenciements, ce qui permet d’éviter une utilisation arbitraire voire répressive mais aussi de le rendre moins contestable par les salariés. De même, les « grilles de rémunération » prévoyant
quels salaires peuvent être versés en fonction du métier ou de l’ancienneté, permettent d’éviter que les
promotions soient un sujet de conflit entre l’employeur et les salariés.
Par ailleurs, le droit du travail contribue à faire entrer la justice dans l’entreprise. Le recours à
la justice est en effet un moyen de faire arbitrer les litiges par les tribunaux sans passer par le conflit
social.
L’existence des syndicats facilite donc l’action collective. Le syndicalisme peut être considéré
comme un facteur de conflictualité sociale. C’est d’ailleurs en partie pour cette raison que les grèves en
France sont plus importantes dans le secteur public que dans le secteur privé : les syndicats y sont encore
6
relativement puissants et bien implantés. Mais, en même temps, les syndicats permettent de piloter les
conflits sociaux et donc de les rendre moins radicaux et de leur trouver une solution.
2. Mutations du travail et affaiblissement des syndicats.
La désyndicalisation est un phénomène général dans les pays industrialisés. Le nombre de conflits, mesuré par le nombre de journées de travail perdues du fait des grèves, a fortement diminué depuis
20 ans en France : entre 3 et 4 millions de journées perdues à la fin des années 1970, moins d’un million
en général depuis 1985. Les grèves ont plus diminué dans le secteur privé que dans le secteur public, où
les grèves se voient plus car elles touchent souvent des services publics. De plus, le secteur public emploie moins de travailleurs que le secteur privé.
Le taux de syndicalisation a beaucoup baissé depuis 30 ans. Aujourd’hui, en France, 8% environ
des salariés sont syndiqués contre près de 40% en 1950. Le taux de syndicalisation reste plus élevé dans
le secteur public que dans le secteur privé (3,5%). Trois raisons essentielles peuvent expliquer cette désyndicalisation :
 La montée du chômage : c’est une explication conjoncturelle. Les salariés craignant pour leur
emploi renoncent à se mettre en grève ou à entamer un conflit avec leur employeur. Une diminution du
chômage pourrait modifier la situation.
 Les transformations du travail : c’est une explication structurelle. La transformation de la structure des emplois joue en défaveur de la syndicalisation. Les effectifs ouvriers ont fortement diminué depuis 1975. De plus, le travail dans les usines s’est transformé : les horaires se sont flexibilisés et les syndicats ont plus de difficultés pour entrer en contact avec les salariés. L’éclatement du collectif de travail
fait que tous les gens qui travaillent au même endroit n’ont pas nécessairement le même employeur (cas
des intérimaires) ce qui rend plus difficile la mobilisation.
Par ailleurs, le développement des firmes multinationales, qui éloigne encore les travailleurs de la
direction réelle de l’entreprise, rend plus difficile l’identification et l’atteinte du groupe avec lequel on
peut rentrer en conflit.
Enfin, le développement des emplois tertiaires s’effectue dans des entreprises de taille inférieure à
celle des entreprises industrielles. Or, le syndicalisme se développe plus facilement dans les grandes entreprises que dans les petites. Par ailleurs, le secteur tertiaire est féminisé et les femmes sont, en
moyenne, moins syndiquées que les hommes.
 L’institutionnalisation des syndicats. Cette évolution peut couper les syndicats de leurs adhérents
et ceux-ci ne se sentent plus représentés réellement par les permanents syndicaux qui négocient avec les
organisations patronales. Les syndicats apparaissent alors comme des organisations bureaucratiques
dans lesquelles les adhérents ne se reconnaissent plus, d’où la diminution du nombre d’adhésions.
Il en résulte que les syndicats encadrent moins qu’avant les conflits. Ainsi, certains conflits se déclenchent « à la base » sans appel des syndicats. Leur place est prise par des coordinations c'est-à-dire
que les grévistes élisent des représentants, indépendamment de leur appartenance syndicale, qui vont
aller négocier avec la direction.
3. Montée de l’individualisme et remise en cause de l’action collective.
Les individus participant à un conflit espèrent défendre ou améliorer leur situation mais cette participation engendre des coûts, c’est pourquoi la mobilisation sociale est aléatoire.
 Les individus se comportent en « passagers clandestins » et renoncent au conflit social. Le passager clandestin essaie de bénéficier d’un avantage collectif sans payer les coûts individuels qu’il faut dépenser en contrepartie, à l’image du passager qui ne paie pas son billet mais bénéficie du voyage que les
autres ont rendu possible en le payant. Par exemple, le non gréviste laisse les autres faire grève (perdre
leur salaire, être « mal vu »…) et bénéficie des résultats positifs de la grève (augmentation de salaire,
réduction du temps de travail…). C’est l’économiste américain Mancur Olson (Logique de l’action collective 1966) qui montre que ce calcul rationnel peut déboucher sur un paradoxe qui porte son nom. Selon lui, la participation des individus à une action collective découle d’un calcul coût / avantage effectué
par chaque individu : le coût individuel supporté de la participation doit être inférieur à l’avantage indi7
viduel que l’on espère retirer du succès de l’action collective. Par conséquent, l’existence d’intérêts
communs aux membres d’un groupe ne les pas nécessairement à agir collectivement. Certains individus
peuvent choisir par calcul rationnel, la non participation (refus de subir les coûts individuels de l’action
collective) tout en désirant retirer les avantages de la mobilisation des autres, ils se comportent en passagers clandestins de l’action collective (free riders). En poussant cette logique jusqu’au bout,
l’agrégation des rationalités individuelles rend improbable l’existence d’action collective. Afin d’éviter
de tes comportements, des mécanismes incitatifs doivent donc être mis en place (avantages accordés aux
seuls participants…)
 L’alternative exit-voice. L’analyse individualiste de l’engagement peut aussi recourir à
l’alternative exit-voice, telle qu’un économiste américain Albert Otto Hirschman l’a expliqué dans Exit,
voice and loyalty (1970). L’alternative se présente à un individu confronté à un problème : exit (il quitte
les lieux), voice (il fait connaître son mécontentement). Ainsi, un contribuable qui estime payer trop
d’impôts peut quitter son pays (exit) ou agir pour faire baisser la pression fiscale ; un parent mécontent
de l’école publique place ses enfants en école privée (exit) ou rejoint une association de parents pour
faire changer les choses (voice).
 Mobilisation des ressources et structure sociale. Le sociologue américain Anthony Obershall considère que les ressources d’un groupe dépendent de sa masse (nombre d’adhérents, puissance économique, intensité des intérêts objectifs communs), de l’importance de son sentiment d’appartenance et de
sa capacité d’action (pouvoir de nuisance et légitimation de la défense de ses intérêts aux yeux de la société). Pour lui, les mouvements sociaux sont d’autant plus développés que les sociétés sont segmentées
(mobilité sociale faible, coupure entre dirigeants et dirigés) et moins atomisées (liens sociaux forts, fort
sentiment de solidarité).
La désyndicalisation peut entraîner une augmentation et surtout une radicalisation des conflits
sociaux dans la mesure où les syndicats n’auraient plus leur rôle de prévention et de régulation des conflits.
II.
Diversité des objets et des formes de l’action collective.
Depuis la révolution industrielle, l’essentiel des conflits étaient des conflits du travail mais depuis
les années 1970, de nouvelles formes et objets de conflit apparaissent. Ces nouveaux mouvements sociaux
(NMS) se différencient des mouvements traditionnels par leurs acteurs, les valeurs qu’ils véhiculent et les
formes concrètes qu’ils prennent. Ces mouvements sociaux, à la différence des conflits, ne sont plus nécessairement l’expression d’un groupe contre d’un autre groupe, mais parfois l’expression du groupe
s’adressant à la société tout entière. Le plus souvent, l’objectif est de transformer les règles, les comportements et les valeurs de la société sur un aspect particulier.
A. Les nouveaux mouvements sociaux (NMS).
1. Pourquoi « nouveaux mouvements sociaux » ?
Les NMS vont mettre en scène de nouveaux acteurs, porter sur de nouveaux enjeux, et utiliser de
nouvelles formes d’action et de revendication.
 Les NMS mettent en scène de nouveaux acteurs/
Aujourd’hui, les individus ne manifestent plus seulement en tant que travailleurs. Ainsi, des étudiants, des chômeurs, ses opposants au nucléaire, des femmes, des régionalistes… manifestent leur mécontentement. Les valeurs post-matérialistes supplantent les intérêts matériels. Ces nouveaux acteurs se
réunissent sur la base d’un rejet commun d’une situation qu’ils estiment préjudiciables soit à leurs
propres intérêts, soit aux intérêts des générations futures.
8
 Les NMS sont fondés sur de nouvelles valeurs :
Ces NMS reposent sur des objectifs très variés : égalité entre hommes et femmes ; défense des
consommateurs ; défense de l’environnement… Les militants se mobilisent au nom de l’intérêt collectif,
de la défense des minorités (mouvements homosexuels, les Noirs,…), de la défense des droits (mouvements des sans papier, des sans logement,…). On peut aussi citer la défense de l’école privé (1985) ou la
défense du service public (1995).
 Les NMS utilisent des formes d’action nouvelles :
La grève traditionnelle n’est pas toujours possible dans ces mouvements. D’autres formes
d’expression sont alors utilisées : marches de protestation, boycott de certains produits, barrages routiers, occupations de locaux, pétitions, grève de la faim… Ces actions permettent aussi de médiatiser les
mouvements et aussi de faire pression sur les pouvoirs publics afin de modifier les règles. Ces mouvements traduisent aussi une méfiance vis-à-vis des organisations traditionnelles (syndicats, partis politiques…)
2. Exemples de NMS : à rechercher.
B. La fin des conflits du travail ?
1. Les NMS sont plus adaptés à des sociétés individualistes, mondialisées où la
place du travail se réduit :
 La montée de l’individualisme pousse les individus à se mobiliser de plus en plus dans une démarche personnelle :
Les individus n’agissent pas uniquement en fonction de l’intérêt de leur groupe social. Aujourd’hui, le droit du travail encadre assez strictement les relations professionnelles, ce qui rend moins
nécessaire la défense collective des droits professionnels. Par ailleurs, la construction de l’identité se fait
plus souvent hors du travail et chacun revendique qu’elle soit reconnue et prise en compte dans la sphère
publique.
 mondialisation des échanges et émergence des NMS :
La mondialisation provoque des conflits particuliers (remise de la stratégie des firmes par rapport
aux pays pauvres) et le cadre national n’est pas toujours adapté aux nouveaux enjeux (lutte pour la protection de l’environnement, contre les OGM…)
 La place du travail se réduit dans la société :
Cette réduction fait que la solidarité se construit aussi en dehors des relations du travail. Ainsi,
les individus vont de plus en plus choisir avec qui ils vont construire ces liens sociaux : voisinage, amis,
associations…ces liens sociaux seront davantage choisis que subis.
2. NMS et conflits traditionnels liés au travail :
Les conflits traditionnels s’étendaient au-delà de l’entreprise et influençaient toute la société. De
même, les NMS aussi les conflits du travail qui se renouvellent.
 Des mouvements sociaux sans lien avec le travail avec le travail ont toujours existé :
On peut citer les mouvements pour l’abolition de l’esclavage ou de la peine de mort comme
exemples de conflits sans lien avec le travail.
 Les NMS se sont institutionnalisés :
Le mouvement social peut passer d’une situation de protestation en marge du jeu politique traditionnel à une situation où il rejoint les institutions. Ainsi, le mouvement écologiste, après une période de
contestation et de mouvements alternatifs et révolutionnaires, a intégré les institutions politiques. Certains sont devenus des notables locaux tandis qu’un ministère de l’environnement a été créé. Les écologistes ont fondé des partis politiques, siègent dans les conseils municipaux, généraux et régionaux. Ils
sont par ailleurs amenés à passer des alliances électorales. Mais cette institutionnalisation se traduit par
une raréfaction des militants et une perte de combativité.
9
 Les conflits du travail reprennent certains aspects des NMS :
Ces dernières années, on observe un renouveau des conflits du travail lié à la fermeture ou à la
réorganisation des entreprises. Un nouveau syndicat, SUD, plus proche de ses adhérents et avec des
formes d’action moins traditionnelles, se développe dans plusieurs secteurs d’activité. On note donc une
certaine convergence de ces différentes formes de conflits.
3. Un exemple illustrant NMS et/ou conflits du travail : l’altermondialisme.
 Définition de l’altermondialisme :
Ce terme ne doit pas être confondu avec l’antimondialisme car ce mouvement ne s’oppose pas à
la mondialisation en général, mais à la mondialisation telle qu’elle existe aujourd’hui c'est-à-dire celle
qui est effectuée par l’action des firmes multinationales, des organisations mondiales (le FMI, Fonds
Monétaire International) et la Banque Mondiale.
 L’altermondialisme repose sur différents groupes sociaux :
Ce mouvement est structuré autour d’associations qui ne prétendent pas représenter un groupe
social particulier (exemple : ATTAC, Association pour la taxation des transactions financières et l’aide
aux citoyen, créée en 1998). Cependant, on retrouve dans ce mouvement les acteurs traditionnels des
conflits sociaux. Ainsi, les syndicats prennent part aux actions de ce ces mouvements. Ainsi, les adhérents
de ces associations sont souvent des adhérents de syndicats ou de partis politiques « traditionnels »
(exemple : les associations de type ATTAC et la Confédération paysanne de José Bové)
 L’altermondialisme défend certaines valeurs :
Ce mouvement défend des valeurs universalistes : La protection de la dignité des personnes (lutte
contre le travail des enfants) ; protection de l’environnement pour les générations futures (lutte contre la
déforestation sauvage au Brésil) ; lutte contre les inégalités entraînées par les stratégies des firmes multinationales. Mais ce mouvement revendique aussi sur d’autres thèmes dont certains relèvent de la défense d’intérêt de groupes sociaux (l’opposition d’agriculteurs aux importations de pays pauvres…). Ce
mouvement dénonce donc le pouvoir économique considérable des firmes multinationales qui imposent
des décisions qui devraient relever du domaine politique et du débat démocratique.
 Les méthodes d’action :
Elles sont variées mais ont pour objectif de rendre les actions visibles, notamment au niveau des
médias. Internet joue un rôle de plus en plus important dans le domaine de la popularisation de ces luttes
(diffusion de l’information sur de nombreux sites, signature de pétitions, blocage de sites officiels…).
C. NMS et changement social :
1. Les NMS font apparaître de nouveaux conflits en remettant en cause la légitimité
d inégalités jusque là socialement acceptées.
Les NMS dénoncent de nouvelles inégalités mais aussi des inégalités qui étaient plus ou moins tolérées dans la société. Ainsi, le mouvement féministe n’est pas apparu parce que la situation des femmes
s’est dégradée mais parce que l’inégalité entre hommes et femmes est devenue intolérable aux yeux d’une
partie croissante de la population. De même, l’altermondialisme s’attaque à un processus de mondialisation qui était jugé inéluctable voire « naturel ».
Ainsi, un mouvement social réussit lorsqu’il parvient à faire perdre sa légitimité à l’inégalité qu’il
dénonce (une inégalité « juste » devient une inégalité « injuste »). Par exemple, les mouvements des
« sans papiers » ont beaucoup de difficultés à faire admettre à la société française que les droits des immigrés doivent être rapprochés des droits des citoyens français.
2. Les NMS développent de nouvelles valeurs et de nouvelles normes.
Les NMS permettent une transformation culturelle de la société parce qu’ils dénoncent et renouvellent son système de valeurs. Ainsi, le féminisme fait référence à l’égalité pour dénoncer le sexisme de
la société. Si la ou les valeurs mises en avant ne sont pas partagées par la société ou entrent avec une
valeur de la société alors il y a conflit. Par exemple, le débat sur la parité politique oppose deux valeurs :
10
l’égalité entre les sexes et l’universalisme politique (Un citoyen français ne se définit pas par son sexe,
son origine ethnique ou ses croyances religieuses). De même, dans le cas du PACS, il existe un conflit
entre la revendication d’une reconnaissance des couples homosexuels au nom de l’égalité et une définition plus traditionnelle de la famille (question de l’homoparentalité).
3. Les NMS essaient d’influencer les politiques publiques pour transformer la société.
Les NMS agissent sur la société en faisant modifier les lois, les règlements ou les décisions publiques : loi sur la parité, sur l’IVG, sur l’égalité professionnelle entre hommes et femmes ; le droit à la
contraception ; le PACS ; l’interdiction des farines animales… Toutefois, cette action sur l’Etat n’est pas
propre aux NMS. En effet, les conflits du travail se règlent aussi par le recours à la loi : loi sur les 35
heurs (ou son assouplissement), loi sur les licenciements…
Les conflits, liés au travail ou pas, contribuent donc au changement social. Néanmoins, tous les
conflits ne sont pas nécessairement révolutionnaires ; certains peuvent être conservateurs.
Les conflits conservateurs sont liés aux conséquences du changement sur une partie de la population. Ainsi, une profession va défendre ses intérêts contre l’intérêt de la majorité. D’autres conflits visent
à imposer des changements. Ainsi, la grève générale de mai 1968 en France ne visait pas qu’une hausse
des salaires mais une autre manière de vivre (la vie ne devait pas se résumer à : « métro, boulot, dodo »).
Par ailleurs, il est parfois difficile de déterminer les conséquences d’un conflit et donc si celui-ci
est porteur de changement. Par exemple, les revendications portant sur une hausse des salaires, et donc
de la valeur ajoutée plus favorable aux salariés, peuvent entraîner à long terme une transformation de
l’organisation de la production permettant d’économiser le travail et d’augmenter la productivité. Ces
changements engendrés par les conflits n’ont été souhaités par les acteurs.
Enfin, il existe des interdépendances entre la sphère « publique » et la sphère « privée » :
La loi sur les 35 heures peut entraîner, par exemple, des changements sociaux dans le partage des
tâches entre hommes et femmes.
Le développement de la scolarisation amorcé dans les années 1950-1960 a augmenté le niveau de
qualification des jeunes entrant sur le marché du travail mais a aussi contribué à remettre en cause
l’organisation du travail régnant dans l’entreprise. L’organisation du travail a donc dû s’adapter au
changement social.
11
Téléchargement