François Bon

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L’hiver le travail commençait dans la nuit encore. Le fer était froid sous la main et
tous ces tubes autour de soi semblaient un monde sans fin.
Tandis qu’on escaladait, échelle par échelle c’était comme si ces cubes l’un sur l’autre
formant encore des cubes sous vous s’enfonçaient pour vous repousser du sol, et tout autour
retenir des parois invisibles qu’on n’atteindrait jamais ; là-haut, bien plus haut, les derniers
tubes dressés accrochaient les lumières de la ville et luisant ils donnaient son relief à la nuit,
semblaient pendre du ciel jusqu’à nous pour nous enlever. Quand on arrivait où la veille on
avait cessé, en prenant appui sur la passerelle de métal on n’était plus que soi et le vent, les
voitures en bas passaient sans nous voir, le monde entier, tout plat sous vous, à l’infini vous
ignore et dans les filins, les entrecroisements cela sifflait : les autres on leur reparlerait à midi
dans la remorque si on avait quelque chose à leur dire, chacun était son chef et la façade
même en construction s’arrêtait un étage en dessous, nous laissant seul dans la nuit mais en
son sein, dans son vide; même les coffreurs ne grimpaient pas si haut que nous et devaient
attendre que l’architecture immobile des tubes dessine en creux la poussée du béton.
François Bon – Le Crime de Buzon – Les éditions de Minuit – 1986 – p.162-163
1/ Donne un titre à ce texte.
Travail au sommet
La Construction
2/ Ce texte est présenté sous une forme impersonnelle (l’auteur utilise le pronom indéfini
« on »).
Réécris-le à la première personne du singulier :
L’hiver mon travail commençait dans la nuit encore. Le fer était froid sous
la main et tous ces tubes autour de soi semblaient un monde sans fin.
Tandis que j’escaladais, échelle par échelle c’était comme si ces cubes l’un sur
l’autre formant encore des cubes sous moi s’enfonçaient pour me repousser du sol,
et tout autour retenir des parois invisibles que je n’atteindrais jamais ; là-haut, bien
plus haut, les derniers tubes dressés accrochaient les lumières de la ville et luisant
ils donnaient son relief à la nuit, semblaient pendre du ciel jusqu’à moi pour
m’enlever. Quand j’ arrivais où la veille j’avais cessé, en prenant appui sur la
passerelle de métal je n’étais plus que moi et le vent, les voitures en bas passaient
sans me voir, le monde entier, tout plat sous moi, à l’infini m’ ignore et dans les
filins, les entrecroisements cela sifflait : les autres je leur reparlerais à midi dans la
remorque si j’avais quelque chose à leur dire, chacun était son chef et la façade
même en construction s’arrêtait un étage en dessous, nous (me) laissant seul dans la
nuit mais en son sein, dans son vide; même les coffreurs ne grimpaient pas si haut
que nous (moi) et devaient attendre que l’architecture immobile des tubes dessine
en creux la poussée du béton.
3/ « les autres on leur reparlerait à midi si on avait quelque chose à leur dire,… »
Réécris ces deux propositions en remplaçant le pronom indéfini : « les autres » par
« l’autre ». Souligne les mots qui sont modifiés, analyse-les.
« l’autre on lui reparlerait à midi si on avait quelque chose à lui dire,… »
lui : pronom personnel, mis pour l’autre, 3e personne du singulier, complément d’attribution
du verbe reparlerait (du verbe dire)
Remarque : (on reparlera à Pierre  on lui reparlera
on dira quelque chose à Pierre on lui dira quelque chose)
Le complément d’attribution est aussi appelé complément d’objet secon.
4/ Voici quelques pronoms indéfinis : aucun (e,s), autre(s), autrui, certain (e, s, es), chacun
(e), grand-chose, je ne sais qui (quoi), le (la) même, n’importe qui (quoi), nul, on pas un,
personne, plusieurs, quelqu’un, tout (tous, toutes)…
Écris un court texte où tu utiliseras deux pronoms indéfinis de ton choix.
[ Attention, aux formes qui peuvent être pronom ou adjectif indéfini :
Nul n’entre ici sans que tous le voient. (pronoms indéfinis)
Nul chat n’entre ici sans que tous les chiens aboient. (adjectifs indéfinis)]
N’importe qui peut jouer à la loterie ; certains gagnent, beaucoup perdent et sont déçus.
5/ Sur le modèle de la phrase ci-dessous, construis une phrase avec deux propositions,
commençant par un participe présent et dont le sujet de la seconde proposition est sousentendu.
« Luisant, les tubes donnaient son relief à la nuit, semblaient pendre du ciel jusqu’à nous
pour nous enlever. »
Ramant sans relâche, les galériens s’épuisaient de jour en jour, devenaient squelettiques.
Tombant, le jeune cavalier ramassait la bride, remontait aussitôt en selle et reprenait
l’exercice.
6/ Conjugue le premier paragraphe de ce texte (L’hiver … sans fin.) au présent, puis au futur
simple.
Présent de l’indicatif :
L’hiver le travail commence dans la nuit encore. Le fer est froid sous la main et tous ces tubes
autour de soi semblent un monde sans fin.
Futur simple de l’indicatif :
L’hiver le travail commencera dans la nuit encore. Le fer sera froid sous la main et tous ces
tubes autour de soi sembleront un monde sans fin.
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