La révolte des Pays-Bas et la naissance des Provinces-Unies. Si aujourd’hui le nom des Pays-Bas nous évoque un pays indépendant depuis fort longtemps et membre de l’Union Européenne. Cependant, ce pays a connu d’autres noms et d’autres appartenances politiques. Les Pays-Bas, au départ nommée Belgique, sont passés de l’époque antique à l’époque médiévale entre les mains des romains puis des germaniques et enfin des Francs. Ainsi à l’époque moderne une partie des Pays-Bas, la Flandre, faisait parti de la maison de Bourgogne, de l’union en 1383 de Philippe le Hardi avec Marguerite de Male, héritière de Flandre. La maison de Bourgogne tentait par ce pied mis en Flandre, réaliser à son profit l’unification de tous les Pays-Bas. Ainsi dès 1428 Philippe le Bon, força sa cousine de Bavière à lui céder les provinces de Hollande, de Zélande, et de Frise, et fit donner la province d’Utrecht à son fils légitime. Son successeur Charles le Téméraire réussi quant à lui à acquérir le duché de Gueldre, en 1477. A la mort du téméraire, la Gueldre retrouvait son indépendance, mais le reste des Pays-Bas acquis étaient alors destinés à ses héritiers Habsbourgeois. Ces héritiers entreprirent de continuer l’unification des Pays-Bas. Ainsi Charles Quint en 1515-1524 se rendit maître de la Frise, et s’empare du pouvoir temporel dans la principauté ecclésiastique d’Utrecht en 1528. Par la suite il annexa en 1536 la Groningue et la Drenthe, et reconquit en 1543 la Gueldre et Zutphen. Les Dix-Sept provinces ainsi unifiées furent placées sous l’autorité d’une gouvernante générale résidant à Bruxelles, Marie de Hongrie, sœur de l’empereur. La gouvernante était alors assistée par trois organismes : le Conseil d’Etat soit le gouvernement central, le Conseil privé, et le Conseil des finances. Au cours du 16ème siècle les Provinces septentrionales firent des progrès rapides alors que les villes de Flandre auparavant prépondérantes déclinaient. Ainsi l’activité se retrouvé sur Anvers et les villes avoisinant les bouches de la Meuse et du Rhin. Ainsi une ville comme Amsterdam passa de treize milles habitants en 1514 à trente mille vers 1550. L’activité commerciale de ces nombreuses villes, les mettait en contact avec de nombreux autres pays comme l’Angleterre, la France, et l’Allemagne. C’est par ce biais là, que pénétra aux Pays-Bas de nombreuses idées de la Réforme. Ainsi dès 1521 Charles Quint répondait à cette expansion hérétique par la publication des Placards menaçants. Puis en 1525 à la Haye, le premier protestant fut brûlé vif. Annonçant alors une répression, qui allait faire d’autres victimes. Enfin en octobre 1555 Charles Quint transmet les Pays-Bas à son fils, Philippe II. Celui-ci prétendit appliquer la même politique centralisatrice dans ces pays, qu’en Espagne. Or jusque là les Pays-bas sous l’autorité des ducs de Bourgogne, puis des Habsbourg, avaient connu un régime politique très équilibré entre les Etats Généraux et les Etats Provinciaux, face à l’autorité du souverain. Or avec Philippe II, il y a l’instauration d’une politique personnel, en la personne de marguerite de Parme, qui confisquèrent le gouvernement du pays. Les Pays-Bas entrent alors dans un contexte politique nouveau. Ainsi, quel est ce contexte politique et religieux, qui fait éclater les révoltes aux Pays-Bas ? Mais aussi par quels procédés aboutit la fondation des Provinces-Unies ? Nous allons donc nous intéresser dans un premier temps à la première révolte des PaysBas, née d’une politique espagnole particulière, ainsi que d’une crise religieuse, aboutissement au remplacement de Marguerite de Parme. Ensuite, dans un second temps nous allons tenter de comprendre les mécanismes qui mènent de la révolte à la guerre, et enfin dans un troisième point nous traiterons des procédés qui ont amené à l’indépendance des Provinces-Unies. I. La première révolte des Pays-Bas. A. La politique espagnole. Il faut noter avant toute chose, que le sujet que nous traitons : les révoltes, la guerre et l’indépendance des Provinces-Unies… a pour usage d’être nommé la « guerre des QuatresVingts Ans », qui commence en 1568 et s’achève en 1648. De plus, ce long conflit comporte plusieurs phases de conflits et de trêves… bref des épisodes forts différents. La révolte des Pays-Bas dans son sens premier, selon Christophe de Voogd, est considérée comme achevée au début des années 1590. Il explique également qu’à l’intérieur même de cette période, les motifs, la chronologie et la géographie de la rébellion varièrent sensiblement. C’est donc dans un espace et une chronologie complexe, que nous allons tenter d’éclairer les phases de révoltes et d’union des Pays-Bas. Nous allons donc dans un premier temps nous intéresser à la politique espagnole aux Pays-Bas. a. L’affrontement entre les Pays-Bas et l’Espagne. Tout d’abord, il est important de remarque que le roi Philippe II ne voyage plus en Espagne depuis 1557, laissant alors à Marguerite de Parme le rênes du pouvoir. Cependant la gouvernante se retrouve vite en étau entre d’un côté la politique espagnole de Philippe II à mettre en application, tout en respectant les particularismes de chaque Provinces des PaysBas. Marguerite de Parme est alors assistée de trois conseils collatéraux : le Conseil d’Etat, le Conseil Privé, et le Conseil des Finances. Mais ses prérogatives se trouvent limitées par le consentement des Etats, via l’existence des états généraux (depuis 1464), et plus encore par les états provinciaux qui défendent les « libertés et franchises » de la confédération néerlandaise. Bref le pouvoir central de la gouvernante se trouve limité par les provinces qui souhaitent garder leur particularisme, au grand regret des grands seigneurs : les Bourguignons et les Habsbourgs principalement, qui souhaitent une unité des dix-sept provinces. Par ailleurs il faut noter que les pouvoirs du roi sont limités par les chartes de privilèges des villes et des provinces, dont les plus connues sont : la « Joyeuse Entrée de Brabant » de 1356 et le « Grand Privilège » de 1477. Limites notamment en matière fiscale et proclamant par ailleurs le droit des sujets à se révolter contre un prince tyrannique. Contrairement à Charles Quint, Philippe II ne comprend pas ces particularismes et le peuple néerlandais. Il évite autant que possible de se rendre au pays de « par-deçà », créant alors une politique éloignée. De fait cette politique éloignée, et méprisante de ses sujets, fait naître alors un décalage entre la politique qu’il souhaite et la politique de la gouvernante. On retrouve alors d’un côté Philippe II qui parle d’obéissance, alors que les provinces demandent la liberté. Les sujets et le souverain entrent alors dans un véritable dialogue de sourds. De plus le souverain espagnol tente d’instaurer de nouvelles taxes sur les biens immobiliers et mobiliers, mais rejeté en force par les états. Sa politique est de plus en plus mal vécue, et la tension s’accroît, ayant comme point d’orgue l’entretien des garnisons qui est mal supportée par la population. En effet l’armée espagnole est constamment présente. Suite à ces tensions le souverain renonce en 1561 à la présence des troupes espagnoles qui était le point de départ des révoltes, ainsi qu’à l’intervention contre la France depuis les Pays-Bas. Cependant, il laisse à Marguerite de Parme une garnison de trois milles hommes, et un groupes de conseillers royales favorables à l’autorité royale : Berlaymont, Viglius et le plus important l’évêque Granvelle. Ce triumvirat ayant pour but de mettre un terme à la domination des grandes villes et des grands nobles. Ce qui entraîne la fin de l’équilibre du régime politique qui était d’un côté les Etats Provinciaux et les Etats généraux, face à 2 l’autorité du gouverneur et des conseillers du gouvernement central. Les nobles se liguent alors contre l’évêque Granvelle qui apparaît comme le premier ministre et chef de l’Eglise, de plus en plus convaincu de l’absolutisme, de la centralisation et de la répression sévère de l’hérésie. Les nobles obtiennent alors son renvoi en 1564. Ainsi lorsque début 1565 le comte d’Egmont se rend en Espagne pour apporter les doléances de ses sujets, concernant la modération des « placards », il se retrouve face à dialogue de sourds. Ainsi le roi dans les Lettres du Bois de Ségovie des 17 et 20 octobre 1565, révèle qu’il ne laisserait aucun terrain aux nobles, ainsi qu’aux hérétiques. Il déclare alors qu’il exige une application plus stricte des Placards, le remplacement des magistrats négligents et il réaffirme la volonté de voir fonctionner l’Inquisition aux Pays-Bas. Cette affirmation politique absolutiste, plaça alors la gouvernante en porte à faux. En effet celle-ci depuis plusieurs mois s’était rapprochée de l’opposition et avait alors acceptée de modérer les placards contre les protestants. Bref la gouvernante opérait une politique plus souple, complètement lapidé par le coup de force du souverain. Ce décalage politique fit alors naître une ligue des grands nobles, dont le Prince Guillaume D’Orange, le comte d’Egmont et le comte d’Hornes… qui en janvier 1566 signent le manifeste intitulé le Compromis des nobles. Aboutissant en avril 1566, à une démarche solennelle, mais néanmoins armée, de nombreux gentilshommes. Désormais la révolte est tournée contre le gouvernement. Nous allons maintenant voir plus en détail ce qu’est le compromis des nobles. b. Le Compromis des nobles (1565-1566). Tout commence donc lors du départ de Granvelle début 1564, avec le rapprochement des calvinistes et l’opposition nobiliaire composée en majeur parti par de « bons » catholiques. Beaucoup de seigneurs demandent la modération des « placards » contre l’hérésie à condition que l’ordre public et leur pouvoir personnels soient préservés. Donc après l’épisode des Lettres du Bois de Ségovie (octobre 1565), et le durcissement de la politique du souverain, les partisans du compromis se sentent déçus. Commence alors un véritable mouvement de concertation des nobles, qui s’amplifie au fil des mois. Ainsi sous l’impulsion de Jean de Marnix, une requête intitulée Traité des grands et des nobles des Pays-Bas contre l’Inquisition d’Espagne, désignée plus tard comme le Compromis des Nobles, circule dans tous les Pays-Bas fin 1565 au début 1566, et récolte deux milles signatures notamment parmi la petite noblesse réformée. Cette requête réclame un changement radical de la politique religieuse, l’atténuation des Placards et l’abolition des l’Inquisition afin d’éviter l’émeute générale. Cependant la couche dirigeante autochtone qui sent ses privilèges menacés par le coup de force royal, se trouve face à une réflexion : faut-il qu’ils se soumettent à l’autorité du roi en passant par la punition des hétérodoxes ou doivent-ils s’allier avec les réformés au risque de trahir leur souverain ? Mais une version plus légère de ce manifeste est faite, ce qui lui vaut d’être rallié par la plupart des grands seigneurs. Ainsi le 5 avril 1566, le compromis est remis à Marguerite de Parme par quatre cents de ces gentilshommes, qui sont alors armés afin de faire une démonstration de force spectaculaire. Le manifeste pour l’ensemble demande l’allègement de l’inquisition. Mais certains nobles comme Orange, Egmont et Hornes ne se contentent pas de demander une modération des placards. En effet ils profitent de la position de faiblesse de la gouvernante pour exiger une plus grande part dans l’exercice du pouvoir. Marguerite de Parme accepte afin d’éviter qu’ils démissionnent du Conseil d’Etat, et surtout en attendant une décision de la part de Philippe II. Celui-ci met du temps à ratifier la modération entreprise, assortie d’une suppression de l’Inquisition… sa décision arrive trop tard : fin août 1566, alors en pleine crise iconoclaste, l’obligeant alors à faire machine arrière dans sa 3 politique. En attendant sa réponse Marguerite de Parme, doit alors composer avec d’une part le roi et d’autres part les confédérés. Le fossé entre le roi catholique et absolutiste, et la gouvernante confronté de près aux troubles, s’élargi à mesure que le temps s’écoule. C’est aussi lors de l’exposition du manifeste à la gouvernante, que valu le nom de gueux aux confédérés, par un conseiller de Marguerite de Parme. B. La crise religieuse et le mouvement iconoclaste. En corrélation à la politique espagnole bicéphale qui fait naître la révolte, il y a aussi la politique religieuse menée par Philippe II le très chrétien. Ainsi l’explosion iconoclaste se déroule en août et septembre 1566, alors que la tension est à son comble entre la gouvernante et les « Gueux ». La prise de position des nobles face à la gouvernante donne un élan et un impact positif sur la population néerlandaise. Fleurit depuis le printemps, tout un mouvement de pamphlet, de littérature, de ballades, d’images, de chansons réclamant la tolérance religieuse. Période à laquelle de nombreux exilés protestants sont de retour dans les Pays-Bas et pratiquent alors une prédication importante, surtout localisée dans les Pays-Bas méridionaux. On trouve dans les Pays-Bas méridionaux le Brabant, la Flandre, l’Hainaut et l’Artois. La prédication se fait dans les campagnes environnantes des villes. Ainsi très rapidement de nombreux artisans sont séduits par la Réforme, notamment à Ypres, Gand et Tournai. Préparant ainsi le terrain à la crise iconoclaste. En fait en faisant la promotion de la croyance au Salut par la Foi seule, les réformés rejettent alors le culte des images, les reliques des saints, ainsi que les cérémonies du culte catholique. Cérémonies considérées comme des impostures contrairement à la communication directe avec Dieu que procurent les textes saints, lors des cérémonies de prédication. Ainsi le mouvement iconoclaste, appelé aussi Beeldenstorm (Beelden : images ; storm : tempête), éclate en Flandre occidentale où les artisans et ouvriers sont très nombreux et où la prédication calviniste à un fort retentissement et une forte activité. C’est alors le 10 août 1566 qu’éclatent les premiers signes du mouvement, à Steenvoord au Sud de Dunkerque, s’attaquant l’église de leur ville, ainsi que les jours suivants aux églises des villes environnantes. Le 17 août le mouvement atteint la ville d’Ypres. C’est surtout avec le mouvement d’Ypres que la révolte iconoclaste se répand dans toute la Flandre, mais également en Zélande, en Hollande, à Utrecht, en Frise, et en Groningue où le mouvement s’éteint en septembre 1566. Le mouvement n’a pas atteints trois provinces où le protestantisme était peu important : en Artois, en Namur et une partie du Hainaut. Concernant les villes seules Lille, Bruges et Bruxelles sont épargnées, alors en pleins dans le mouvement. Dans de nombreux cas, surtout dans la partie septentrionale des Pays-Bas, la révolte est organisée, selon Catherine Denys et Isabelle Paresys. Des nobles et des notables prennent le mouvement en main à Utrecht par exemple. Les attaques sont purement religieuse et ne vise pas les autorités ou les marchands de grains, mais cependant très violentes. Concernant la politique de Marguerite de Parme face à ce mouvement, dès août elle fait des concession notamment dans sa Grande Ordonnance du 23 août, où elle vise la pacification en accordant aux calvinistes la liberté de culte, mais sous surveillance de l’Etat et à l’extérieur des villes. Cependant en sont exclus les anabaptistes, les iconoclastes et les rebelles. Par cette ordonnance elle ne parvient pas à mettre un terme au mouvement, puisqu’il continue encore un mois durant. Elle demande alors aux grands nobles un soutient de leur part. Certains comme Hornes et Egmont vont alors répondre à son appelle et tenter d’écraser les révoltes. Tandis que Guillaume et Louis de Nassau se démarquent en prônant la tolérance, et se démarquent et des calvinistes extrémistes et du Conseil d’Etat. Pour eux ni les uns- ni les autres ne convient à leur idéal politique. L’aide des nobles a été importante pour la 4 gouvernante qui a pu récupérer des villes de révoltés. En effet les nobles ont été très profondément marqués par les émeutes, et opposés à une prise d’armes contre le roi, permettant de se rallier à Marguerite de Parme. Ainsi de nombreux aristocrates ont aussi proposé leur aide à la gouvernante. De plus le 23 août de certains nobles du Compromis des Nobles signe un accord avec la gouvernante, offrant leur soutien à la Grande Ordonnance, et par la même ont dissout la Ligue du Compromis. Enfin fin 1566 Philippe II sous l’impulsion du Duc d’Albe rappelle à l’ordre sa sœur, qui réinstaure donc les Placards et l’Inquisition. Ceci ayant pour conséquence de raviver et pousser l’effervescence plus loin. Ainsi au Sud une politique d’éradication du protestantisme est instaurée avec l’aide de nobles comme Egmont et Hornes, qui ne veulent se révolter contre le souverain. Quant aux partisans de la révolte, ils se replient au Nord, où Guillaume d’Orange sera contraint de s’y rendre. En effet au départ les frères Nassau et les comtes d’Hornes et d’Egmont, étaient favorable à l’idée d’une paix de religion et d’un démantèlement pacifique e la politique royale. Mais tous se séparent lors de cette nouvelle effervescence, ou certains nobles catholiques comme Hornes et Egmont vont rallier la cause du souverain. Ainsi les troupes de la gouvernante marchent avec succès sur les villes des révoltés, et au printemps 1567 de nombreuses villes des provinces wallonne sont reprises, et de nombreux calviniste reviennent au catholicisme ou décident alors d’émigrer en Angleterre, en Allemagne ou encore en Scandinavie. Le mouvement s’essouffle face à de longs sièges. Ainsi de grands nobles comme Guillaume d’Orange pense qu’il est plus prudent de s’exiler, ainsi ils gagnent l’Allemagne, et plusieurs à Dillembourg en Rhénanie résidence familiale des Nassau d’où ils organisent une résistance. Suite à ces évènements Philippe II Enfin pendant que la gouvernante lutte contre les rebelles, une armée est envoyée par le souverain, en direction des Pays-Bas. C. Le remplacement de Marguerite de Parme par le Duc d’Albe. a. Instauration d’une politique de terreur et du Conseil des Troubles. L’armée contourne la France par l’Est, tout d’abord car il y a la deuxième guerre de religion en France en 1567-1568, puis car le souverain concentre dans son armée des hispaniques mais aussi des napolitains et des mercenaires germaniques. En effet Philippe II, doit une partie de son armée à des ducs catholiques germaniques et italiens. Même si certaines provinces germaniques sont réticentes, certains bons catholiques sont prêts à fournir le nombre d’hommes nécessaire. Du reste si Philippe II a du soutient par des catholiques, sa mission est unique : extirper l’hérésie et l’opposition aux Pays-Bas. Pour cela il faudra au duc punir de façon exemplaire les grands aristocrates, les villes et les peuples en révolte contre l’autorité royale, avec l’injonction de faire observer strictement les Placards. C’est alors au Duc d’Albe qu’il en confie la charge et la réussite. Albe est un Grand d’Espagne et surtout Chevalier de la Toison d’Or, il compte donc exécuter les ordres du souverain auquel il conseillait quelques mois auparavant la fermeté et la sévérité. Ainsi le duc arrive le 22 août 1567 à Bruxelles, et dès septembre il frappe fort. En effet il fait arrêter les comtes d’Hornes et d’Egmont, qui pourtant n’avaient pas pris les armes contre l’autorité du roi et de plus sont de fervents catholiques. Ces arrestations font alors démissionner Marguerite de Parme, qui ne comprend l’arrestation de nobles qui l’a soutenaient. Le duc instaure en outre une véritable inquisition civile d’exception : le conseil des Troubles, très rapidement rebaptisé le conseil du Sang (bloedraad). Ce conseil a pour but de juger les infractions aux Placards, et de gérer les biens confisqués. Le bilan de ce conseil est de douze milles inculpés entre 1567 et 1576, onze milles confiscations et plus de milles exécutions ; dont les comtes d’Hornes et d’Egmont en 5 juin 1568. Le prince d’Orange quant à lui se fait confisquer ses biens, et a été banni en 1568. Son exil lui a peut-être valu de ne pas être exécuté. Le conseil des Troubles devient un organe centralisateur et souverain, comme le souhaitait Philippe II. Ce système est surtout d’une redoutable efficacité puisqu’il surveille aussi les tribunaux civils et ecclésiastiques. Ceux-ci continuent de juger les hérésies, mais ils doivent faire approuver leurs sentences par le conseil. De fait en s’introduisant dans les institutions locales, et ne les ménageant guère, la politique du Duc d’Albe est très impopulaire puisque c’est une politique de terreur. En effet le duc d’Albe, a fait appel dans son système de répression et de justice à trois magistrats espagnols, dont un Juan Vargas est particulièrement violent, et est particulièrement bien écouté par le duc. Celui-ci a réussi l’instauration de la terreur, et de la fin des rébellions. Cependant la répression fléchie, lorsqu’en juillet 1570 il y la multiplication des appelles à la clémence, notamment de Marguerite de Parme et de Granvelle. Philippe décide alors d’accorder le pardon à tous ceux qui abjureraient leurs erreurs, ceci contre l’avis du duc d’Albe. Ainsi autour de 1573 le conseil des Troubles est quasi inactif, date à laquelle la seconde révolte est mâtés. Lors de seconde révolte de 1572-1573, les procédures du conseil sont très meurtrières : avec neuf exécutions sur dix procédures. Aussi les trois quarts des procédures et poursuites concernent les provinces méridionales. De plus la noblesse dans la province de Hollande, d’Utrecht, de Frise et de Groningue, est très touchée par les poursuites et exécutions. Après la politique de terreur du duc d’Albe il est intéressant de s’intéresser à la politique fiscale mise en place : b. La politique fiscale. Comme nous l’avons vu, la politique de terreur mise en place est très impopulaire, de plus il faut noter que la politique fiscale que le duc instaure accroît aussi son impopularité. Ainsi il a besoin d’argent pour maintenir l’ordre et repousser les révoltes, ceci notamment par la présence permanente de troupes, construction de citadelles… De plus le souverain espagnol n’est plus en mesure de subvenir aux besoins, car il y a un affaiblissement des rentrées financière venant des Amérique, et surtout l’Espagne a deux fronts à combattre : les Pays-Bas et les Turcs. L’augmentation des taxes aux Pays-Bas avait déjà été réalisée, mais manquant toujours de moyens, le duc d’Albe décide d’en créer trois nouvelles : le centièmes Denier, soit un pourcent de la valeur des biens immobiliers ; le vingtième Denier, soit cinq pourcent de la propriété immobilière ; et le dixième Denier, soit dix pourcent des ventes, ce qui constitue une taxe indirect. Cette taxe indirecte est alors la plus impopulaire car elle pénalise l’activité commerciale vitale notamment pour les villes portuaires comme Anvers et Amsterdam. De plus Albe entend bien se passer des Etats généraux et provinciaux. Ainsi en 1569 c’est Philippe II qui sous la pression, organise de nouveaux Etats Généraux. Ceux-ci réussissent alors à différer les paiements du dixième et du vingtième Denier, mais à partir 1571, Albe en exige le paiement par la force, méthode à laquelle la population résiste, notamment par la grève. Malgré toute la politique centralisée mis en place par le duc d’Albe, la population encore révoltée continue sa propagande. Notamment en cultivant l’esprit de résistance chez les exilés. Des images et des textes justifiant la cause des révoltés sont diffusés clandestinement. Donc malgré la politique répressive du duc d’Albe, les révoltés continuent de crier que Philippe II est hors de ses droits, puisqu’il a violé les droits et libertés des néerlandais, qui de fait se sont révoltés selon leurs droits, mais révoltes que le roi a mâté. Désormais nombreux ceux sont qui veulent leur indépendance. Ainsi la seconde révolte éclate en 1572… 6 II. De la révolte à la guerre. (1572) A. Du « désordre » des Pays-Bas à la pacification de Gand. a. La seconde révolte de 1572 ou le sursaut des Gueux. Si la seconde révolte éclate en 1572, c’est surtout lié aux exigences fiscales énumérées plus haut. Ainsi l’exigence fiscale dans certaines provinces jusque là obéissantes, retenti alors comme une déclaration de guerre, selon Christophe de Voogd. C’est alors que le 1er avril 1572 la flotte des gueux de mer réussie à entre dans les ports de La Brielle (Zélande), et dans l’estuaire de la Meuse. Cette flotte est constitué de nombreux horizons : des nobles, des roturiers, des proscrits, des fugitifs, des catholiques, des protestants… d’origine hollandaise, zélandaise, flamande, mais aussi française, anglaise, allemande, mais aussi quelques déserteurs espagnols… Cette flotte ressemble plus à des pirates et à une pègre maritime qu’à une flotte de guerre. Ainsi lorsque les troupes espagnoles sont appelées à renforcer la frontière française, les gueux profite de ce moment pour prendre des villes portuaires comme La Brielle, par le protestant Guillaume de la Marck, puis ses hommes prennent Flessingue cinq jours plus tard, lieu stratégique puisqu’il permet de contrôler l’embouchure de l’Escaut. Suite à cette arrivée des révoltés, des villes vont alors se rallier à leur mouvement, formant ainsi des enclaves en Zélande et en Hollande. Cependant Middelbourg en Zélande et Amsterdam en Hollande, restent fidèles au gouvernement de Bruxelles. Par ailleurs d’autres villes se rallie aux révoltés, pour des raisons plus économiques notamment pour l’accès illimité à la mer, pour la pêche et le commerce. D’autres villes comme Rotterdam se rallie après avoir subi des exactions des troupes espagnoles, ou par pression de la population ou des émissaires d’Orange sur les régents loyalistes. Enfin les provinces septentrionales, bascule dans la résistance, ce qui est le cas d’une grande partie de la Gueldre et de l’Overijssel. Ceci grâce à la venue de rebelles d’Allemagne. Ainsi en juillet 1572 Guillaume d’Orange fait son retour dans les Pays-Bas. Les Etats de Hollande décident au même moment de se réunir à Dordrecht, sans l’accord du roi et sans la présence du stadhouder, pour rétablir le prince d’Orange dans ses trois provinces qu’il gouvernait avant son exil. C'est-à-dire la Hollande, la Zélande et l’Utrecht. Pour lui redonner son statut les Etats, justifient par le fait qu’il n’ait pas été démis de ses fonctions selon les coutumes et privilèges du pays. De plus ils le nomment protecteur de l’ensemble des Pays-Bas « en l’absence de sa Majesté », niant alors complètement l’autorité du duc d’Albe. En échange Orange promet de ne pas gouverner les provinces sas le consentement des Etats. Concernant les provinces méridionales dans l’Hainaut et le Brabant seule quelques villes se rallient aux révoltés, comme Malines, Louvain et Oudenarde. Dans l’Hainaut, Louis de Nassau s’empare de Mons, une forteresse. Avec l’aide d’huguenots français il résiste au siège du duc d’Albe. Cependant Louis de Nassau attendait du renfort de la part de quinze milles huguenots français, qui n’arriveront jamais puisque éclate la saint Barthélemy le 24 août 1572. Désormais ils sont seuls à Mons, et cela rend alors service à l’armée espagnole, qui craignait l’alliance avec les huguenots français, qui aurait certainement affaiblie la position espagnole selon Catherine Denys et Isabelle Paresys. En réaction Guillaume d’Orange tente en vain de faire éclater une insurrection méridionale générale, mais Anvers, Bruxelles et les villes flamandes en général ne réagissent pas. En septembre 1572 Mons doit alors capituler, et Albe écrase alors toutes les autres villes révoltées du Sud. Ainsi l’armée espagnole à Malines, qui s’était révoltée, pille et saccage la ville en assassinant protestants et catholiques. Par cette lutte réussie du duc d’Albe contre la révolte en Hainaut et dans le Brabant, il espère une même capitulation au Nord. Ainsi en octobre il marche sur la Gueldre, ce qui inquiète Guillaume d’Orange qui sait que les Gueux peuvent difficilement tenir, et craint alors que la Zélande et 7 la Hollande ne puissent résister. Pour dissuader les révoltés de maintenir leur effort, le duc d’Albe emploi la méthode sanglante qui consiste à faire des massacres exemplaires, durant le mois de décembre 1572. Sa méthode marche puisque la population est terrorisée, ainsi des cités en Gueldre, en Overijssel et en Frise se rendent. Le duc décide alors de faire un siège à Haarlem, puis à Leyde. La lutte est très longue et très violente. Ainsi après ces longs mois de sièges du duc, qui multiplie par ailleurs les atrocités, Philippe II rappel le rapelle. En effet les sièges trop coûteux en temps, demande aussi de nombreux hommes, ce qui mène à de grosses dépenses… que le roi n’accepte plus. En fait la transformation d’une simple opération de maintient de l’ordre en guerre d’usure oblige le souverain espagnol à infléchir sa tactique. Infléchir ne veut cependant pas dire, renoncer à ses objectifs. Ainsi il remplace le duc D’albe, par Luis Resquesens en novembre 1573. Aussi les méthodes tyranniques du duc, aliénaient à sa cause beaucoup de nobles et de catholiques modérés. Par ailleurs il faut noter que durant tous ces sièges, les proscrits des Pays-Bas méridionaux affluent en grand nombre, dans les provinces orangistes. Ainsi depuis 1576, le foyer le plus virulent se trouve autour de la Hollande et de la Zélande. Ce moment, selon Catherine Denys et Isabelle Paresys, est alors le point culminant de l’entente des révoltés contre l’Espagne, puisque ensuite les antagonismes religieux l’emportent et finissent par diviser. Cette mésentente profite à Philippe II, qui parvient alors à maintenir son autorité sur les Pays-Bas méridionaux. Enfin Philippe II va se servir de ces provinces pour essaye de reconquérir les Pays-bas du Nord. b. L’entente des Pays-Bas contre l’Espagne, avec la pacification de Gand. (1573-77) Le nouveau gouverneur Luis Resquesens adopte une politique de détente, avec pour objectif de pacifier les Pays-Bas tout en voulant faire capituler le Nord du pays. En 1574 le nouveau gouverneur accorde son pardon général, supprime le Conseil des Troubles et les impôts impopulaires. Cependant il maintient ses troupes, et décide alors de les faire avancer jusqu’au Nord, par-delà les grands fleuves comme l’Escaut. Pour repousser l’armée, et sauver le Sud de la Hollande, le prince d’Orange décide de faire ouvrir les écluses et percer les digues pour inonder le pays. Poussant alors Resquesens à lever le siège autour de Leyde. Puis en juin 1575, la Hollande et la Zélande s’unissent, et instaure un embryon d’Etat constitué d’un organe administratif et financier commun, avec un seul stadhouder qui n’est autre que le prince d’Orange, alors chargé de garantir la liberté de conscience. Mais le prince d’Orange se charge, aussi, de tenter d’imposer aux calvinistes extrémistes, la tolérance de toutes les confessions. Commencent alors en 1575 des négociations entre orangistes et espagnols, en vain puisque les négociations échouent. Donc le 13 octobre 1575 la Hollande et la Zélande rejettent l’autorité du souverain, et appellent alors à la réunion des Etats Généraux afin de rétablir la paix. Ces mêmes Etats Généraux chargent alors le prince d’Orange de trouver un nouveau souverain, auprès de princes traditionnels mais opposé à l’Espagne. Ainsi il se tourne vers Elizabeth Ière d’Angleterre. Mais elle ne s’engage pas par prudence, mais leur apporte un soutient financier. Alors Guillaume d’Orange s’adresse à la France et plus particulièrement au duc d’Anjou, le frère d’Henri III, catholique mais regardant avec attention, pour son aide apportée aux huguenot lors de la cinquième guerre de religion (1574-1576). Par ailleurs l’autorité espagnole se retrouve aussi affaiblit, car après de la mort de Resquesens en mars 1576, le pouvoir est vacant en attendant son successeur Don Juan d’Autriche, le frère de Philippe II. En effet son successeur arrive aux Pays-Bas en novembre 1576. Ces mois de vacances de la charge de gouverneur permet alors aux Etats Généraux de s’imposer politiquement et d’organiser un mouvement de résistance face aux armées espagnoles qui saccagent la Flandre et le Brabant tout particulièrement, pour se dédommager 8 des arriérés de solde qui leur sont dus. Leurs exactions provoquent des insurrections comme à Bruxelles en juillet 1576. C’est par l’initiative des provinces du Brabant, des Flandre et de l’Hainaut, que se réunissent les dix-sept provinces, afin d’envisager une défense commune. Ainsi et pour la première fois depuis le début de la guerre, il y a une situation révolutionnaire : en se réunissant sans l’accord du roi, et en s’arrogeant la droit de prendre des mesures législatives et de mener des négociations sur la paix ou la guerre. De plus grâce à la Furie d’Anvers le 4 novembre 1576, le processus d’entente entre les provinces s’accélère. La Furie d’Anvers est en fait la mutinerie sauvage de la garnison espagnole, qui privée de solde, pillent, violent et tuent sept milles personnes, et brûle un tiers de la ville d’Anvers. Cet évènement permet alors à Amsterdam de prendre le monopole économique d’Anvers, lié au commerce fluvial, car Anvers est complètement saccagé. Enfin, quelques jours plus tard, le 8 novembre 1576, les Etats Généraux alors réunis à Gand, publient un texte d’entente connu sous le nom de la Pacification de Gand, qui est signée par l’ensemble des députés de toutes les provinces des Pays-Bas. Cette Pacification exige le départ des troupes espagnoles et étrangères, l’arrêt de la répression dans tous les Pays-Bas, et l’autorisation du culte calviniste en Zélande et Hollande uniquement. Concernant la question de culte et de confession des autres provinces, la question est reportée à plus tard. Cette institution se comporte alors comme l’autorité souveraine. Ainsi lorsque le nouveau gouverneur Don Juan d’Autriche, fils bâtard de Charles Quint, arrive aux Pays-Bas, il est alors mis devant le fait accompli, et est alors contraint de ratifier la Pacification par l’Edit Perpétuel de février 1577. De fait il renvoi alors l’armée espagnole vers l’Italie, condition indiscutable pour qu’il soit reconnu gouverneur. Cependant, avec cet édit, les Etats Généraux promettent d’appliquer et de maintenir le catholicisme romain. Or cette clause est contraire à ce qu’avait demandé et obtenu la Zélande et la Hollande dans la Pacification, donc ces deux provinces ne ratifient pas cet édit. C’est le début de la division entre les provinces… Enfin en octobres 1575, la Hollande et la Zélande se prononcent pour le rejet de temporaire de la suzeraineté de Philippe II, et demandent alors la protection de François de Valois frère d’Henri III. B. La confusion dans les Provinces-Unies fait naître l’Union d’Arras. a. Vers la division des rebelles. (1577-78) Dès 1577, au sein des Etats Généraux trois tendances se manifestent : la première concernant les catholiques modérés, notamment les wallons, qui se regroupent autour du duc d’Aerschot gouverneur des Flandres qui pressent une demande à l’archiduc Mathias de Habsbourgs, pour remplacer le gouverneur actuel ; la seconde tendance concerne les calvinistes te les « patriotes » qui soutiennent le prince d’Orange et font régner les lois calvinistes dans les villes catholiques ; enfin la troisième tendance est issu de Guillaume d’Orange lui-même, qui souhaite apaiser les rivalités qui l’opposent aux grands seigneurs du Sud, tout en imposant une paix de religion aux calvinistes révolutionnaires, en rassurant d’un autre côté les magistrats modérés… Son objectif est alors d’éviter la division des Pays-Bas. Les Etats Généraux décident alors de choisir un gouverneur général, en la personne de l’Archiduc Mathias. Cet archiduc très catholique puisque c’est un Habsbourg, n’est en fait que le fils de l’empereur Maximilien II, et le cousin du roi espagnol. Cependant Philippe II ne le reconnaît pas, ce qui n’empêche pas l’archiduc de séjourner, dans les Pays-Bas jusqu’en 1581, malgré la présence du gouverneur reconnu par le souverain. En janvier 1578, Guillaume 9 d’Orange est alors nommé stadhouder, soit le lieutenant général des Pays-Bas. Cette époque 1577-78 est le sommet de la gloire du prince. Philippe II malgré les évènements est bien décidé à reconquérir ses terres, et à garder sa mainmise et son autorité sur ces Dix-Sept provinces. Ainsi il envoi du renfort à Duan Juan : Alexandre Farnèse le neveu du roi, soit le fils de Marguerite de Parme. Ainsi en janvier 1578, les Espagnols commencent la reconquête des villes insurgées. Mais certaines grandes places résistent comme Gand, Bruges, Anvers et Bruxelles. De plus malgré une demande du prince d’Orange à une tolérance, se répand une véritable terreur chez les calvinistes des provinces du Sud. Cette terreur amène alors les catholiques à rechercher des protections. Le gouverneur catholique du Hainaut prend alors contact avec François duc d’Anjou, pour contrer le prince d’Orange. Par ces faits Elizabeth Ière d’Angleterre est inquiète des ambitions françaises, de fait elle propose alors d’en appeler à Jean Casimir comte de palatin. Dès lors les Pays-Bas qui ont un souverain légitime, Philippe II, mais surtout de nombreux « défenseurs des libertés »… en les noms d’Orange, Aerschot, l’archiduc Mathias, le duc d’Anjou, et puis en le nom d’Alexandre Farnèse. La défense des libertés, est donc une notion variable suivant les défenseurs. Les provinces sont désormais divisées, et la guerre civile religieuse menace. Ces antagonismes religieux sont alors à l’avantage de Farnèse, qui pense en tirer profit. En effet les « Malcontents » en particulier les Wallons refusent l’autorité calviniste, et rejettent, du même coup, le zèle excessif de Jean Casimir pour le calvinisme. Quant aux grands seigneurs catholiques ils se rapprochent du souverain espagnol. Par ailleurs, il faut noter que le clivage religieux n’est pas une cause unique, en effet il est aussi question de clivages sociaux : en effet au Sud les grands nobles, craignent la caste praticienne très présente au Nord. Ce clivage social fait aussi vaciller le semblant d’unité et de paix des Provinces-Unies. b. L’Union d’Arras et l’union d’Utrecht : une séparation consommée. La division s’accentue lorsqu’à l’automne 1578, les députés de l’Artois, du Hainaut, des villes de Lille, de Douai et d’Orchies réunies à Arras, refuse combattre l’Espagne. Ils demandent alors un retour à la pacification de Gand, ainsi qu’un retour au catholicisme comme seule religion de leurs provinces, et surtout ils souhaitent la réconciliation avec l’Espagne en échange du retrait des troupes et surtout en échange du respect de leurs privilèges. Ainsi le 6 janvier 1578 les malcontents et les catholiques s’unissent autour de l’Union d’Arras. Cette union fait alors naître une union calviniste, en réponse à celle-ci, le 23 janvier suivant. Cette union regroupe les provinces de Hollande, de Zélande, d’Utrecht, de la Gueldre, puis un peu plus tard de la Frise, de la Groningue et de l’ Overijssel. Ainsi que le rattachement de quelques villes des provinces du Sud : Bruges, Gand, Anvers, Breda… du reste les villes à domination calviniste. Tous s’unissent autour de l’Union d’Utrecht, en s’engageant pour la liberté religieuse des provinces, mais aussi à combattre l’autorité espagnole en se munissant d’un organe fiscal et militaire commun. Cette union d’Utrecht est alors la base constitutionnelle des Provinces-Unies. Ces deux unions ne sont, par ailleurs, pas reconnues officiellement comme une rupture, mais en sont tout de même le point de départ. C. Les Pays-Bas espagnols contre les Provinces-Unies. a. De la Paix d’Arras à la déclaration de déchéance du roi. Cependant très rapidement l’union d’Arras et Farnèse, concluent une paix séparée, la Paix d’Arras en mai 1579. Ainsi les provinces sont pour un retour à la situation législative et 10 fiscale prévalent sous Charles Quint, ainsi qu’à la nomination d’autochtone aux hautes charges des provinces. La rupture entre l’union d’Arras et l’union d’Utrecht est alors consommée. D’un côté se trouvent alors les Pays-Bas espagnols et de l’autre les ProvincesUnies. Pourtant Philippe II n’est satisfait que par un point de l’union d’Arras : l’unicité du catholicisme dans les provinces qui se sont ralliées à son autorité. En effet Farnèse a du verser beaucoup d’argent aux nobles catholiques pour qu’ils acceptent ce ralliement. De plus Farnèse doit alors confirmer la Pacification de Gand et l’Edit perpétuel, tout en garantissant le retrait des troupes, et maintenir les privilèges traditionnels des Pays-Bas. Philippe n’abandonne pas l’idée de reconquérir les provinces de l’union d’Utrecht, même s’il la met de côté pendant un temps ; et dès juin 1579 Farnèse entreprend une nouvelle conquête vers le nord. Toujours en réaction, les provinces ralliées à l’union d’Utrecht et des Etats Généraux montent aussi d’un cran dans la révolte. Ainsi le 26 juillet 1581, les Etats Généraux par l’Acte d’abjuration, déchoient Philippe II de sa souveraineté, il est alors considéré comme un tyran. La souveraineté est alors offerte au Duc d’Anjou. Rapidement le souverain Valois, se mettre « arrogant, impérieux et catholique » selon Christophe de Voogd, par le fait que celui-ci fut élevé à l’école française, alors en plein essor de l’absolutisme. De fait l’entente entre le duc et ses sujets fut un échec, tandis que l’aide française était alors limitée. Cependant Guillaume d’Orange défend le duc d’Anjou, jusqu’en 1583 où il tenta un coup d’Etat sur Anvers. Coup qu’il manque et qui suffit alors à le discréditer. De fait, le duc d’Anjou rentre en France, et y meurt en 1584. b. La reconquête espagnole. En juin 1579, reprend donc la volonté Espagnole de reconquérir les Provinces du Nord rattachée à l’union d’Utrecht. Très rapidement Farnèse récupère des villes stratégiques comme Maëstricht, ville frontière sur la Meuse, d’où il peut contrôler les communications avec le Nord et l’Empire. Concernant les villes de Flandres et du Brabant, entre 1581 et 1584 Farnèse rallie : Douai, Audenarde, Dunkerque, Ypres, Bruges, et Gand. Ainsi que durant l’été 1585, il réussit à reprendre Malines, Anvers et enfin Bruxelles. Cette réussite a été possible grâce à deux évènements majeurs, qui ont affaibli l’unité des provinces insurgées : tout d’abord la tentative de coup d’Etat « absolutiste », terme qu’utilise Arlette Jouanna, du duc d’Anjou ; puis ensuite l’assassinat du prince d’Orange le 10 juillet 1584, le symbole de la résistance. Se pose alors le problème du secours extérieur et la forme du pouvoir à adopter. Mais la France alors en pleine guerre civile, seule l’Angleterre menacée par le complot catholique et la reconquête espagnole aux Pays-Bas peut réagir. Ainsi pour parer l’avancée espagnole, les Etats Généraux obtiennent l’aide d’Elizabeth Ière qui leur envoi le comte de Leicester, pour mener les troupes anglaises de six milles hommes et les troupes des provinces révoltées. Cette alliance est alors scellée en août 1585 par le Traité de Nonsuch. Ce traité veut surtout forcer le roi Philippe II a entamer des négociations, ceci par l’arrivée de Leicester et en prenant en gage La Brielle et Flessingue. Alors au cours de l’année 1585, Leicester, contre l’avis de la reine, est nommé gouverneur général. Cependant rapidement il se montre incapable de renverser la situation militaire, et il se heurte à la fois à la reine qui négocie de son côté avec Farnèse, puis de l’autre les Provinces-Unies qui doutent de lui et craignent un double jeu. Leicester se retrouve rapidement au cœur d’intrigues, l’obligeant alors à rentrer en Angleterre en 1588. Philippe II cette même année décide alors d’envoyer l’Invincible Armada pour écraser les Provinces et villes insurgées des Pays-Bas, tout en employant une guerre contre les Anglais, afin de combattre un grand nombre d’hérétiques. En effet l’intervention d’Elizabeth Ière apparaît à Philippe II comme une déclaration de guerre. Cette offensive lancée l’été 1588, tourne en faveur des révoltées, puisque Farnèse est appelé à marcher sur Londres, pour cela il doit donc retirer ses troupes de Provinces-Unies. Alors qu’au même moment 11 l’Invincible Armada est mise à néant par les Anglais, au large des côtes anglaises. En interaction intervient la guerre civile française, où Philippe II envoie Farnèse soutenir la ligue catholique. Les Provinces-Unies profitent de se retrait espagnole pour reprendre des villes comme Breda, Zupten, Deventer et Nimègue… obligeant alors Farnèse à revenir aux PaysBas en 1591. Or Philippe II, le contraint de retourner en France, soutenir les catholiques, Farnèse y est blessé et meurt alors en France en 1592. Les Pays-Bas se retrouvent de fait sans chefs, et les espagnols pris entre la révolte néerlandaise et son jeu d’alliances avec l’Angleterre et la France, cèdent du terrain. Il est important que ce jeu d’alliance rend internationalise le conflit, ce que Guillaume d’Orange souhaitait depuis toujours. Par ailleurs les espagnols cèdent du terrain par le fait de la banqueroute de 1596. Conjointement à cette « crise » espagnole qui a désormais deux fronts, et qui n’a plus de chef militaire, dans les Provinces-Unies depuis 1587 Maurice de Nassau, fils de Guillaume d’Orange, se montre particulièrement fin stratège. Puisque c’est lui qui a pu récupérer les villes en Brabant et en Flandres dans les années 1590. c. La fin d’une alliance avec l’Angleterre et la France, fait naître la paix de Douze Ans. La réussite néerlandaise est cependant freinée en 1598 par la paix entre Henri IV et Philippe II, ainsi qu’en 1604, par la paix signée entre l’Espagne et les Pays-Bas. Ainsi l’Espagne n’a plus d’ennemis en plus. De fait les Pays-Bas se retrouvent alors sans soutient financier tout particulier de l’Angleterre, et donc sans défense extérieure. C’est au même moment que les Pays-Bas espagnols se retrouvent doté d’un nouveau chefs de guerre : Ambrosio Spinola. Ainsi en 1606 Spinola tente une reconquête des pays insurgés, par le flanc oriental. Il réussit alors à s’emparer de villes en Overijssel et en Gueldre. Puis en 1607, s’engagent des pourparlers de paix et un cessé le feu est instauré. Ce fait naît notamment du parti espagnol, qui se trouve confrontée à de gros problèmes financiers, et qui ne trouve plus assez de ressources pour ce conflit qui lui coûte, selon Catherine Denys et Isabelle Paresys : cinq millions de Florins par an. C’est par ce manque de ressources financière, qu’éclate en 1506 une mutinerie de garnisons impayées, comme celle de 1576. Par ailleurs, du côté des rebelles, l’effort de guerre est aussi très lourd, puisque les effectifs militaires ont double, et surtout les dépenses pour les fortifications ont quintuplé. Enfin, une paix avec l’Espagne permettrait surtout aux Provinces-Unies de restaurer leur commerce avec la péninsule et en méditerrané, et surtout de mettre fin à une guerre qui traîne en longueur. Cependant les négociations à partir de 1607, sont longues et difficiles, par la méfiance des deux partis après quarante ans de guerre. La participation de la médiation franco-anglaise, entre les deux partis, devient alors importante, puisqu’elle propose des solutions. Le plus gros « problème » dans la négociation de la paix est la question de la souveraineté. La trêve de Douze Ans est signée le 9 avril 1609, à Anvers, par les représentants des Provinces-Unies et les représentants du roi Philippe III, l’archiduc Albert d’Autriche et la fille du souverain espagnol : Isabelle-ClaireEugénie ; qui depuis 1598 règnent sur les Pays-Bas. De fait le roi d’Espagne reconnaît les Provinces perdues comme un Etat souverain sur lequel il n’a plus aucune autorité depuis longtemps. Cependant l’indépendance reste très théorique, puisque si les archiducs meurent sans descendance les territoires néerlandais reviennent au roi d’Espagne. En fait l’Espagne souhaite toujours, garder une mainmise permanente sur les Pays-Bas. La trêve est un semblant de paix, puisque tout repose sur des subtilités diplomatiques et sur des clauses particulières. 12 III. La fondation des Provinces-Unies. Enfin nous allons aborder les piliers de la fondation des Provinces-Unies. Ainsi nous pouvons avant tout, aborder la question de l’expérience républicaine. A. L’expérience républicaine a. La création de la république. Ainsi Catherine Denys et Isabelle Paresys, parle d’une expérience républicaine de 1581 à 1702. Cette limite étant hors de notre sujet. Donc on parle de la naissance d’un nouvel Etat en juillet 1581, du rejet de la souveraineté habsbourgeoise par les Provinces du Nord. Suit alors quelques années, de recherche d’un nouveau prince… en vain, puisque parmi toutes les expériences aboutissent à l’échec, comme nous l’avons vu précédemment. Ainsi les Provinces6unies finissent par se doter d’un régime politique « original » : une république. Son originalité, repose alors sur le fait que les institutions reposent sur une idée que la souveraineté est populaire. L’idée de souveraineté collective, n’est pas innée aux révoltés, elle découle des expériences faites avec les différents princes : Espagnols, Anglais, Français, Germanique… Enfin cette république étonne les contemporains, par la diversité des confessions religieuses de ses habitants. L’idée de république, naît immédiatement de l’Acte d’abjuration du 26 juillet 1581, où les Etats Généraux déchoient Philippe II. Pourtant, loin est l’idée de se défaire du régime monarchique. L’idée comme nous l’avons dit germe principalement par l’échec de Mathias, d’Anjou, et de Leicester notamment. Aucun ne parvient à s’imposer, d’où l’idée d’un régime politique novateur. Guillaume d’Orange décide alors de s’y rallier lorsqu’il est déclaré hors la loi par Philippe II. Ainsi fin 1580 Orange reconnaît dans son ouvrage Apologie ou défense de monseigneur le prince d’Orange, que l’unique pouvoir résidait dans les Etats Généraux. Dans ce même ouvrage il accuse Philippe II d’avoir trahi le contrat qui le liait à ses sujets… légitimant de fait le pouvoir des Etats Généraux. Ces idées, que le prince d’Orange incarne, s’inspirent des idées monarchomaques en vigueur chez les théoriciens huguenots français dans les années 1570. Ces théories monarchomaques revendiquent le droit du peuple, représenté par les Etats Généraux, de retirer la souveraineté du monarque si celui-ci devient tyran. La bonne entente étant issue d’un contrat originel, donc si ce contrat est brisé le souverain n’a plus de raison de gouverner, voire d’exister. Donc après les différentes tentatives, vouées à l’échec, de se donner un prince, les Etats Généraux décident de s’en passer et proclament alors en 1588, la république. Philippe II, cependant, ne reconnaît pas l’existence de cette république, et donc les Etats Généraux et les révoltés sont forcés d’abandonner l’idée d’union entre le Nord et le Sud. En effet depuis peu la France, cherche à conquérir les Pays-Bas espagnol, tout comme elle prétend au trône d’Espagne… l’allié d’hier devient donc un ennemi à ne pas se créer. La France est la puissance montante du XVIIème siècle, qui se montre très menaçante. De plus les ProvincesUnies ont des intérêts commerciaux à conserver, notamment en la place forte qu’est Amsterdam la ville portuaire, qui a pris la place d’Anvers qui subit le blocus espagnol. Politiquement et économiquement une union les affaiblirait. b. La structure institutionnelle des Provinces-Unies. Les Provinces-Unies sont composées de sept provinces septentrionales : la Hollande, la Zélande, l’Utrecht, le Gueldre, la Frise, Overijssel et la Groningue. En plus de ces provinces, s’ajoutent les pays de la Généralité, gagné sur les pays Bas espagnols depuis la fin du XVIème 13 siècle. Ces pays de la Généralité sont constitués des Etats de Flandre, et des Etats du Brabant. Puis en 1632 s’ajoute Maastricht Overmaas ainsi que Wede-Westerwolde. Ces Etats ne sont pas représentés aux Etats Généraux, et ressemble à une sorte de colonie intérieure, selon Christophe de Voogd. Quant à la république, elle est fondée sur une triple souveraineté collective. En effet il y a les Etats Généraux, les Etats Provinciaux et les villes. Ce principe particulier, est une des causes de l’échec de la monarchie. En effet chaque province à des particularismes, rendant alors difficile la cohabitation de la monarchie et de toutes les libertés provinciales. Chaque province a son propre Etat Provincial, composé généralement de députés de la noblesse et des députés des villes, cependant certaines provinces très rurales on trouve dans les Etats Provinciaux des paysans. Comme c’est le cas en Frise et en Groningue. Chaque province est alors souveraine dans la justice dans les finances et dans le législatif. Donc forcément chaque Etat est différent de son voisin. Ce plus il y a, par ailleurs, une différence notable dans les systèmes de vote : ainsi par exemple en Hollande chacun des sept députés à une voix, alors qu’en Zélande la voix du Prince d’Orange englobe l’ensemble des sept députés nobles. Dans une même assemblée les votes diffèrent suivant les Etats. La république permet alors de composer avec ces particularismes. Après avoir montré quelques exemples des types de particularisme, nous allons observer comment la république est elle organisée. Au départ les Etats Provinciaux nomment un Pensionnaire qui est leur secrétaire. Il est ainsi nommé pour la pension qu’il reçoit de sa province. Concrètement il s’occupe de l’administration de sa province, et de préparer le travail des Etats Provinciaux, d’une certaine manière c’est lui qui gouverne. Les Etats Provinciaux choisissent aussi leur Stadhouder qui est chargé de faire appliquer la loi, de surveiller l’administration judicaire, et de diriger les forces militaires terrestres et maritimes locales. Par la suite les Provinces-Unies prennent l’habitude de regrouper la défense de tout leur territoire sous un seul et même Stadhouder. Le stadhoudérat au XVIIème siècle est alors proposé aux Orangistes : Guillaume de Nassau, Prince d’Orange Stadhouder général, puis ensuite ses deux fils : Maurice de Nassau de 1585 à 1625, et Frédéric-Henri de 1625-1647. Enfin la plus haute instance de la république sont les Etats Généraux, et ils siègent à La Haye. Depuis 1563 les députés siègent en permanence, sans distinction de leur origine sociale dans leur placement. En revanche il n’y a pas de députés du clergé, et les députés sont élus pour trois à six ans, sauf en Zélande où leur élection est à vie. Par ailleurs chaque province a une voix, même si plusieurs représentants sont présents. Cependant les Etats Généraux sont rarement au grand complet, en session ordinaire ils sont dix à vingt députés, manquant parfois la présence de une à deux provinces. En effet les députés sont constamment en train de consulter les Etats Provinciaux avant toute décision. C’est le principe et la pratique du ruggespraak. De fait les Etats Généraux ressemblent plus à une assemblée d’ambassadeurs qu’à une assemblée de gouvernement. Enfin, en théorie, les décisions devaient se prendre à l’unanimité, ce qui en réalité ne fut pas toujours respecté. Concernant les compétences des Etats Généraux concernent la défense et la question de la guerre et la paix, le financement des dépenses de défenses et la politique étrangère. Dans la réalité leurs compétences touchaient aussi à la navigation, à l’administration des territoires conquis sur les Pays-Bas espagnols, les affaires ecclésiastiques u encore l’expansion coloniale. Concernant les institutions des pays de la Généralités, elles existent pour assister les Etats Généraux ans leurs fonctions, mais tout en étant sous leur contrôle. L’institution la plus importante est le Conseil d’Etat qui siège aussi à La Haye. Ce Conseil est constitué d’une douzaine de délégués des provinces ainsi que des stadhouder. Ce conseil administre les affaires militaires et celles des territoires de la Généralité, mais peut aussi avoir d’autres compétences. 14 Par ailleurs il existe aussi cinq Collèges de l’Amirauté, qui administrent la Marine, et l’activité locale pour la survie des Provinces-Unies. Parmi lesquels sont nommés par les Etats Généraux : un Capitaine général et un Amiral général. Est créée en 1602 une Cours des Comptes, afin d’administrer les finances de la république. Cette cours enregistre par exemple, les contributions fiscales de chaque province. Concernant les finances dans les Provinces, chaque Provinces donne selon son importance dans l’économie du pays. Cependant le montant total des levées est décidé par les Etats Généraux, puis ensuite les provinces elles-mêmes se charge des levées selon des quotas. Enfin les Etats Généraux nomment et paye contre son travail un Grand Pensionnaire, qui assure leur secrétariat et il est chargé de la politique extérieure. Le Grand Pensionnaire est élu à vie, les plus grand et plus importants du XVIIème siècle sont issus de la Hollande, comme Jan Oldenbarnevelt (1586-1619), ou plus tard Jan Witt (1653-1672). Les institutions des Provinces-Unies prennent leur forme définitive, entre le départ de Leicester en 1587, et la fin de la Trêve des Douze Ans signée en 1609. Mais rapidement une concentration des pouvoirs se manifeste, au profit de la bourgeoisie marchande hollandaise, et de la maison d’Orange-Nassau. En effet, la Hollande dominait les Etats Généraux, du fait de la non application de la règle de l’unanimité, car c’était la province qui fournissait plus de 50% du budget et de la population… d’où sa grande influence. C’est par cette grande influence qu’au fil du temps le Grand Pensionnaire souvent originaire de Hollande, devint alors un des premiers hommes de la république, par la domination de la scène politique dont ils jouissaient. Pourtant, en parallèle la maison d’Orange-Nassau jouissait aussi d’une grande influence, mais sur la combinaison de plusieurs facteurs : tout d’abord par les prestige de Guillaume d’Orange alors désigné comme le « père de la patrie », donc faisant état d’un statut et d’un caractère national ; de plus la famille avec Guillaume de Nassau et son frère Jean, avait acquis de nombreux gouvernorats et stadhoudérats. De fait, l’équilibre des institutions dépendait principalement de l’entente entre ces deux protagonistes. C’est cette rivalité qui va régir toute l’activité et l’histoire politique néerlandaise du XVIIème siècle. B. La crise politique et religieuse met fin à la paix de douze ans. a. La rivalité entre Maurice de Nassau et Oldenbarnevelt : les républicains contre les orangistes. Cette rivalité entre Maurice de Nassau et Oldenbarnevelt, qui commença alors à prendre le l’ampleur. Pour cela il est important de noter le rôle d’Oldenbarnevelt auprès de Guillaume d’Orange, pour comprendre les rivalités avec le fils de celui-ci. Oldenbarnevelt est un noble, né en 1547, il a suivi des études de droits qui le menèrent à Bourges où il s’imprégna de la culture humaniste tolérante, et c’est à ce moment là qu’il noue aussi des amitiés avec la France. En 1570, il est choisi comme pensionnaire de Rotterdam et il rejoint Guillaume d’Orange, dès le début du soulèvement hollandais. Oldenbarnevelt devient alors un des plus proches conseillers du prince, et à la mort de celui-ci il joua un rôle important dans la survie de la révolte. Etant un excellent stratège et très intéressé par les nouveauté scientifiques et techniques il devint et s’imposa comme l’un des grands capitaines de l’Europe. Enfin de 1586 à 1618, il domine la scène politique du pays, en étant désigné comme pensionnaire ou avocat des états de Hollande. C’est par ailleurs lui qui en 1588, fit admettre aux Etats Généraux que les Provinces-Unies constitueraient désormais une république. Cependant les relations entre Oldenbarnevelt et Orange, s’assombrissent lors de la bataille de Nieuport en 1600, que Maurice de Nassau remporte de justesse. Celui-ci accuse alors Oldenbarnevelt, de l’avoir 15 conduit au bord du précipice. Le différend naissait, et allait s’accentuer durant la négociation de la Trêve de Douze Ans. En effet d’un côté Oldenbarnevelt souhaitait la paix, et de l’autre Maurice de Nassau souhaitait continuer la lutte. De plus sur le plan politique les deux hommes était aussi en désaccord : de Nassau souhaitait un pouvoir central et envisageait même l’établissement d’une monarchie, au profit de la maison d’orange. A contrario Oldenbarnevelt, lui voulait représenter le parti des Etats, c'est-à-dire l’oligarchie bourgeoise qui voulait maintenir la confédération républicaine et l’autonomie des provinces. Leur opposition glissa, par ailleurs, sur le terrain religieux lorsque éclate la querelle théologique de la prédestination. D’où : b. Une forte tension religieuse. La controverse religieuse naît entre deux professeurs de l’université de Leyde : Gomarus et Arminius. Dont on nomme les partisans : arminiens et gomaristes. Arminius (1560-1609) conteste la doctrine calviniste de la prédestination absolue pour laquelle Dieu seul prédestine par sa Grâce au Salut et à la damnation. Arminius propose alors l’idée que la volonté de l’individu a un rôle dans son salut. Gomarus considère cette idée est issue du catholicisme. En revanche Gomarus présente alors l’idée de l’orthodoxie calviniste, écartant toute liberté humaine dans le salut, la grâce étant accordée de toute éternité aux seuls élus. La passion pour les deux camps prend de l’ampleur au point de troubler l’ordre public, malgré le départ de Gomarus pour la France et le décès d’Arminius. Ce trouble pose alors une question essentielle : qui a l’autorité compétente en matière religieuse ? Les arminiens sont très minoritaires dans les Provinces-Unies, ce qui les amène à s’adresser en 1610 aux états de Hollandes via une remontrance signée de quarante-six ministres du culte. L’assemblé provinciale, alors dominée par une élite praticienne mais multiconfessionnelle, décide alors la souveraineté de l’autorité politique en matière religieuse. Le politique dirige le religieux. De fait l’assemblée préconise une solution de compromis et recommande la tolérance. Mais les gomariste, crient au schisme accusant les arminiens de favoriser le catholicisme par leur libéralisme doctrinal et leur appel à la tolérance. Or le catholicisme signifiait l’Espagne, c’est donc de la trahison. Les gomaristes souhaitent alors que la question soit tranchée par un synode. Dans cette querelle, naît une rivalité complètement ouverte entre les deux protagonistes. Notamment lorsque Maurice de Nassau, pourtant désintéressé de la querelle se rend compte que l’unité du pays risque d’être ébranlée, et décide alors le 23 juillet 1617 d’assister au culte gomariste à La Haye. Cette décision, était surtout un enjeu politique, en effet par cet acte, Maurice de Nassau lancé un défi à la Hollande. Oldenbarnevelt decide d’y répondre en fsaisnt passer une résolution qui autorisait les villes à lever des troupes pour assurer l’ordre, tout en ordonnant aux commandants militaires de coopérer. Dans les commandants militaires se trouvait ainsi le prince d’Orange. Oldenbarnevelt fut alors soutenu par Amsterdam, l’armée et les Etats Généraux. Le prince d’Orange se retrouve alors pris entre les différentes institutions, dès lors il s’emploi à isoler Oldenbarnevelt, notamment en faisait expulser les arminiens de plusieurs municipalités, pour le priver de tout soutien. Enfin Maurice de Nassau pousse à l’extrême sa politique, et en août 1618 il fait arrêter Oldenbarnevelt et de nombreux de ses partisans, qu’un tribunal exceptionnel juge et condamne à mort. Oldenbarnevelt est exécuté le 13 mai 1619. Ces faits ont alors fait frôler la guerre civile aux Provinces-Unies, mais par le synode de Dordrecht de 1618-1619 qui tranche la question en faveur des gomaristes, et par cet acte d’éradication de l’hérésie arminienne de Maurice de Nassau, la guerre interne est évitée. Les arminiens sont alors expulsés de l’Eglise publique, et forme une Eglise dissidente, qui après une courte période de persécution dans les années 1620, vie sous le même régime de 16 tolérance passive que les protestants des Provinces-Unies. La maison d’Orange entérine cette rivalité, et en est complètement vainqueur. La république, ayant par ailleurs surmontée cette crise, son unité en était alors grandie et renforcée. Enfin la maison Orangiste dirigée par Maurice de Nassau jusqu’en 1625, reste fidèle ses idées lors des négociations de la Trêves de Douze ans. Il faut continuer la révolte. Ainsi en 1621, le prince d’Orange réengage la rivalité avec l’Espagne et son nouveau roi Philippe IV. Les Provinces-Unies entrent alors dans la guerre de Trente Ans. C. De la guerre de Trente Ans aux traités de Westphalie qui proclame l’indépendance des Provinces-Unies. Les Pays-Bas, au XVIIème siècle sont un enjeu international, dans ce siècle de guerre, et notamment de la Guerre de Trente Ans. a. Les Provinces-Unies dans la Guerre de Trente Ans. Tout d’abord la Trêve de Douze Ans, assure aux Provinces8unies une paix solide, qui permet de mettre à profit l’idée de préparer la reprise des combats et la défense du pays contre l’Espagne qui rencontres de grandes difficultés financières. De fait l’Espagne ne peut pas renforcer sérieusement les Pays-bas espagnols. Ainsi, comme on l’a vu le conflit néerlandoespagnol reprend en 1621 avec Maurice de Nassau et Philippe IV. Cependant c’est alors en pleine guerre de Trente Ans qui dévaste l’Empire et fait jouer la solidarité entre Habsbourg d’Autriche et d’Espagne. Donc lorsque les Provinces-Unies s’engagent dans ce conflit espagnol, elles s’engagent de fait dans la guerre de Trente Ans. Les Provinces-Unies se retrouvent alors dans le camp des protestants, ainsi en 1625 la république s’allie avec l’Angleterre et le Danemark contre l’Empereur. Cette même année commence par une victoire de Spinola à Breda sur les Pays-Bas. Mais les succès suivants sont favorable à aux ProvincesUnies, dirigée depuis 1625 par Frédéric-Henri d’Orange frère de Maurice de Nassau, qui récupère Bois-le-Duc et Maastricht. Sur mer les néerlandais réussissent notamment par la capture de la flotte d’argent, le 8 septembre 1628 dans les Antilles. Par ailleurs l’Espagne se retrouve en plus grande difficulté lorsque la France s’engage dans la guerre de manière ouverte, en 1635. En avril de cette année 1635, la France de Louis XIII avec Richelieu s’assure une alliance avec les Provinces-Unies. Cette alliance ayant pour projet de partager les Pays-Bas espagnol une fois le conflit terminé. La France peut alotrs s’engager ouvertement dans le conflit, en déclarant symboliquement la guerre depuis Bruxelles. Lorsque l’armée français se rend à Bruxelles, elle encontre un détachement espagnol qu’elle réduit à néant, créant alors une forte inquiétude dans les Provinces-Unies. En effet la France est alors une puissance en plein essor. Les Pays-Bas craignent alors une mainmise française sur toutes les provinces une fois la fin du conflit. Cependant les troupes française, rejoignant les troupes des Etats Généraux, se retrouvent toutes deux réunis sous les ordre d’un même homme : Frédéric-Henri. Mais en 1636 lorsque l’armé se retrouve affaiblis, par le long siège de Louvain par exemple, l’Espagne aidée des contingents impériaux reprennent l’offensive. Ainsi depuis l’Artois, l’opposition pénètre en picardie. Progression qu’une nouvelle levée d’hommes par Louis XIII, freine à Corbie fin août 1636. De son côté les Provinces-Unies réussissent à reprendre Breda en 1637. Puis en 1637 l’armée française se dirige vers les Pays-Bas espagnols, reprenant alors des villes ennemies comme : Hesdin en 1639, Arras en 1640 et Bapaume en 1641. En 1639, aussi la flotte espagnole est aussi réduite à néant. Un moment important éclate alors : au printemps 1643 l’armée espagnole forte de vingt huit milles hommes, composée de cinq infanterie délites, vient mettre le siège devant 17 Rocroi. C’est une ville stratégique puisqu’elle est une place qui commande la route vers l’Oise. Cependant force est de constater que la bataille tourne en faveur des français dirigés par le duc d’Enghien, futur Grand Condé. Cette bataille met fin à l’invincibilité espagnole, et porte un coup très dur au camp espagnol. Les deux camps épuisés engagent alors une négociation de paix, qui prend un tournant nouveau avec l’ouverture des conférences de Westphalie, en 1644. b. Les temps sont à la négociations : les Traités de Westphalie. Les conférences de Westphalie de 1644 ont pour but, théorique, que toutes les puissances en guerre doivent négocier ensemble afin d’aboutir à un règlement général. Les représentants des princes catholiques doivent alors se retrouver à Münster, et les protestants à Onasbrück. Cependant les diplomates néerlandais siègent à Münster, car ils doivent négocier avec la France et l’Espagne. Lors de ce siège, les Pays-bas obtiennent une réaffirmation de l’alliance avec la France de Mazarin et d’Anne d’Autriche régente pour Louis XIV. Tandis qu’est signée une paix séparée avec l’Espagne, qui depuis longtemps s’était résignée à la perte des Pays-Bas, en préférant alors conserver leur force contre la France. Cette paix avec L’Espagne, reconnaît enfin officiellement l’indépendance des Pays-Bas En revanche les Pays-Bas se méfient, tout de même de la France, qu’ils ne veulent pas voir remplacer les Pays-Bas. par une puissance française en plein essor. A La Haye circule une illustre phrase : « Gallus amicus sed non vicinus », qui signifie véritablement que les néerlandais veulent les français comme ami mais pas comme voisin. Cependant il faut noter que si la paix est signée entre les Pays-Bas et l’Espagne, la paix entre la France et l’Espagne n’est pas conclue. La véritable paix générale en Europe et surtout pour les Pays-Bas prendra naissance avec la Paix des Pyrénées de 1659. Les Pays-Bas étaient le lieu de conflit entre l’Espagne et la France durant la guerre de Trente Ans. Les Pays-Bas restent alors jusqu’en 1659, ces mêmes lieux de conflits entre français et espagnols. Les PaysBas enfin indépendants ne sont pas pour autant sorti de la guerre et du malheur. Mais l’Âge d’or les Provinces-Unies continuent. 18 Conclusion : L’histoire des Pays-Bas de la fin du XVIème siècle au XVIIème siècle, se concentre autour d’une notion importante : la mainmise espagnole fait naître l’idée d’indépendance. En effet il est important de noter qu’au départ les révoltes qui éclatent dans les Pays-Bas ne concerne pas l’autorité du souverain Philippe II, mais plutôt la difficulté qu’à la gouvernante marguerite de Parme à faire cohabiter la politique du souverain et les libertés et particularismes des Dix-Sept provinces. C’est aussi contre l’oppressante présence militaire espagnole qu’éclate la révolte, associée à la diversité religieuse qui se retrouve persécuté par l’Inquisition via les Placards. C’est un contexte politique et religieux qui fait naître le mouvement de révoltes. Cependant face à un souverain qui se veut absolutiste, les Pays-Bas se retrouvent rapidement à espérer et demander la liberté et l’indépendance vis-à-vis de l’Espagne. Malgré la différence entre l’Espagne alors à son apogée, et les Pays-Bas sous tutelle espagnole, l’Espagne ne réussit jamais à prendre le dessus sur toute une partie des pays-Bas. Comme on l’a vu le Nord se crée, et permet d’instaurer les bases institutionnelles. Alors que le Sud toujours sous la tutelle espagnole subit ses déboires. L’histoire des Pays-Bas est liée à l’histoire économique et politique de l’Espagne, mais aussi à l’histoire de l’Angleterre et de la France via les alliances. Par ailleurs l’histoire des Provinces-Unies, est importante car il y a un mouvement de révoltes qui parfois prend la tournure d’une révolution. Ces embryons de révolutions permettent ainsi, aux Provinces-Unies d’instaurer une république, qui alors une nouveauté pour l’époque moderne. Les Provinces-Unies sont audacieuses dans une Europe déchirée, et qui lutte de toute son énergie pour conserver ses acquis. Elle se montre aussi très diplomatique, par le système d’alliance qu’elle sait mettre en place suivant les différentes phases de guerres et révoltes. Enfin l’indépendance est signée en 1644 lors des traités de Westphalie, mais la prospérité politique, et économique s’établirent bien avant. En effet Isabelle Paresys et Catherine Denys parlent de : l’Âge d’or ou du Siècle d’or des Provinces-Unies, durant le XVIIème siècle. En effet alors que les pays voisin des Provinces-Unies souffrent d’une conjoncture difficile, la croissance économique et démographique de ce pays fait figure d’exception pour un si petit pays. Cette prospérité repose sur la combinaison particulièrement heureuse entre : une position commerciale dominante, une industrie et une agriculture modernes, ajouté à un système financier efficace. Cet ensemble permet l’épanouissement d’une société nouvelle, d’une culture originale et une magnifique floraison artistique. Pour finir concernant la religion, les Pays-Bas et Provinces-Unies restent un modèle de tolérance religieuse, et montrent la possibilité de la cohabitation multiconfessionnelle. Les Provinces-Unies sont un enjeu politique pour l’Europe, ce qu’à très bien compris Louis XIV en voulant avoir autorité sur les Pays-Bas autant que sur le reste de l’Europe. Les Provinces-Unies sont une place forte, que nombre d’Etats courtisent. Aujourd’hui les Paysbas sont indépendants, et n’ont plus bougé depuis 1815 et le Congrès de Vienne. Cependant la république s’éteindra pour laisser place à une monarchie, qui existe aujourd’hui encore. 19 Bibliographie Outils de travail : Grand Larousse Universel, Larousse, 1994. MOURRE Michel, Dictionnaire encyclopédique d’Histoire, Paris, Bordas, Delarge, 1978. Histoire de l’Europe par 14 historiens, Paris, Hachette, 1997. La Grande Histoire du monde, Paris, Sélection du Reader’s Digest, 2006. JOUANNA Arlette, Histoire et dictionnaire des guerres de religion, Paris, Laffont, 1998. Ouvrages spécialisés : CHILDS John Charles Roger, La guerre au XVIIème siècle, Paris, Editions Autrement, 2004. DE VOOGD Christophe, Histoire des Pays-Bas, des origines à nos jours, Paris, Fayard, 2003. WEISS Monique, Les Pays-Bas espagnoles et les Etats du Saint Empire (1559-1579) : priorités et enjeux de la diplomatie en temps de troubles, Bruxelles, Editions de l’Université de Bruxelles, 2003. DENYS Catherine, PARESYS Isabelle, Les anciens Pays-Bas à l’époque moderne (14041815), Paris, Editions Ellipses, 2007. 20