Alter Égales 2016 : Droits de ne pas être stigmatisée Sous-commission « Les stéréotypes et la stigmatisation dans les médias et la publicité et plus particulièrement la publicité diffusée dans les médias publics et/ou soutenus par les pouvoirs publics » Co-pilotage CFFB Compte rendu de la réunion du jeudi 29 septembre 2016 Participant-e-s : voir liste en annexe I. Introduction : Barbara Brunisso (Cabinet Simonis) - et Viviane Teitelbaum (CFFB)- coprésident la 4ème et dernière réunion de cette sous-commission dédiée au thème « Les stéréotypes et la stigmatisation dans les médias et la publicité et plus particulièrement la publicité diffusée dans les médias publics et/ou soutenus par les pouvoirs publics ». Toutes deux remercient, au nom de Mme la Ministre Simonis et des membres de la souscommission, Stéphane Hoebeke du service juridique de la RTBF pour sa présence à la présente réunion et Isabelle Kempeneers de l’avoir organisée. La réunion est scindée en deux parties : - Un exposé général de l’expérience de Stéphane Hoebeke ; Un débat avec questions/réponses entre les membres de la sous-commission et Stéphane Hoebeke en vue de trouver des pistes de recommandations. La note de travail CFFB « Les stéréotypes et la stigmatisation dans les médias et la publicité, plus particulièrement dans les médias de service public » retravaillée suite aux commentaires émis par Florence Montreynaud et les membres de la sous-commission lors de la 3ème réunion du 9 septembre dernier est distribuée en présente réunion. II. Exposé général de l’expérience de Stéphane Hoebeke Stéphane Hoebeke est juriste à la RTBF depuis 1989. Il s’est spécialisé dans tout ce qui touche à la liberté d’expression et à ses limites et s’est, au fil du temps, intéressé à la question des stéréotypes véhiculés dans et par les médias. Il est l’auteur de plusieurs livres : « Le droit de la presse » ; « Sexe et stéréotypes dans les médias » et « La liberté d’expression : pour qui, pour quoi, jusqu’où ? ». A titre informatif et avant de parler de la pub stricto sensu, Stéphane Hoebeke tient à faire part de son point de vue sur la liberté d’expression et ses limites. Il rappelle ainsi que la liberté d’expression est un principe constitutionnel, consubstantiel d’une société moderne civilisée. Cette liberté d’expression est essentielle pour des individus qui communiquent et vaut quelque soit le support, la personne, etc. et vaut donc aussi pour la publicité. Selon lui, la liberté d’expression inclut un principe de tolérance qui implique, de facto, d’accepter que l’ « Autre » publie des choses de mauvais goût, quelque soit le niveau d’humour, d’où le fameux « Je ne suis pas Charlie ». 1 Il poursuit sa présentation en précisant ce que recouvre le principe de liberté publicitaire, à savoir que : - Le publicitaire a la liberté de vendre ses produits de la manière qu’il décide de mettre en avant ; Cette liberté n’est pas absolue compte tenu des restrictions régies par les lois, notamment la CEDH qui, se basant sur l’art.10 de la Convention, s’est positionnée, à plusieurs reprises, sur certaines publicités. Selon lui, la loi, en matière de publicités, doit être claire, précise, accessible et implique que la sanction corresponde à un besoin social impérieux pour la société. Ex : incitation à la haine, mépris, injure ou atteinte grave à la dignité humaine. Il précise aussi sa pensée sur la notion de stéréotype en rappelant qu’« on fonctionne tous par stéréotypes » et qu’un stéréotype ne peut être sanctionné que s’il franchit une loi. En outre, il rappelle que l’article 9 du décret SMA (Services des Médias Audiovisuels http://www.csa.be/system/documents_files/1440/original/Décret%20SMA%20coordonné %20au%208%20juillet%202016.doc.pdf?1474623093 ) de la FWB vient d’inclure la notion de l’égalité entre les femmes et les hommes, signifiant que les contenus audiovisuels de la FWB ne doivent pas porter atteinte aux femmes. Il rappelle aussi l’existence de la loi de 2014 sur le sexisme (http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&table_name=l oi&cn=2014052240 ), régissant notamment le harcèlement en rue, définie de la manière suivante : « Tout geste ou comportement qui, dans les circonstances visées à l’article 444 du Code pénal, a manifestement pour objet d’exprimer un mépris à l’égard d’une personne, en raison de son appartenance sexuelle, ou de la considérer, pour la même raison, comme inférieure ou comme réduite essentiellement à sa dimension sexuelle et qui entraîne une atteinte grave à sa dignité. » Il veut également attirer l’attention des membres sur le stéréotypisme qui, selon lui, est une tendance à voir des stéréotypes sexistes, xénophobes, homophobes, etc. un peu partout. Il continue son exposé en évoquant quelques exemples de publicités qui tendent à démontrer la difficulté de savoir si une publicité dépasse ou non les limites légales. Ces exemples sont discutés en présente réunion : - - - - Adecco avec une pub parodiant un patron obèse faisant une danse qui vise à faire signer un contrat. Au départ, la RTBF avait validé cette pub puis l’a retirée après sa diffusion. Le publicitaire a alors porté plainte contre la RTBF et le Tribunal d’ordre judiciaire a condamné la RTBF. Il précise que le JEP et le CSA avaient, au préalable, considéré que cette pub ne choquait pas ; Autre pub avec une phrase « Vous pouvez louer la femme de votre choix comme un DVD ». Une action de l’IEFH a permis d’aboutir à une condamnation du publicitaire ; Cap 48 : Pub en affichage avec un bras atrophié parodiant une pub Wonderbra « Regardez moi dans les yeux ». Le JEP a estimé qu’il ne s’agissait pas d’une discrimination ni d’une atteinte grave à la dignité humaine ; Autre exemple de pub radio débutant par un « Bonjour Fatima » faisant le lien entre des prénoms de femmes d’origine étrangère et le travail de techniciennes de surface ; 2 En matière de contrôle, Stéphane Hoebeke explique différents cheminements possibles pour qu’une pub puisse être diffusée ou non sur les antennes de la RTBF : La RMB : 1) L’annonceur envoie la pub à la RMB ; 2) La RMB effectue un contrôle de la légalité avant de les envoyer aux radios et TV de la RTBF ; 3) Une personne au sein de la RTBF contrôle les publicités. Cette personne peut (il s’agit d’une faculté de la RTBF # doit) : Soit consulter la direction juridique (c-à-d Stéphane Hoebeke ou son collègue) ; Soit saisir le JEP pour avis s’il y a doute. Le JEP : Le JEP peut renvoyer un avis négatif à la diffusion d’une publicité et le média décide de ne pas la diffuser. Il n’y a aucune loi contraignante à cet effet, il s’agit uniquement d’autorégulation, de déontologie. Exemple : pub en radio pour Veritas avec une phrase « La logique des femmes, c’est logique…Quand je dis NON, ça ne veut pas dire NON… ». Pour le JEP, c’était clairement discriminatoire. LA RTBF n’a alors pas diffusé la pub. Si le JEP remet un avis négatif à la diffusion d’une pub, il existe une procédure d’appel mais l’annonceur n’est pas tenu de suivre l’avis du JEP sur lequel il peut clairement s’asseoir. le Tribunal d’ordre judiciaire Si c’est la RTBF qui refuse la diffusion d’une pub, c’est le Tribunal d’ordre judiciaire qui est compétent pour trancher sur la diffusion. En termes de responsabilités civiles, le Juge peut condamner soit l’annonceur, soit le diffuseur, soit les deux (#responsabilités éditoriales pour lesquelles seules la RTBF est concernée). Le principe, rappelle-t-il, est qu’un média ne peut pas refuser la diffusion d’une pub sans motif. Le CSA : Chacun peut porter plainte auprès du CSA contre une pub sexiste. La RTBF est soumise au contrôle du CSA de la FWB contrairement à RTL (entreprise luxembourgeoise) qui est soumise au CSA luxembourgeois. Par contre, BEL RTL est une entreprise belge qui est soumise au CSA de la FWB. Notons également que RTL est également membre du JEP. En outre, il arrive aussi que ce soit l’annonceur lui-même, via la RMB, qui demande un avis préalable à la RTBF sur le script proposé avant sa diffusion. C’est notamment le cas avec les pubs GAIA réputées pour leur aspect choc. Enfin, il rappelle que la publicité constitue un champ particulier car il ne s’agit pas d’un contenu de la RTBF mais d’une publicité diffusée sur les antennes de la RTBF. Il existe donc deux champs : 1) un champ publicitaire dans lequel la RTBF est diffuseur de pubs ; 2) un champ éditorial dans lequel la RTBF diffuse des contenus éditoriaux conformes à son contrat de gestion. 3 III. Débat avec questions réponses A l’issue du débat entre les membres de la dite sous-commission, plusieurs propositions sont avancées : - La possibilité donnée à la RTBF d’opérer une sélection dans ses choix commerciaux en matière de publicités. Cette sélection serait motivée et inscrite dans le cadre de son contrat de gestion ; - L’utilité de rappeler les différentes lois en matière de discrimination et l’inclusion de la notion d’Egalité au sein du décret SMA, mener une réflexion sur la loi 2014 en matière de sexisme qui ne vise que des comportements et ne concerne donc pas réellement la pub ( éventuellement étendre cette loi de 2014 afin qu’elle puisse concerner la pub tout en rappelant que les critères ne doivent pas être cumulatifs) ; s’interroger sur l’efficacité de la loi de 1989 et sur la notion d’une citation générale qui vaudrait pour tous les critères de discrimination plutôt que l’énumération de critères cumulatifs ; - Rappeler les missions de service public œuvrant à la cohésion sociale et interdisant la discrimination au travers du contrat du gestion ; - La création d’une Régie/ Autorité centrale de diffusion des publicités pour tous les médias œuvrant en FWB. Pour l’instant, c’est chaque média qui décide avec sa propre régie de la diffusion ou non de pubs ; - Outre sa composition, reconsidérer le rôle du JEP pour qu’il puisse donner un visa préalable « contraignant » à la diffusion ; - S’interroger sur les rapports entretenus entre la RMB (http://www.rmb.be/apropos-de-rmb ) et la RTBF (la RTBF reste l’actionnaire majoritaire de la RMB) ; - Sensibiliser et former au préalable les personnes ressources à la RMB mais aussi les personnes – ressources au sein des médias FWB qui visionnent les pubs aux questions genre, diversité et plus largement à la non discrimination ; - Travailler sur les différents textes éthiques/d’autorégulation existant en Belgique en matière de pubs : JEP et leurs Recommandations ; Code International de la Chambre du Commerce ; Code éthique du CSA en matière de publicité audiovisuelle à destination des enfants ; - Aider la RTBF à la rédaction de critères visant à être repris dans son futur contrat de gestion en vue de promouvoir l’Egalité et la Diversité et lutter contre les discriminations dans le champ spécifique de la publicité // normes canadiennes ; - S’interroger sur une possible évaluation du Plan Egalité-Diversité mis en place par la Ministre Fadila Laanan sous la précédente législature ; IV. Planning La note de travail CFFB « Les stéréotypes et la stigmatisation dans les médias et la publicité, plus particulièrement dans les médias de service public » a été retravaillée suite aux commentaires émis lors de la 3ème réunion du 9 septembre dernier. Celle-ci est distribuée aux membres présent-e-s à la réunion et annexée au présent PV. 4 - Les commentaires des membres sur cette note sont attendus pour le 19 octobre au plus tard ; La note retravaillée pour la seconde fois par le CFFB sera envoyée aux membres courant de la semaine du 24 octobre au plus tard. La réunion plénière Alter Egales aura lieu le jeudi 15 décembre à partir de 9h à 12h30. Une invitation officielle sera envoyée prochainement à l’ensemble des membres du réseau Alter-Egales. 5