i. les origines de la decolonisation.

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LA COLONISATION EUROPEENNE ET
LE SYSTEME COLONIAL
I – Les Européens à la conquête du monde (1850 – 1914)
A/Le dynamisme européen avant 1914

En raison d’une croissance démographique soutenue, le Vieux Continent regorge d’hommes :
de 1850 à 1914, près de 50 millions d’Européens partent vers les pays neufs, attirés
principalement par les Etats-Unis, mais aussi par le Brésil, l’Argentine ou les colonies de
peuplement britanniques.

L’Europe tire aussi largement parti de sa maîtrise technique : les progrès des moyens de
transports et de communication, de la navigation à vapeur au télégraphe, unifient l’espace
mondial ; le percement des grands canaux transocéaniques, Suez (1869) et Panama (1914),
raccourcissent spectaculairement les distances.

La puissance économique et financière de l’Europe occidentale lui permet de dominer
largement le commerce mondial (plus de 60 % des échanges mondiaux en 1914) et d’exporter
ses capitaux dans le monde entier, qu’il s’agisse d’investir directement dans l’économie ou de
prêter à des Etats lourdement endettés, comme l’Empire ottoman.
B/Le triomphe de l’idéal colonial

La colonisation retrouve de nombreux partisans dans la deuxième moitié du 19ème siècle. Les
explorateurs multiplient les voyages de découverte, comme ceux de Livingstone, à la
recherche des mystérieuses sources du Nil. Les missionnaires partent évangéliser les peuples
indigènes. Militaires, chambres de commerce et sociétés de géographie constituent de
puissants groupes de pression qui encouragent les explorations, organisent des expositions et
diffusent des récits de voyage enthousiastes.

Les arguments avancés sont donc de nature très diverse : la recherche de marchés, la quête de
placements sûrs, l’orgueil national, les préoccupations stratégiques, et, par-dessus tout, la
conviction largement partagée que les nations d’Europe ont une responsabilité vis-à-vis de
peuples « en retard », voire « inférieurs ». L’utopie coloniale, inspirée souvent par un idéal
généreux et par de bons sentiments, repose sur de véritables contradictions : la lutte contre
l’esclavage, ce « commerce honteux » qui sévit en Afrique, légitime les interventions des
puissances européennes comme celle du roi des Belges Léopold II au Congo, mais débouche
sur la servitude généralisée du continent !
Le discours colonial, nourri de préjugés racistes, de mythes et d’illusions, est propre à
séduire et ne soulève guère de réserves avant 1914. Relayé par la presse, la littérature et l’école, il
s’affirme comme une composante majeure des sociétés européennes et entretient le sentiment
nationaliste.
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La justification du fait colonial : texte A
« Je dis […] que cette politique coloniale repose sur une triple base économique, humanitaire et
politique. […] Les colonies sont, pour les pays riches, un placement de capitaux des plus avantageux. […]
Les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures […], parce qu’il y a un devoir pour elles.
Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures […]. Une marine comme la nôtre ne peut se passer, sur
la surface des mers, d’abris solides, de défense, de centre de ravitaillement. »
Jules Ferry, Discours devant la Chambre des députés, le 28 juillet 1885.
Contestations des arguments de la colonisation. Texte B
« Races supérieures ! Races inférieures ! C’est bientôt dit. Pour ma part, j’en rabats singulièrement
depuis que j’ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue
dans la guerre franco-allemande, parce que le Français est d’une race inférieure à l’Allemand. […]
Regardez l’histoire de la conquête de ces peuples que vous dites barbares et vous y verrez la
violence, tous les crimes déchaînés, l’oppression, le sang coulant à flots, le faible opprimé, tyrannisé par
le vainqueur. […]
Mais n’essayons pas de revêtir la violence du nom hypocrite de civilisation. Ne parlons pas de
droit, de devoir. La conquête que vous préconisez, c’est l’abus pur et simple de la force que donne la
civilisation scientifique sur les civilisations rudimentaires pour s’approprier l’homme, le torturer, en
extraire toute la force qui est en lui au profit du prétendu civilisateur.
Ce n’est pas le droit, c’en est la négation. Parler à ce propos de civilisation, c’est joindre à la
violence l’hypocrisie. »
Georges Clemenceau, Discours à la Chambre des députés, 30 juillet 1885.
Vision raciale de la fin du XIX° siècle. Texte C
« C’est en vain que quelques philanthropes ont essayé de prouver que l’espèce nègre est aussi
intelligente que l’espèce blanche. Un fait incontestable et qui domine tous les autres, c’est qu’ils ont le
cerveau plus rétréci plus léger et moins volumineux que celui de l’espèce blanche. Mais cette supériorité
intellectuelle qui selon nous ne peut être révoquée en doute, donne-t-elle aux Blancs le droit de réduire en
esclavage la race inférieure ? Non, mille fois non. Si les nègres se rapprochent de certaines espèces
animales par leur forme anatomique, par leurs instincts grossiers, ils en diffèrent et se rapprochent des
hommes blancs sous d’autres rapports dont nous devons tenir grand compte. Ils sont doués de la parole, et
par la parole nous pouvons nouer avec eux des relations intellectuelles et morales, nous pouvons essayer
de les élever jusqu’à nous, certains d’y réussir dans une certaine limite. Du reste, un fait plus sociologique
que nous ne devons jamais oublier, c’est que leur race est susceptible de se mêler à la nôtre, signe sensible
et frappant de leur commune nature. Leur infériorité intellectuelle, loin de nous conférer le droit d’abuser
de leur faiblesse, nous impose le devoir de les aider et de les protéger. »
Extrait de l’article « nègre » du Dictionnaire Larousse de 1872.
II – De la domination au partage (1850 – 1914)
A/Les étapes de l’expansion

Premières interventions : la France, en Algérie dès 1830, ou la Grande-Bretagne en NouvelleZélande en 1840. Au début : réticences des états.

L’expansion change de nature vers 1880. Les rivalités grandissantes entre puissances, les
difficultés économiques entraînées par la Grande Dépression suscitent l’adoption de politiques
résolument colonialistes. Le Britannique Joseph Chamberlain et le Français Jules Ferry se font
les porte-parole d’une conquête systématique. Alors que les Français mettent la main sur la
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Tunisie en 1881, les Britanniques occupent l’Egypte en 1882 afin de contrôler la nouvelle
route des Indes ouverte par le canal de Suez. De nouvelles puissances, comme l’Allemagne ou
l’Italie, revendiquent leur « place au soleil ». Après la conférence de Berlin qui s’achève en
février 1885, la compétition s’accélère et une vague colonisatrice dise l’Afrique

Le partage colonial est achevé pour l’essentiel en 1914. Il est accompagné de terribles
violences contre les indigènes, les confiscations de terres et les déplacements de peuples
s’ajoutant aux massacres de la conquête. Il a provoqué des heurts entre puissances et alimenté
le nationalisme. Le rêve français d’un empire qui irait de Dakar à Djibouti se heurte au projet
anglais de réunir dans un même ensemble les territoires du Caire au Cap : en 1898, à Fachoda,
sur le Nil, les Français doivent reculer. La France et l’Allemagne s’affrontent à propos du
Maroc : en 1905 – 1906 (crise de Tanger) et 1911 (crise d’Agadir), on est au bord de la guerre.
B/Colonialisme ou impérialisme


La colonisation constitue la forme la plus visible de la domination européenne. Des régions
entières passent sous le contrôle direct des puissances et sont administrées depuis Paris,
Londres ou Berlin. Quand la puissance coloniale juge préférable de maintenir la fiction d’une
certaine autonomie locale, elle recourt au régime du protectorat, comme en Tunisie, au
Cambodge ou en Egypte. Mais, dans tous les cas, elle conserve, par le biais d’un gouverneur
ou d’un ministre-résident, l’essentiel des pouvoirs.
Certains pays ne peuvent pas être placés sous tutelle, du fait de leur taille, leur histoire ou
l’âpreté des rivalités qu’ils suscitent : c’est le cas de l’Empire Ottoman, de la Chine ou de
l’Amérique latine. Il s’agit alors de profiter de la supériorité technique et financière pour
obtenir une influence déterminante, comme le font les Britanniques en Amérique du Sud. Des
pans entiers de l’économie passent sous le contrôle des firmes européennes (mines,
plantations). Cet impérialisme conduit également à une mainmise étrangère sur la Chine,
partagée en véritables zones d’influence en 1895 (« Break up of China ») ainsi qu’à des
ententes au Moyen-Orient sur les concessions ferroviaires et l’exploitation pétrolière.
III – Le système colonial
A/L’apogée de la colonisation



En 1939, l’Empire Britannique est de loin le plus important, tant par la taille (30 millions de
km2) que par la population (500 millions d’habitants). S’étendant sur les cinq continents, il
comprend les territoires de population blanche, les dominions, associés à la Grande-Bretagne
dans le cadre du Commonwealth.
L’Empire Français s’étend sur 10 millions de km2 et ne compte que 70 millions d’habitants. Il
n’y a pas de colonie de peuplement même si l’Algérie comporte une forte minorité de
population européenne et est, pour cette raison, divisée en départements et rattachée
directement à la métropole. Partout, la politique officielle repose sur l’assimilation et sur une
administration centralisée dans le cadre de grands ensembles territoriaux (AOF et AEF en
Afrique, Union indochinoise en Asie).
Les autres empires sont beaucoup plus petits, même si l’Italie a pu prétendre son domaine
africain par la conquête de l’Ethiopie en 1936. Leur importance économique est très inégale,
mais le Congo belge ou l’Indonésie néerlandaise ont largement profité à leurs métropoles.
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B/L’exploitation des colonies


Le discours colonial souligne les progrès réalisés, qu’il s’agisse de l’élimination des maladies
endémiques, de l’encadrement scolaire, œuvre des missionnaires le plus souvent, ou des
efforts d’équipement ferroviaire et portuaire. Toutefois, les résultats d’ensemble paraissent
bien maigres, tant la logique de la mise en valeur reste dominée par les intérêts des colons et
les besoins des métropoles.
Les cultures vivrières sont sacrifiées au profit des denrées tropicales et des cultures
industrielles : l’Inde fournit coton et thé ; l’Indochine et l’Indonésie, le caoutchouc ; le Congo
belge et la Rhodésie, le cuivre ; le Maroc, les phosphates, etc. En retour, les colonies doivent
absorber les produits fabriqués par la métropole, la récession des années trente aggravant cette
dépendance avec l’adoption de la « préférence impériale ».
III – Une domination menacée
A/La remise en cause de la puissance européenne


En 1918, les deux principales puissances coloniales, la France et la Grande-Bretagne, se
félicitent de la contribution de leur empire à la victoire. L’opinion dans les métropoles se
persuade que leur mise en valeur est un gage de prospérité durable. Toutefois, les « quatorze
points » du président Wilson ont fait valoir le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et la
SDN, en confiant aux vainqueurs des mandats provisoires sur les anciennes colonies
allemandes et ottomanes, souligne qu’il s’agit d’une étape sur la voie de leur émancipation.
La domination européenne n’est plus sans partage. Les Etats-Unis sont devenus la première
puissance mondiale et ils condamnent la colonisation lui préférant un impérialisme informel,
en particulier en Amérique latine. L’URSS et l’internationale communiste multiplient les
appels aux « peuples opprimés ». L’expansion du Japon est souvent accueillie avec
enthousiasme en Asie même si leur exaltation de l’union des peuples asiatiques masque leurs
ambitions impérialistes.
B/La montée des contestations internes
Dans ces conditions, les élites indigènes comprennent mal que l’égalité civique leur soit
toujours refusée. Formées dans les écoles européennes ou dans les séminaires, elles s’appuient
sur les valeurs occidentales pour réclamer, sinon l’indépendance, du moins une véritable
autonomie, proche de celle dont jouissent déjà les dominions. Or, les métropoles se montrent
sourdes à ces attentes. Nous verrons cela en étudiant le phénomène de décolonisation.
PAYS
Inde
Inde
Indochine/Vietnam
Indonésie
LEADER
Gandhi et Nehru
Ali Jinnah
Ho Chi Minh
Sukarno ou Soekarno
Algérie
Algérie
Messali Hadj
Ben Bella
Maroc
Tunisie
Mohamed 5 le sultan
Habib Bourguiba
GROUPE
Parti du Congrès
Ligue Musulmane
Vietminh
Parti Communiste
Indonésien
Parti Populaire Algérien
Front de Libération
Nationale
Istiqlal (indépendance)
Néo Destour (nouvelle
constitution)
METROPOLE
RU
RU
FRA/USA
PAYS BAS
FRA
FRA
FRA
FRA
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Gold Coast/Ghana
Kwame Nkrumah
Sénégal
Léopold Senghor
Convention people’s
RU
party
Bloc
Démocratique FRA
sénégalais
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L'EMANCIPATION DES PEUPLES
DEPENDANTS
La décolonisation débute dès 1945. À la faveur de la guerre, les mouvements nationalistes profitent
de l'affaiblissement des métropoles européennes et demandent la reconnaissance de leurs
revendications. L'hostilité des Etats-Unis ou de l'URSS à la colonisation, la création d'un organisme
comme l'ONU, sont par ailleurs autant d'éléments favorables à l'émancipation des peuples dominés.
La décolonisation mènera à l’expression d’un nouveau bloc : « le Tiers-Monde ».
Comment s’est déroulé la décolonisation ?
Si, dans un grand nombre de cas, les indépendances découlent d'un processus de négociation
entamé le plus souvent sous la pression et se déroulent pacifiquement, dans d'autres cas, les
métropoles se crispent sur leurs positions et la décolonisation se déroule dans le déchirement et la
violence.
I. LES ORIGINES DE LA DECOLONISATION.
A. L’IMPACT DE LA GUERRE
1°) L'affaiblissement des métropoles.
Impact négatif des défaites du début de la guerre pour les alliés européens :
Les métropoles sont épuisées par la guerre
En Extrême-Orient, le rôle des Japonais : ils avaient promis l’indépendance
2°) La déstabilisation des colonies
 Les combattants des troupes coloniales estiment être en droit de disposer de la
liberté après avoir combattu pour celle de leurs colonisateurs
 Les Alliés ont présenté leur combat comme celui de la liberté des peuples et de la
démocratie.
 La Charte de l’Atlantique a affirmé le droit des peuples du monde entier à
disposer d’eux-mêmes, et elle prend vite une valeur universelle...
B. UN CONTEXTE INTERNATIONAL FAVORABLE.
Les pressions des USA et leurs limites dans le contexte de guerre froide
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Les USA, ancienne colonie ayant lutté pour son indépendance, soutiennent donc les
peuples qui mènent désormais un combat de même nature que le leur autrefois.
Le soutien de l'URSS au combat anti-impérialiste : contre l’ »exploitation de
l’homme par l’homme »
Le rôle de l'ONU
C. L’ESSOR DES MOUVEMENTS DE LIBERATION NATIONALE
1°) L'éveil des consciences nationales
Exemples
 Le parti du Congrès en Inde, fondé en 1886
 Pétri de valeurs anglo-saxonnes
 Formule très tôt des revendications d'autonomie
 En Indochine, la contestation du colonialisme s'inspire largement du mouvement
communiste international
 Au Maghreb et au Proche-Orient, les mouvements se nourrissent du panarabisme et
de l'Islam .
Certains leaders s’identifiant à leur peuple jouent un rôle charismatique.






Léopold Sédar Senghor, au Sénégal
Houphouët Boigny en Côte d'Ivoire
Ho Chi Minh au Vietnam
Sukarno en Indonésie
Bourguiba en Tunisie
Nasser dans le monde arabe
2°) Les premiers mouvements nationalistes
a) En Asie
En Inde
 Le parti du Congrès, fondé en 1885, pratique, sous l’impulsion de Gandhi, la «
non-coopération non violente ».
 Dès1929, son président Nehru exige l’indépendance totale. Redoutant une Inde
dominée par les Hindous, la Ligue musulmane de Ali Jinnah, appuyée par les
Anglais, réclame la formation d’un Etat musulman séparé.
 En 1942, face à l’offensive japonaise et à la poussée nationaliste, Londres propose
de faire de l’Inde un dominion. Solution que rejettent tous les Indiens, même si au
« Quittez l’Inde ! » du Congrès s’oppose le « Divisez et partez ! » de la Ligue.
 En 1945, les Britanniques sont résignés à l’indépendance.
En Indonésie,
 A côté du parti communiste indonésien antijaponais, s’est organisé à partir de
1942 le parti national indonésien de Soekarno.
 Les nationalistes administrent le pays sous la tutelle des Japonais, et, après la
défaite de ceux-ci, proclament l’indépendance de la République indonésienne, le
17 août 1945.
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En Indochine,
 Le parti communiste indochinois fondé en 1930 crée en mai 1941 le Viêt-minh
(Ligue pour l’indépendance du Vietnam) pour lutter contre les Français et les
Japonais.
 L’insurrection générale permet à Hô Chi Minh de proclamer l’indépendance, le 2
septembre 1945 à Hanoi.
b) Au Maghreb
En Tunisie,
 Habib Bourguiba, leader du "Néo-Destour" ( Nouvelle Constitution) veut négocier
l’indépendance du protectorat, mais il se heurte au refus et à la répression.
Au Maroc,
 Le roi Mohammed V entend s’appuyer sur les Etats-Unis pour obtenir la fin du
protectorat.
 Il prend la tête du mouvement national en créant en 1944 le parti de l’Istiqlal
(Parti de l'Indépendance).
En Algérie,
 Les courants nationalistes sont plus divisés. Depuis 1937, le "parti du peuple
algérien", ou PPA, de Messali Hadj envisage la conquête de l’indépendance par
un soulèvement.
 Le mouvement plus modéré du « manifeste du peuple algérien lancé en 1943 par
Ferhat Abbas n’envisage qu’une Algérie autonome fédérée à la France.
D. LES METROPOLES FACE A LA DECOLONISATION
1°) La Belgique et les Pays-Bas
 Recours à la force pour éviter l'indépendance et pour préserver ensuite ses
intérêts économiques
 Cas de l'Indonésie (Pays-Bas) et du Congo (Belgique)
2°) Le cas de la France : des changements modestes largement théoriques
 Cas plus complexe : les indépendances ont été tantôt arrachées et violentes,
tantôt négociées et pacifiques
 Le tournant s'effectue vers 1956, lorsque l'on commence à estimer que ce
mouvement est inéluctable, et que l'empire coûte plus cher qu'il ne rapporte !
La conférence de Brazzaville (début 1944) envisage le droit à la « gestion de leurs
propres affaires » des indigènes
La constitution de 1946 : Elle supprime le statut de l’indigénat et le travail
forcé, proclame l’égalité des droits des citoyens « autochtones », mais la tutelle de
la métropole reste entière. L’« Empire » est transformé en «Union française », les
« colonies » deviennent des « départements » ou des « territoires d’outre-mer »,
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les «protectorats » des « Etats associés ». Le vocabulaire change, la réalité
coloniale demeure.
3°) Le cas de la Grande-Bretagne
 Les Britanniques, eux, ont déjà l’expérience de la transformation de leurs colonies
blanches en dominions au sein du Commonwealth (1931) et ils favorisent
l’émergence des élites par l’« indirect rule »
 Les travaillistes au pouvoir, conscients de la diversité de l’Empire et des faiblesses
du royaume, reconnaissent le droit des peuples colonisés à l’autodétermination.
 Ils souhaitent préserver leurs intérêts économiques et diplomatiques quitte à négocier
et accorder l'indépendance politique. La GB conservera d'ailleurs par la suite des
liens privilégiés avec ses anciennes colonies dans le cadre du Commonwealth.
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II. LA DECOLONISATION COMMENCE EN ASIE ( 1945-1954)
A. LES INDEPENDANCES AU PROCHE-ORIENT.
1°) La liquidation des mandats français au Levant.
 En Syrie et au Liban, territoires sous mandat SDN, la débâcle de juin 1940 puis
les combats qui y ont opposé les armées françaises restées fidèles à Vichy et celles
de la France libre ont porté une atteinte décisive à son autorité et à son prestige.
Les Britanniques, espérant garder après la guerre leur contrôle sur cette région
qu'ils considèrent comme vitale, encouragent les nationalistes arabes .En mai
1945, des troubles très violents éclatent à Damas contre les "oppresseurs" français
et la France doit sous demande de l’ONU se retirer définitivement en Décembre
1946.
2°) Le Problème de la Palestine et la naissance d’Israël
 Le Proche-Orient est un carrefour de mondes et une zone de contact
 Contact entre l’Orient et l’Occident, carrefour géographique et culturel
 Berceau des trois grandes religions du Livre : le Judaïsme, le Christianisme et
l’Islam
 Le conflit israélo-arabe qui va naître et se développer dans la région repose en fait sur
le fait que sur cette terre de Palestine existe une double légitimité :
 celle des juifs, héritée de l’histoire ( royaume de David, de Salomon…), avant que
le peuple juif ne se disperse de par le monde en l’an 70 de notre ère suite à la
terrible répression romaine contre les mouvements indépendantistes de l’époque
 celle des palestiniens arabes qui vivent sur place depuis au moins aussi longtemps,
même s’ils n’ont jamais eu d’état, la région ayant pratiquement toujours été sous
contrôle étranger (les anglais maintenant, les turcs auparavant pour ne citer
qu’eux)
Les origines de la naissance d'Israël
L’idée du retour à Sion (Jérusalem)
 Elle est entretenue dans la prière quotidienne des communautés juives de la
Diaspora et reste donc tout à fait vivace chez les juifs
Le sionisme
 idéologie politique née à la fin du XIXème (Théodore Herzl)
 objectif : offrir au peuple juif un état en Palestine
. La Déclaration Balfour de 1917
 Pendant la lère guerre mondiale, les juifs combattent les Turcs qui sont les alliés
des allemands, et trouvent donc ainsi en position d’alliés des anglais
 Par l’intermédiaire de son ministre des affaires étrangères, Balfour, la GB
s’engage à favoriser la création en Palestine d’un « foyer national juif », formule
équivoque, mais qui suscite bien des espoirs et une accélération brutale de
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l’immigration juive en Palestine après la guerre, la région étant passée sous
contrôle anglais (mandat SDN)
Les origines récentes de la naissance d’Israël : l’impact de la 2ème G.M.
La mauvaise conscience du monde et le rôle des grands
 Liée à la découverte du génocide nazi faisant 6 millions de morts parmi les juifs
 Nombre de survivants de l’holocauste attendent dans des camps, notamment en
Allemagne et sous contrôle allié évidemment, la possibilité d’émigrer, soit vers
les USA, mais les visas sont difficiles à obtenir, soit vers la Palestine, se refusant à
vivre dans cette vieille Europe qui fut le décor de leur tragédie.
La naissance de l'état d'Israël
1. l’ONU saisie du problème juif
 La GB s'en remet à l'ONU, incapable de résoudre le problème par elle-même
 Le 29 novembre 1947 l’ONU propose un plan de partage de la Palestine ayant
l’approbation des grands
 Un état juif sur 55 % du territoire,
 Un état arabe palestinien
 La ville de Jérusalem sous autorité internationale (des Nations Unies)
 Les juifs acceptent mais les Arabes refusent et multiplient les attaques de colonies
et de convois juifs, les juifs répliquant par les attaques de villages arabes :
l’engrenage de la violence est engagé…
2. Proclamation de l’indépendance d’Israël le 14 mai 1948
 Proclamation par Ben Gourion et le Conseil National Juif
 Reconnaissance immédiate par les USA et l'URSS
3. La première guerre israélo-arabe ( mai 48-Janvier 49)
 Les pays de la ligue arabe avaient annoncé la guerre au cas où un état d'Israël
viendrait à naître en Palestine
 Une coalition regroupant l’Egypte, la Syrie, le Liban, la Transjordanie, et l’Irak
entre immédiatement en guerre contre l’état hébreux : dès le 15 mai, les armées de
la ligue arabe pénètrent en Palestine
 Israël met sur pieds une véritable force armée, Tsahal ( abrégé pour forces de
défense d’Israël) ; cette armée compte 80 000 combattants en décembre avec la
levée en masse de tous les hommes et femmes adultes.
 Malgré un rapport de forces qui ne lui était pas favorable initialement, Israël
l’emporte et conserve pour sa sécurité une partie de ses conquêtes.
 Un armistice est signé en juin 49.
 Israël contrôle désormais 78 % du territoire de l’ancienne Palestine et
Jérusalem-Ouest :les Palestiniens arabes ne disposent finalement pas de
l’état que prévoyait le partage de l’ONU.
 Le reste de la Palestine, Cisjordanie et Jérusalem-Est sont annexés par la
Transjordanie, qui prend en 1950 le nouveau nom de Jordanie
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B. L’EMANCIPATION LARGEMENT NEGOCIEE DES COLONIES
ANGLAISES EN ASIE.
1°) L'indépendance de l'Inde.
 Gandhi et Nehru ont un projet d’État unitaire, multi religieux et neutraliste
 Ali Jinnah désire la partition de l’Inde et la création d’un Pakistan musulman et
anglophile.
 Les affrontements entre communautés, aggravés à partir d’août 1946, poussent le
gouvernement Attlee à décider le transfert rapide du pouvoir. Le dernier vice-roi
des Indes, Lord Mountbatten, fait accepter son plan de partition.
 Le 15 août 1947 deux Etats accèdent à l'indépendance :
 l’Union indienne, ralliée par la majorité des hindouistes
 le Pakistan constitué par deux territoires à majorité musulmane mais distants de
1 800 km au nord-ouest de l’Inde et dans le Bengale.
 Cette partition des provinces et des réseaux de transport et d’irrigation entraîne le
déplacement gigantesque de millions de personnes et d’innombrables massacres.
Gandhi est assassiné par un fanatique
2°) A Ceylan Les élites anglophiles reçoivent de façon précipitée le self-government en
décembre 1947
3°) En Birmanie Londres accorde l’indépendance totale du pays en janvier 1948.
4°) La Malaisie et Singapour
 Pour mieux garder le contrôle des richesses en étain et caoutchouc de Malaisie et leur
position stratégique, les Anglais jouent sur les divisions ethniques entre Malais,
Chinois et Indiens.
 Ils détachent, en 1946, Singapour de la Malaisie, du fait de la position stratégique de
la grande ville portuaire et commerciale.
 De 1948 à 1954, ils doivent affronter une dure et coûteuse guérilla. La Fédération
malaise devient finalement indépendante en 1957 et Singapour l’année suivante.
C. LES INDEPENDANCES ARRACHEES PAR LA FORCE EN EXTREMEORIENT.
1°) L’abandon forcé de l’Indonésie par les Pays-Bas
 En août 1945 les Japonais autorisent Soekarno à proclamer l'indépendance à la veille
de leur départ.
 Les Néerlandais, ne voulant pas renoncer à leur Empire, ne reconnaissent pas la
République indonésienne de Soekarno et dès la fin de 1945, ils tentent de reconquérir
les îles. Pour écraser les républicains, ils envahissent en 1947 et 1948 Java et
Sumatra et arrêtent les leaders nationalistes. Suite à de longs combats et sous
pression de l’ONU, Les pays bas sont contraints de se retirer et Soekarno devient
chef du pays en 1952.
2°) Une décolonisation tragique : la guerre d’Indochine.
 Ho Chi Minh proclame l'indépendance du Vietnam le 2 septembre 1945, dès la
capitulation japonaise.
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 Le général de Gaulle désirant restaurer la souveraineté française sur l’Indochine, un
corps expéditionnaire est envoyé en Cochinchine dès septembre 1945 et chasse le
Viêt-minh de
 Les accords Sainteny-Hô Chi Minh (mars 1946) :Création de la fédération
indochinoise
 Des accords d’association sont proposés au Cambodge et au Laos.
 La république du Vietnam est reconnue comme un Etat libre, membre de la
fédération indochinoise et de l’Union française
Les initiatives tragiques de d'Argenlieu et la marche à la guerre
 Le haut-commissaire, l’amiral Thierry d’Argenlieu, est un farouche partisan du
maintien de l’Empire.
A la suite d’incidents, la marine française, le 23 novembre, bombarde le port de
Haiphong faisant au moins 6000 morts. Le 19 décembre, deux cents européens sont
massacrés par le Viêt-minh à Hanoi. C’est le début de la guerre.
1949-50, l’Indochine devient un conflit de guerre froide
L’échec de la France et la fin de la guerre Dien Bien Phu Mais le piège de
Dien Bien Phu se retourne contre les français enfermés dans la cuvette et le 7 mai
1954, les 12 000 soldats encerclés doivent se rendre après 54 jours de combats.
Le nouveau gouvernement de Pierre Mendès France conclut les accords
de Genève qui mettent fin à la guerre le 21 juillet 1954
Bilan pour la France
 Cette guerre lointaine a coûté à la France et à ses alliés 92 000 morts.
 Elle laisse dans l’armée amertume et colère.
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III. LA DEUXIEME VAGUE DE LA DECOLONISATION : LES
DECENNIES AFRICAINES
 De 1956 à 1968, près de 50 pays deviennent indépendants dont 38 africains, 6 asiatiques, 4
américains.
 1960 est bien 1’« année de l’Afrique », avec 17 indépendances enregistrées sur le continent.
A. DES CONDITIONS NOUVELLES FAVORISANT LA DECOLONISATION.
1°) La conférence de Bandoung.
En 1954, Nehru entreprend de patronner une conférence des pays libres d'Asie et
d'Afrique incluant la Chine : elle se tient en avril 1955 à Bandoung, en Indonésie,
sous la présidence de Soekarno.
 En dépit de forts antagonismes, l'unanimité se fait sur quelques grandes
orientations :
 droit des peuples à disposer d'eux-mêmes,
 égalité entre toutes les nations,
 condamnation du racisme
 opposition totale au colonialisme, « Mal auquel il doit être mis fin
rapidement »,
 refus de toute ingérence dans les affaires intérieures des Etats
 interdiction des armes atomiques.
 Cette conférence pose également la question du sous-développement comme un
enjeu majeur que symbolisent l'image d'un nouveau « tiers état » (19) et trois
chiffres : les 29 pays présents représentent plus de 50 % de l'humanité et disposent
de 8 % des richesses l'émancipation politique doit donc s'accompagner d'une
émancipation économique et sociale.
La conférence de Bandung, 1955.
« La conférence afro-asiatique a pris note du fait que l’existence du colonialisme dans plusieurs
pays de l’Asie et de l’Afrique, sous quelque forme qu’il se présente, non seulement entrave la coopération
culturelle mais aussi le développement des cultures nationales. Certaines puissances coloniales ont refusé
à leurs sujets coloniaux les droits élémentaires en matière d’éducation et de culture, ce qui entrave le
développement de leur personnalité et aussi la collaboration culturelle avec les autres peuples d’Afrique
et d’Asie […]. La conférence condamne un tel déni des droits fondamentaux de l’homme […] comme
forme d’oppression culturelle […].
La conférence, après avoir discuté le problème des peuples dépendants, du colonialisme et des
conséquences de la soumission des peuples à la domination et à l’exploitation étrangère est d’accord :
page 15
-
pour déclarer que le colonialisme sous toutes ses formes est un mal auquel il doit être rapidement
mis fin ;
-
pour affirmer que la soumission des peuples au joug étranger, à l’exploitation étrangère, constitue
une violation des droits fondamentaux de l’homme, est contraire à la charte des Nations unies et
est un obstacle à la consolidation de la paix mondiale.
Communiqué final de la conférence de Bandung, 24 avril 1955.
1) Présenter le document.
2) Expliquer la phrase en italique, à l’aide d’un exemple précis.
3) D’après le deuxième paragraphe, préciser les revendications concrètes des acteurs de cette conférence.
4) Quelles étaient les formes de « domination et […] exploitation étrangère » ?
5) Quelle a été l’influence de cette conférence, sur l’évolution politique mondiale après 1955 ?
page 16
2°) Le panarabisme et l'influence de Nasser
 En Afrique du Nord, l’aspiration à l’indépendance est stimulée par la Ligue arabe et
l’exemple de Nasser, 1’Égypte apparaissant comme le champion de la cause arabe,
face à la présence britannique.
 En 1952, le mouvement des « officiers libres » renverse le faible roi Farouk et
proclame la République égyptienne.
 Pour financer la construction du barrage d’Assouan, il nationalise en 1956 la
Compagnie du canal de Suez.
 Face à l’intervention armée d’Israël, de la Grande-Bretagne et de la France, il
sauve son régime grâce aux pressions des Etats-Unis et de l’URSS.
 Désormais aidée et armée par l’URSS, l'Egypte apporte un soutien actif aux « luttes
de libération des peuples arabes », même si le projet de fusion avec la Syrie et
d’autres Etats échoue. Le panarabisme nassérien s’affirme dans le monde arabe.
L’apparition de l’expression « tiers-monde » en 1952.
« Nous parlons volontiers des deux mondes en présence, de leur guerre possible, de leur
coexistence, etc., oubliant trop souvent qu’il en existe un troisième, le plus important et, en somme, le
premier dans la chronologie. C’est l’ensemble de ceux que l’on appelle, en style Nations unies, les pays
sous-développés […]. Ces pays ont notre mortalité de 1914 et notre natalité du XVII° siècle […]. On
conçoit bien que cet accroissement démographique devrait être accompagné d’importants investissements
[…]. Or, ces investissements vitaux […] se heurtent au mur financier de la guerre froide. Le résultat est
éloquent : le cycle millénaire de la vie et de la mort est ouvert, mais c’est un cycle de misère […].
Peut-être le monde n°1 pourrait-il, même en dehors de toute solidarité humaine, ne pas rester
insensible à une poussée lente et irrésistible, humble et féroce, vers la vie. Car enfin, ce tiers-monde
ignoré, exploité, méprisé comme le tiers état, veut, lui aussi, être quelque chose. »
Alfred Sauvy, « Trois mondes, une planète », L’Observateur, 14 août 1952.
B. LA DECOLONISATION DE L’AFRIQUE DU NORD
1°) Des indépendances négociées sous la pression
La Tunisie
 Dans la foulée des accords de Genève, Pierre Mendès France se rend à Tunis le 31
juillet 1954 et promet formellement de reconnaître « l'autonomie interne de l'état
tunisien » (discours de Carthage). Une indépendance totale est reconnue le 20
mars 1956, date à laquelle Bourguiba proclame la République tunisienne.
Le Maroc
 Le roi Mohammed Ben Youssef, rendu responsable des troubles anti-français, est
déposé et exilé en 1953.
 Conséquence : hostilité grandissante des nationalistes marocains, multiplication
des actes de terrorisme et dérive insurrectionnelle
 le gouvernement Edgar Faure doit rappeler le sultan sur le trône, et Mohamed V
fait un retour triomphal en novembre 1955 !
 L’indépendance du royaume est acquise le 2 mars 1956.
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2°) Une indépendance arrachée : l'Algérie
Une organisation nouvelle, le FLN (Front de libération nationale), animé par Ben Bella,
déclenche le ler novembre 1954 une vague d’attentats qui marque le début du
soulèvement algérien. TOUSSAINT SANGLANTE OU TOUSSAINT ROUGE
 En 1956,le gouvernement Guy Mollet, élu pour faire la paix, va cependant intensifier
la guerre et expédier le contingent ( jeunes faisant leur service militaire) en Algérie
sous la pression des pieds-noirs.
 Les massacres de civils européens et algériens, la guérilla contre l'armée française, la
« guerre à outrance » menée dès 1956 par la France, les ratissages et les
regroupements de population, les « ratonnades » et les tortures, les actes terroristes
de l'OAS1 caractérisent cette guerre de 8 ans qui cache son nom, et qui engendrera la
chute de la IVème république, incapable d'apporter une solution.
 Le 13 mai 1958, éclate l’insurrection d’Alger, avec le soutien de l’armée française
d’Algérie et ces événements, d’une extrême gravité, conduisent à l’effondrement de
la IVème République et au retour au pouvoir du général De Gaulle.
 Le soutien des pays arabes, les pressions de l’ONU, la montée de l’opposition à la
guerre d’Algérie en France entraînent l’évolution des positions du général de Gaulle
revenu au pouvoir en 1958.
 Dès 1959 il se prononce pour le droit des algériens à l'autodétermination
 En 1960, il accepte de négocier avec le FLN
 L’évolution de l’Algérie vers l’indépendance par la négociation est toutefois
retardée par l’opposition farouche
 des pieds-noirs (révolte des barricades en janvier 1960 à Alger),
 de l’armée qui, en avril 1961, tente un coup d'état : le putsch des généraux
(Salan, Challe, Jouhaud, Zeller)
 de l'O.A.S. ensuite (Organisation de l’Armée Secrète) qui tente à plusieurs
reprises d’assassiner De Gaulle et mène sur place une politique de terreur.
 La signature des accords d'Evian le 12 mars 1962, permet le cessez-le-feu, puis
l’accession de l’Algérie à l’indépendance, le 3 juillet 1962
 Au prix de huit ans de guerre, de plus de 600 000 morts, de l’exode de 800 000
pieds-noirs et de bien des souffrances et des rancoeurs, s’achève la plus cruelle des
guerres de décolonisation.
C. LA DECOLONISATION DE L'AFRIQUE NOIRE
1°) Les processus pacifiques
a) L'émancipation des colonies anglaises
 Le Ghana (Gold Coast) Kwame Nkrumah1957 - Proclamation de l’indépendance
dans le cadre du Commonwealth : c'est le premier état africain à devenir indépendant
 Le Nigeria : il accède à l’indépendance en 1960, dans un cadre fédéral
 Même processus pacifique au Tanganyka ( Tanzanie), en Ouganda, en Zambie et au
Malawi entre 1962 et 1966.
Des difficultés et des violences aussi
 Au Kenya la révolte des Mau-Mau est durement réprimée en 1952.
1
OAS = Organisation de l'Armée Secrète combattant pour l'Algérie Française
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 Les Mau-Mau veulent reprendre aux colons britanniques les meilleures terres que
les Anglais ont accaparées.
 Les très longues négociations avec le chef de la rébellion, Jomo Kenyatta, met un
terme à la tuerie en 1954
 Le Kenya n’obtient réellement son indépendance qu’en 1963
b) La décolonisation de l’Afrique noire française est octroyée par étapes.
 La loi-cadre Defferre accorde en 1956 l’autonomie interne à des gouvernements
territoriaux.
 Avec la constitution de 1958 De Gaulle en fait des « Etats associés » dans la
Communauté Française. Seule la Guinée de Sékou Touré refuse, devient aussitôt
indépendante, rompt avec la France et se rapproche de l'URSS
 En 1960, l'indépendance est accordée à quinze Etats africains restant liés à la France
par la Coopération. La décolonisation de l’Afrique noire française a été pacifique,
sauf au Cameroun et à Madagascar.
2°) Les processus violents
a) Le drame du Congo belge
 Les Belges pensent préserver le statu quo colonial par leur « paternalisme ».
 Surpris par les émeutes de 1958-1959 et n’ayant pas préparé des élites locales
("pas d'élites, pas d'ennuis"…pour reprendre la formule des colons belges), ils
concèdent précipitamment l’indépendance en 1960 au Mouvement national
congolais du marxiste Patrice Lumumba.
Une terrible guerre civile s'ensuit
 Les compagnies minières et les hommes de Moise Tchombé organisent la
sécession de la riche province du Katanga.
 Après l’assassinat de Lumumba et l’échec de la médiation de 1’ONU, le Zaïre
sombre dans l’anarchie. ( Sécession d'autres régions, massacres ethniques,
insécurité généralisée, initiatives militaires…)
 Le chef de l’armée, le général Mobutu, appuyé par les Occidentaux, s’empare du
pouvoir en 1965 par un coup d'état militaire.
 Mobutu impose le retour à l'ordre et instaure pour 32 ans une des dictatures
d'Afrique les plus longues et les plus corrompues
 La dépendance du Zaïre à l’égard des intérêts étrangers reste flagrante.
b) Le cas de la Rhodésie du Sud
 En 1965, Jan Smith proclame de manière unilatérale l’indépendance et en 1970,
rompt ses relations avec le RU, mettant en place un régime d’apartheid calqué sur
le modèle sud-africain.
En 1971, le RU reconnaît l’indépendance de la Rhodésie. Le régime ségrégationniste
et raciste dure 10 ans. Le pays devient le Zimbabwe
c) La décolonisation tardive et chaotique de l'Empire portugais
 La chute de la dictature portugaise en 1974 avec la révolution des œillets, permet la
proclamation des indépendances.

page 19
3°) Le cas particulier de l'Afrique du Sud
L'Union Sud Africaine est un dominion du Commonwealth depuis 1909
L'Apartheid
 politique de ségrégation raciale
 mise en place par les gouvernements nationalistes blancs pendant l'entre deux
guerres et après 1945
 discrimination des races systématique dans le travail, l'habitat, les loisirs, le
logement …
 création "d'états noirs", les "bantoustans" appelés ensuite "homelands", au nom du
développement séparé
 états fictifs, surpeuplés, véritables réserves ou ghettos
 dans les régions pauvres et arides
 la lutte est menée par "l'African National Congress", principal mouvement
nationaliste noir
 vigoureuse répression à son encontre, sanglante parfois (massacre de Sharpeville
en 1960, émeutes de Soweto en 1976) et emprisonnement de son leader le plus
célèbre pendant 27 années : Nelson Mandela
La fin de l'Apartheid
 élection du Pt De Clerk en Sept 89
 libération de Nelson Mandela (leader noir anti-apartheid en février 90)
 démantèlement progressif de l'apartheid, avec confirmation au référendum de
mars 92 ; vote blanc 2/3 de OUI
 En avril 1994, la nouvelle assemblée élit MANDELA à la présidence de la
république, lequel va s'efforcer de mener une politique de réconciliation nationale.
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TEXTES UTILISES EN CLASSE
La justification du fait colonial : texte A
« Je dis […] que cette politique coloniale repose sur une triple base économique, humanitaire et politique. […] Les
colonies sont, pour les pays riches, un placement de capitaux des plus avantageux. […] Les races supérieures ont un droit visà-vis des races inférieures […], parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures […].
Une marine comme la nôtre ne peut se passer, sur la surface des mers, d’abris solides, de défense, de centre de ravitaillement. »
Jules Ferry, Discours devant la Chambre des députés, le 28 juillet 1885.
Contestations des arguments de la colonisation. Texte B
« Races supérieures ! Races inférieures ! C’est bientôt dit. Pour ma part, j’en rabats singulièrement depuis que j’ai vu
des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande, parce que
le Français est d’une race inférieure à l’Allemand. […]
Regardez l’histoire de la conquête de ces peuples que vous dites barbares et vous y verrez la violence, tous les crimes
déchaînés, l’oppression, le sang coulant à flots, le faible opprimé, tyrannisé par le vainqueur. […]
Mais n’essayons pas de revêtir la violence du nom hypocrite de civilisation. Ne parlons pas de droit, de devoir. La
conquête que vous préconisez, c’est l’abus pur et simple de la force que donne la civilisation scientifique sur les civilisations
rudimentaires pour s’approprier l’homme, le torturer, en extraire toute la force qui est en lui au profit du prétendu civilisateur.
Ce n’est pas le droit, c’en est la négation. Parler à ce propos de civilisation, c’est joindre à la violence l’hypocrisie. »
Georges Clemenceau, Discours à la Chambre des députés, 30 juillet 1885.
Vision raciale de la fin du XIX° siècle. Texte C
« C’est en vain que quelques philanthropes ont essayé de prouver que l’espèce nègre est aussi intelligente que
l’espèce blanche. Un fait incontestable et qui domine tous les autres, c’est qu’ils ont le cerveau plus rétréci plus léger et moins
volumineux que celui de l’espèce blanche. Mais cette supériorité intellectuelle qui selon nous ne peut être révoquée en doute,
donne-t-elle aux Blancs le droit de réduire en esclavage la race inférieure ? Non, mille fois non. Si les nègres se rapprochent de
certaines espèces animales par leur forme anatomique, par leurs instincts grossiers, ils en diffèrent et se rapprochent des
hommes blancs sous d’autres rapports dont nous devons tenir grand compte. Ils sont doués de la parole, et par la parole nous
pouvons nouer avec eux des relations intellectuelles et morales, nous pouvons essayer de les élever jusqu’à nous, certains d’y
réussir dans une certaine limite. Du reste, un fait plus sociologique que nous ne devons jamais oublier, c’est que leur race est
susceptible de se mêler à la nôtre, signe sensible et frappant de leur commune nature. Leur infériorité intellectuelle, loin de
nous conférer le droit d’abuser de leur faiblesse, nous impose le devoir de les aider et de les protéger. »
Extrait de l’article « nègre » du Dictionnaire Larousse de 1872.
PAYS
Inde
Inde
Indochine/Vietnam
Indonésie
LEADER
Gandhi et Nehru
Ali Jinnah
Ho Chi Minh
Sukarno ou Soekarno
Algérie
Algérie
Messali Hadj
Ben Bella
Maroc
Tunisie
Mohamed 5 le sultan
Habib Bourguiba
Gold Coast/Ghana
Kwame Nkrumah
Sénégal
Léopold Senghor
GROUPE
Parti du Congrès
Ligue Musulmane
Vietminh
Parti Communiste
Indonésien
Parti Populaire Algérien
Front de Libération
Nationale
Istiqlal (indépendance)
Néo Destour (nouvelle
constitution)
Convention people’s
party
Bloc
Démocratique
sénégalais
METROPOLE
RU
RU
FRA/USA
PAYS BAS
FRA
FRA
FRA
FRA
RU
FRA
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La conférence de Bandung, 1955. TEXTE 1
« La conférence afro-asiatique a pris note du fait que l’existence du colonialisme dans plusieurs pays de l’Asie et de
l’Afrique, sous quelque forme qu’il se présente, non seulement entrave la coopération culturelle mais aussi le développement
des cultures nationales. Certaines puissances coloniales ont refusé à leurs sujets coloniaux les droits élémentaires en
matière d’éducation et de culture, ce qui entrave le développement de leur personnalité et aussi la collaboration culturelle
avec les autres peuples d’Afrique et d’Asie […]. La conférence condamne un tel déni des droits fondamentaux de l’homme
[…] comme forme d’oppression culturelle […].
La conférence, après avoir discuté le problème des peuples dépendants, du colonialisme et des conséquences de la
soumission des peuples à la domination et à l’exploitation étrangère est d’accord :
-
pour déclarer que le colonialisme sous toutes ses formes est un mal auquel il doit être rapidement mis fin ;
-
pour affirmer que la soumission des peuples au joug étranger, à l’exploitation étrangère, constitue une violation des
droits fondamentaux de l’homme, est contraire à la charte des Nations unies et est un obstacle à la consolidation de la
paix mondiale.
Communiqué final de la conférence de Bandung, 24 avril 1955.
1) Présenter le document.
2) Expliquer la phrase en italique, à l’aide d’un exemple précis.
3) D’après le deuxième paragraphe, préciser les revendications concrètes des acteurs de cette conférence.
4) Quelles étaient les formes de « domination et […] exploitation étrangère » ?
5) Quelle a été l’influence de cette conférence, sur l’évolution politique mondiale après 1955 ?
TEXTE 2 :
Depuis sept jours nous sommes dans cette belle ville de Bandoung, et Bandoung a été au cours de cette
semaine le point de mire, la capitale, devrais-je dire, de l’Asie et de l’Afrique [...]. Vous avez vu le projet de
communiqué final que je vous ai lu. Je pense qu’il représente un résultat considérable. Mais j’aimerais plus
encore attirer votre attention sur le fait que nous nous sommes rencontrés, vus, liés d’amitié et que nous
avons discuté ensemble pour trouver une solution à nos problèmes communs [...].
Il y a aujourd’hui un autre aspect en Asie. Il n’y a plus d’Asie soumise, elle est vivante, dynamique [...]. Nous
nous sommes résolus à n’être d’aucune façon dominés par aucun pays, par aucun continent [...]. C’est pourquoi
nous élevons notre voix contre l’hégémonie et le colonialisme dont beaucoup d’entre nous ont soufferts
pendant longtemps. Et c’est pourquoi nous devons veiller à ce qu’aucune autre forme de domination ne nous
menace. Nous voulons être amis avec l’Ouest, avec l’Est, avec tout le monde [...].
Je pense qu’il n’y a rien de plus terrible que l’immense tragédie qu’a vécue l’Afrique depuis plusieurs siècles
[...]. Malheureusement, même aujourd’hui, le drame de l’Afrique est plus grand que celui d’aucun autre
continent, tant du point de vue racial que politique. Il appartient à l’Asie d’aider l’Afrique au mieux de ses
possibilités, car nous sommes des continents frères.
Extraits du discours de clôture de Nehru à la conférence de Bandoung le 24 avril 1955.Traduit de l’anglais,
d’après J. Nehru, Speeches, 1949-1961.
Questions
1 - Présenter le document.
2 - Expliquer l’expression : "Il n’y a plus d’Asie soumise".
3 - Quelle est, en 1955, la situation de l’Afrique ?
4 - D’après Nehru, quelles sont les perspectives ouvertes par la conférence de Bandoung ?
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CORRECTION TEXTE 2
Question 1
L’auteur : Nehru dirigeant indien, l’un des instigateurs de la Conférence. /
Le contexte :
- la décolonisation
- en Indonésie
- les pays du TM
- principaux représentants : Sukarno pour l’Indonésie, Nasser pour l’Egypte
Nature : discours de clôture et intérêt du document (volonté de pays du TM de ne pas prendre parti dans
l’affrontement des deux blocs et de s’affirmer comme force politique).
Question 2
L’Asie était colonisée par les puissances européennes mais à la date de la Conférence la décolonisation est
achevée en :
Inde, colonie anglaise, décolonisation négociée mais suivie de violences, indépendance en 1947
Indonésie, colonie hollandaise, intervention armée, indépendance en 1949 (sous pression de l’ONU)
Indochine, colonie française, guerre meurtrière, indépendance en 1954.
Question 3
Le processus de décolonisation est en cours, à peine entamé. Fournir des exemples différenciés.
- Maroc et Tunisie à la veille de l’indépendance.
- Algérie au début de sa guerre d’indépendance.
- Afrique noire française : processus pacifique ms il faut attendre 1960 pour l’accès à l’indépendance
- Au moins un exemple de colonie non française : Ghana en 1957 ; Congo en Belge en 1960 ; colonies
portugaises en 1975, Rhodésie du Nord en 1964.
Question 4 : D’après Nehru :
« résolus à n’être dominés par aucun pays » : indépendance politique, économique, culturelle
« ns élevons notre voix contre l’hégémonie et le colonialisme » : existence du Tiers-Monde (Alfred Sauvy)
« veiller à ce qu’aucune autre forme de domination ne nous menace » : le néocolonialisme
« ns voulons ê amis avec l’O et avec l’E » : le non-alignement (Belgrade 1961) :
« des continents frères » : solidarité des pays nouvellement indépendants
PROPOSITION DE REDACTION :
Question 1 : Il s'agit d'un extrait du discours de clôture de la conférence de Bandoung, prononcé par le Premier Ministre de
l'Union Indienne Jawarharlal Nehru, le 24 avril 1955. Cette conférence réunie à l'invitation de l'Indonésie rassemblait les pays
décolonisés d'Afrique et d'Asie dans l'île de Java.
Question 2 : En 1955, la quasi totalité de l'Asie est indépendante à l'exception de quelques pays encore dominés comme la
Malaisie, le sultanat de Brunei, et des pays de la péninsule arabique (Oman, Yémen du Sud, E.A.U., Qatar, Koweit, ...).
Cette décolonisation s'est souvent faite par la négociation avec la puissance coloniale (Inde, Pakistan) mais parfois aussi à la
suite de violents conflits armés (Indonésie, Indochine française).
Question 3 : En 1955, l'Afrique est encore très largement sous domination coloniale. Seuls quatre pays sont alors indépendants
: l'Ethiopie, le Libéria, l''Egypte dirigée par le colonel Nasser, l'Afrique du Sud (mais sous le régime de l'Apartheid).
La plupart des colonies françaises accèdent à l'indépendance en 1960 et les colonies anglaises entre 1958 et 1965.
Question 4 : Les perspectives ouvertes par Nehru sont la décolonisation de l'Afrique toute entière, la fin de la domination
étrangère sur les peuples de couleur et la naissance d'une "troisième force" entre l'Est et l'Ouest. Le mouvement prendra
naissance sous le nom de Non-Alignement.
La conférence de Bandoung marque l'entrée du Tiers-Monde dans le concert des nations
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