LES MICROMETEORITES ULTRACARBONEES : UNE NOUVELLE FAMILLE DE GRAINS COMETAIRES. E. Dobrică1, C. Engrand1, J. Duprat1, H. Leroux2, E. Quirico3, J.N. Rouzaud4, G. Montagnac5, J. Aleon1, Y. Marrocchi6, S. Mostefaoui6, A. Meibom6, M. Gounelle6, F. Robert6. 1CSNSM CNRS/IN2P3 - Université Paris Sud; Bâtiment 104, 91405 Orsay Campus ([email protected], [email protected], [email protected]); 2UMET CNRS- Univ. Sci. Techno., 59655 Villeneuve d’Ascq; 3LPG Univ. J. Fourier CNRS-INSU, 38041 Grenoble Cedex 09; 4Laboratoire de Géologie ENS-CNRS 8538, 75231 Paris Cedex 5; 5 LST ENS Lyon CNRS, 69364 Lyon Cedex 07; 6LMCM UMR 7202–CNRS INSU, MNHN, 57 Rue Cuvier, 75231 Paris Cedex 05. Introduction: La collection de micrométéorites CONCORDIA renferme deux nouvelles familles d'objets : (i) les micrométéorites à grain fin similaires aux IDP chondritiques poreuses anhydres collectées dans la stratosphère par la NASA [1], et (ii) des particules dominées par la matière carbonée, les micrométéorites ultracarbonées (UCAMMs, pour Ultracarbonaceous Antarctic Micrometeorites) [2, 3]. Ces deux familles de grains ont pu être mises en évidence dans la collection CONCORDIA grâce à l'optimisation de la technique de collecte des particules dans la neige des régions centrales antarctiques, proche de la station CONCORDIA [2]. Nous avons caractérisé la composition chimique, minéralogique et isotopique des UCAMMs. Echantillons et méthodes: Les micrométéorites ont été collectées en Janvier 2006 à partir de blocs de neige des régions centrales antarctiques, proche de la station Concordia [majuscules ?voir 4 pour plus de détails]. Les UCAMMs (acronyme déjà défini dans l’intro Ultracarbonaceous Antarctic Micrometeorites) ont été étudiées par microscopie électronique en transmission, spectroscopie Raman à deux longueurs d'ondes d'excitation (514 et 244 nm) et par NanoSIMS (MNHN Paris). Résultats: Les UCAMMs représentent moins de 5% des micrométéorites non fondues de la collection CONCORDIA. Elles sont dominées en volume par une matière organique comportant des portions de matrice chondritique et de petits agrégats de minéraux (Figure 1). Carbonates Matière Carbonée Sulfures de fer Matrice chondritique Figure 1 : Micrographie électronique en électrons rétrodiffusés d'un fragment d'une micrométéorite ultracarbonée de la collection CONCORDIA 2006. La structure de cette matière carbonée a été caractérisée par spectroscopie Raman et par microsco- pie électronique en transmission à haute résolution [5, 6]. Les micrographies électroniques montrent une structure très désordonnée, proche de celle de la matière organique insoluble (MOI) extraite des chondrites carbonées (Figure 2). Figure 2. Micrographie électronique en transmission à haute résolution montrant la structure désordonnée de la matière carbonée d'une UCAMM. Les analyses de 2 UCAMMs (c’est la première fois que tu parles spécifiquement des 2 UCAMM étudies, peut être le préciser avant) en spectroscopie Raman montrent également une signature de matière organique de structure polyaromatique de très faible maturité. Une étude systématique réalisée sur une série de micrométéorites montre que la signature Raman des UCAMMs est similaire à celle de la matière carbonée des micrométéorites à grain fin (donc les deux familles définies dans l’intro n’en forment qu’une ?) [5]. L'observation des échantillons par microscopie électronique en transmission montre que la composante minérale des UCAMMs est principalement constituée de petits agrégats (100 nm à quelques µm) de petits minéraux de tailles individuelles allant de moins de 10 nm à plus de 500 nm (Figure 3) [6, 7]. Quelques rares minéraux isolés sont également disséminés dans la matière carbonée. Ces minéraux sont dominés par les silicates magnésiens (olivines et pyroxènes) et par les sulfures de fer. Dans ces échantillons, les pyroxènes sont systématiquement plus abondants, et généralement légèrement plus magnésiens (en moyenne En92-97) que les olivines (Fo84-93). La proportion de phases cristallines par rapport aux phases vitreuses est d'au moins 25%, la vraie valeur étant probablement d'environ 50% (pourquoi ?). Des phases similaires aux GEMS des IDPs [8] ont été identifiées dans une UCAMM. Ces objets sont toute- LES UCAMMS, UN NOUVELLE FAMILLE DE GRAINS COMETAIRES E. Dobrică, C. Engrand et al. fois plus riches en soufre que les GEMS des IDPs, car les phases métalliques y sont très rares. Agrégats Minéraux Matière carbonée Figure 3 : Micrographie électronique en transmission en champ clair d'une coupe ultramince d'une micrométéorite ultracarbonée montrant les assemblages de minéraux inclus dans la matière carbonée. leur matière carbonée, couplée à leur fort enrichissement isotopique en deutérium, plaide pour une origine de cette matière dans les régions froides du système solaire, les régions d'agglomération des comètes. La minéralogie des inclusions est compatible avec celle des chondrites carbonées et avec la minéralogie cométaire déduite d'observations à distance ou d'analyses des échantillons rapportés sur Terre par la mission Stardust [e.g. 14, 15, 16]. La présence de phases minérales formées à haute température souligne l'existence de mécanisme(s) de transport de matière depuis les régions internes vers les régions externes du système solaire primitif. Des objets présentant une texture sphérique compacte ont également été observés dans les UCAMMs (Figure 4). Ces objets sont dominés par des olivines et pyroxènes très magnésiens avec un verre interstitiel riche en silice. La composition de la phase vitreuse pourrait être compatible avec celle de la mésostase de chondres [9]. Figure 5 : Cartographie isotopique de la répartition du deutérium (δD = (D/Héch / D/Href -1) x 1000) réalisée à l'aide du NanoSIMS sur un fragment de micrométéorite ultracarbonée écrasée dans une feuille d'or. Figure 4 : Micrographie électronique en transmission de la micrométéorite ultracarbonée DC06-09-19 montrant un objet sphérique compact (En100, Fo99, Glass) à proximité d'agrégats polycristallins d'olivine (Fo73-76), de sulfures de fer (S) et de métal (FeNi). Les sulfures de fer dans les UCAMMs sont domines par la troilite (FeS), comme c'est le cas pour tous les sulfures de fer dans tous les types de micrométéorites, pour les sulfures de quelques dizaines de nm à plus de 2 µm [10, 11]. (je trouve la phrase pas très claire) L'analyse isotopique de 2 UCAMMs à l'aide du NanoSIMS (service national MNHN) montre de forts enrichissements en deutérium de la matière carbonée, sur de grandes surfaces de la particule (i.e. pas de "hotspot", mais une matière carbonée globalement enrichie en D contrairement aux hotspots) (Figure 5) [4]. Discussion : Les micrométéorites ultracarbonées représentent une famille de particules encore absente des collections d'objets extraterrestres. Elles se rapprochent des grains CHON détectés dans la comète 1P/Halley en 1986 par les missions spatiales Giotto et Vega [12, 13]. La structure très désordonnée de Historiquement, les forts enrichissements en deutérium observés dans la matière extraterrestre étaient interprétés comme un héritage du milieu interstellaire. L'abondance de phases cristallines dans les agrégats minéraux des UCAMMs (>25%) est très supérieure à la limite de cristallinité des phases minérales du milieu interstellaire [<0,2% en masse, ref 17]. L'association de la matière carbonée fortement enrichie en deutérium à des phases cristallines suggère donc une formation et une deutération de cette matière organique au sein du système solaire. Les micrométéorites ultracarbonées sont donc très probablement des particules cométaires 'géantes'. Elles constituent donc les échantillons idéaux pour étudier les processus physico-chimiques des régions externes du système solaire primitif. References : [1] Bradley J.P., in Meteorites, Comets and Planets: Treatise on Geochemistry, A.M. Davis, H.D. Holland, and K.K. Turekian, Editors. 2005, ElsevierPergamon: Oxford. p. 689. [2] Duprat J., et al. (2007) ASR 39, 605-611. [3] Dobrică E., et al. (2008) LPSC XXXIX, #1672 (CD-ROM). [4] Duprat J., et al. (2010) Science 328, 742-745. [5] Dobrică E., et al. (2009) LPSC XL, #1688 (CD-ROM). [6] Dobrică E., et al. (2009) LPSC XL, #1534 (CD-ROM). [7] Dobrică E., et al. (2010) LPSC XLI, #1613 (CD-ROM). [8] Bradley J.P. (1994) Science 265, 925-929. [9] Brearley A.J. and Jones A., in Planetary Materials, J.J. Papike, Editor. 1998, Mineralogical Society of America: Washington DC. [10] Engrand C., et al. (2007) LPSC XXXVIII, #1668 (CD-ROM). [11] Dobrică E., et al. (2009) MAPS 44, 1643-1661. [12] Lawler M.E. and Brownlee D.E. (1992) Nature 359, 810-812. [13] Fomenkova M.N., et al. (1994) GCA 58, 4503-4512. [14] Hanner M.S. and Bradley J.P., in Comets II. 2004. p. 555564. [15] Zolensky M.E., et al. (2006) Science 314, 17351739. [16] Wooden D.H. (2008) SSR 138, 75-108. [17] Kemper F., et al. (2004) ApJ 609, 826-837.