MEA8020_travail 3 final

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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
GESTION DE CLASSE
MEA 8020
TRAVAIL 3
Analyse des données du problème de « manque d’estime de soi » en gestion classe, ses concepts,
ses incidences sur l’apprentissage, l’enseignement et la gestion de classe ainsi que des pistes de
solutions pour le résoudre.
TRAVAIL PRÉSENTÉ À
FRANCE PERRON
PAR
ANNE DRYBURGH
16 juin 2014
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Analyse du problème de gestion
1. Contexte du problème, composantes et relations de la situation pédagogique, incidences
sur les apprentissages
Dans ma classe de sixième année, constituée de onze jeunes filles, le principal problème
auquel je fais face se trouve être le manque d’estime de soi. Deux aspects de cette
problématique ont été fréquemment observés au sein de ce groupe : l’aspect physique et la
compétence sportive1. En danse classique, l’apparence et la performance sont deux éléments
au travers lesquels les élèves se définissent et cherchent à s’affirmer sur une échelle
comparative. Il est donc souvent difficile pour elles de reconnaître leurs réelles valeurs,
d’autant plus si elles se trouvent grosses et poches (dixit les élèves). À ce sujet, des études
stipulent que « […] le désir de devenir professionnelles chez les jeunes danseuses classiques
s’accompagne d’une insatisfaction corporelle intense et exclusive » (Doumenec, Sudres et
Sztulman, 2005, p.303). L’enseignement de la danse classique en milieu professionnel, de par
les exigences corporelles qui lui sont inhérentes, la quête constante de la perfection et le
contrôle imposé aux danseuses, entraîne des problèmes psychologiques reliés à une faible
estime de soi (Hamilton, 1999). Le corps étant l’outil principal à travers lequel l’élève
apprend à s’exprimer en danse, cet état de fait engendre inévitablement plusieurs problèmes
tels le perfectionnisme et un concept de soi négatif qui, bien entendu, influencent
l’apprentissage et l’évolution de l’élève. Dans cette perspective, il est logique qu’une élève
inconfortable avec son corps parce qu’elle n’arrive pas à le maîtriser, ne l’aimant donc pas, ne
pourra jamais arriver à progresser autant que celle qui en est fière, le considérant donc comme
un allié.
Un obstacle important au développement de l’estime de soi se trouve être que la plupart de
mes élèves ne savent justement pas ce qu’est l’estime de soi, ce que cette notion représente et
ce à quoi elle est utile dans le développement d’une identité. N’étant pas à même de définir ce
concept ou de le comprendre adéquatement, il devient alors hasardeux, voire impossible, de
l’utiliser comme outil de développement. Force est de constater que l’estime de soi découle en
grande partie du concept que l’on a de soi-même forgé à partir de détails et d’idées glanées ici
Selon le Petit Larousse de la psychologie (2008), « une étude a montré qu’il existe cinq domaines essentiels pour la
construction de l’estime de soi des enfants et des adolescents : l’aspect physique, les compétences sportives, la
popularité auprès des pairs, la réussite scolaire et un comportement correspondant aux normes de son groupe »
(p. 299).
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et là au fil de notre expérience de vie. Toutefois, l’image que l’élève se fait d’elle-même est
souvent faussée par la quête d’un corps idéalisé qui lui a été dicté par la danse classique.
Chaque jour, face aux miroirs, la confrontation est inévitable. Elles se dévalorisent et se
comparent aux autres élèves ayant un « …plus beau corps ». Dès lors entre en jeu la
compétition, qui plus est malsaine, et qui peut aller dans certains cas jusqu’à vouloir être une
autre. L’utilisation du miroir en classe contribuerait donc à la distorsion de l’image de soi. Je
constate que mes élèves sont très critiques vis-à-vis leur corps et cherchent constamment à se
comparer avec leurs pairs. Le tout a pour résultat de faire naître un sentiment d’infériorité et
de dépréciation. Étant trop centrées sur l’apparence, elles arrivent difficilement à développer
leur sens kinesthésique. Ceci est sans doute dû au fait qu’en danse classique on enseigne
beaucoup par imitation ce qui favorise difficilement le développement de soi. L’élève qui
n’atteint pas le but espéré sera envahie par un sentiment de découragement. La gestion de
classe devient alors difficile puisque le professeur doit constamment ajuster le contenu de son
cours pour palier à l’omniprésence d’une atmosphère négative : tout ceci contribue à ralentir
le programme prévu au cours. Dans le contexte de la classe de danse, l’élève n’est pas
suffisamment invitée à participer à la construction de sa propre identité. Ce dernier est trop
souvent au service de la personne qui le « construit ». « C’est pourquoi la relation à
l’enseignant est aussi dominante dans un cours de danse : le rapport au savoir est presque
inévitablement rapport au professeur» (Pujade-Renaud, 1976, p.104).
2. Nature du problème (le diagnostic) et ses causes potentielles
De façon évidente, le problème d’estime de soi rencontré dans ma classe découle en grande
partie de la nature de la discipline inhérente à la danse classique et qui est principalement axée
sur le corps. De façon concrète, lorsqu’une correction technique est donnée à l’élève, il la
prend d’abord et avant tout comme une critique, l’élément constructif de cette critique se
situant dans une zone incompréhensible et inatteignable. J’essaie d’enseigner de façon plus
humaine, plus sensible, à l’écart souvent des dogmes académiques. Malgré cela, il m’arrive
d’avoir recours à des méthodes pédagogiques qui ne favorisent pas l’estime de soi. J’enseigne
inévitablement comme on m’a enseigné, c’est-à-dire, et j’en suis tout à fait consciente, de
façon souvent trop directive, voire autoritaire. Je réalise que j’utilise des commentaires qui,
chez certaines élèves, ont pour effet de les insécuriser, les amenant à douter de leurs
compétences. Ceci dit, je dois par ailleurs composer avec le fait que mes élèves ont des
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classes avec d’autres professeurs qui utilisent encore des méthodes ne favorisant aucunement
l’éveil de l’estime de soi. Un article de Johnston (2006) portant sur l’expression de soi en
danse classique explique que la manière dont on enseigne ne favorise pas l’expression d’idées
ou même l’expression de ses sentiments. On sollicite rarement la pensée chez l’élève : celle
qui l’amènerait à participer pleinement à son processus de développement. Pour appuyer cette
constatation, Johnston explique qu’il est primordial de donner l’opportunité aux enfants
d’exprimer leur pensée afin de concrétiser leurs apprentissages.
3. Question posée à l’égard du problème
Les éléments précédemment soulignés m’amènent inévitablement à me poser la question
suivante : Comment favoriser une saine estime de soi dans le milieu hautement compétitif
qu’est la danse classique ? Je souhaite que mes élèves puissent prendre connaissance de
l’importance de développer leur estime de soi afin de mieux s’apprécier et de définir ce qui
les rend uniques.
4. Concepts du problème et définitions
Estime de soi : L’estime de soi est le fruit d’une compréhension de la valeur qu’une personne
attribue aux divers éléments du concept qu’elle se fait d’elle-même (Doron, 1991, p.274).
L’estime de soi doit donc faire appel à la confiance fondamentale de l’être humain en son
efficacité et en sa valeur (Legendre, 2005, p.560). L’estime de soi se construit sur deux grands
besoins : le sentiment d’être aimé et celui d’être compétent (Antoine, Guillemot et Blumel,
2008, p. 299). Une équation qui devient possible lorsque les outils adéquats sont fournis.
Concept de soi : Ensemble des perceptions et des croyances qu’une personne a d’elle-même,
ainsi que des attitudes qui en découlent (Legendre, 2005, p.234). Le concept de soi se
développe par l’intermédiaire des expériences quotidiennes qui permettent à l’enfant de se
représenter comme un être ayant des caractéristiques particulières […] (Papalia, Olds et
Feldman, 2009, p.169). Les gens définissent et pondèrent de façon majoritaire leurs
conceptions de soi en grande partie par rapport à autrui (Martinot, 2001, p.493).
Perfectionnisme : Le sujet, jamais satisfait de ses actions, doute de lui, se sous-estime, a
tendance à se retirer de toute compétition (Sillamy, 1991, p.191). Le perfectionnisme orienté
vers soi se retrouve associé à un stress implicitement lié aux accomplissements qui ne
dépendent que de soi (Turgeon, Forget et Sénécal, 2011, p. 318). Selon la théorie rationnelleémotive de Ellis (1962) le perfectionnisme peut être considéré comme une croyance erronée
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qui peut mener à une mauvaise interprétation de l'environnement par l'individu, à des pensées
et des émotions négatives et à un comportement autodéfaitiste de l'individu (Boivin et
Marchand, 1996, p.126).
Compétition: Rivalité entre des personnes qui poursuivent un même but (Grand dictionnaire
de terminologie, 2012). Recherches simultanées d’un même objet (De Villers, 2009, p.343).
La compétition (malsaine) peut détruire l’estime de soi (Déziel, 2011, p.152).
5. Mise en commun des concepts et pistes de solutions
Ces trois concepts sont intimement reliés. Une élève ayant un concept de soi peu élevé, aura
tendance à être trop perfectionniste, favorisera la compétition malsaine et aura une faible
estime d’elle même. De plus, ces trois concepts ont en commun le regard que chaque élève
pose sur soi versus le regard de l’autre. La présence de ce dernier devenant primordiale,
l’élève est constamment à la recherche d’approbation et de perfection. Il désire alors se faire
remarquer. Il est compétitif et veut réussir à tout prix.
Les pistes de solutions envisagées pour ma problématique sont directement en lien avec le
courant humaniste. L’essentiel s’exprime comme suit : donner à l’élève l’importance qui lui
revient, faire en sorte de lui offrir les outils essentiels pour lui permettre de mieux se connaître
afin de développer une juste estime de soi qui lui sera rentable. Comme le dit si bien
Vienneau, « À quoi sert de transformer nos élèves en d’efficaces machines à traiter
l’information et à construire des savoirs complexes s’ils ne se sentent pas bien dans leur
peau? » (Vienneau, 2011, p.65).
1. L’auto-observation : On demande à l’élève d’observer ses émotions et ses comportements
pour qu’il en prenne conscience (Massé, 2000, cité dans Archambault et Chouinard, 2009,
p.272). Le but escompté est de l’amener à être conscient des actions qui suscitent
inadéquatement le perfectionnisme et la compétition malsaine.
2. L’autoévaluation : Processus par lequel un sujet est amené à porter une jugement sur la
qualité de son cheminement, de son travail ou de ses acquis au regard d’objectifs prédéfinis et
tout en s’inspirant de critères précis d’appréciation (Legendre, 2005, p.143). Cette forme
d’évaluation est essentielle en danse. Elle permet à l’élève d’identifier ce qu’il a fait
correctement ou ce sur quoi il doit continuer à travailler. Elle permet de définir le concept de
soi et offre la possibilité de développer une connaissance de soi juste et productive.
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3. Le retour réflexif : Permettre à l’élève de prendre conscience des actions encourues et
d’être capable de les mettre en mots. La prise de conscience suppose la remémoration
puisqu'elle se situe toujours a posteriori de l'activité étudiée (Vermesh, 2004, p. 26).
Bibliographie
Antoine, C., Guillemot, M., & Blumel, B. (2008). Petit Larousse de la psychologie. Paris,
France : Larousse.
Archambault, J., & Chouinard, R. (2009). Vers une gestion éducative de la classe. (3e éd.)
Montréal, Québec : Gaëtan Morin.
Boivin, I., & Marchand, A. (1996). Le perfectionnisme et les troubles anxieux. Revue québécoise
de psychologie, 17 (1), 125-154
Déziel, L. (2011). Stress de performance et estime de soi. Dans L. Déziel (dir.), L’enfant,
l’adolescent et le sport de compétition (p.147-171). Montréal, Québec : Éditions du CHU
Sainte-Justine.
Doumenec, A., Sudres, J.-L., & Sztulman, H. (2005). Approche des dimensions pondérales et
corporelles de jeunes danseuses classiques amatrices vs professionnelles.
Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, 53, 299-308
De Villers, M-A. (2009). Multi dictionnaire de la langue française. Montréal, Québec: Québec
Amérique.
GRISE. [Groupe de recherche sur les inadaptations sociales de l’enfance de l’Université de
Sherbrooke]. Le programme cognitif-comportemental : l’exemple du Centre jeunesse de
Montréal-Institut universitaire]. 1-9. Repéré à http://www.grise.ca/index.php/leprogramme-cognitif-comportemental
Hamilton, L. H. (1999). A psychological profile of the adolescent dancer. Journal of dance
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Johnston, D. (2006). Private speech in ballet. Research in dance education, 7(1), 3-14
Legendre, R. (2005). Dictionnaire actuel de l’éducation. Montréal, Québec: Guérin.
Le grand dictionnaire de la terminologie. (2012). Repéré à http//gdt.oqlf.gouv.qc.ca/index.aspx
Martinot, D. (2001). Connaissance de soi et estime de soi : ingrédients pour la réussite scolaire.
Revue des sciences de l’éducation, 27(3), 483-502
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Papalia, D.E., Olds, S.W., & Feldman, R. D. (2009). Psychologie du développement humain. (7e
éd.). Montréal, Québec: Chenelière McGraw-Hill, Chenelière Éducation.
Pujade-Renaud, C. (1976). Danse et narcissisme en éducation. Paris, France : ESF.
Sillamy, N. (1991). Dictionnaire de psychologie. Paris, France : Larousse.
Turgeon, M-E., Forget, J., & Sénécal, C. (2009). Trouble des conduites alimentaires, dépression,
estime de soi et perfectionnisme chez les enfants. Pratiques psychologiques, 17, 315-328
Vienneau, R. (2011). Apprentissage et enseignement : Théories et pratiques. (2e éd.). Montréal,
Québec : Gaëtan Morin.
Champoux, L., Couture, C. & Royer. É. (1992). École et comportement. L’observation
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scolaire
et
des
services
complémentaires.
Québec.
1-31
Repéré
à
http://aqps.qc.ca/uploads/documents/Boites_outils/p-tc4.htm
ÉDITION SPÉCIALEDU SECRÉTARIAT N° 21
7
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