TD3 – La production potentielle et sa croissance : un outil pour anticiper les effets d’une politique économique : I. Qu’est-ce que la production potentielle et sa croissance ? « Les économies ont toutes des limites de vitesse. Laissez-les les dépasser pendant un temps et l’inflation repart. Quelle est la limite de vitesse de l’économie mondiale ? Rien que les chiffres de base donnent à penser qu’elle augmente au fil du temps. Ainsi, entre 1983 et 1994, la croissance était en moyenne de 3,3% ; entre 1995 et 2006, de 4,0% ; et, depuis 4 ans, de 4,8%. « La vitesse limite de croissance économique est liée au potentiel sous-jacent de l’économie. La production potentielle part de l’hypothèse d’un déploiement raisonnablement complet de la population active et du capital national. [D’une manière générale], la croissance économique potentielle vient de la croissance de la population active (croissance démographique naturelle, immigration et évolutions durables de la participation au marché du travail), de la croissance du capital national (nouveaux investissements des entreprises) et de l’innovation ou de nouvelles technologies [qui se traduisent par des gains de productivité]. Par exemple, le potentiel de croissance américain est estimé à environ 3,0% par an, tandis que le potentiel français se situe autour de 2,0%. « La croissance effective est par contre la croissance observée pour une période. À court terme, la croissance de la production peut être supérieure ou inférieure à celle de son niveau potentiel en fonction des fluctuations de la demande finale (consommation des ménages, dépense publique, investissement des entreprises, variation des stocks et demande étrangère) ». S. Poloz, Le relèvement de la vitesse de la croissance mondiale, http://www.edc.ca, 11 avril 2007 Question 1. A partir du texte ci-dessus, essayez de définir ce qu’est la production potentielle. …………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… …………………………………………………………………………………………………………………………………………… Question 2. Surlignez dans le texte les facteurs qui font augmenter la production potentielle. Question 3. Résumé. Le dernier paragraphe parle de production et de croissance effective, que l’on oppose à la notion de production et de croissance potentielle. Remplissez le tableau suivant, en partant des deux premières questions et du texte, avec les expressions suivantes : - Renvoie au chapitre 5. - Renvoie au chapitre 1. - Déterminé par le stock de facteur travail et de capital - Déterminé par le stock de capital technologique (et humain (et donc la productivité). donc la productivité). - Est observable. - N’est pas observable mais est estimé. - Analyse de long terme, avec équilibre de l’économie - Déterminé par la demande globale. (et donc sans inflation). - Analyse de court terme, avec déséquilibre possible de - Déterminé par le stock de capital physique. l’économie (et donc avec inflation). Production potentielle II. Production effective La production potentielle, un référentiel pour l’analyse économique : Il reste maintenant à savoir à quoi sert la production potentielle. Son usage le plus fréquent est d’en déduire, après estimation, un « écart de production » ou « output gap » qui permet de placer la production effective par rapport à la production potentielle, et donc d’équilibre, de l’économie. L’écart se calcule comme un taux de variation : (Production effective – Production potentielle) / Production potentielle. Par conséquent, si l’écart est supérieur à 0, cela signifie que : …………………………………………………………………………… Par conséquent, si l’écart est inférieur à 0, cela signifie que : ……………………………………………………………………………………………………. Question 4. Pour être sûr d’avoir compris, faites une phrase donnant la signification : - du point en 2007 : …………………………………………………………………………………………………………………………………………… - du point en 2009 : …………………………………………………………………………………………………………………………………………… Selon l’estimation de la production potentielle et donc de l’écart de production, les politiques économiques réalisées seront donc différentes. Question 5. Remplissez les trous du texte en vous aidant des questions 3 et 4 et du TD2. 1er scénario : Envisageons que pendant un temps, les entreprises tournent à plein régime avec de nombreuses heures supplémentaires demandées aux salariés pour répondre à une forte demande. C’est un niveau de production qui n’est pas soutenable (sur un intervalle de temps limité). Les entreprises vont préférer réagir en augmentant les ………………. A court terme, une politique de lutte contre l’inflation peut donc devenir nécessaire, mais à ………………………, il pourrait devenir nécessaire de mettre en place une politique de l’offre : stimuler les ………………… de capacité, innover pour augmenter la ……………………, revenir à 45 heures de travail hebdomadaire, trouver les mesures économiques pour permettre d'embaucher plus. Ici, l’écart de production est ………………….. : c’est une situation où le PIB réel est supérieur au PIB potentiel ; et cela peut conduire à différents types de politique économiques conjoncturelles (surtout de ……………….) et structurelles (politique de l’offre). 2ème scénario : Envisageons au contraire que dans une économie, les machines tournent à 60 % de leurs capacités, qu’il existe du chômage et du chômage partiel, etc. Alors, on peut supposer qu’avec une ………………….. un peu plus forte, les entreprises pourraient produire plus. Ici, l’écart de production est ………………… : c’est une situation où le PIB réel est inférieur à au PIB potentiel ; et cela peut conduire d’autres types de politique économiques conjoncturelles (surtout de ……………………) et structurelles. A partir de : L. Maurin, « La croissance potentielle », 2012 Première conclusion : Question 6 : Pour être sûr d’avoir compris, expliquez la phrase soulignée. « Les notions de croissance potentielle et d'écart de production apparaissent ainsi cruciales pour la conduite de la politique économique. Celle-ci ne doit pas se polariser sur les seules contraintes de court terme, mais doit se placer dans une optique de moyen terme. Une croissance plus vive peut entraîner des déséquilibres temporaires, notamment en terme de salaire ou de prix, à cause de pénuries localisées et transitoires de main-d’oeuvre ou de capital. Si ces déséquilibres sont jugés inacceptables à court terme, la croissance sera freinée par la politique économique avant que les investissements en capital physique et humain et la mobilité des facteurs n’aient eu le temps de réduire les pénuries. L’économie peut alors être piégée dans la croissance lente en raison d’une vision trop prudente et trop myope des responsables de la politique économique ou des marchés. Aussi, l’avantage de mettre au coeur du débat conjoncturel la notion de production potentielle est-il de bien expliciter les objectifs et la stratégie de la politique économique. En Europe, en particulier, le poids des contraintes monétaires a fait perdre de vue ce que devrait être le premier but de la politique macroéconomique : assurer une croissance la plus proche possible de la croissance potentielle ». Cour et al., « La croissance potentielle », in CEPII, L’économie mondiale 1998 III. Les limites du concept de croissance potentielle : « Les nombreuses incertitudes qui entourent la mesure de la production potentielle sur la période récente, et donc l’évaluation de l’output gap, tiennent notamment au fait que la crise rend l’évolution des variables considérées très incertaine. À court terme, compte tenu des méthodes d’estimations, le ralentissement (voire la baisse) de la production potentielle s’explique par la chute de l’investissement des entreprises, et donc le ralentissement (la baisse) du rythme d’accumulation du capital disponible. Mais l’impact de la crise sur l’emploi potentiel et la productivité des facteurs est difficile à cerner. « Le concept de production potentielle est d’autant mieux validé que la croissance est stable et proche de sa tendance de long terme. Or la crise économique et financière actuelle est profonde ; les relations sur le marché du travail (relation chômage-inflation, retrait de la population active,..) et l’impact de la crise sur la productivité globale tendancielle des facteurs (PGF) restent inconnus. L’estimation de la croissance potentielle sur les années en cours et à venir est donc conditionnée aux hypothèses prises sur l’impact de la chute de la demande sur la formation de l’offre ». OFCE, « La multiplication de la rigueur », Revue de l’OFCE n°119(4), 2011 Question 7. Relevez dans le texte deux grandes limites à la notion de croissance potentielle. Limite 1 : ……………………………………………………………………………………………………………………………… Limite 2 : ………………………………………………………………………………………………………………………………… Question 7. Concluez en regardant le document ci-contre. Chaque courbe du document représente une estimation différente réalisée par l’OCDE de l’écart de production français. Prenons l’année 2005. - Selon l’estimation la plus haute, l’écart de production est de ………. Donc cela signifie que la production effective serait …………………. à la production potentielle. Donc, il faudrait mener une politique conjoncturelle de ………………………………… - Selon l’estimation la plus basse, l’écart de production est de ………. Donc cela signifie que la production effective serait …………………. à la production potentielle. Donc, il faudrait mener une politique conjoncturelle de ………………………………… Conclusion : selon l’estimation de la croissance potentielle, il est possible de choisir des politiques économiques contradictoires. Les liens entre croissance potentielle et effective posent également problème. Dans la vision traditionnelle, la croissance potentielle est exogène et relativement régulière : c’est la somme du progrès technique et de la croissance de la population active disponible. Les chocs conjoncturels n’ont que des effets transitoires. La croissance effective s’écarte peu de la croissance potentielle. Cette vision peut être remise en cause de deux façons. D’une part, il semble, particulièrement en Europe, que les chocs conjoncturels ont des effets permanents. Un bas niveau durable de la croissance effective provoque une réduction de la croissance potentielle par de nombreux canaux. Une période prolongée de chômage de masse dégrade la quantité et la qualité de la main-d’oeuvre. Le ralentissement des hausses de salaires incite les entreprises à utiliser des techniques de production moins économes en travail, ce qui fait diminuer les gains de productivité du travail. L’accumulation du capital fléchit, ce qui réduit les possibilités ultérieures de croissance en limitant les capacités de production. Enfin, la productivité globale des facteurs ralentit dans une période de stagnation peu propice aux innovations technologiques. La prise en compte d’effets de ce type dans certains modèles de croissance endogène conduit à donner à la croissance potentielle un caractère historique : l’accumulation passée conditionne la croissance à venir ; les effets d’un ralentissement de l’accumulation des facteurs se doublent d’un ralentissement du progrès technique. Un choc de court terme produit des effets irréversibles et persistants. Les sentiers de croissance sont multiples et leurs écarts sont cumulatifs. Le sentier de croissance potentielle entendu comme sentier de long terme de l'économie, et jouant comme force de rappel, n'existe donc pas et la notion de croissance potentielle perd de son sens. D’autre part, il n’est pas assuré qu’après un choc de demande ou d’offre, la croissance tend spontanément à retrouver le sentier de croissance potentielle par des mécanismes de marché. Deux schémas peuvent être opposés : - selon le modèle de stabilisation spontanée, une production inférieure au niveau potentiel provoque des baisses de salaires, des prix et des taux d’intérêt qui relancent la demande par reconstitution des profits, effets de richesse, gains de compétitivité. - selon le modèle de dépression durable, l’écart entre production effective et production potentielle est persistant voire cumulatif. La baisse des salaires réels restaure les profits, mais diminue le revenu, donc la consommation des ménages ; si l’investissement dépend surtout de la demande et peu de la profitabilité, ce qui est probable dans une situation où la part des salaires ayant fortement baissé, les profits sont forts et la demande faible, la demande globale peut en être réduite et le déséquilibre accentué ; la baisse des prix provoque un alourdissement des ratios de dettes qui peut contrebalancer les effets de richesse ; la baisse des taux d’intérêt réels n’est guère assurée si le taux d’intérêt nominal se heurte à un plancher tandis que le taux d’inflation devient très bas ; les effets de compétitivité ne jouent que si le choc n’atteint qu’un seul pays ; la baisse de l’activité provoque automatiquement un gonflement du déficit et de la dette publiques : si le gouvernement veut rétablir l’équilibre des finances publiques, il accentue le déficit de demande ; s’il maintient durablement un déficit public important, les craintes des marchés peuvent provoquer une hausse des taux d’intérêt sur les titres longs. Aussi la croissance peut s’écarter durablement de la croissance potentielle. Le niveau de la production potentielle fournit une cible pour la politique économique de gestion de la demande. Les politiques monétaires et budgétaires doivent être expansionnistes (restrictives) si la demande est inférieure (supérieure) à la production potentielle, sauf si la politique économique souhaite explicitement maintenir un bas niveau d’activité pour lutter contre l’inflation ou faire baisser les salaires. En dépit des problèmes théoriques et des incertitudes d’évaluation qui ont été soulignées dans cet article, les notions de croissance potentielle et d'écart de production apparaissent ainsi cruciales pour la conduite de la politique économique. Celle-ci ne doit pas se polariser sur les seules contraintes de court terme, mais doit se placer dans une optique de moyen terme. Une croissance plus vive peut entraîner des déséquilibres temporaires, notamment en terme de salaire ou de prix, à cause de pénuries localisées et transitoires de main-d’oeuvre ou de capital. Si ces déséquilibres sont jugés inacceptables, la croissance sera freinée par la politique économique avant que les investissements en capital physique et humain et la mobilité des facteurs n’aient eu le temps de réduire les pénuries. L’économie peut alors être piégée dans la croissance lente en raison d’une vision trop prudente et trop myope des responsables de la politique économique ou des marchés. Aussi, l’avantage de mettre au coeur du débat conjoncturel la notion de production potentielle est-il de bien expliciter les objectifs et la stratégie de la politique économique. En Europe, en particulier, le poids des contraintes monétaires a fait perdre de vue ce que devrait être le premier but de la politique macroéconomique : assurer une croissance la plus proche possible de la croissance potentielle. Les nombreuses incertitudes qui entourent la mesure de la production potentielle sur la période récente, et donc l’évaluation de l’output gap, tiennent notamment au fait que la crise rend l’évolution des variables considérées très incertaine. À court terme, compte tenu des méthodes d’estimations, le ralentissement (voire la baisse) de la production potentielle s’explique par la chute de l’investissement des entreprises, et donc le ralentissement (la baisse) du rythme d’accumulation du capital disponible (graphique 2). Mais l’impact de la crise sur l’emploi potentiel et la productivité des facteurs est difficile à cerner. Le concept de production potentielle est d’autant mieux validé que la croissance est stable et proche de sa tendance de long terme. Or la crise économique et financière actuelle est profonde ; les relations sur le marché du travail (relation chômage-inflation, retrait de la population active,..) et l’impact de la crise sur la productivité globale tendancielle des facteurs (PGF) restent inconnus. L’estimation de la croissance potentielle sur les années en cours et à venir est donc conditionnée aux hypothèses prises sur l’impact de la chute de la demande sur la formation de l’offre. La forte instabilité des estimations d’écart de production va donc bien au-delà des révisions de la comptabilité nationale et illustre la difficulté à évaluer la position dans le cycle, surtout ex ante. Les chocs économiques perturbent la frontière de répartition entre le structurel et le conjoncturel et les erreurs d'évaluation dans ce partage conduiront à imposer des choix de politiques économiques inadaptées. Le problème est le même pour l’ensemble des pays étudiés, et illustre bien la nécessité d’une évaluation prudente3 de l’écart de production pour la conduite d’une politique économique adaptée à la situation réelle de l’économie4. Dans le cas de la conduite de la politique monétaire, la mesure de l’écart de production est également centrale, les erreurs dans son évaluation pouvant conduire à des politiques inadaptées dans le meilleur des cas, et génératrice de bulles ou de déflation dans le pire des cas. Corrigé : La production potentielle est définie comme la production maximale et économiquement soutenable sans tensions inflationnistes dans l’économie.